2J.-L. COLLIOT-THÉLÈNE & O. WITTENBERG
n’ont permis d’exhiber aucun triplet (x, y, z)∈Z3tel que x3+y3+z3= 33 ou
x3+y3+ 2z3= 148 (cf. [EJ09], [Koy00]).
Étant donné un schéma Ude type fini sur Z, il résulte de la théorie du corps de
classes global que l’image de l’application diagonale U(Z)→QU(Zp), où pparcourt
l’ensemble des places de Q(en convenant que Z∞=R), est incluse dans le sous-
ensemble des points adéliques orthogonaux au groupe de Brauer de U=U ⊗ZQpour
l’accouplement de Brauer–Manin (cf. [CTX09, §1]). La vacuité de ce sous-ensemble
permet dans certains cas d’expliquer celle de U(Z) (cf. [CTX09], [KT08]). On parle
alors d’obstruction de Brauer–Manin entière (ou simplement d’obstruction de Brauer–
Manin) à l’existence d’un Z-point de U. C’est un cas particulier de l’obstruction de
Brauer–Manin à l’approximation forte sur U.
Cassels [Cas85] s’était rendu compte que la loi de réciprocité cubique impose une
contrainte non triviale aux solutions entières de l’équation x3+y3+z3= 3 (à savoir,
les entiers x,yet zsont nécessairement congrus entre eux modulo 9). Son argument
revient en réalité à exhiber une obstruction de Brauer–Manin à l’approximation forte
sur la surface affine d’équation x3+y3+z3= 3 sur Q. (Il s’agit même d’une obstruction
à l’approximation faible ; voir la remarque 5.7 ci-dessous.) Il est naturel de se demander
si de façon plus générale, il se pourrait qu’une obstruction de Brauer–Manin interdise,
pour certains entiers a, l’existence de x, y, z ∈Ztels que x3+y3+z3=aou
x3+y3+ 2z3=a(sous l’hypothèse, pour la première équation, que an’est pas
congru à 4 ou 5 modulo 9). Le but de cet article est de démontrer qu’il n’en est rien :
les diverses lois de réciprocité englobées dans l’obstruction de Brauer–Manin entière
ne permettent d’exclure aucun entier a.
Le texte est organisé comme suit. Les paragraphes 2 et 3 sont consacrés à la
détermination des groupes de Brauer des surfaces affines d’équations x3+y3+z3=a
et x3+y3+ 2z3=asur Q(propositions 2.1, 3.1 et 3.4). Les démonstrations des
propositions 3.1 et 3.4 requièrent l’utilisation d’information arithmétique non triviale
(classification des courbes elliptiques sur Qisogènes à une courbe elliptique donnée)
et ne s’étendraient pas telles quelles à des équations plus générales ou à des corps de
nombres autres que Q. Au paragraphe 4, tirant parti de la structure de groupe des
courbes elliptiques x3+y3+z3= 0 et x3+y3+ 2z3= 0 sur Fp, nous établissons le
théorème principal de l’article (théorème 4.1). Finalement, le paragraphe 5 rassemble
divers compléments à la démonstration du théorème 4.1, dont certains pourraient
avoir un intérêt indépendant, discute quelques exemples et soulève la question de
la densité de U(k) dans l’ensemble des points adéliques de Uorthogonaux à Br(U)
(pour la topologie adélique modifiée aux places infinies ; voir la question 5.8 (ii) pour
un énoncé précis) lorsque Uest le complémentaire d’une section hyperplane lisse dans
une surface cubique lisse sur un corps de nombres.
Remerciements. Des calculs partiels sur les surfaces x3+y3+z3=at3avaient été
réalisés par Venapally Suresh il y a quelques années. Nous savons gré à Samir Siksek
d’avoir attiré notre attention sur l’équation x3+y3+ 2z3=a. Le premier auteur
remercie l’Institut Alfréd Rényi (Budapest) et l’Institut Hausdorff (Bonn) pour leur
hospitalité.