INTRODUCTION
Vingt ans après l’entrée de l’Espagne dans l’Union euro-
péenne, la production porcine espagnole a doublé et le pays
est devenu un acteur important sur le marché européen de la
viande porcine. Toutefois, des changements sont apparus sur
la période récente, qui se traduisent par une stagnation des
volumes produits, un plafonnement de la consommation et
un renchérissement des coûts.
Après les fortes croissances qu’elle a connues, la production
porcine en Espagne serait maintenant entrée dans une ère
de consolidation. Elle doit affronter des problématiques com-
munes à celles des autres pays, comme la montée des coûts
liés au travail, à l’environnement et aux aspirations socié-
tales, dans un marché de plus en plus concurrentiel. Il faut
aussi ajouter pour le moyen terme, l’incertitude créée par
la réforme de la PAC, dans deux directions : une possible
baisse de la production céréalière en zones sèches et l’appli-
cation des mesures agroenvironnementales.
L’article présente les caractéristiques principales de la pro-
duction porcine en Espagne, ses débouchés, ses facteurs de
compétitivité et les grandes évolutions en cours.
1. IMPORTANCE DU SECTEUR PORCIN DANS
L’ÉCONOMIE ESPAGNOLE
1.1. Données physiques et humaines
L’Espagne occupe une surface de 506 000 km². En 2005,
sa population s’élève à 44,1 millions d’habitants. Le taux
d’accroissement naturel est faible (+ 0,15 %), alors que le
nombre d’habitants a progressé de 1,1 % cette même année,
sous l’effet de l’immigration : 3 millions d’étrangers vivent en
Espagne (4 fois plus qu’en 1998). Les nouveaux habitants
proviennent maintenant majoritairement d’Amérique cen-
trale et du Sud, principalement de l’Équateur et de Colombie
(MAPA 2004).
La densité moyenne est de 85 habitants par km², contre 110
en moyenne pour la France et 230 en Allemagne. Un tiers
de la population réside dans les 9 agglomérations de plus
de 500 000 habitants et le quart dans les 4 qui dépassent
le million de personnes : Madrid (5,0 millions), Barcelone
(3,9), Valence (1,4) et Séville (1,1).
Enfin, selon le dernier recensement de 2004, la commu-
nauté espagnole compte aussi 1,5 million d’expatriés dans le
monde. La plupart réside sur le continent Sud-américain.
Il convient aussi de faire état de l’importance de la fré-
quentation touristique. En 2005, l’Espagne a accueilli 55,6
millions de visiteurs étrangers (Alves, 2006), un chiffre en
hausse de 6 % par rapport à 2004, malgré la réorientation
des flux de touristes qui s’est opérée cette année là vers les
nouveaux États-membres de l’Union européenne.
1.2. Chiffres clés de l’économie
L’Espagne va bien. Son Produit Intérieur Brut (PIB), estimé en
2004 à 1 100 millions de dollars US en Parité de Pouvoir
d’Achat1, la place au 6ème rang des économies mondiales
(OCDE a, 2005). Il est moins favorable par habitant, à 92 %
de la moyenne des pays de l’OCDE, inférieur aux moyennes
de la zone euro et des pays de l’UE à 15 (Espagne incluse).
La croissance de l’économie espagnole ne se dément pas.
Entre 1994 et 2004 elle a réalisé la meilleure performance
de l’Union européenne à 15, avec une progression moyenne
de 3,4 % par an de son PIB, largement supérieure à celle de
la zone euro (2,3 %) et de l’UE à 15 (2,2 %). Depuis, le ryth-
me s’est maintenu à cette valeur, avec de nouvelles prévisions
nationales pour 2006 et 2007 à respectivement 3,7 et 3,5 %.
Les équilibres budgétaires du Pacte de Stabilité et de
Croissance de la zone euro sont respectés : l’excédent bud-
gétaire du pays a atteint 1 % du PIB en 2005, contre un défi-
cit de 3 % en France. Il devrait se tasser durant les années à
venir, pour atteindre 0,8 % en 2008. La dette publique s’est
fortement réduite pour atteindre 43 % du PIB en 2005 (66 %
en France). Elle devrait tomber à 36 % du PIB en 2008.
Conséquence de ce développement économique, le chômage
a fortement régressé durant la dernière décennie : proche
de 24 % de la population active en 1994 (son point culmi-
nant), il est estimé à 8,7 % en mars 2006, stabilisé depuis
octobre 2005 (Eurostat, 2006). Il existe de forts écarts entre
les régions : il est élevé au Sud, alors que l’économie frise le
plein emploi au Nord du pays.
Les seules ombres au tableau concernent :
- l a balance commerciale, fortement déficitaire, à presque
9 % du PIB en 2005.
- l e niveau élevé de l’inflation qui, s’il explique une part du
dynamisme de la consommation, contribue aussi à éroder
la compétitivité des produits espagnols sur les marchés
extérieurs.
- l’endettement des ménages, majoritairement réalisé à taux
variable. La remontée en cours des taux d’intérêt dans l’UE
alourdit la charge correspondante.
La croissance de l’économie espagnole a été largement
stimulée par un coût réel négatif de l’argent, aussi bien à
court qu’à moyen terme (Horny, 2006). Face à une inflation
annuelle de 3,7 %, le taux central de la BCE à 2,25 % en
2005 (relevé plusieurs fois depuis en 2006 jusqu’à attein-
dre 3,5 % en décembre) était favorable à la consommation
intérieure : même le taux des emprunts à 10 ans avoisinait
3,5 %, guère différent de celui observé en Allemagne (3,4 %)
où l’inflation, comme en France, tournait autour de 2 %.
La croissance de l’économie espagnole repose fortement sur
la consommation intérieure et sur la construction, plus que
sur l’investissement des entreprises. Les prix de l’immobilier
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1 PPA : taux de conversion monétaire permettant d'exprimer dans une unité commune les pouvoirs d'achat des différentes monnaies. Il exprime
le rapport entre la quantité d'unités monétaires nécessaire pour se procurer un même "panier" de biens et de services dans différents pays. Il
peut être différent du "taux de change" entre les monnaies (INSEE, http://www.insee.fr).ww