PLAN XVII contre PLAN SCHLIEFFEN
Des Frontières à la Marne
La Théorie
Chaque camp part en guerre avec un plan de bataille bien
préparé, dès le temps de paix, dont le but est de vaincre le plus
vite possible, par un conflit rapide et bien mené.
Celui des Allemands date de 1905, il constitue la dernière
évolution du Plan Schlieffen, conçu vers 1890. Ce plan
consiste à vaincre les armées françaises en moins de six
semaines, avant de se retourner contre la Russie : sept armées
allemandes sont impliquées à l’Ouest, deux en Alsace-Lorraine
et cinq face au Luxembourg et la Belgique, pays neutres qu’il
faudra envahir et traverser en moins d’une semaine… Cette
masse de cinq armées aura pour but d’entrer en France par le
Nord et les Ardennes, avec un seul objectif : Paris ! Ensuite, le
gros des armées rejoindra la région de Pologne pour combattre
l’armée Russe.
Côté Français, le Plan XVII date de 1913. Le nouveau chef
d’état-major général, Joseph Joffre, l’a imposé non sans
difficultés contre celui du général Michel, son prédécesseur, qui
souhaitait intervenir plus au Nord, en liaison avec l’armée
Belge. Estimant que les Allemands attaqueraient dans les
Ardennes, Joffre veut les surprendre par une attaque encore plus
rapide, de part et d’autre de la place forte de Metz. Il se réserve
une armée pour déplacer son dispositif vers la Belgique en cas
de coup dur…
Pour ces deux plans, les états-majors ont besoin de quelques
délais pour mobiliser les réservistes : 19 jours exactement pour
l’armée française, ce qui fixe le début de l’offensive en Lorraine
à la date du 21 août 1914 (mobilisation + 19 jours). Entre le 3 et
le 21 août, les opérations sont donc limitées, sauf en Haute-
Alsace où la région de Mulhouse est libérée.
La Pratique
Le 21 août, l’armée française attaque en Lorraine et dans le sud
de la Belgique. Le contact est immédiat et sanglant, depuis
Charleroi au Nord-Ouest jusqu’à Sarrebourg au Sud-Est. Le 22
août est la journée noirede l’armée française : près de 27.000
soldats aux pantalons garance et képi rouge sont tués. Face aux
700.000 allemands présents en Belgique, les 350.000 franco-
britanniques de l’aile droite ne doivent leur salut que dans le
repli. L’Allemand von Moltke a pris le Français Joffre à contre-
pied, la route de Paris s’ouvre à lui ! Le ministre de la guerre
Messimy est remplacé.
Du 22 au 30 août, l’avancée allemande semble inexorable,
malgré la brillante résistance de la Ve Armée du général
Lanrezac. Mais le 30, l’état-major allemand perd de vue
l’objectif de Paris. Il cherche à encercler et détruite toute
l’armée française dans la vallée de la Marne entre Meaux et
l’Argonne. La capitale est sauvée, mais c’est désormais l’heure
du grand face-à-face : deux armées de près de 1,5 million
d’hommes chacune vont se rencontrer dans une bataille rangée
sur plus de 200 kilomètres.
Epuisées par trois semaines de marches et de combats, les deux
armées puisent dans des ressources inexpliquées : les soldats
Allemands espèrent dans la victoire et la troupe française qui se
bat à proximité immédiate du cœur du pays, est galvanisée par
le mot d’ordre du général Joffre : « L’offensive sera prise par
les armées le 6 septembre, dès le matin. »
A l’aube du 6 septembre 1914, alors que les armées allemandes
resserrent leur étreinte sur le Pays de Brie et la Champagne, les
soldats français font demi-tour et repartent à l’assaut. La
Bataille de la Marne débute…
Lieutenant-colonel Philippe GUYOT
Conservateur du musée de l’Artillerie
21-24 août 1914
CHARLEROI
L’aile gauche
franco-britannique
est débordée et se
replie pour éviter
l’encerclement.
25 août 1914
FRANCE
Joffre signe l’ordre
de repli général ; sa
limite Sud est fixée
sur l’Aisne, puis
l’Aube.
29 août 1914
GUISE
L’aile droite
française freine les
Allemands. Les
Anglais sont sauvés,
le repli continue.
30 août 1914
PARIS
Les Allemands
cherchent à
encercler les
armées françaises ;
Paris est sauvée !
3-4 septembre 1914
PARIS
Gallieni prépare
une nouvelle armée
contre le flanc
Ouest des
Allemands
Symbole du soldat Allemand,
son casque à pointe
Le 23 octobre 1842, Frédéric Guillaume IV de Prusse fait
adopter par tous les états allemands (Wurtemberg, Bade,
Saxe, Oldenburg, etc…), une nouvelle coiffure militaire.
Ce couvre-chef, fait de cuir bouilli, porte en son sommet
une pointe, dont le rôle premier est de dévier les coups de
sabre donnés par l’ennemi. Un jonc en laiton, placé à
l’arrière, va de la pointe à la nuquière pour remplir le
même office de glissement de la lame.
La bombe du casque est en acier pour les cuirassiers, ces
derniers étant les combattants les plus exposés aux coups
lors des charges lancées à cheval.
La pointe du casque a joué son rôle protecteur jusqu’aux
dernières années du XIXesiècle. Sa présence deviendra une
tradition purement décorative lors de l’adoption du modèle
1895, qui coiffera le soldat allemand à l’entrée en guerre en
1914. Le casque à pointe sera abandonné en 1915 au profit
du casque d’acier.
Les casques des artilleurs étaient ornés, non pas d’une
pointe, mais d’une boule. Son utilité visait à éviter que les
servantsdes pièces d’artillerie ne se blessent entre eux
lorsqu’ils procédaient aux opérations de mise en œuvre de
leurs canons Adjudant –chef Thierry Simon
Expert armement-munitions du musée de l’artillerie
Symbole du soldat Français,
son pantalon rouge
Le 26 juillet 1829, le pantalon rouge fait son
apparition dans l’infanterie française par décret
royal. Fortement influencé par la pression des
producteurs de garance (Rubia-Tinctorum).du
département du Vaucluse, le ministère adopte cette
couleur issue d’une plante cultivée pour sa racine
qui fournit la teinture rouge, l’alizarine.
Afin de remplacer le pantalon blanc jugé trop
salissant, cette culotte rouge fait son apparition le 14
juin 1830 à Sidi-Ferruch lors du débarquement en
Algérie. Puis les cuirassiers, les carabiniers, le train
des équipages, les généraux…..adoptent cette
couleur. Cela permet de se repérer sur le champ de
bataille parmi la fumée épaisse des poudres. Chaque
belligérant adopte tacitement une couleur dominante
afin de différencier les troupes (les Anglais portent
une veste rouge, les Prussiens, bleue foncée…).
On invoque aussi que le sang est moins visible que
sur le blanc, de quoi rassurer le soldat blessé et
éviter de démoraliser les autres…. Puis c’est la
guerre de 1870-1871 et malgré de nombreuses
recherches sur le camouflage, le pantalon garance
s’impose comme étant le symbole du soldat français.
Alors que l’État-major des armées travaille depuis
des années sur une tenue de couleur Réséda
(mélange de marron et de gris clair), la pression
politique et journalistique est telle que rien n’y fait.
Les projets d’uniformes moins voyants sont rejetés
par les députés.
Mais le plus incroyable réside dans le fait que la
production française de garance est arrêtée depuis la
fin du XIXème siècle, jugée non rentable ! Depuis
1868, la couleur rouge est obtenue par un colorant
chimique… préparé par une firme allemande qui
approvisionne les teinturiers !!!
Aussi, le 2 août 1914, les fantassins français partent
au combat comme des coquelicots au milieu des
champs,vêtus de culottes de couleur rouge made in
Allemagne. Ces cibles faciles à repérer vont subir
des pertes cruelles, évaluées à plus de 310.000 morts
entre le 6 août et le 13 septembre 1914.
Major Richard Maisonnave
Adjoint du Conservateur du musée de l’Artillerie
Régiments d’aujourd’hui dans la tourmente d’hier
1er Régiment d’artillerie de campagne
Parti de sa garnison de Bourges le 7 août 1914, le 1er RA de
campagne, sous les ordres du colonel Lequime, débarque en
gare de Charmes en Moselle, le 9. Il forme l’artillerie de la
16eDivision d’infanterie (8eCorps) et entre en Moselle
occupée dans la nuit du 11 au 12. Au contact de l’ennemi
deux jours plus tard, dans la région de Domèvre, il participe
à l’avancée française jusqu’à Sarrebourg qui est libérée le
18. Mais face aux canons allemands de 21 cm, la portée des
canons de 75 ne permet pas de riposter et Sarrebourg est
perdue. La contre-attaque allemande subit elle-même un
coup d’arrêt lors de la Bataille de la trouée de Charmes, où
le succès initial de l’infanterie est renforcé par un usage
concentré de l’artillerie que le général de Castelnau emploie
de façon groupée. Le front du 1er RAC se stabilise sur la
Mortagne face à Saint-Pierremont, le 25 août. L’étendard du
1er RA garde la mémoire de ces combats avec l’inscription
LORRAINE 1914.
35eRAP stationné à Tarbes
1er RA stationné à Bourogne
(Belfort)
35eRégiment d’artillerie de campagne
Parti de sa garnison de Vannes le 7 août 1914, le 35eRA de
campagne, sous les ordres du colonel Ely, débarque à
Grandpré et se regroupe à Sedan. Il forme l’artillerie de la
22eDivision d’infanterie (11eCorps) et franchit la frontière
belge. Lors de la Bataille de Charleroi, le 22 août, il
participe à la prise du village de Maissin et gagne plusieurs
duels contre l’artillerie allemande. Les canons de 75 arrêtent
ensuite l’avancée de l’ennemi sur la Meuse du 25 au 27 août.
Puis, sous les ordres du général Foch, son ancien chef de
corps, le 35eRAC se bat lors de la Bataille de la Marne, à
Lenharrée où les combats finissent au corps à corps au milieu
des pièces et à Gourgançon le 9. Par la suite, le régiment
participe à la Course à la mer et notamment le 29 septembre
à la Bataille d’Albert, dans la Somme, où il combattra
jusqu’en août 1915. L’étendard du 35eRAP garde la
mémoire de ces combats avec l’inscription SAINT-GOND
1914.
Casque à pointe Badois
modèle 1895
Casque d’artilleur Prussien
modèle 1895