Perspectives économiques en Afrique
© BAfD, OCDE, PNUD 2016
RÉPUBLIQUE CENTRAFRICAINE
La crise politico-sécuritaire a eu des conséquences néfastes sur la situation urbaine de la RCA.
Elle a détérioré les perspectives pour un développement durable des villes, en raison, notamment,
de son incidence sur le plan humain, avec un nombre élevé de décès et de personnes déplacées, de
la destruction du tissu social et économique, et de l’affaiblissement des capacités de l’État. Ainsi,
selon l’Agence des Nations Unies pour les Réfugiés, environ 25 % de la population centrafricaine
a été déplacée à l’intérieur du territoire depuis le début de la crise, avec une profonde fracture
ethnico-religieuse. Aussi est-il aujourd’hui extrêmement difficile de s’appuyer sur la situation
d’avant la crise pour procéder à des projections sur la dynamique urbaine et la soutenabilité des
villes dans le contexte centrafricain actuel.
Avant le déclenchement de la crise, l’urbanisation, estimée à 38 % pour l’ensemble de la RCA,
était déjà relativement limitée et essentiellement concentrée à Bangui. Au moment de la crise
de 2013, la capitale comptait près d’un million d’habitants (soit environ 10 000 habitants/km²),
tandis que les autres villes considérées comme urbaines avaient moins de 100 000 habitants ‒ à
l’exception de Bimbo, avec environ 180 000 habitants. Plusieurs villes considérées comme urbaines
ne se distinguent des agglomérations rurales que par la présence des services de l’administration
publique, ce qui en fait les chefs-lieux de préfecture, et par celle des infrastructures scolaires
et sanitaires. La RCA connaît donc une situation de macrocéphalie urbaine, caractérisée par
l’absence de villes intermédiaires entre la première ville urbaine et le reste du réseau urbain. Par
conséquent, seule Bangui a réellement retenu l’attention dans le traitement de la problématique
de l’urbanisation en RCA et des enjeux liés au développement des villes durables.
Dans les faits, plusieurs facteurs ont contribué à la faible urbanisation en RCA : faible densité
de la population, manque de dynamisme de l’économie combiné à une absence de transformation
structurelle, déficience des infrastructures de transport sur un territoire vaste et fortement
enclavé, récurrence de crises et de conflits armés depuis l’indépendance du pays, etc. Ainsi,
dotée d’une superficie de 623 000 km² et d’une population d’environ 4 millions d’habitants, la
RCA présente l’une des plus faibles densités d’Afrique avec 7 habitants/km² contre une moyenne
de 38 habitants/km² ailleurs sur le continent. Le pays connaît par ailleurs une grande dispersion
démographique : à l’est, un « désert humain » avec moins de 1 habitant au km², au centre des
densités intermédiaires de 4 à 5 habitants au km² et, à l’ouest, une zone de concentration ne
dépassant toutefois pas 12 habitants au km². Pour remédier au problème de développement
urbain en RCA, les gouvernements successifs avaient, au cours de ces dernières années, adopté,
avec l’appui de l’Union européenne, une stratégie pour promouvoir des pôles de développement
avec la création d’un ministère en charge de ces questions. Il s’agit en fait de promouvoir
certaines agglomérations urbaines grâce au développement des activités économiques, en
ciblant notamment les régions disposant de ressources naturelles importantes et susceptibles
d’agglomérer des zones pour dépasser plus de 100 000 habitants.
Ces dernières décennies, l’urbanisation de Bangui, qui a fait l’objet de plusieurs études1,
s’est caractérisée par une accentuation de l’occupation anarchique des sols sous l’effet de
l’évolution de la démographie, mais sans une véritable planification urbaine. De nombreux
schémas d’urbanisme ou plans d’aménagement ont certes vu le jour depuis la création de la
capitale, mais ils n’ont pratiquement jamais guidé le développement urbain, entraînant ainsi
l’expansion des quartiers non lotis. La ville de Bangui, fondée en 1889, a ainsi vu sa population
passer de 80 000 habitants en 1960 à 622 771 habitants en 2003, date du dernier recensement, et
sa superficie de 22.56 km² à 92.50 km² au cours de la même période. Cette dynamique urbaine,
sans véritable lien avec celle de l’économie et de sa transformation structurelle, n’est pas sans
poser des problèmes de durabilité pour l’agglomération de Bangui, en raison notamment de sa
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