8 | La Lettre du Sénologue • n° 44 - avril-mai-juin 2009
Effets secondaires et séquelles des traitements après cancer du sein
DOSSIER THÉMATIQUE
bations de la sensibilité, notamment sous la forme d’une
allodynie mécanique ou thermique, d’une hyperalgésie.
Les troubles du sommeil sont très fréquents. La douleur est
nuisible à la qualité du sommeil, tandis qu’une mauvaise
nuit entraîne souvent une aggravation de la douleur. Et la
patiente entre facilement dans un cercle vicieux.
Enfin, ces douleurs se révèlent le plus souvent réfrac-
taires à de nombreux traitements médicamenteux.
Leur tendance à la chronicisation est donc évidente
avec une interaction inévitable de facteurs thymiques
et comportementaux, susceptibles d’intervenir dans
l’expression douloureuse et de gêner l’analyse de leur
profil. Ce sont des patientes “difficiles” en consultation,
qui demandent beaucoup de temps et de disponibilité,
qui nous découragent parfois par la complexité de leurs
symptômes et leur résistance aux traitements.
Le traitement de ces douleurs neuropathiques est spéci-
fique, imposant le recours à des traitements médica-
menteux de mieux en mieux identifiés, mais non dénués
d’effets secondaires indésirables, parfois très limitants.
Dans la pratique quotidienne, il faut savoir prescrire des
traitements de première ligne et adresser au besoin la
patiente en consultation spécialisée de la douleur. Le
Lyrica® est plus pratique que le Rivotril® en raison de
sa présentation en comprimés, avec moins de risques
d’erreur de posologie. On commence à 75 mg le soir
pendant 3 jours puis 75 mg x 2 sont souvent néces-
saires. Si la dose doit être augmentée, on respectera
des paliers d’une semaine entre chaque augmentation,
sans dépasser une dose totale de 600 mg par jour.
Éducation : prévention du lymphœdème après
curage axillaire
Donner les conseils d’hygiène de vie fait partie de la
prise en charge préopératoire en cas de curage axil-
laire. En surveillance précoce, on vérifiera la bonne
mémorisation des précautions à prendre. Même si
ces mesures n’ont pas été beaucoup évaluées, elles
sont consensuelles et sont à appliquer tout au long
de la vie. Elles sont détaillées dans le tableau.
Un à deux mois
après la chirurgie
En principe, les thromboses lymphatiques et les
adhérences cicatricielles doivent avoir disparu en un à
deux mois. Mais elles peuvent réapparaître sans cause
déclenchante particulière ou éventuellement après la
radiothérapie. L’enraidissement de l’épaule peut aussi
apparaître secondairement. Le fait que l’évolution
précoce soit très favorable n’exclut pas entièrement
le risque d’enraidissement tardif, lié à une réaction
inflammatoire tardive mal expliquée. Il est encore
possible et évidemment urgent de prescrire une prise
en charge kinésithérapique à ce stade.
La capsulite de l’épaule, l’algoneurodystrophie, le
lymphœdème sont des complications rares mais de
diagnostic facile ; elles sont souvent d’apparition plus
tardive mais peuvent déjà se voir à ce stade.
La prise en charge du lymphœdème est détaillée
par le Dr Becker.
Au total
Après un curage axillaire, une ordonnance systéma-
tique de rééducation doit être délivrée à la sortie.
Ainsi, lors de son bilan initial, le kinésithérapeute
pourra dépister et déclencher une prise en charge
spécifique pour – par exemple – des thromboses
lymphatiques superficielles ou un enraidissement de
l’épaule, dont la prise en charge précoce permettra
la guérison, avant que les séquelles ne deviennent
définitives. Encore faut-il bien connaître les indica-
tions et les possibilités de la kinésithérapie.
La patiente et son entourage doivent bénéficier d’une
éducation préventive qui est essentielle.
Le raccourcissement général des durées d’hospita-
lisation et le développement de la chirurgie ambu-
latoire font disparaitre de plus en plus les quelques
jours d’hospitalisation qui étaient le lieu naturel de
cette prise en charge précoce de la rééducation du
membre supérieur et surtout de l’information et
de l’éducation des patientes. C’est aujourd’hui en
amont et en aval de l’hospitalisation que ce travail
devra être réalisé.
Lors des premières consultations postopératoires, il
faudra donc être vigilant sur ces points.
Tableau. Précautions à prendre
après curage axillaire.
Recommandations à suivre
toute la vie, qui ont pour but
de limiter le risque d’appari-
tion d’un œdème du bras.
Du côté opéré, il faut :
➤ Éviter de faire pratiquer
une prise de sang, une injec-
tion ou une prise de tension
artérielle.
➤ Éviter de porter des
charges lourdes (pas plus de
5 kg) et de faire des efforts
violents.
➤ Éviter le travail répétitif
: faire des poses régulière-
ment.
➤ Éviter toute agression : pi-
qûre, griffure, écorchure, etc.,
à désinfecter immédiatement
avec un produit adéquat.
➤ Éviter toute source de
chaleur : une exposition pro-
longée au soleil, le sauna.
➤ Porter des gants lors de
la manipulation de produits
corrosifs, lors du jardinage ou
de l’utilisation du four.
➤ Suivre attentivement les
conseils du kinésithérapeute
et en cas d’apparition de cer-
tains symptômes : rougeur,
chaleur, œdème, consulter ra-
pidement le médecin traitant.
La bonne connaissance des séquelles précoces après
chirurgie de l’aisselle et leur prise en charge spéci-
fique sont essentielles pour limiter l’apparition des
séquelles tardives. Nous disposons ici d’un véritable
outil de prévention des séquelles tardives, qui reste
encore irrégulièrement utilisé. ■