Lire un extrait

publicité
AgApAnthe
Un amour de fleur
Nom français : agapanthe.
Nom latin : Agapanthus.
afrique
Famille : Agapanthacées.
du sud
Allure, taille : vivace herbacée haute, aux feuilles de 40 à 50 cm
surmontées de tiges fleuries.
Origine : Afrique du Sud (province du Cap).
Floraison : des ombelles de fleurs généralement de couleur bleu-doux en juillet-août
poussent sur une tige de 40 à 90 cm.
Feuillage : lancéolé, souple, vert, persistant sous climat doux.
Exposition, sol : soleil ou mi-ombre, sur sol indifférent.
Rusticité : -7 à -10 °C. Les températures jusqu’ à -12 °C provoquent la disparition
des feuilles sans nuire à la plante.
Signes particuliers : il en existe sept espèces botaniques.
Étymologie
Le nom vient du grec agape, « amour » et anthus, « fleur ». Ce très joli patronyme
a été créé en 1788 par l’Héritier de Brutelle (1746-1800).
Notre sélection
Agapanthus praecox : variété à hautes
tiges et fleurs bleu-lavande, qui existe aussi
en blanc. C’est la variété la plus plantée et
sans doute la plus belle.
Agapanthus ‘Peter Pan’ : variété courte
(40 cm), d’un beau bleu.
Agapanthus ‘Loch Hope’ : 90 cm, bleufoncé.
Agapanthus ‘Blue Storm’ : 60 cm, bleulilas. Une fois installé, chaque pied donne
une quarantaine de fleurs. Rusticité : -7 °C.
Agapanthus praecox
Agapanthus praecox (gros plan)
Conseils
du paysagiste
Les agapanthes regroupées forment des îlots
azurés qui s’accordent avec pratiquement
toutes les autres plantes. Elles conviennent
également pour des bordures fleuries le long
des allées.
Attention cependant de ne pas les laisser se
ressemer n’importe où, les graines tombées
au pied des rosiers ou d’autres arbustes
prennent la place des racines et peuvent les
détruire.
Agapanthus praecox blanche
Agapanthe
11
Pour aller plus loin...
Francis Masson (1741-1805)
(1741-1805),
une vie semée de fleurs, au bord des précipices
qui le fait prisonnier. Libéré peu de temps après, il regagne
l’Angleterre. De retour en Afrique du Sud entre 1786
et 1795, Masson consacre officiellement ce pays « Paradis
des botanistes ». Il découvre 400 nouvelles espèces de plantes,
plus belles les unes que les autres : arums, agapanthes,
amaryllis, pélargoniums, crassulas, mésembryanthèmes,
glaïeuls, gardénias…, la palme revenant au Strelitzia
reginae, « l'oiseau de paradis », qui débute alors une carrière
de « superstar ». Les pépiniéristes achètent ces plantes à
prix d’or, les multiplient, les améliorent par hybridation
et offrent à l’Angleterre la suprématie mondiale dans le
domaine horticole. Les botanistes mandatés par Banks
obtiennent des retours sur investissement plus rentables
que ceux des mines d’argent de Potosi !
N
é en Écosse, il émigre à Londres où sa passion pour
les plantes lui ouvre les portes du Jardin botanique de
Kew où il est embauché comme jardinier, sous la direction
de Joseph Banks. En 1772, ce dernier, convaincu de ses
qualités, le choisit pour une mission au Cap. À bord du
Resolution, le bateau du second voyage de Cook, il se rend
en Afrique du Sud où il rencontre Thunberg avec qui il
accomplit deux intrépides expéditions botaniques dans
l’arrière-pays parmi « les prairies luxuriantes (...) avec une
grande variété d’ixias, de glaïeuls et d’iris dont la plupart sont
en fleurs au mois d’août ».
Après l’Afrique du Sud, l’Amérique du Nord
En 1797, Masson part pour les États-Unis, mais des pirates
français le capturent puis le cèdent à un navire allemand
qui le relâche à New York. Dans la région des Grands
Lacs et au Canada, il collecte et envoie à Kew, durant sept
ans, d’autres nouvelles espèces, dont l’élégant Trillium
grandiflorum.
Désireux de rentrer dans ses Highlands natales, cet
amoureux des plantes n’aura pas le plaisir de cultiver ses
« fleurs de l’amour » dans son propre jardin ; il décède à
Montréal en 1805. Francis Masson a, toute sa vie, affronté
les embûches avec une ténacité d’Écossais, alliée à un
flegme britannique du meilleur aloi… En hommage, Carl
von Linné, baptise une espèce d’asphodèle Massonia.
Quand une mission botanique devient une véritable
chasse aux trésors
Masson ramène à Kew plusieurs caisses d’espèces nouvelles,
notamment des bruyères exotiques et des protées qui lui
valent une réputation de redoutable chasseur de plantes.
En 1778, il continue ses collectes à Madère, aux Canaries,
aux Açores et aux Antilles. Il herborise sur l’île de la Grenade
en 1779 quand débarque un corps expéditionnaire français
Grands
Lacs
†
Bréhat, l’île jardin
Décès en 1805
à Montréal
À une encablure de Paimpol (10 minutes de traversée), dans les Côtes-d’Armor, l’archipel de Bréhat
présente le charme fleuri de la Bretagne côtière. La municipalité l’a très vite compris et respecte le
cachet des villages, fleuris. Les habitants jouent également le jeu et leurs jardins bordés de murets
fleuris ajoutent au charme de la promenade entre mer et campagne. Bréhat, baignée par le Gulf
Stream, bénéficie d’un climat des plus tempérés et les « belles exotiques » s’y épanouissent :
l'agave du Mexique, l'échium des Canaries et bien sûr les agapanthes du Cap à partir de juillet.
Bréhat subit une intense activité touristique en juillet et août mais le reste de l’année, les 400
habitants de l’île principale prennent encore le temps de jardiner.
Alfred Guézénec (1822-1866), dit Alfred de Bréhat, du nom de son île natale, fils d’un lieutenant
de vaisseau, sillonne le monde dès son plus jeune âge et assiste à la mort de son père à Calcutta
en 1840. Malade lui aussi, il met sac terre et se remémore ses voyages par l’écriture de romans.
Publiés en feuilletons dans les journaux, ils seront très appréciés. Tout porte à croire que l’auteur
de Souvenirs du Cap de Bonne-Espérance ait été le premier à planter les belles agapanthes couleur
« bleu des mers du Sud » dans son île bretonne.
Agapanthes de Bréhat
Plantes cousines
Scille du Pérou, Scilla peruviana : Liliacée bulbeuse de
30 cm originaire du bassin méditerranéen. Son nom vient du latin
scilla qui désignait des plantes à bulbes. Les premières plantes
sont arrivées en Angleterre sur le bateau espagnol El Peru, dont
elles ont conservé le nom. Ces magnifiques fleurs bleu-outremer
s’ouvrent en mai. Leur feuillage, assez semblable à celui des
agapanthes, disparaît après la floraison. Elles se plaisent au soleil
ou à mi-ombre. Rusticité : -10 °C.
Amaryllis belladonna : Amaryllidacée bulbeuse sur tige de
50 cm, en provenance, elle aussi, du Cap. Dédiée à Amaryllis, jolie
bergère chantée par Virgile, ses larges fleurs roses explosent en
Scilla peruviana, scille du Pérou
fin d’été. Le feuillage, de type agapanthe, apparaît au printemps
et sèche avant la floraison. La plante aime le soleil et un sol bien
drainé. Rusticité : -8 °C.
Ail d’ornement, Allium aflatunense : Alliacée capable de
lancer ses fleurs à 1 m de haut. Ses nombreux rayons portent
chacun une fleur, mais ce sont des pseudo-ombelles : la floraison
progressant du centre vers l’extérieur, il s’agit donc d'une
inflorescence de type cyme très contractée. Sa remarquable
floraison bleue se situe en début d’été. Cette plante demande le
plein soleil et un sol bien drainé. Rusticité : -20 °C.
Amaryllis belladonna
Ail d’ornement, Allium aflatunense
New York
Pour voyager par les livres
Les chasseurs d’hommes. Souvenirs du Cap de Bonne-Espérance,
Alfred de Bréhat, Calmann Lévy.
An Account of Three Journeys from the Cape Town Into the Southern
Parts of Africa 1772-1774, Francis Masson, numérisé et disponible
gratuitement sur archive.org/details/texts
L'alliance, James Michener, Le Seuil.
Le Cap
1er voyage : départ de Plymouth
avec Cook en juillet 1772.
(séjour de 3 ans au Cap
et retour à Londres.)
2e voyage : départ 1778, Grenade via
Madère et Canaries.
(retour en Grande Bretagne.)
12
3e voyage : départ 1797 vers
New York, Grands Lacs,
baie d'Hudson.
Décès à Montréal en 1805.
Idées de visites
L’île jardin de Bréhat (Côtes-d’Armor) : brehat-infos.fr
L’île est envahie d’agapanthes et d’autres belles plantes exotiques.
La Pépinière de Bréhat propose également un bon choix de
plantes de climat doux mais surtout un impressionnant catalogue
d’agapanthes : pepiniere-brehat.com
Les jardins Agapanthe, Grigneuseville (Seine-Maritime) : ouvert
d’avril à octobre, tél. : 06 08 62 24 58. Un jardin qui présente
des agapanthes mais beaucoup d’autres plantes en majesté !
jardins-agapanthe.com
Parc de Caradoc, Bayonne (Pyrénées-Atlantiques) : ouvert toute
l’année, tél. : 05 59 46 01 46. Beaucoup d’arbres majestueux
autour du château mais aussi une belle collection de 55 taxons
d’agapanthes et 46 de cistes.
Jardin Florilegium, Olonne-sur-Mer (Vendée) : le jardin de la
pépinière Poiroux est ouvert à la visite de juillet à octobre, tél. :
02 51 95 09 61. Il présente des plantes maritimes pour sol sec dont
une superbe collection d’agapanthes. pepiniere-poiroux.fr
13
PAVOT SOMNIFÈRE
Pour mourir de plaisir
turquie
caucase
Nom français : pavot somnifère, pavot à opium.
Nom latin : Papaver somniferum.
Famille : Papavéracées.
Allure, taille : plante annuelle haute de 60 cm à la floraison.
Origine : Turquie, Caucase. Cultivé par les Égyptiens. Les Perses,
en 671 av. J.-C., après l’invasion de l’Égypte, l’importent au Moyen
Orient. Les armées d’Alexandre le Grand en 332 av. J.-C. le diffusent jusqu’en Inde.
Floraison : les 50 espèces de pavots se caractérisent par des fleurs en coupe aux boutons
inclinés. Les couleurs sont principalement le rose, le violet, le rouge ; plus rarement
le jaune ou le blanc.
Feuillage : les feuilles découpées gris-bleuté s’insèrent sur la tige au sommet de laquelle
apparaissent les fleurs.
Exposition, sol : plein soleil et tous sols.
Rusticité : même dans les régions très froides, les graines se ressèment d’une année
sur l’autre.
Signes particuliers : le Papaver somniferum x nigrum produit des graines comestibles,
souvent cuites sur les pains en Orient. Le Papaver somniferum x alba est, lui, le vrai pavot
à opium ; ses fleurs sont jaunes, orangées ou blanches. Sa tige, mais surtout ses têtes,
contiennent un latex chargé d’alcaloïdes proches des opiacées dont on extrait la morphine.
Plantes cousines
Pour bien fleurir, tous les pavots ont besoin d’un
emplacement ensoleillé et d’une bonne terre.
Pavot d’Islande, Papaver croceum : vivace
de 20 à 40 cm d’Asie Mineure et d’Amérique
du Nord, jusqu'à 2 000 mètres. Supporte
-30 °C, d’où le nom associé arbitrairement à
un pays froid. Les fleurs, dans les tons chauds,
apparaissent au printemps sur un feuillage
semi-persistant. La plante est toxique mais
ses graines sont comestibles.
Pavot d’Orient, Papaver orientalis :
vivace de 30 à 50 cm d’Asie du sud-ouest.
Au printemps, s’ouvrent de magnifiques
fleurs larges de 10 cm, généralement rouges
mais qui existent aussi en rose ou orange.
Les larges feuilles rugueuses vert-dense
disparaissent l’hiver. Rusticité : -20 °C.
Coquelicot, Papaver rhoeas : annuelle
de 40 à 60 cm originaire d’Asie Mineure. Sa
floraison rouge illumine les fins de printemps
et débuts d’été. Associée au sommeil, dans
la mythologie grecque, Morphée en portait
une couronne. Le nom français est dérivé
de « cocorico » car le rouge des fleurs
rappellerait la crête du coq. La plante se
ressème d'elle-même.
Étymologie
Papaver était le nom latin de tous les pavots et vient de papa, « bouillie », car les graines
mélangées aux bouillies favorisent le sommeil des enfants.
Opium signifie « suc de pavot » en grec. Homère l’a surnommé népenthes, ce qui signifie
« qui éloigne toutes peines ».
Morphine doit son nom à Morphée, dieu des rêves chez les Grecs, qui considéraient
le sommeil comme un véritable remède.
Pavot d’Islande, Papaver croceum
Conseils du paysagiste
Une fois installés, les coquelicots et les pavots
somnifères se ressèment d’eux-mêmes et
apportent une touche de couleur vive dans
les espaces libres du jardin. En bordures
d’allées, ils sont particulièrement attrayants.
Pavot d’Orient, Papaver orientalis
Coquelicot, Papaver rhoeas. Le "buzzing" des abeilles provoque un nuage de pollen
201
Pierre Belon (1517-1564), ou le « stupéfiant » pouvoir des plantes
I
ssu d’une famille modeste de la Sarthe, il devient « garçon
apothicaire » au Mans où il gagne la protection de
l’évêque René du Bellay en charge des cours de botanique à
l’université de Wittenberg. Après des études de médecine à
Paris, Belon entre dans l’entourage du cardinal de Tournon,
diplomate puis ministre. En 1546, celui-ci envoie le jeune
naturaliste en mission scientifique au Levant où François
i er tient à marquer son amitié, intéressée, avec Soliman le
Magnifique.
Un brillant début de carrière
Belon visite l’Italie, la côte dalmate, la Grèce et ses îles,
Constantinople et ses environs, l’Égypte, la Palestine,
la Syrie puis traverse l’Anatolie où il séjourne un hiver,
approfondissant ses connaissances des mœurs turques.
On lui doit les premières descriptions de nombreuses
plantes, mais seule une petite partie de ses collectes est
arrivée en France, des pirates ayant intercepté le vaisseau
chargé de convoyer ses caisses. Par chance, son stock de
graines n’était pas du voyage.
Son nom reste associé à l’introduction du platane. Le
platane commun en France est le Platanus acerifolius,
hybride fertile du Platanus orientalis ramené par Belon et
du Platanus occidentalis américain. Il a également introduit
le lilas, bouturé discrètement dans le jardin du Sultan de
Constantinople, de l’olivier, du laurier-rose, de la rose de
Jéricho, de l’hellébore noire et du prunier Reine-Claude,
dédié à la première épouse de François i er. En Égypte, il
mentionne le papyrus du Nil, la canne à sucre originaire de
l’Inde, le bananier, le sycomore, le séné (Cassia).
Il propose au nouveau roi Henri ii d’acclimater diverses
essences de l’est du bassin méditerranéen : chêne-liège,
chêne-vert, arbousier, térébinthe, sumac.
Des fréquentations dangereuses
Outre les plantes d’ornement, Belon s’intéresse également
aux pouvoirs de certaines plantes pouvant enrichir
le « droguier du roi » : l’hysope (Hysopus), le henné
(Lawsonia), l’arbre à myrrhe (Commiphora) mais surtout
le pavot à opium (Papaver somnifera), cultivé en Turquie
pour ses graines alimentaires, ses vertus somnifères mais
aussi euphorisantes. Belon, subjugué par cet analgésique
puissant, tente sans doute d’en faire commerce : « Un
Arménien chez lequel j’ai longtemps logé en mangeait souvent
devant moi ; et ayant éprouvé l’opium, je n’y trouvais autre
accident que de m’échauffer la poitrine, et de me troubler
quelque peu le cerveau, et rêver en dormant ».
Une fin mystérieuse
À son retour, il publie Observations de plusieurs singularités
et choses mémorables trouvées en Grèce, Asie, Judée, Égypte,
Arabie et autres pays étranges. Henri ii succède à François
i er et malgré ses amitiés avec le poète Ronsard, les dignitaires
ecclésiastiques Tournon et du Bellay, le nouveau roi
n’accorde à Belon que de maigres subsides. Belon auraitt-il eu recours au commerce de l’opium et autres plantes
euphorisantes pour améliorer ses fins de mois ? Serait-ce
la raison de son assassinat nocturne dans un chemin du
Bois de Boulogne ? Si Pierre Belon ne figure plus dans les
dictionnaires modernes, son nom reste cependant associé
à un palmipède à bec rouge au plumage multicolore mais
à la chair immangeable, le tadorne de Belon, qui niche au
Moyen Orient.
Départ de Paris en 1546
Retour en 1549
Paris
Venise
Constantinople
Jerusalem
Athènes et
les Cyclades Le Caire
Pour aller plus loin...
Pavot, mode d’emPloi
À Java, au xvii e siècle, s’ouvrent les premières fumeries, nouvelle façon de consommer de la drogue. La firme pharmaceutique Bayer, en 1899,
isole l’héroïne et un autre alcaloïde du pavot, la codéine, qui est prescrite contre la toux. La morphine, tirée du pavot, reste d’ailleurs, malgré
les avancées de la médecine, le plus efficace antidouleur.
Botanique
Les abeilles nourrissent leurs larves avec le pollen. Chaque matin, dans certaines fleurs comme les coquelicots,
abeilles et bourdons secouent les anthères et se couvrent ainsi de pollen dans un bruissement caractéristique,
le "buzzing". Le pavot somnifère détient le record du plus grand nombre de grains de pollen par plante : 300 millions !
Il dispose également du plus grand nombre de graines par fleur : les 2 000 semences sont contenues dans
une « tête » avec une sorte de béret plat sous lequel s’ouvre une rangée de trous. À maturité, chaque fois
que la longue tige oscille, les graines sont expulsées aux alentours. C’est en observant ce phénomène
qu’un inventeur américain, R.H. Francé, a l’idée, au début du xxe siècle, de la salière…
« Religion, oPium du PeuPle »
Empereur Chenghua
• Une dépendance qui se démocratise
Le pavot somnifère n’est pas une plante chinoise, l’opium était rare et cher en Chine et seuls quelques privilégiés pouvaient se l’offrir. Les
pauvres avaient recours à la décoction de têtes de pavots pour soulager leurs maux.
Au xv e siècle, à la cour impériale de Chine, constamment à la recherche de raffinements nouveaux, l’opium acquiert peu à peu une réputation
d’aphrodisiaque. « L’opium médicament » devient alors « l’art alchimique du sexe et des courtisans ». L’empereur Chenghua (1464-1487)
envoie des émissaires à travers tout le continent pour rapporter « la noire et odorante médecine du printemps triomphant », payée un prix
fabuleux. Au xvii e siècle, sa consommation se démocratise. Un mélange tabac-opium, le madak, fumé en quelques bouffées dans un tube de
bambou ou une petite pipe, devient peu à peu un complément naturel de la chique de bétel et du thé traditionnel.
Au xviii e siècle, des empereurs, parfois eux-mêmes fumeurs, interdisent vente et consommation d’opium pour usage non médical.
• Les Anglais tirent les premiers
Au début du xix e siècle, les Anglais, qui cherchent un débouché pour leur production d’opium cultivé en Inde, inondent le marché chinois
par la contrebande. Lord Melbourne, Premier ministre de la Reine Victoria, déclare la guerre à la Chine après la destruction d’une grosse
cargaison d’opium à Hong Kong. Battue par un corps expéditionnaire franco-anglais, la Chine doit accepter le traité de Nankin en 1842
qui autorise les Anglais à faire commerce de l’opium. Ce dernier, théoriquement interdit, devient une aubaine pour de nombreux Chinois
qui se mettent à trafiquer, contribuant au développement de la consommation, au grand désespoir du gouvernement. Affirmant que sa
consommation « n’était pas un dommage mais un réconfort », Français et Américains rejoignent les Anglais et participent à ce commerce
lucratif. Le 19 mars 1853, une troupe de rebelles Taiping dirigés par Hung Xiuquan s'empare de Nankin, capitale de la Chine du sud.
• La solution radical-socialiste
Leur révolte va se solder par 20 millions de victimes. Une seconde intervention des Occidentaux lui fait suite. Le résultat des deux guerres
de l’opium est la légalisation forcée de la consommation et du commerce de la drogue dans toute la Chine. Un traité conclu en juin 1858, à
Tien-Tsin par les représentants de la France, de l'Angleterre, de la Russie et des États-Unis, stipule que la Chine sera ouverte au christianisme
et au commerce étranger. Mao, en 1949, après la « Longue marche » et l’institution de la République populaire de Chine, interdit l’opium
et la religion, suivant le conseil de Marx.
• Épilogue : l’argent va à l’argent
Les Empereurs chinois exigeaient des lingots d’argent contre le thé qu’ils consentaient à
vendre à la Compagnie anglaise des Indes occidentales. En 1773, le Tea Act ouvre le
marché de la colonie américaine à la Compagnie anglaise des Indes. En réaction contre ce
monopole, les commerçants locaux jettent les caisses de thé dans le port de Boston. Ce
conflit débouchera sur la Révolution américaine.
Afin d’obtenir les lingots d’argent indispensables à l’achat du thé chinois, la Compagnie a
l’idée de vendre l’opium fabriqué en Inde aux contrebandiers chinois contre des lingots
d’argent, plus de cinq fois sa valeur.
Idées de visites
Pour voyager par les livres
Voyage au levant (1553), Pierre Belon, Chandeigne.
L’éloge de l’herbe : Les formes cachées de la nature, Claude
Nuridsany, Adam Biro.
Palikao (1860) : Le sac du Palais d’été et la prise de Pékin, Raymond
Bourgerie et Pierre Lesouef, Economica.
202
Jardin des plantes de Caen (Calvados) : ouvert tous les jours, tél. :
02 31 30 48 40. Spécialisé dans la flore normande et la conservation
des espèces menacées, ce jardin possède une riche collection de 101
taxons de plantes médicinales, dont les pavots somnifères en saison.
Jardin des plantes médicinales du Musée Flaubert, Rouen (SeineMaritime) : ouvert le mardi, mercredi et samedi, tél. : 02 35 15 59 93.
Une somme de renseignement sur les vertus des plantes.
203
Téléchargement