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1 – Introduction
Lors de la reproduction, les organismes sexués transmettent une part de leur génome à
leur descendance. Ce matériel génétique détermine en grande partie les caractéristiques des
organismes. La biologie évolutive vise à comprendre les mécanismes qui dictent l’évolution
de ces caractères héréditaires dans les espèces et doit donc prendre en compte comment ils
sont transmis. Si cette transmission elle-même dépend de caractères qui peuvent évoluer, il est
important de comprendre comment ils évoluent car ils vont déterminer l’évolution de tous les
autres.
Le système de reproduction est l’un de ces caractères. Ainsi, parmi les espèces à
reproduction sexuée, il existe une grande variété de tels systèmes. On peut noter une gamme
de situations allant d’un régime allofécondant panmictique, qui consiste en un croisement
aléatoire entre individus, à des régimes consanguins où la reproduction a lieu entre individus
apparentés à divers degrés. Chez les organismes hermaphrodites, où les individus possèdent à
la fois le sexe mâle et le sexe femelle, on peut observer une forme extrême de reproduction
consanguine : l’autofécondation, où le même individu joue le rôle de père et de mère.
L’évolution de l’autofécondation a été principalement étudiée chez des végétaux (la plupart
des angiospermes étant hermaphrodites) et pour une plus petite part, chez les animaux
hermaphrodites comme les escargots pulmonés, les nématodes (essentiellement chez
Caenorhabditis), les plathelminthes.
Un facteur majeur à prendre en compte pour comprendre l’évolution de
l’autofécondation est la dépression de consanguinité. En effet, lors de croisements
consanguins, on observe une diminution de la valeur sélective des descendants par rapport
aux descendants non consanguins. C’est cela qu’on nomme la dépression de consanguinité (le
terme dépression endogamique est aussi parfois employé). Une forte dépression tend à
empêcher l’évolution de l’autofécondation puisque celle-ci produit des descendants de moins
bonne qualité que l’allofécondation. Pour autant, lorsqu’on regarde la distribution des taux
d’autofécondation, on remarque que l’autofécondation parvient à se maintenir et on observe
une distribution plutôt bimodale (Fig. 1). Ce maintien de l’autofécondation est permis par
certains avantages intrinsèques. En effet, un régime autofécondant implique que le parent
transmette potentiellement trois copies de ses gènes à ses descendants là où l’allofécondation
n’en transmet que deux (Fisher 1941, Fig. 2). De plus, l’autofécondation confère une
assurance de reproduction (Baker 1955, Fig. 3). Il n’est donc pas nécessaire pour les