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MATERIAUX CERAMIQUES – MICROTECHNIQUE
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VII. Les diélectriques polaires et non linéaires – Pyroélectriques et Piézoélectriques
1. Introduction
Dans le chapitre précédent on s’est restreint au cas des diélectriques strictement
!
! linéaire. Ceci veut dire que
nous avons considéré que la constante diélectrique k de la relation D = k! 0 E soit une constante et ne
!
dépend pas du champ électrique E . En plus, nous avons assumé que la polarisation ne soit qu’une
'
conséquence du champ électrique P = ! 0 (k "1)E = N#E qui polarise les atomes et molécules (avec le
champs E’ à l’endroit des ces derniers). Il y a pourtant des matériaux pour lesquels ni l’un ni l’autre c’est le
cas. Les matériaux polaires sont polarisés par la manière d’arranger les ions dans les solides ioniques. Il y a
une auto-polarisation qui existe sans champ électrique. Ce phénomène peut être très fort dans des
matériaux cristallins. Il en résulte des propriétés intéressantes comme la piézoélectricité qui a amené à des
applications importantes comme l’imagerie à ultrasons, les filtres RF dans la téléphonie mobile, ou bien les
actionneurs à l’échelle nanométrique, pour mentionner quelques unes. Parmi ces matériaux polaires il y a
ceux qui permettent de changer la direction de l’auto-polarisation par un champ électrique. Ceci a pour
conséquence que la constante diélectrique est dépendante du champ électrique et de l’histoire du matériau.
On parle de la ferroélectricité, en analogie avec le ferromagnétisme. (Le ferromagnétisme es basé sur les
spins des électrons. Le spin est un moment magnétique et un dipôle par sa nature. La ferroélectricité est
basée sur les charges électriques, donc des monopôles).
Si la polarisation d’un matériau change d’une manière non-linéaire en réponse à un champ électrique
appliqué, le matériau est considéré comme étant un diélectrique non-linéaire.
2. Diélectriques non-centro-symétriques et polaires, et leurs propriétés fonctionnelles
2.1 Origine de la polarité – polarisation spontanée (auto-polarisation)
L’existence d’une polarisation spontanée suppose une asymétrie du cristal. Un matériau qui possède une
polarisation spontanée, matériau polaire, possède des dipôles: les centres de charges positives ne
coïncident pas avec les centres des charges négatives. Les éléments exemplaires de structures polaires
sont illustrés schématiquement dans la Fig. 1. Pour arriver à un effet polaire macroscopique, ces éléments
doivent être répétés périodiquement dans le même sens.
O2-
E
E
H+
Un dipôle
électrique
H+
Une molécule polaire
E
Anion B-1
Cation A+1
Un cristal polaire
Figure 1 : Structures polaires : Le concept des dipôles, une molécule polaire et une maille d’un cristal polaire.
Dans la physique des solides, la symétrie joue un rôle central. Si nous nous demandons si une structure
cristalline possède une polarisation spontanée (ou auto-polarisation), il faut! se demander si une telle
polarisation est compatible avec la symétrie de cette structure. La polarisation P est un vecteur (comme le
champ électrique). Il faut alors investiguer s’il y a un vecteur dans la structure qui ne change jamais de
direction si on applique toutes les opérations de symétrie de la structure cristalline en question. Un tel
vecteur indiquerait une direction polaire. Bien évidement, l’inversion
de la symétrie,
! I ne doit
! pas faire
! partie
!
!" # P , donc P = ! P = 0 . Ainsi, un carré
car celle-ci change la direction d’un vecteur dans son opposé: P !
régulier comme dessiné dans la fig. 2 ne peut pas contenir un axe polaire dans le plan. Seulement les
symétries ne possédant pas de centres d’inversion peuvent admettre une direction polaire. L’exemple du
triangle régulier montré en fig. 2 ne possède pas de centre d’inversion. Pourtant, il n’y a pas de vecteur
invariable dans le plan, car la structure possède un axe de rotation 3. Si on admet un vecteur quelconque
dans le plan du triangle, il y a deux autres vecteurs équivalents résultant des rotations de 120° et 240°, ainsi
la somme de ces 3 vecteurs vaut zéro ! Donc, il faut encore exigé qu’il n’y ait pas d’axe de symétrie (les
cristaux peuvent avoir des axes de rotation 2, 3, 4 et 6) qui tourne l’axe polaire dans une autre direction. Par
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2
exemple, on brise la symétrie de trois en allongeant le triangle dans une direction (fig. 2). Le plan de miroir
ou axe de 2 qui est maintenu devient un axe polaire. Ainsi, on différencie 3 classes de matériaux cristallins:
(1) La maille cristalline possède des centres d’inversion
(2) La maille ne possède pas de centre d’inversion
ème
(3) Parmi les symétries du 2
cas, il y a celles qui possèdent en plus un axe polaire.
La figure 2 représente ces 3 cas. Les matériaux du cas 2 possèdent des propriétés de piézoélectricité (voir
prochain chapitre), les matériaux du cas 3 sont aussi piézoélectriques et sont en plus pyroélectriques voire
parfois même ferroélectrique. La structure polaire de la fig. 2c doit être répétée d’une manière parallèle afin
de constituer un cristal polaire.
(a)
(b)
(c)
Figure 2 : (a) Un carré régulier, formé par des ions de même type, centré avec un ion de signe opposé, possède un
centre d’inversion. Il n’y a aucune direction polaire dans le plan. (b) Le triangle régulier ne possède pas de centre
d’inversion. Pourtant il n’y quand même pas de vecteur polaire. (c) La symétrie de rotation 3 est brisée par l’allongement
du triangle dans une direction. Il reste un axe de rotation 2. Celui-ci est devenu un axe polaire.
2.2 La piézoélectricité
Les cristaux non-centro-symétriques sont piézoélectriques (Exemple: le quartz, qui ne possède pas d'axe
polaire). C’est à dire, en appliquant une déformation, il y a une séparation de charge (effet direct), ou en
applications un champ électrique, il y a une déformation (effet converse). L’effet direct est illustré par les la
figure 4, et en contraste avec fig. 3 qui montre l’absence d’une séparation de charge quand il y a un centre
d’inversion.
Les structures avec un axe polaire sont aussi piézoélectriques. En effet, la structure montrée en fig. 4b a
perdu la symétrie de rotation 3 (qui est perpendiculaire au plan en fig. 4a), et est devenu polaire le long des
flèches qui indiquent la déformation. Donc, si cette structure possède cette déformation en étant en équilibre
(sans forces extérieures), elle est de toute façon aussi piézoélectrique. Notez aussi, que si on applique un
champ électrique, les ions négatifs et positifs vont dans des directions inverses, et amènes à une
déformation qui est linéaires avec le champs électrique.
Structure centro-symétrique
Sous contrainte :
Les centres des charges positives et négatives
correspondent. Il n’y a pas de charge nette.
Figure 3 : Structure centro-symétrique
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3
a)
b)
Figure 4. Une structure non-centrosymétrique contenant des ions positifs et négatifs (a) soumise à une contrainte,
(b) montrant comment la contrainte crée la polarisation. Cette structure est une simplification du quartz « quartz
planaire » (hexagone de Si-O).
2.4. La pyroélectricité
Les structures polaires sont aussi pyroélectriques. Quand la température change, les ions se déplacent de
sorte que le centre de gravité des ions positifs, et le centre de gravités des ions négatives se séparent plus
(pendant l’abaissement de la température) ou se rapprochent (pendant la montée de la température). Ainsi
des charges sont créées aux surfaces perpendiculaires à l’axe polaire.
2.5. La ferroélectricité
Il y a encore une particularité de plus parmi les structures polaires, ou pyroélectriques : c’est la
ferroélectricité. Quand l’axe polaire s’invertit en appliquant un champ électrique, on parle de ferroélectricité.
Ceci se passe dans des structures qui donnent assez de place aux ions pour changer leurs positions. Dans
les ferroélectriques, la polarisation électrique P, qui se forme spontanément à cause de la polarité de la
structure (on parle aussi de la polarisation spontanée Ps), devient mesurable, car elle se manifeste aux
surfaces perpendiculaires à P par un changement de charge de 2P lors de l’inversion de P par un champ
électrique.
P
(C/m )=
D(E)
P(E)
2
(C/m
)
0.3
Pr
Ps
Champ
coercitif Ec
0.2
0.1
E (MV/m)
Ec
0
0.1
0.2
-Pr
Figure 5 : Cycle d’hystérésis d’un monocristal de BaTiO3. Pr est la polarisation rémanente qui reste à E=0.
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Figure 6 : Graph situant les différents types de relations propriétés-symétries pour quelques piézoélectriques
majeurs. Notez que les meilleures pyroélectriques sont parmi les ferroélectriques. La structure a droite est le
wurtzite, présent sous forme de AlN et ZnO.
3. Transition de phase ferroélectrique et matériaux ferroélectriques
3.1. Transition de phase et maille élémentaire
La ferroélectricité est un phénomène des structures polaires. Dans les structures ferroélectrique l’axe
polarie
!
!
peut être renversé par un champ électrique extérieur, car l’énergie du système s’abaisse quand P et E sont
parallèles. Les matériaux ferroélectriques se transforment habituellement en un état ferroélectrique depuis
une phase paraélectrique stable à haute température (le plus souvent non polaire). Les céramiques
ferroélectriques les plus utiles possèdent une structure cubique de type pérovskite à haute température. Lors
du refroidissement, elles subissent une transition de phase : la structure devient polaire non-cubique. Cette
température de transition se nomme la température de Curie (Tc). La transition de phase se fait par un petit
déplacement des ions de leur position symétrique, schématiquement montré en fig. 7 :
Figure
7:
La
transition
paraélectriqueferroélectrique brise la symétrie d’inversion par un
déplacement des ions, dans ce cas dans la
direction horizontale. La maille s’allonge dans la
direction de ce déplacement. Ferroélectrique veut
dire que le déplacement peut être renversé dans
la direction opposée par un champ électrique.
Deux des matériaux ferroélectriques les plus utilisés sont le titanate de baryum (BaTiO3) (fig. 8) et le
titanate/zirconium de plomb (Pb(Zr0.5Ti0.5)O3), plus connu sous le nom de PZT. Leur température de Curie
vaut respectivement 130°C et 370°C. En-dessous de la température de Curie, le BaTiO3 devient tétragonal.
2
Les ions sont déplacés (fig. 7) d’une telle manière qu’une polarisation spontanée de 0,26 C/m existe à
température ambiante dans une des directions de la maille. D’autres ferroélectriques utiles, n’ayant pas la
structure de la pérovskite, sont le LiNbO3 (souvent utilisé comme monocristal pour les filtres RF (1 à 3
GHz)), les éléments actifs en optiques et le polymère PVF2 (polyvinildiène di-fluoride (CH2F2)n).
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A T > TCurie (120-130°C) : symétrie cubique avec un
4+
2cation Ti centré dans un octaèdre de O
4+
A T < TCurie : Ti occupe une position décentrée dans
une maille tétragonale : un axe de rotation 4 devient l’axe
polaire
 une polarisation spontanée, dans ce cas parallèle à un
des axes de rotation 4 (dont il en existe 3 dans la
phase cubique à haute température) donne donc
2x3=6 directions possibles pour la polarisation,
comme indiqué avec les flèches.
Figure 8 : Maille pérovskite du BaTiO3 et aussi du PZT en
substituant Ba par Pb et une partie (moins de 50 % de Ti par Zr
d’une manière aléatoire (solution solide)).
Déplacements en Å
Ba2+
0.06
0.03
Ti4+
O2-
Ti - charge
positive
0.12
O - charge
négative
Figure 9 : Projection faciale de la maille tétragonale du BaTiO3 indiquant les nouvelles positions des ions. L’axe c est
vertical. Dans un domaine, tous les ions équivalents font le même déplacement: mouvement collectif.
3.2. Domaines ferroélectriques
Sachant que les six directions le long des arêtes du cube du BaTiO 3 dans sa phase paraélectrique sont
équivalentes, la polarisation peut se développer selon une de ces directions, avec la même probabilité pour
chaque direction. Sans force ou champ électrique extérieurs, toutes les directions possibles sont assumées
en formant des zones homogènes (domaines), séparées par des parois où la polarisation saute (parois de
domaines, Figure ). Les parois de domaines possèdent une épaisseur de l’ordre de 100 Å, quand l'angle de
rotation est différent de 180 °. Dans le dernier cas, la paroi a une épaisseur d'une maille (4 Å).
La structure finale des parois de domaines du cristal peut être très complexe, dépendant des champs
extérieurs et des forces agissant sur le cristal lors du refroidissement en passant par la température de
transition Tc. Pour obtenir un cristal avec seulement un mono-domaine (un seul domaine ou sans domaine),
il doit généralement être soumis, après sa croissance, à des champs électriques et parfois mécaniques,
dans des conditions soigneusement contrôlées. Le fait que le cristal puisse être transformé d’une
configuration en multidomaines à une configuration en mono-domaine est une conséquence directe de la
définition de la ferroélectricité: à savoir que la direction spontanée de polarisation peut être changée sous
l’action d’un champ extérieur.
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(a)
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+ + + + +
+ + + + +
+ + + + +
+ -
+ +
+ - + - +
+ - + - + -
-
E
Ps
- - - - - - - - - - - - paroi de domaine 180°
contrainte en compression
(b)
axe - a
Ps
axe - c
Ps
axe - a
Ps
axe - c
paroi de domaine 90°
(c)
En général, les
parois de domaine à
180° et à 90° sont
tous deux présents
Figure 10 : Illustration de la création de domaines et des parois de domaines dans le BaTiO3
180°
c
180°
90°
c
90°
E
c
c
cas initial
application
d’un champ électrique
Figure 11 : Mouvement des parois de domaines sous l’influence d’un champ extérieur. Explication: L'axe c qui est
parallèle à P est plus grand. L’axe c s'aligne préférentiellement avec des directions sans contraintes compressives.
La situation dans les céramiques est encore plus complexe. Lorsque la céramique est refroidie en-dessous
de la température de Curie Tc, des grains individuels adoptent des formes anisotropiques déterminées par
l’orientation des axes cristallographiques. Le changement de forme de chaque grain induit de grosses
contraintes sur les grains adjacents. Dans le but de minimiser l’énergie élastique totale, une structure
complexe de domaines se forme à l’intérieur de chaque grain, en ajustant sa forme à l’environnement
immédiat (Figure 12 a et b). Si les grains sont distribués de manière aléatoire, la contribution de la
polarisation de tous les domaines va s’annuler, ce qui donne une polarisation macroscopique nulle.
Toutefois, en raison de la nature modifiable de la polarisation, la structure des domaines peut être changée
(polarisation nette dans les grains réorientés) par un champ électrique extérieur provoquant une polarisation
macroscopique non nulle, qui persiste même une fois le champ électrique supprimé (12c). Ce processus de
polarisation des céramiques (ou monocristal, comme décrit au-dessus) par des champs électriques
extérieurs est appelé polarisation (‘’poling’’ en anglais). On doit noter encore que c’est la possibilité de
changer la direction de polarisation (propriété définissant la ferroélectricité) qui permet le ‘’poling’’. Si une
céramique est faite d’un matériau polaire, qui n’est pas ferroélectrique, le ‘’poling’’ n’est pas possible.
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Une céramique ferroélectrique doit être polarisée avant d'être utilisée comme matériau piézoélectrique. Elles
sont habituellement polarisées à une température élevée, proche de Tc, où les parois des domaines sont
plus mobiles. Toutefois, la conductivité électrique devient plus élevée à haute température et le champ de
claquage devient plus faible. Ainsi, pour un ‘’poling’’ correct, il est nécessaire de définir soigneusement le
temps de ‘’poling’’, l’intensité du champ de ‘’poling’’ et la température. Des conditions typiques pour le PZT
sont des températures entre 100°C et 200°C, des champs entre 20 kV/cm et 100 kV/cm et des temps de
polarisation entre quelques minutes et une demi-heure, dépendant du matériau. A l’opposé des
monocristaux, le ‘’poling’’ des céramiques n’est jamais complet à cause de la présence nécessaire des
domaines pour permettre la relaxation d’une partie de la déformation le long des grains.
T > Tc
Après frittage : T > Tc
E
E=0
A T < Tc
Après polarisation
Figure 12: Céramiques ferroélectriques : a) Au-dessus de la température de Curie Tc. b) En-dessous de la température
de Curie. c) Après le ‘’poling’’.
3.3 : Constante diélectrique des ferroélectriques
Le plus souvent, l’application électrique des ferroélectrique vise à obtenir une grande constante diélectrique.
En effet, les parois de domaines bougent assez facilement, surtout près de la phase de transition. En dessus
de la température de transition, le réseau cristallin est très «mou» par rapport au mouvement des ions pour
obtenir le déplacement polaire et peut être polarisé fortement par un petit champ électrique. Par conséquent,
autour de la transition de phase ferroélectrique, ces pérovskites ferroélectriques possèdent une constante
diélectrique très élevée (Figure 13).
Figure 13 : Représentation schématique de la constante diélectrique de matériaux ferroélectriques proche de la
température de Curie
3.4. Applications des ferroélectriques
3.4.1 Condensateurs à haute permittivité diélectrique (high-k)
Le titanate de baryum est aujourd’hui le matériau ferroélectrique de loin le plus employé pour des
12
applications dans les condensateurs. Chaque année, l’industrie vend environ 1.2 x 10 condensateur de
titanate de baryum, donc environ 200 pièces par habitant de la terre. Ils sont surtout employés pour bloquer
la propagation des signaux et des bruits électriques à travers des lignes d’alimentation dans des circuits RF
(radio fréquence, MHz à GHz)
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Pour parvenir à une efficacité volumétrique maximale, des diélectriques très fins sont nécessaires. Toutefois,
on doit se rappeler que les céramiques minces avec de grandes surfaces sont fragiles. Une solution à ce
problème consiste à fabriquer des condensateurs multicouches, Figure 1. La préparation est faite par
coulage en bande (« tape casting » en anglais) de couches de céramiques et impression («screen printing»
en anglais) des électrodes internes. L’épaisseur des couches individuelles est typiquement autour de 20
microns et les dimensions du condensateur peuvent être aussi petites que 1x1x1 mm. La capacité peut
varier de 1 pF à 300 µF.
t
électrodes
t1
Figure 14: condensateur multicouches
Négligeant l’épaisseur des électrodes, l’épaisseur totale t du condensateur est égale à N*t1 où t1 est
l’épaisseur de chaque couche et N le nombre total de couches. La capacité de chaque couche vaut
C1 = !0 k
A
t1
Et pour N couches connectées en parallèle, la capacité totale vaut :
C = NC1 = N!0 k
A
A
= N 2!0 k
t1
t
2
Ainsi, la capacité d’un condensateur multicouches composé de N couches est N fois plus grande que la
capacité d’un condensateur ayant le même volume avec la même épaisseur totale.
3.4.2 Mémoire ferroélectrique non volatile FERAMS
L’hystérèse ferroélectrique est employée pour le stockage d’informations digitales. Un matériau
ferroélectrique, polarisé dans la direction positive, répond comme un condensateur à basse valeur à une
pulsation positive de tension. S’il est polarisé dans la direction négative, une tension positive dépassant le
champ coercitif Ec va résulter en une charge d’environ 2Pr, correspondant au changement de la polarisation
spontanée de –Pr à +Pr. Ainsi, deux états, positif et négatif, peuvent être distingués par différentes charges
générées par une même pulsation. Il s’agit du principe de base pour le stockage de la mémoire. Sachant
que la polarisation spontanée (ou rémanente) reste dans le matériau même si le champ extérieur est
supprimé, les matériaux ferroélectriques peuvent être employés pour le stockage de la mémoire non volatile
(permanente).
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Read “0”
Pr
Polarisation
9
Caractéristiques requises
Prr“0”
Read “1”
Pnv
-Prr“1”
-Pr
Ø
Ø
Matériau ferroélectrique sous forme de film mince
Les 2 états de polarisation = les états logiques binaires
Ø
Ø
Ø
Matériau typique: PZT: Pb(Zr,Ti)O3,
Températures de 500 à 700°C utilisées pour la fabrication
Haute T, atmosphère oxydante  électrodes résistant à
l’oxydation
Electrodes typiques : Pt, Ir, RuO2, IrO2, etc...
Ø
Voltage
Figure 15 : Boucle d’hystérèse ferroélectrique
montrant les 2 états logiques d’une FERAM
En principe, le FERAM (Ferroelectric non volatile Random Access Memory) pourrait éliminer l’emploi d’un
disque dur dans les ordinateurs et est un composant très attractif. Toutefois, pour le moment, les puces à
haute densité ne sont pas encore disponibles et la technologie n’est pas encore assez avancée. Cependant
le FERAM est vendu pour des marchés des niches comme les jouets (jeux vidéo) et les carte à puces
(Fujitsu). Le principale avantage par rapport au mémoire FLASH est la vitesse d’écriture.
4. L’effet pyroélectrique et ses applications
Pour les aspect de dispositifs micro, voir : P. Muralt, Micromachined infrared detectors based on pyroelectric thin films,
Rep. Prog Phys. 64, 1339-1388 (2001).
4.1. Principe et matériaux
Quand un matériau possédant une polarisation spontanée est assujettie à des changements de
température, sa polarisation va changer, produisant des charges à la surface. Le coefficient pyroélectrique
est défini comme la dérivée de la polarisation par rapport à la température.
p = dP/dT
(1)
La charge sur un condensateur de surface A est donc : dQ = dP ! A = pA ! dT
Il en découle que tous les monocristaux ferroélectriques et les céramiques polarisées sont pyroélectriques.
Selon la Figure 16 et l’équation (1), les matériaux ferroélectriques montrent un coefficient pyroélectrique
élevé dans la région de Tc. Toutefois, si le matériau doit être utilisé près de Tc, où p change très
rapidement, sa température doit être maintenue constante pour un emploi stable. Pour cette raison, les
matériaux ferroélectriques sont employés à température ambiante où le coefficient pyroélectrique est
significativement plus faible, mais relativement stable en fonction de la température. Des matériaux
pyroélectriques sélectionnés sont montrés dans le tableau 1. Noter que les pyroélectriques nonferroélectriques possèdent un coefficient pyroélectrique plus bas. Toutefois, ce n’est pas seulement le
coefficient pyroélectrique qui compte, ce sont également la constante diélectrique, les pertes diélectriques,
et la capacité de chaleur qui sont importantes. Voir l’article cité en haut pour des informations plus amples.
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Ferroélectrique
Paraélectrique
Ps
dPs/dT
Température
Tc
Figure 16 : Dépendance en température de la polarisation spontanée et coefficient pyroélectrique pour un ferroélectrique
typique.
Tableau 1 : Matériaux pyroélectriques
Matériau
LiTaO3 single crystal
Ba0.27Sr0.73Nb2O6 single crystal
Modified Pb(Zr,Ti)O3
Polyviniledene chloride
ZnS
Sont-ils
ferroélectriques ?
yes
yes
yes
yes
no
Coeff. pyroélectrique à 20°C
-5
2
10 C/(m K)
-19
-55
-38
-2.7
-0.03
Les matériaux pyroélectriques sont principalement employés pour la détection de radiations infrarouges
(chaleur). En principe, les matériaux pyroélectriques peuvent détecter des changements de température
-6
aussi faibles que 10 °C sur le capteur, ou 50 mK variation dans la cible d’une caméra infrarouge.
L’avantage significatif des appareils pyroélectriques est qu’ils peuvent être employés à température
ambiante, alors que les détecteurs semi-conducteurs nécessitent un grand refroidissement.
4.2. Applications des matériaux pyroélectriques
Les matériaux pyroélectriques vont réagir à des changements de température (changement de la radiation
infrarouge), voir équation (18). Ainsi, ils peuvent être employés pour détecter un objet qui bouge possédant
une température différente de l’environnement, ou un objet statique qui change de température. Pour la
détection de sources statiques avec une température constante, il est nécessaire d’interrompre la radiation
émise d’une manière périodique (mode on-off). Ceci est habituellement accomplit en plaçant un disque
rotatif qui est divisé en plusieurs secteurs en avant du détecteur et qui agit comme un interrupteur de
radiation (fig. 17). Ainsi, la radiation infrarouge est modulés avec une fréquence connue, ce qui permet de
mieux détecter les signaux, c’est à dire de les sortir du bruit.
Comme contrôleur de polluants, l’élément pyroélectrique est exposé à des radiations infrarouges qui passent
à travers un gaz contenant les polluants qui doivent être identifiés (fig. 17). Un filtre avec une bande
passante étroite est placé devant le détecteur. La bande passante du filtre inclut la longueur d’onde à
laquelle un polluant absorbe fortement. Si le gaz est présent, l’intensité IR qui arrive sur le détecteur est
diminuée. Comme la radiation IR est modulée, on a toujours la référence à la situation sans radiation IR, ce
qui donne une bonne stabilité à la mesure. L’amélioration de la réponse nécessite la réduction de la capacité
thermique du détecteur, ce qui favorise l’utilisation de fines couches de pyroélectriques sur de fines
membranes (silicium micro-usiné) ou des couches pyroélectriques suspendues à des ponts (surface en
silicium micro-usiné).
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Figure 17 : Contrôleur de polluants
Fig. 18: Capteur de sécurité détectant des cambrioleurs. En passant, la personne jette sa radiation infrarouge
d’abord sur un des deux éléments pyro, après sur l’autre, ce qui donne un signal charactéristique qui est détecté
par l’électronique.
Design layout (large geometry)
absorption layer
black Pt
top electrode
Cr/Au
pyroelectric film
PbTiO 3 (PT)
1 mm
membrane
Si3N 4/SiO 2
Si
SiO 2
exaggerated vertical scale
Fig. 19: Capteur de sécurité contre des cambrioleurs en version microusinée (M. Kohli et al, 1995)
Les pyroélectriques sont utilisé comme détecteurs infrarouges pour les applications suivantes:
Ø Mesure de la température sans contacte
Ø Capteur de sécurité (intrusion, musée, etc.)
Ø Capteur de gaz par l'absorption d’infrarouge caractéristique (p.ex. CO2).
Ø Imagerie par infrarouge (vue à travers la fumée (service de feu), vue pendant la nuit (militaires),
détection de fuite de chaleur (bâtiment mal isolé), sécurité sur la route, réglage des systèmes de
climatisation (au nombre de personnes présentes), ….
Remarque : Dans les microsystèmes, il y a un fort concurrent des film minces pyroélectriques : des films
minces d’oxyde de vanadium (VOx). Ce matériau possède une transition isolateur-conducteur à peu près de
la température ambiante. Il y a donc une grande chute dans la résistance électrique en fonction de la
température, ce qui donne un « thermomètre » très sensible.
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4. Les piezoélectriques
4.1. Phénomènes et coefficients
La piézoélectricité est le nom du phénomène qui génère des charges électriques par une contrainte
mécanique. Elle fut découverte il y a plus de cent ans (1880) par Pierre et Jacques Curie, qui observèrent
ième
l’effet à un cristal pyroélectrique (déjà connu en 18
siècle) et firent le postulat suivant : lorsqu'un cristal est
soumis à une contrainte de compression, des charges électriques peuvent apparaître à la surface du cristal,
à condition que la symétrie du cristal remplisse certains critères. Ce phénomène fut plus tard appelé
piézoélectricité ("piezo" est dérivé du mot grec signifiant "presser"; "piézoélectricité"---> électricité produite
par pression). C’est un effet linéaire qui lie contrainte et champs de déplacement.
Définition de la piézoélectricité
Les matériaux piézoélectriques développent une charge quand ils sont soumis à une contrainte mécanique.
La charge est proportionnelle à la contrainte. Cet effet est appelé effet piézoélectrique direct.
Les matériaux piézoélectriques montrent également un effet réciproque: Ils se déforment mécaniquement
lorsqu'ils sont soumis à un champ électrique. La déformation est proportionnelle au champ électrique.
Effet réciproque Effet direct force
+++++++++++++++++++
!l
cristal piézoélectrique
charge
cristal piézoélectrique
E
--------------------------------
force
Figure 20: Description schématique de la piézoélectricité
(effet direct): Une charge électrique apparaît sur la surface
d'un cristal soumis à une contrainte de compression, à
condition que la symétrie du cristal remplisse certains
critères.
Figure 21: Description schématique de la piézoélectricité
(effet réciproque): Un cristal piézoélectrique soumis à un
champ électrique subit une déformation parallèle et
verticale au champ appliqué.
On peut écrire la relation suivante pour l'effet piézoélectrique direct:
D = ddirect X
(1)
2
2
2
Avec X la contrainte (N/m ) et D la charge par unité de surface (Coulomb/m - C/m ).
Pour l'effet réciproque, on peut écrire:
x = dréciproque E
(2)
Avec E le champ électrique (V/m) et x la déformation relative (m/m).
La constante de proportionnalité d est appelée le coefficient piézoélectrique. On peut montrer à l'aide
d'arguments thermodynamiques que:
ddirect = dréciproque
(3)
Les unités du coefficient piézoélectrique de type d sont donc (C/N) ou (m/V).
L'effet piézoélectrique direct est utilisé dans les capteurs, car l’effet produit directement un signal électrique
MATERIAUX CERAMIQUES – MICROTECHNIQUE
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en fonction d’une pression, ou d’une dilatation. Ainsi on peut concevoir des capteurs de mouvement
(accélération, rotation). L'effet piézoélectrique réciproque est également d'un grand intérêt, car il permet
d’engendrer une déformation par application d'un champ électrique (utilisée dans les actionneurs). Il y a
aussi trois autres constantes piézoélectriques (e, g et h), qui relient d'autres combinaisons de variables
élastiques et électriques.
Les coefficients piézoélectriques sont des tenseurs du troisième ordre, car la dilatation (xij) est un tenseur de
ième
2
ordre, et le E (Ek) est un vecteur. Dans une notation complète il faudrait donc écrire : xij = dijk Ek .
Il y aune convention de réduire les nombres d’indices de la dilatations: ii->i (pour les cisaillements indices
4,5,6). Ici nous simplifierons et admettrons que la valeur d'une propriété varie avec la direction de la force
extérieure appliquée (force ou tension électrique) et celle de la mesure de la réponse induite (charge ou
déformation). Pour l'effet direct, nous utiliserons les notations suivantes : nous donnons le coefficient
piézoélectrique avec deux indices, le premier indiquant la direction de la réponse induite (charge ou
déformation), et le deuxième, la direction de la variable extérieure appliquée au matériau (contrainte
mécanique ou champ électrique). Par exemple d33 est le coefficient qui relie la charge générée par une force
appliquée sur la même surface, alors que d31 relie la charge générée sur une surface perpendiculairement à
la force appliquée. Le premier indice 3 signifie le composant D3 du champ de déplacement, tandis que le
2’ième 3 signifie la pression direction 3 sur surface 3 dans le cas de d33, et la pression direction 1 sur la
surface 1 dans le cas de d31.
Effet longitudinal
Effet transversal
force
++++++++++++++++
+++++++++++++++++
céramique
charge
P
piézoélectrique
3
-------------------------------3
céramique
piézoélectrique
force
P
- force
charge
-------------------------------
2
1
2
force
1
d33 est la constante qui relie la charge générée
sur une surface à la contrainte appliquée sur
cette même surface
Contrainte 11 fait charge d31 est la constante qui relie
la charge générée sur la surface perpendiculaire à
l'axe 3 à la contrainte appliquée sur la surface
perpendiculaire à l'axe 1.
Figure 22 : description des coefficients piézoélectriques d33 and d31
Les céramiques possèdent 3 coefficients piézoélectriques indépendants. La direction de la polarisation est
définie par le champ électrique utilisé pour polariser le matériau. La convention donne l'indice 3 pour cette
direction. Perpendiculaire à la direction 3, la céramique est aléatoirement arrangé, et en conséquence,
toutes les directions perpendiculaires à la direction 3 sont équivalentes au niveau des propriétés
macroscopiques: les directions 1 et 2 sont équivalentes. Mathématiquement parlé, la symétrie est celle du
cylindre.
Le premier indice se réfère à la direction du champ E et le deuxième à celle de la contrainte ou déformation
mécanique. Pour le coefficient d:
d(ind .E )(ind .def )
Effet longitudinal E//P: x 3 = d 33 E 3
Effet transverse aussi E//P: x1 = d 31E 3 ,
Effet de cisaillement
x 2 = d 31E3
E!P : x 4 = d14 E1 ,
x 5 = d15 E1 , d14 = d15
MATERIAUX CERAMIQUES – MICROTECHNIQUE
14
Figure 23: Les 3 déformations piézoélectriques dans les céramiques ferroélectriques polarisés, ainsi que dans
beaucoup de cristaux polaires avec une axe de symétries 3,4, ou 6, comme le ZnO, le AlN, le LiNbO3, etc.
4.2. Matériaux piézoélectriques
Comme la piézoélectricité trouve son origine dans la symétrie de la structure cristalline, un grand nombre de
matériaux possèdent cette propriété. Des exemples sont répertoriés dans le tableau 2. Beaucoup de
matériaux de basse symétrie, comme par exemple des matériaux biologiques, sont piézoélectriques.
Cependant, les matériaux les plus intéressants pour l'application sont ceux qui ont les plus grands
coefficients. La plus grande famille de matériaux piézoélectriques est constituée par les céramiques
piézoélectriques.
Tableau 2 Exemples de matériaux piézoélectriques.
MONOCRISTAUX INORGANIQUES
Isolants, comme le quartz SiO2
Semiconducteurs, comme CdS, GaAs
Matériaux polaire, non-ferroélectrique, comme AlN, ZnO
Monocristaux ferroélectriques, LiNbO3
CERAMIQUES FERROELECTRIQUES (grand effet)
BaTiO3
Pb(Zr,Ti)O3
POLYMERES
Fluorure de polyvinyldiène ( (-CH2-CF2-)n, ou PVDF)
Ses copolymères
Chlorure de polyvinyle (PVC) et d'autres
MATERIAUX BIOLOGIQUES (faible effet)
Cellulose
Kératine (Cheveux, os, soie, laine)
Polymères synthétiques (biologiques)
Polypeptides
Comme les céramiques sont un assemblage aléatoire de grains monocristallins, la symétrie globale de la
céramique est la plus élevée qui soit : c'est à dire que le matériau est macroscopiquement isotrope et que sa
symétrie est sphérique. Cette symétrie ne permet pas la piézoélectricité, même si les grains individuels sont
piézoélectriques ou polaires. Lorsqu'une contrainte est appliquée, chaque grain peut produire une charge,
mais à cause de la distribution aléatoire (i.e équivalente en toute direction) des grains, certains donneront
une charge positive, d'autres une charge négative et l'effet net sera nul.
Ainsi, la silice (céramique à base de SiO2) ou ZnO sous forme céramique ne peuvent montrer d'effets
piézoélectriques, bien que les monocristaux de quartz SiO2 et d'oxyde de zinc ZnO soient piézoélectriques.
Pour ces céramiques, une fois mises en forme, la direction des dipôles dans chaque grain ne peut pas être
MATERIAUX CERAMIQUES – MICROTECHNIQUE
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orientée par l'application d'une contrainte mécanique ou d'un champ électrique. Il n'est donc pas possible
d'obtenir une charge nette avec de tels matériaux. Ils ne peuvent pas être orientés.
Tableau 3 : Sélection de matériaux piézoélectriques et leurs propriétés.
Matériaux
Monocristaux
Quartz, SiO2
LiNbO3
ZnO
Sr2Nb2O7
La2Ti2O7
Bi4Ti3O12
Céramiques
Soft PZT (doux)
Hard PZT (dur)
PbTiO3 modifié
Bi4Ti3O12 modifié
SrBi4Ti4O15
BaTiO3
Polymères
PVDF
Coefficient piézoélectrique
(25°C) (pC/N)
Température de Curie (°C)
d11 = 2.3
d33 = 6.0
d33 = 12.4
d33 = 18
d22 = 16
d33 = 20
573 Transition de phase
1250
d33 ~ 500
d33 ~ 200
d33 ~ 50
d33 = 20
d33 = 20
d33 = 190
~ 300
~ 300
~ 200 - 300
640
530
120
d33 = -15
150 (fusion)
1342
1500
675
La situation est très différente dans les céramiques ferroélectriques. Les ferroélectriques sont des matériaux
polaires, dans lesquels la direction du dipôle peut être orientée par l'application d'un champ électrique
externe. Par définition, la polarisation spontanée d'un matériau ferroélectrique peut être renversée, c'est-àdire qu'elle peut être alignée par un champ électrique externe, de manière à obtenir une polarisation
résultante non nulle dans la direction du champ électrique appliqué. Une fois les domaines alignés, la
céramique est polaire et devient donc piézoélectrique. Les conditions d'orientations typiques sont:
température entre 100°C et 200°C, champs électriques entre 20 et 100 kV/cm.
Il faut remarquer une fois encore que c'est la possibilité de changer la direction de polarisation (la propriété
caractéristique des ferroélectriques) qui permet l'orientation. Une céramique faite d'un matériau non–
centrosymétrique ou/et polaire (i.e mais non ferroélectrique) ne peut être orientée. Pour être utilisable, toutes
les céramiques piézoélectriques doivent être ferroélectriques.
Polarisation globale P
Polarisation globale nulle
E
a)
b)
Figure 24 : Après frittage, les dipôles sont orientés aléatoirement : la polarisation globale du matériau est nulle.
Après application du champ électrique, certains dipôles se réorientent dans la direction du champ créant ainsi
une polarisation nette de la céramique
Titanate de Plomb/Zirconate de Plomb-PZT
La céramique qui a les meilleures propriétés piézoélectriques à température
ambiante est un alliage de deux pérovskites: le titanate de plomb (PbTiO3) et le
zirconate de plomb (PbZrO3): Cette solution solide est connue sous le nom de
PZT. La composition qui donne la plus grande réponse piézoélectrique est le
Pb(Zr0.52Ti0.48)O3 dopé avec quelques autres éléments (quelques pourcents).
La famille des PZT est plus utilisée que n'importe quel autre matériau
piézoélectrique pour les transducteurs, capteurs ou autres applications comme
MATERIAUX CERAMIQUES – MICROTECHNIQUE
16
actionneurs. Les céramiques à base de PZT doivent leur succès aux propriétés suivantes:
•
coefficients piézoélectriques élevés
•
préparation simple
•
orientation facile
•
faible coût
(problème : le plomb. Il faut éviter de mettre ce métal toxique dans les déchets)
Les valeurs typiques sont: d33 = 400 pC/N, d31 = -170 pC/N. Différents dopants sont utilisés pour modifier les
propriétés.
PZT doux
• permittivité diélectrique élevée
• coefficient piézoélectrique élevé
• pertes diélectrique et mécanique élevées
• polarisation et dépolarisation faciles
PZT durs
• permittivité diélectrique plus faible
• coefficient piézoélectrique plus faible
• pertes diélectrique et mécanique plus faibles
• polarisation et dépolarisation difficiles.
4.3. Coefficient de couplage électromécanique
L'effet piézoélectrique convertit l'énergie électrique en énergie mécanique (effet réciproque) et l'énergie
mécanique en énergie électrique (effet direct). Comme toute conversion d'énergie, celle-ci n'est pas idéale,
et une partie de l'énergie est perdue sous forme de chaleur ou autre. Il y a plusieurs manières de décrire
cette conversion d'énergie.
L'une des plus usuelle est de définir le facteur de couplage électromécanique K comme:
K2 = Wconvertie / Wfournie
avec Wconvertie l'énergie mécanique convertie en énergie électrique et Wfournie l'énergie mécanique fournie au
système. Ceci s'applique à l'effet direct. Pour l'effet réciproque, il suffit de permuter "mécanique" et
"électrique" dans l'explication ci-dessus. La valeur de K varie entre 0.1 (quartz) et plus de 0.6 dans certaines
céramiques piézoélectriques. Le facteur de couplage électromécanique est un paramètre important. Il faut
en tenir compte dans les applications où l'efficacité de la conversion énergétique est plus importante que,
par exemple, la sensibilité.
4.3. Applications des matériaux piézoélectriques
Les applications des piézoélectriques se regroupent en trois domaines majeurs.
(i)
Transducteur ultrasonique
(ii)
Capteurs (sensors)
(iii)
Actionneurs (actuators)
Le terme générique de transducteur est souvent utilisé pour désigner un composant transformant une forme
d'énergie en une autre.
4.3.1 Applications à haute fréquence
Les applications à haute fréquence utilisent typiquement des résonateurs, donc des transducteurs
(structures qui fonctionnent avec effet direct et inverse). Il a deux types d’ondes qui sont utilisés : Les ondes
massives (Bulk Acoustic Waves : BAW) et les ondes de surfaces (Surface Acoustic Waves : SAW). Une
onde de surface (voir fig. 25) possède une vitesse du son plus bas que la vitesse dans le massif, et de ce
fait ne peut pas se propager dans le massif. Elle est ainsi piégée dans une couche de surface dont la
profondeur est typiquement de l’ordre de quelques longueurs d’onde. Un type d’onde SAW s’appelle
« Rayleigh wave », par ce que ce fût Lord Rayleigh qui les a postulées pour expliquer les ondes des
tremblements de terre. Les substrats les plus rependus pour les dispo SAW sont le quartz (filtres TV) et le
LiNbO3 et le LiTaO3 (filtres RF pour téléphones mobiles). Les ondes dans les dispo’s BAW sont piégées par
la forme du corps. La structure la plus simple est une plaque piézoélectrique avec polarisation
perpendiculaire au plan. Si on applique des électrodes aux deux surfaces on engendre un changement
MATERIAUX CERAMIQUES – MICROTECHNIQUE
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d’épaisseur de la plaque. Une onde massive avec direction de propagation perpendiculaire au plan est
réfléchie aux interfaces plaque/air des deux cotés. Le premier mode piégé est celui qui fait un changement
de phase de 2π pour l’allé et le retour. Il faut donc que l’épaisseur correspond à la moitié de la longueur
d’onde (notez que le produit de la longueur d’onde λ * la fréquence f est égale à la vitesse du son vs ) :
t p = ! /2 =
vs
2f
La vitesse du son se monte à 5'000 é 10'000 m/s. Pour les fréquences de MHz il faut donc des plaques de
plusieurs 100 µm (imagerie médicale), voir de l’ordre de µm pour des applications au GHz (communication,
fig. 26).
(a)
(b)
Figure 25 : Ondes des surfaces : (a) transducteurs avec électrodes digitées en fonction d’un filtre. Seule une
excitation qui correspond à l’excitation d’une onde SAW avec la périodicité de l’électrode peut se propager (b)
forme de l’onde Rayleigh en profondeur. La longueur d’onde λ est définie par la périodicité des électrodes.
Figure 26 : Onde massive (BAW) piégée dans une plaque (vibration d’épaisseur d’une plaque). (a) Le principe ;
(b) Structure schématique d’une structure micro-usinée avec film mince de p.ex. AlN pour filtres RF.
0.15
0.1
G Conductance
30 µm square
B Susceptance
Q=460
2
Admittance [S]
k =5.9%
0.05
0
-0.05
7000 7200 7400 7600 7800 8000 8200 8400 8600
Frequency [MHz]
Figure 27 : Admittance d’un résonateur BAW de film mince AlN à 8 GHz (R. Lanz et al., IEEE TUFFC 2005). Ces
résonateurs sont très petits (30x30 µm). Notez la susceptance négative entre résonance et antirésonance (point
où l’admittance est quasiment zéro). Le résonateur se comporte ici comme une inductance !
MATERIAUX CERAMIQUES – MICROTECHNIQUE
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On utilise des piézoélectriques pour des applications à haute fréquence (ultrasonique), typiquement entre
100 kHz et 3 GHz:
• Imagerie ultrasonique (1-50 MHz) / Matériaux : PZT
• Oscillateur pour contrôler une fréquence, ou le temps / Matériau : quartz
• Filtres RF (TV, téléphonie mobile, GPS, etc., entre 100 MHz et 2.5 GHz) Matériaux : quartz, films minces
de ZnO sur verre de quartz, LiNbO3, LiTaO3
• Capteurs en résonance (p.ex. quartz microbalance, quelque MHz)
Imagerie ultrasonique
Les matériaux piézoélectriques sont des émetteurs (effet réciproque) et des récepteurs (effet direct)
d'énergie acoustique. Si le transducteur (type BAW, fig. 26) est en contact avec un solide, comme par
exemple une pièce de métal, les ondes ultrasoniques vont être transmises dans le solide et vont se réfléchir
sur ses surfaces et interfaces. Les ondes réfléchies sont reçues par le transducteur et converties en signal
électrique. Ce signal électrique peut ensuite être transformé en signal visuel, comme par exemple une image
TV. L'amplitude et la phase de l'onde réfléchie dépendent des propriétés acoustiques du matériau dans
lequel l'onde se propage. S’il y a des inhomogénéités dans le solide (fissures, secondes phases) elles vont
modifier le signal réfléchi. Pour détecter de petits détails à l'intérieur du matériau, il est nécessaire d'utiliser
une longueur d'onde faible, i.e dans l'ultrason. Les fréquences de test typiques sont de l’ordre de 1 MHz ou
plus. Ceci est nécessaire pour détecter des détails inférieurs au millimètre. L'imagerie ultrasonique est
largement utilisée dans l'industrie pour l'analyse non-destructive des matériaux. On l'utilise aussi beaucoup
dans le domaine médical, par exemple pour l'observation du fœtus.
Autres applications à haute fréquence
• Contrôle de la fréquence
• Filtres et applications apparentées. (On utilise surtout le quartz, à cause de la stabilité de ses propriétés).
• Capteurs (utilisant la sensibilité de la fréquence de résonance par rapport à la charge externe appliquée au
résonateur). Exemple: mesurer la concentration d'un composant toxique dans une solution, dans les cas où
la viscosité varie avec la concentration en composant toxique.
4.3.2 Capteurs
L'effet piézoélectrique direct convertit des signaux mécaniques en signaux électriques faciles à analyser. Les
piézoélectriques sont ainsi des capteurs presque idéaux pour mesurer des:
• Variations de pressions (on ne peut pas mesurer des pressions ou forces constantes, sauf avec des
capteurs en résonance mentionné en 5.1)
• Variations de forces
• Vibrations (p. ex, pour surveiller le bon fonctionnement des avions)
• Accélérations
Les applications typiques sont:
• Capteurs de pressions dans les moteurs à combustion interne.
• Mesure des vibrations dans diverses applications aérospatiales.
• Contrôle de mise en œuvre (par exemple, contrôle de la pression dans les machines de moulage par
injection)
• Applications biomédicales.
• Installations d'écoute sous-marine (sonars)
4.3.3 Actionneurs (actuators)
Les actionneurs piézoélectriques produisent un déplacement (mouvement mécanique) en utilisant l'effet
piézoélectrique réciproque. Les matériaux piézoélectriques sont un choix naturel pour les actionneurs de
précision:
• ils utilisent la déformation induite par un champ électrique, facilement contrôlable.
-4
-3
6
• les déformations réalisables sont de l'ordre de 10 - 10 pour des champs de l'ordre de 10 V/m
• pour des échantillons dont les dimensions sont de l'ordre du cm, les déplacements sont de l'ordre du µm.
• la précision atteignable peut être de quelques picomètres.
• la vitesse de déplacement est élevée (1-10 µ/s),
• la puissance requise est faible
• les forces générées sont relativement grandes
• il est possible de miniaturiser.
MATERIAUX CERAMIQUES – MICROTECHNIQUE
19
Les grands déplacements ΔL nécessitent des voltages élevés V (ΔL = d33* V), mais ce désavantage pour les
matériaux piézoélectriques est supprimé si l'on utilise une configuration multicouche. En plaçant N éléments
fins mécaniquement en série, et électriquement en parallèle, on peut obtenir des déplacements bien plus
grands avec un même voltage. En effet, les déplacements des N éléments individuels s'ajoutent.
Pour un monobloc de longueur Ltot on a :
!Ltot
V
= d 33
Ltot
Ltot
Pour un multicouche composé de N couches d’épaisseur Li:
Le champ électrique est le même dans chaque couche :
E
Ei = E = V/Li
La déformation est la somme des déformations de chaque couche :
!Ltot
!Li
V
= N
= N d 33
Ltot
Li
Ltot
Li
Ltot
Figure 28 Actionneur multicouche. Les
éléments en PZT sont mécaniquement
en série, et électriquement en parallèle
Et donc :
ΔL = N d33* V
Applications des actionneurs piézoélectriques:
Il y a quatre groupes principaux d'applications pour les actionneurs piézoélectriques:
(i) Miroirs déformables : Les actionneurs sont utilisés pour ajuster la phase des ondes lumineuses et pour
éliminer les effets des turbulences atmosphériques, des contraintes thermiques ou des forces de
gravitations. On les rencontre dans les systèmes optiques de haute précision, comme
• les grands télescopes terrestres et spatiaux
• les lasers de haute énergie
• les systèmes de communication laser
• les dilatomètres interférométriques de haute sensibilité.
(ii) Micro-positionneurs : Des actionneurs de précisions sont souvent nécessaires pour positionner des
pièces mécaniques avec une grande précision et de manière reproductible, au niveau du micron ou même
au-delà. On les rencontre dans les applications suivantes:
• microscopie optique et champ proche (AFM et STM)
• micropositionnement pour robots
• positionnement de têtes de lecture magnétique ou optique.
(iii) Impacteurs et soupapes Actionneurs qui développe beaucoup de force en peu de temps :
• interrupteurs
• imprimantes à jet d'encre (pulse qui monte la pression en une microseconde)
• soupapes pour injection de fuel (Moteur Diesel)
(iv) Moteurs ultrasoniques (piézoélectriques).
Dans les moteurs ultrasoniques, un champ alternatif est appliqué à un actionneur avec une fréquence égale
à la fréquence de résonance de l'actionneur. De cette manière, des déformations importantes peuvent être
générées avec de faibles champs. Comme les actionneurs opèrent à leur fréquence de résonance, les
propriétés les plus importantes sont une qualité mécanique élevée et un haut coefficient de couplage
mécanique. Il y a plusieurs types de moteurs ultrasoniques. Les plus largement utilisés sont ceux qui
utilisent des ondes acoustiques de surface pour déplacer un rotor se trouvant en contact avec la surface du
transducteur. Les ondes acoustiques de surface sont générées par la superposition de deux ondes
stationnaires d'amplitude égale mais déphasées de 90° dans le temps et dans l'espace.
MATERIAUX CERAMIQUES – MICROTECHNIQUE
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Mouvement
elliptique à la
surface
Figure 28: Principe de fonctionnement du moteur piézoélectrique rotatif
Les moteurs ultrasoniques sont intéressants car ils sont petits et légers, pourvus de mécanisme
autobloquant. Ils ont un couple relativement important à basse vitesse et peuvent être utilisés dans les deux
sens. Par contre, il est difficile de maintenir la force de friction entre la surface et l'objet en mouvement et
une alimentation à haute fréquence est nécessaire. Une application typique est l'unité autofocus d'un
appareil photo.
Références:
1.A.J. Moulson and J.M. Herbert: "Electroceramics," Chapman and Hall, London, 1990.
2.J.M. Herbert: "Ferroelectric Transducers and Sensors," Gordon and Breach, New York, 1982
3. K. Uchino , Ferroelectric Devices, Marcel Dekker, 2000
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