RARE MAIS IMPORTANT Forum Med Suisse No39 26 septembre 2001 976
Ventilation non invasive
et invasive
La ventilation non invasive constitue aujour-
d’hui un traitement palliatif bien établi des
troubles en relation avec la SLA. Elle permet
d’améliorer la qualité du sommeil, de diminuer
la dyspnée et d’écarter les épisodes d’hypoven-
tilation à tendance nocturne au début, puis
aussi à l’état de veille. Il n’existe actuellement
aucune indication valable concernant le
meilleur moment pour la mise en œuvre d’une
ventilation non invasive. On se guidera en fait
sur l’importance des symptômes tels qu’une
mauvaise qualité de sommeil avec agitation
et cauchemars, fatigue diurne, somnolence
diurne excessive et maux de tête. Il est impor-
tant de garder à l’esprit qu’une insuffisance
partielle constatée à l’analyse des gaz sanguins
ou une désaturation nocturne à la pulsoxymé-
trie sont le signe d’une ventilation insuffisante
et ne doivent donc pas être traitées en premier
par l’administration d’oxygène. La ventilation
non invasive peut aussi être instituée précoce-
ment (p.ex. suite à une première bronchite in-
fectieuse) à titre de traitement préventif contre
les infections des voies respiratoires; elle favo-
rise en outre le sommeil en décubitus en cas
d’atteinte prédominante du diaphragme. Les
études les plus récentes semblent indiquer que
la ventilation non invasive allonge la vie des pa-
tients atteints de SLA sans en modifier pourtant
l’issue fatale [8, 9].
Les membres du groupe de travail sont
convaincus qu’à condition d’une sélection adé-
quate, la ventilation non invasive peut amélio-
rer la qualité de vie des patients. En cas d’at-
teinte bulbaire, la ventilation non invasive n’est
pourtant souvent pas possible. Le groupe de
travail est d’avis que l’indication et l’instruction
à une ventilation non invasive doivent impéra-
tivement être données dans le cadre d’une hos-
pitalisation dans un centre qui possède l’expé-
rience de tout le spectre des mesures pallia-
tives, aussi bien neurologiques que respira-
toires. Si cela n’a pas déjà été fait il faut, dans
le cadre de cette hospitalisation, insister sur la
nature palliative de la ventilation. Cela signifie
que le patient et tous les intervenants doivent
être parfaitement conscients que cette forme de
ventilation peut à un moment donné s’avérer
inopérante et qu’il faut alors passer à un autre
traitement, en règle générale une palliation mé-
dicamenteuse, par exemple la morphine.
La ventilation mécanique invasive par tra-
chéostomie permet de vivre au-delà de la dé-
faillance respiratoire terminale, empêche la
broncho-aspiration et facilite l’évacuation des
sécrétions. Le patient qui désire la mise en
œuvre d’un tel moyen doit être dûment informé
qu’il deviendra tétraplégique, qu’il ne peut ni
déglutir ni parler ni se mouvoir en dépit du fait
que la motilité oculaire peut fréquemment en-
core être préservée durant quelques années. Le
patient entre dans une situation de locked-in en
dépit d’une présence d’esprit absolue et il est
complètement dépendant des soins, de l’inté-
grité de fonctionnement de l’appareil de respi-
ration artificielle et du dégagement des voies
respiratoires. Certains systèmes électroniques
peuvent dans certains cas rendre une commu-
nication lente possible. En 1993, Moss [10] a
rapporté que dans la partie nord de l’Illinois,
sur 335 patients atteints de SLA, 19 (5,4%) ont
été ventilés de manière invasive. Ceux-ci né-
cessitaient chacun en moyenne journalière
neuf heures de soins prodigués par les
membres de leur famille ainsi que 15 heures
supplémentaires de soins prodigués par du per-
sonnel soignant externe. Il fallait 3,5 soignants
par patient. Les coûts s’élevaient à $ 153000 et
même jusqu’à $ 366 000 par année, selon que
les patients étaient soignés à domicile ou dans
une institution. L’expérience a par ailleurs
montré que l’équipe soignante au service de ces
patients subit de rapides changements. Une en-
quête nord-américaine sur les patients atteints
de SLA au bénéfice d’une ventilation invasive à
long terme a certes montré que 88% se ré-
jouissent d’être en vie et que 80% se décide-
raient à nouveau pour une telle mesure [11].
A l’Hôpital cantonal de Genève, sous la déno-
mination «VINCRE» (Ventilation à domicile des
Insuffisants Neuromusculaires Chroniques
Respiratoires Evaluation), on a institué une
commission dont la tâche est de conseiller les
médecins qui prennent en charge des patients
atteints de maladie neuromusculaire avec pro-
blèmes respiratoires. Ce groupe, constitué de
professionnels possédant une expérience spé-
cifique de la prise en charge des patients ven-
tilés à domicile a rédigé, suite à un important
travail de réflexion préliminaire, une prise de
position interne dans le but de pouvoir, sur la
base d’un concept reflétant le consensus des
personnes concernées, réagir aux questions
relatives au sujet «ventilation invasive via tra-
chéostomie en cas de SLA et autres maladies
neuromusculaires» [12]. VINCRE recommande
que l’orientation des patients sur la possibilité
de ventilation invasive s’accompagne automa-
tiquement d’une information adéquate sur les
importants problèmes liés à cette mesure thé-
rapeutique. Si le patient envisage une ventila-
tion invasive, il s’agit d’examiner soigneuse-
ment si le patient lui-même et son entourage,
c’est-à-dire en général sa famille, disposent des
ressources humaines nécessaires pour assu-
mer une pareille charge à long terme, proba-
blement des années durant et si des structures
de prise en charge adéquate sont disponibles
(famille?, domicile?, équipe de soins?, centre
spécialisé?). Ce n’est que lorsque ces assises
sont acquises qu’il faut alors prendre avec le pa-