MUSÉE DE L’ARTILLERIE Musée de l’Artillerie Quartier Bonaparte Avenue de la Grande Armée 83300 Draguignan Ouvert du dimanche au mercredi inclus 9h-12h et 13h30-17h30 Entrée gratuite Petit journal de l’exposition La M A R N E, Regards croisés Exposition du 17 mai au 16 novembre 2014 Association des Amis du Musée de l’Artillerie de Draguignan BP 400 83007 Draguignan Cedex Supplément au bulletin n°52 Directeur de publication : René Gangloff ISSN : 1269-357 X Rédacteur en chef : Jean-Marie Parahy Rédacteur en chef délégué : Richard MAISONNAVE Comité de rédaction : Ph. Guyot, R. Maisonnave Th. Simon, G Léocard, L. Copeau D. Baert, J.F. Botella, A. Rappolt EDITORIAL L’Europe en 1914, Empires et Alliances Se souvenir, étudier, comprendre ! Deux coalitions diplomatiques, politiques et militaires se font face : sur les deux extrémités de l’Europe, la Triple entente qui réunit la Russie, la Grande-Bretagne et la France ; au centre du continent, la Triple alliance composée de l’Allemagne, l’Autriche-Hongrie et l’Italie. En mars 2008, la France a enterré son dernier Poilu, Lazare Ponticelli, un gamin italien engagé volontaire à 16 ans en août 1914 et mort à plus de 110 ans, doyen des Français et dernier des Poilus ! Etranger et engagé, il était, comme par un clin d’œil du hasard, l’ultime représentant de l’immense armée de soldats de la Grande Guerre, personnels de carrière, engagés, mais surtout appelés ou réservistes rappelés sous les drapeaux. Ses obsèques, en la Cathédrale Saint-Louis des Invalides, l’église des soldats, ont été suivies d’un hommage national aux Poilus, un hommage au-delà des grades, des classes et des couleurs de peau, parce que là-bas au front, c’est ainsi qu’ils avaient vécu dans la fraternité des armes, face au hasard imparable de la mort au combat. Cet hommage était indispensable pour signifier le respectueux regard que la Nation porte sur ceux qui la défendent et notamment les combattants des cinquante-deux mois de la Première Guerre Mondiale. Six ans après les obsèques de Lazare Ponticelli, l’obligation de ce respectueux regard reste intacte et se renforce même à l’occasion du centenaire de la Grande Guerre dont notre génération à la charge. Il n’y a plus de témoin direct. Certes ! Mais est-ce une raison pour oublier et est-ce une raison pour ne pas continuer à tirer des leçons de cette immense tuerie ? En effet, que nous soyons simples citoyens, que nous soyons militaires ou que nous soyons historiens, la Grande Guerre est, pour nous tous, un sujet édifiant. Se rappeler est un devoir, il porte même un nom aujourd’hui, c’est celui de la mémoire ! La Mémoire est l’affaire de tous, grands ou petits, savants ou non. Elle est une combinaison des souvenirs, donc naturellement elle est une question de sensibilité qu’il faut savoir assumer, afin de ne pas céder à la colère rétrospective et au ressentiment. La mémoire est notre héritage commun, notre fondement actuel et la direction pour notre avenir. Le maréchal Foch, un des grands généraux de la Bataille de la Marne écrivait : Un peuple sans mémoire est un peuple sans avenir. L’étude tactique et le culte des anciens sont les domaines de prédilection des militaires pour ce centenaire ; l’étude tactique parce qu’elle permet de continuer, aujourd’hui encore, de tirer les leçons de ce conflit exceptionnel ; le culte des anciens, aussi appelé respect de nos aînés, parce que ce que les Poilus méritent l’hommage des soldats d’aujourd’hui, tant ils ont réalisé des efforts, des sacrifices et des exploits comme ils en existent peu dans notre passé militaire. L’Histoire peut paraître le domaine de spécialistes. Ce n’est pas faux, mais je souhaite nuancer : nous pouvons tous être des historiens. Pour cela il faut trois ingrédients : des faits, des analyses, de la mesure. Les faits sont l’ensemble des actions qui se sont produites autrefois ; notre génération n’agit pas sur les faits puisqu’ils sont finis, elle les constate. L’analyse est précisément l’ensemble de nos constatations ; c’est notre capacité à ordonner les faits (ordre chronologique), à les relier (ordre de causes à effets), à les comprendre (ordre logique). C’est vrai qu’il faut pour cela quelques connaissances en histoire, mais ce sujet est tellement passionnant à apprendre ! La mesure est notre vertu commune, mais elle est surtout indispensable à l’Histoire. Il faut bien se garder de juger l’histoire trop vite, d’appliquer nos passions actuelles pour évaluer les faits anciens, de refuser certains faits au nom de tabous actuels… L’histoire est une belle fleur qui craint le vent violent ! Lieutenant-colonel Philippe GUYOT Conservateur du musée de l'Artillerie Dirigée par le Tsar Nicolas II, la Sainte Russie dispose d’une armée nombreuse, mais encore mal équipée, qui essaye de se moderniser après la défaite de 1905 contre le Japon. L’Empire britannique, avec ses vastes possessions coloniales, veut garder sa prédominance sur l’Europe du Nord et se méfie de l’industrie de guerre allemande. Il s’est porté garant de la neutralité Belge, proclamée en 1839. La République française, touchée dans son orgueil depuis la défaite de 1871, garde les yeux et les cœurs tournés vers l’Alsace et la Lorraine, provinces perdues. Mais mise en confiance par la composition d’un nouvel empire colonial depuis 1881, elle espère prendre sa Revanche. Raymond Poincaré, France, Président de la république L’Empire allemand, doté d’une industrie florissante, aligne une formidable armée ainsi qu’une marine modernisée qui concurrence celle des britanniques. L’Empire AustroHongrois s’étend face aux Turcs, mais fragilisé par la question des nationalités, peine à s’imposer face à la Serbie, alliée des Russes. Le Royaume d’Italie, unifié depuis 1861, reste faible et désireux d’éviter la guerre. Son entrée dans l’Alliance n’a été motivée que par sa volonté d’expansion en Tunisie, où les Français l’ont devancé. Nicolas Alexandrovitch Romanov, Tsar de toutes les Russies Bien que la plupart des souverains dirigeants soit cousins par la reine Victoria leur grand’mère, les tensions internationales sont fortes. Les historiens estiment que dès 1912, il ne manque qu’une étincelle, un prétexte, pour que l’Europe s’embrase. Major Richard MAISONNAVE Adjoint du Conservateur du musée de l’Artillerie Wilhelm II von Hohenzollern, Empereur d’Allemagne et Roi de Prusse GRANDEBRETAGNE Moscou Londres RUSSIE BELGIQUE Franz-Joseph 1er de HabsbourgLorraine, Empereur d’Autriche Paris FRANCE SUISSE Albert 1er de Saxe-Cobourg, Roi des Belges 1871 VERSAILLES L’Empire Allemand est proclamé. L’Alsace et la Lorraine sont annexées. 1878 BERLIN Le Congrès de Berlin décide du partage des Balkans. 1 1905 PORT ARTHUR Battue par les Japonais, la Russie est fragilisée. Agitation bolchévique. 1905-1911 MAROC A Tanger (1905), puis Agadir (1911), l’Allemagne tente de gêner l’avancée française au Maroc. 1912-1913 BALKANS La Turquie est sévèrement vaincue, mais les pays balkaniques se battent entre eux. LA GUERRE ! La marche à la guerre En juin 1914, l’Archiduc François-Ferdinand d’Autriche, chef de l’armée et héritier du trône austro-hongrois, est en Bosnie où il inspecte les manœuvres d’été d’une partie de son armée. Le 28 juin, il est assassiné devant l’hôpital de Sarajevo. Son épouse meurt avec lui, sous les balles de Gavrilo Princip, un étudiant Serbe. Tant par esprit de famille que par calcul politique, l’Autriche-Hongrie adresse alors un ultimatum d’un mois à la Serbie. A son échéance, le 28 juillet, la guerre est déclarée. Les alliances se mettent alors en action. La Russie protège la Serbie. La France alliée de la Russie, fait de même. L’Allemagne, alliée de l’Autriche-Hongrie, s’en mêle, tout en cherchant à gagner la neutralité de l’Angleterre… Le 1er août, l’Empire d’Allemagne mobilise son armée et déclare la guerre à la Russie. Le lendemain, la France mobilise à son tour son armée pour éviter une attaque surprise, comme celle qui guette la Belgique, pourtant neutre sous la garantie de la Prusse depuis 1839 ! Bien lui en prend, puisque le 3 août à 16h45, le Baron de Schoen, ambassadeur d’Allemagne à Paris, dépose une déclaration de guerre en bonne et due forme. Le 3 août dans la soirée, les avant-gardes allemandes entrent en Belgique. Elles visent la forteresse de Liège et la vallée de la Meuse autour de Namur. Cette agression emporte la décision à Londres : le 5 août, la Grande-Bretagne est fidèle à l’Entente et déclare la guerre à l’Allemagne. L’Europe vient de s’embraser… pour plus de quatre années ! Major Richard MAISONNAVE Adjoint du Conservateur du musée de l’Artillerie L’Italie, alliée inattendue ! Affiche proclamant la mobilisation générale des armées françaises Régiments d’aujourd’hui dans la tourmente d’hier e 40 Régiment d’artillerie de campagne Parti de sa garnison de Saint-Mihiel le 31 juillet 1914, le 40e RA de campagne tient une position de couverture à Flirey, avant de former l’artillerie de la 40e Division d’infanterie (6e Corps). Entrant en Moselle occupée le 21 août, il est au contact de l’ennemi à Joppecourt près de Longuyon où il subit les tirs de l’artillerie lourde allemande. Engagé dans le mouvement de repli, il ralentit l’avancée ennemie à Montfaucon d’Argonne, le 2 septembre, puis à Courcelles-sur-Aire qu’il défend âprement pendant toute la Bataille de la Marne, avant de poursuivre l’ennemi jusqu’aux Jumelles d’Ornes, à l’ouest de Verdun. Mais très vite, une nouvelle offensive menace cette place forte par le Sud et la 40e DI doit se battre dos à la rivière dans la région de Lacroix-sur-Meuse près de Saint-Mihiel. C’est là que le régiment passe le premier hiver de guerre. L’étendard du 40e RA garde la mémoire de ces combats avec l’inscription LA MARNE 1914. Héritière d’un passé romain plus que millénaire, l’Italie a vécu divisée en nombreux royaumes, principautés, duchés et républiques pendant toute l’époque moderne. A compter de 1848, un mouvement tant politique que populaire, souvent contrarié par l’Autriche-Hongrie, tente de réaliser l’unité de l’Italie. Après la belle campagne de 1859 et les victoires de Magenta et Solferino, le royaume d’Italie est recréé. Sa capitale est fixée à Florence, puis Rome après la victoire sur le Pape en 1870. Au début des années 1880, se heurtant aux Britanniques et aux Français, l’Italie peine à se doter d’un empire colonial et ne parvient que très tardivement à imposer sa tutelle sur la région de la Tripolitaine, actuellement Lybie. Ces difficultés expliquent son alliance presque contre-nature avec l’Allemagne et l’Autriche-Hongrie, son ancien oppresseur. 54e RA stationné à Hyères Le caractère artificiel de cette alliance est mis en exergue dès les premiers temps de la crise du début de l’été 1914, Face à la guerre, l’Italie quitte la Triple Alliance et choisit la neutralité… avant de rejoindre le camp des Alliés en mars 1915 ! Vu du côté français, ce choix politique des Italiens a été la vraie bonne surprise du début de la guerre. Il évite d’avoir à conduire une campagne sur les Alpes et en Tunisie, avec tout le poids de deux autres fronts. Il inaugure aussi la longue liste des entrées en guerre dans le camp Franco-Britannique : la Roumanie, le Portugal, le Brésil, les Etats-Unis, la Grèce… 40e RA stationné à Suippes 54e Régiment d’artillerie tillerie de campagne Parti de sa garnison de Lyon dès le 31 juillet 1914, le 54 e RA de campagne, sous les ordres du chef d’escadron Pacand, débarque en gare de Thaon-les-Vosges le 2 août. Il forme l’artillerie de la 6e Division de cavalerie (21e Corps).en couverture de Baccarat. Combattant sur la ligne de crêtes des Vosges, ses canons de 75mm font merveille dans cette région où l’artillerie lourde progresse difficilement. Les actions sont très fractionnées et se résument souvent à des duels entre batteries comme le 20 août à la Bruche ou le 28 au sud de ce village où la 9e Batterie doit charger l’ennemi pour se dégager. Engagé dans les dernières opérations de la Course à la mer, le régiment tient le front à compter du 25 septembre vers Herleville-sur-Framerville, entre Chaulnes et la Somme. Ses trois groupes se signaleront notamment le 29 septembre à Dompierre et les 3 et 4 décembre, lors de l’attaque du Bois de Fay, avant de tenir le secteur jusqu’à l’été 1915. 28 juin 1914 SARAJEVO Assassinat de l’Archiduc FrançoisFerdinand, héritier d’Autriche-Hongrie 28 juillet 1914 SERBIE Déclaration de la guerre par l’Autriche-Hongrie à la Serbie. 1er août 1914 RUSSIE Déclaration de la guerre par l’Allemagne à la Russie. Lieutenant-colonel Philippe GUYOT Conservateur du musée de l’Artillerie Jules Peugeot, premier soldat Mort Pour La France, en 1914 Un conflit qui éclate entraine inexorablement son cortège de malheurs et de misères. Hommes et bêtes meurent en masse et l’histoire nous désigne le caporal Jules André Peugeot comme étant le premier soldat français mort pour la Patrie, le dimanche 2 Août 1914, jour de la mobilisation générale. Originaire du Doubs, Jules Peugeot naît le 11 juin 1893 à Etupes. Jeune employé dans l’horlogerie, il convoite un poste d’instituteur qu’il obtient en 1912 à l’école du Pissou, à quelques kilomètres du Saut du Doubs. Il est incorporé en 1913 à la 6ème Compagnie du 2ème Bataillon du 44ème Régiment d’Infanterie et promu caporal, le 1er avril 1914. Très vite à cause des tensions qui règnent avec le voisin allemand, il se retrouve chef d’un poste avancé près de Joncherey (90). Accompagné de quatre hommes, le caporal implante son dispositif et place une sentinelle en direction de Faverois, environ 15 kms au sud-est de Belfort. Le 2 août vers 10 heures du matin, une patrouille allemande est repérée par une jeune fille du village proche. Paniquée, elle alerte la sentinelle qui n’a que le temps d’appeler « Aux Armes ! » Un des cavaliers allemands, le sous-lieutenant Albert Mayer (1892-1914) du 5ème Régiment de chasseurs à cheval.(1) galope seul à l’attaque du poste français en faisant feu de son revolver. Le caporal Peugeot riposte, tire sur l’assaillant et le blesse mortellement. Durant le bref échange de coups de feu, le caporal est mortellement touché à son tour. Le reste de la patrouille allemande fuit. Des renforts français alertés par les tirs arrivent et constatent la mort des deux soldats ennemis. L’officier allemand est inhumé au cimetière de Joncherey. Plus tard il sera transféré en Allemagne à Illfurth. La dépouille de Jules Peugeot est inhumée à Etupes. Le Maire de l’époque, monsieur Charbonnier récupère le képi modèle 1884 du Caporal à Joncherey, qui est toujours visible de nos jours protégé dans une vitrine. Cette coiffure du premier des soldats tués, devient aussi la première relique de cette Grande Guerre qui ne sera déclarée par l’Allemagne à la France que dans trente heures, le 3 août 1914 à 18 heures 45. Le caporal Peugeot avait alors juste 21 ans (2). (1) Jäger Regiment zu Pferde N° 5 (2) Le Caporal PEUGEOT est cité à l’ordre du 44ème R.I. en 1915, reçoit la croix de guerre avec étoile de bronze et en 1920, le Président de la République Paul DESCHANEL lui confère la médaille militaire à titre posthume. Major MAISONNAVE Adjoint du Conservateur du musée de l’Artillerie 2 août 1914 BELGIQUE Ultimatum Allemand contre la Belgique, pays neutre. Invasion du 2 Luxembourg. 3 août 1914 FRANCE A 18h00, déclaration de la guerre par l’Allemagne à la France. Le képi de Jules Peugeot Premier soldat tué au combat Cette coiffure exceptionnelle est aimablement prêtée au Musée de l’artillerie de Draguignan, par la municipalité de Joncherey pour une durée limitée du 17 au 31 mai 2014. Elle sera ensuite visible à l’exposition organisée à l’hôtel de ville de Joncherey pendant tout l’été 2014. (Renseignements : Mairie de Joncherey 03.84.36.01.46) LA GUERRE ! Les exactions allemandes de 1914, entre mythe et réalité… Dès le début de l’invasion de la Belgique, les troupes du Kaiser perpétrèrent de nombreuses exactions sur les populations civiles. Au total, 6 427 civils furent tués, majoritairement en Belgique et dans le Nord-Est de la France, entre août et octobre 1914. Villes et villages vont être détruits et pillés, de nombreux viols commis, les hommes, femmes et/ou enfants tués ou déportés sans motif, ni jugement. Ces exactions, aux raisons multiples, semblent n’avoir été que très rarement planifiées. Réactions spontanées des troupes allemandes, elles étaient liées aux combats (65% des incidents) ou à la panique qui en résultait (22% des pertes civiles). Nous sommes hélas bien loin de l’image d’une armée allemande disciplinée et toute puissante. Certes, la peur, à l’instar de l’ivresse, a mené à certaines méprises. Mais surtout la guerre de 1870-71 avait vu pour le soldat allemand la création d’une nouvelle menace : le franc-tireur caché parmi la population. De ce personnage devenu un véritable mythe, découle une loi martiale allemande tout particulièrement sévère qui permet la condamnation sur le champ et sans procès, de toute personne considérée comme Franc-tireur. Le suspect est immédiatement abattu sans procès. Face à tant de facilités dans la procédure, cette loi martiale devient rapidement un prétexte utilisé pour justifier toutes les représailles. De plus, les témoins rapportent que les Allemands utilisaient les populations civiles pour se protéger pendant les attaques, comme boucliers humains, sans que l’on sache s’il s’agissait de mesures punitives ou d’une véritable tactique. L’armée allemande souhaitait créer un environnement de terreur, répondant à trois objectifs : la sécurité, la punition et la dissuasion. Cette violence, liée au plan de guerre-éclair de Schlieffen, devait permettre d’accélérer le rythme de la conquête allemande. La résistance inattendue des Belges va donc à contrario encourager la rancœur des conquérants envers les civils. Avec le recul d’un siècle, il est certain que de réelles exactions eurent lieu dès août 1914, mais leur dénonciation fit l’objet d’une propagande très forte dans les deux camps : la barbarie des massacres allemands vues par les gazettes de Paris le disputait aux attaques sournoises des francs-tireurs dans les Zeitung de Berlin. Parfois simples légendes, comme celle des enfants du Nord aux bras coupés par les Bavarois, leur exagération ne permet que difficilement de déceler le vrai du faux. De plus, il ne faut pas généraliser ces actes à l’ensemble des troupes allemandes ou d’autres nations : une bonne part des soldats allemands, imperméables au mythe des francs-tireurs, ne se laissèrent pas entraîner dans un tourbillon de brutalité. Laëtitia COPEAU Contractuelle Armée-Jeunesse au musée de l’Artillerie Début de guerre et récompenses Légion d’honneur et Médaille militaire Convaincues de partir pour quelques semaines et d’être de retour pour les vendanges, c’est sans avoir envisagé de système de récompense sous forme de médaille que nos armées partent en guerre. On fait avec la Légion d’Honneur et la Médaille Militaire, car entre août et décembre 1914, il n’y a que cinq mois et d’ici là la guerre sera gagnée. Durant ces premières semaines de bataille, les actions d’éclats et les faits d’armes font que la Légion d’Honneur est attribuée à des drapeaux, des soldats mais également à des femmes qui se distinguent par leur héroïsme. Le 3 décembre 1914, madame Marcelle Semmer du village de l’Eclusier dans la Somme est faite chevalier de la Légion d’Honneur pour son dévouement envers les blessés qu’elle soigne et sauve sur le champ de bataille. C’est une des premières femmes à être décorée. « L’ordre national de la Légion d’Honneur récompense dans le domaine militaire, en temps de guerre, une aptitude exceptionnelle dans le commandement ou un fait d’armes hors norme ». Le 13 août 1914 un décret porte création d’un tableau spécial d’attribution de la médaille militaire sous réserve de ratification par la loi. La Médaille Militaire est attribuée, pour la première fois du conflit, le 15 août 1914 au 1er Bataillon de chasseurs à pieds, après que le sergent Foulfon à Saint-Blaise (Alsace) a pris le drapeau allemand du 132ème Régiment de landwehr. Ce premier trophée est exposé au balcon du Ministère de la Guerre à Paris. Grâce à ce fait d’armes, le drapeau des chasseurs est solennellement décoré le 20 octobre 1914 à Gouyen-Gohelle (62). Cette médaille récompense aussi les soldats et les sousofficiers, exceptionnellement les officiers généraux ayant commandé en chef. Le premier général à en être décoré est le Général de division Joffre, commandant en chef des armées du Nord-Est le 2 décembre 1914. C’est alors toute la France combattante qui est honorée par cette attribution. Major R. Maisonnave Adjoint du Conservateur du musée de l’Artillerie 4 août 1914 BELGIQUE Invasion de la Belgique. La Grande-Bretagne déclare la guerre à l’Allemagne, le 5. 7 – 16 août 1914 LIEGE L’offensive allemande peine pendant neuf jours pour vaincre les forts de Liège. Deux armes, pas sièreblanches que ça Au cours de la 1 guerre, français et allemands ont équipé leur fusil (Lebel pour les uns, Mauser pour les autres) de baïonnette à lame longue. Les allemands en ont utilisé différents modèles, mais un type particulier a suscité, à l’époque, une polémique : la baïonnette à dents de scie !! Baptisée « Modèle 1898/05 », cette arme blanche était initialement prévue pour équiper 6% des fantassins et la totalité des bataillons du génie en tant que couteau-scie destiné à tronçonner du bois pour réaliser des abattages et des parements de tranchées (fascines, claies) Rapidement, cette arme massive munie d’une double rangée de dents a été diabolisée, et une légende s’est tissée autour d’elle. En effet, les français l’entachèrent d’un rôle offensif des plus sordides en l’affublant du surnom de « couteau de boucher », tout en précisant que les allemands étripaient nos poilus avec cette arme de sauvage. Les soldats ennemis, pris avec ce type d’arme, étaient passés par les armes sans autre forme de procès. Afin d’éviter ce désagrément à ses troupes, le Kaiser fit publier en janvier 1918 un décret impérial stipulant que les dents de ces armes devaient être meulées. 15 août 1914 DINANT (BELGIQUE) Premier contact sur la Meuse entre les armées françaises et allemandes. 3 Croix de fer (Des origines à la première guerre mondiale) Institué en 1813 par le roi de Prusse Frédéric Guillaume pour récompenser les actes de courage de ses soldats dans les guerres contre Napoléon 1er, l’ordre de la croix de fer se décline en 4 classes. La décoration, dessinée par Schinkler, est constituée d’un centre en fer peint en noir, en forme de croix pattée, enchâssé dans un cadre en argent. Un anneau de bélière retient le ruban aux couleurs de la Prusse (noir, blanc) pour les classes 1 et 3. Les classes 2 et 4 n’en comportent pas ; une épingle étant fixée au revers de la médaille pour l’accrocher sur la poitrine. Les attributions ont été les suivantes : 16.000 croix de 2nde classe, 670 croix de 1re classe, 5 grand-croix, 1 étoile de la grand-croix (Blücher Stern). La baïonnette Mauser modèle 98/05 et sa lame à dents de scie La légende a détourné le côté utilitaire de la baïonnette à dents de scie, alors que nos poilus montaient à l’assaut avec leur fusil Lebel au bout duquel était fixée la fameuse baïonnette Rosalie, adoptée en 1886, dont la lame cruciforme était tout aussi sauvage. La Rosalie En effet, la forme en croix de la lame et sa lame provoquait des hémorragies internes dont en croix l’issue était fatale. Mais aucun décret, aucune directive n’a jamais été publiée visant à interdire cette arme blanche tout aussi « sauvage » que celle de « ceux d’en face » Adjudant-chef T. Simon Expert armement – munitions du musée de l’Artillerie 7-24 août MULHOUSE L’aile droite française libère la Haute Alsace, mais butte devant Colmar et se replie. Début de guerre et récompenses 20-25 août 1914 LORRAINE L’aile droite française est battue à Morhange et à Sarrebourg. Elle recule vers Nancy En juillet 1870, dans le cadre de la guerre franco prussienne, l’Empereur d’Allemagne et roi de Prusse Guillaume 1er rétablit l’ordre de la croix de fer. Le millésime « 1870 », inscrit au centre de la décoration est le seul indice qui la différencie du type de 1813. La décoration, bien que déclinée en quatre classes, ne sera attribuée que dans les trois premières: 41.702 croix de 2nde classe, 1307 croix de 1re classe, 9 grand-croix, Déclaré empereur en juin 1888, Guillaume II poursuit la tradition de ses aïeuls en réinstaurant, le 5 août 1914, deux jours après la déclaration de guerre, cette décoration prestigieuse. Elle est recréée dans les quatre grades initiaux, et seul le millésime « 1914 », inscrit en son centre la différencie des types précédents. Au cours du premier conflit mondial, la croix de fer sera décernée comme suit : 5 millions de croix de 2nde classe, 250.000 croix de 1re classe, 5 grand-croix, 1 étoile de la grand-croix Adjudant-chef T. Simon Expert armement – munitions du musée de l’Artillerie PLAN XVII contre PLAN SCHLIEFFEN Des Frontières à la Marne La Théorie Chaque camp part en guerre avec un plan de bataille bien préparé, dès le temps de paix, dont le but est de vaincre le plus vite possible, par un conflit rapide et bien mené. Celui des Allemands date de 1905, il constitue la dernière évolution du Plan Schlieffen, conçu vers 1890. Ce plan consiste à vaincre les armées françaises en moins de six semaines, avant de se retourner contre la Russie : sept armées allemandes sont impliquées à l’Ouest, deux en Alsace-Lorraine et cinq face au Luxembourg et la Belgique, pays neutres qu’il faudra envahir et traverser en moins d’une semaine… Cette masse de cinq armées aura pour but d’entrer en France par le Nord et les Ardennes, avec un seul objectif : Paris ! Ensuite, le gros des armées rejoindra la région de Pologne pour combattre l’armée Russe. Côté Français, le Plan XVII date de 1913. Le nouveau chef d’état-major général, Joseph Joffre, l’a imposé non sans difficultés contre celui du général Michel, son prédécesseur, qui souhaitait intervenir plus au Nord, en liaison avec l’armée Belge. Estimant que les Allemands attaqueraient dans les Ardennes, Joffre veut les surprendre par une attaque encore plus rapide, de part et d’autre de la place forte de Metz. Il se réserve une armée pour déplacer son dispositif vers la Belgique en cas de coup dur… Régiments d’aujourd’hui dans la tourmente d’hier 1er Régiment d’artillerie de campagne Parti de sa garnison de Bourges le 7 août 1914, le 1er RA de campagne, sous les ordres du colonel Lequime, débarque en gare de Charmes en Moselle, le 9. Il forme l’artillerie de la 16e Division d’infanterie (8e Corps) et entre en Moselle occupée dans la nuit du 11 au 12. Au contact de l’ennemi deux jours plus tard, dans la région de Domèvre, il participe à l’avancée française jusqu’à Sarrebourg qui est libérée le 18. Mais face aux canons allemands de 21 cm, la portée des canons de 75 ne permet pas de riposter et Sarrebourg est perdue. La contre-attaque allemande subit elle-même un coup d’arrêt lors de la Bataille de la trouée de Charmes, où le succès initial de l’infanterie est renforcé par un usage concentré de l’artillerie que le général de Castelnau emploie de façon groupée. Le front du 1er RAC se stabilise sur la Mortagne face à Saint-Pierremont, le 25 août. L’étendard du 1er RA garde la mémoire de ces combats avec l’inscription LORRAINE 1914. Pour ces deux plans, les états-majors ont besoin de quelques délais pour mobiliser les réservistes : 19 jours exactement pour l’armée française, ce qui fixe le début de l’offensive en Lorraine à la date du 21 août 1914 (mobilisation + 19 jours). Entre le 3 et le 21 août, les opérations sont donc limitées, sauf en HauteAlsace où la région de Mulhouse est libérée. 1er RA stationné à Bourogne (Belfort) 35e Régiment d’artillerie de campagne Parti de sa garnison de Vannes le 7 août 1914, le 35e RA de campagne, sous les ordres du colonel Ely, débarque à Grandpré et se regroupe à Sedan. Il forme l’artillerie de la 22e Division d’infanterie (11e Corps) et franchit la frontière belge. Lors de la Bataille de Charleroi, le 22 août, il participe à la prise du village de Maissin et gagne plusieurs duels contre l’artillerie allemande. Les canons de 75 arrêtent ensuite l’avancée de l’ennemi sur la Meuse du 25 au 27 août. Puis, sous les ordres du général Foch, son ancien chef de corps, le 35e RAC se bat lors de la Bataille de la Marne, à Lenharrée où les combats finissent au corps à corps au milieu des pièces et à Gourgançon le 9. Par la suite, le régiment participe à la Course à la mer et notamment le 29 septembre à la Bataille d’Albert, dans la Somme, où il combattra jusqu’en août 1915. L’étendard du 35e RAP garde la mémoire de ces combats avec l’inscription SAINT-GOND 1914. Symbole du soldat Allemand, La Pratique Le 21 août, l’armée française attaque en Lorraine et dans le sud de la Belgique. Le contact est immédiat et sanglant, depuis Charleroi au Nord-Ouest jusqu’à Sarrebourg au Sud-Est. Le 22 août est la journée noire de l’armée française : près de 27.000 soldats aux pantalons garance et képi rouge sont tués. Face aux 700.000 allemands présents en Belgique, les 350.000 francobritanniques de l’aile droite ne doivent leur salut que dans le repli. L’Allemand von Moltke a pris le Français Joffre à contrepied, la route de Paris s’ouvre à lui ! Le ministre de la guerre Messimy est remplacé. Du 22 au 30 août, l’avancée allemande semble inexorable, malgré la brillante résistance de la Ve Armée du général Lanrezac. Mais le 30, l’état-major allemand perd de vue l’objectif de Paris. Il cherche à encercler et détruite toute l’armée française dans la vallée de la Marne entre Meaux et l’Argonne. La capitale est sauvée, mais c’est désormais l’heure du grand face-à-face : deux armées de près de 1,5 million d’hommes chacune vont se rencontrer dans une bataille rangée sur plus de 200 kilomètres. Epuisées par trois semaines de marches et de combats, les deux armées puisent dans des ressources inexpliquées : les soldats Allemands espèrent dans la victoire et la troupe française qui se bat à proximité immédiate du cœur du pays, est galvanisée par le mot d’ordre du général Joffre : « L’offensive sera prise par les armées le 6 septembre, dès le matin. » A l’aube du 6 septembre 1914, alors que les armées allemandes resserrent leur étreinte sur le Pays de Brie et la Champagne, les soldats français font demi-tour et repartent à l’assaut. La Bataille de la Marne débute… Lieutenant-colonel Philippe GUYOT Conservateur du musée de l’Artillerie Symbole du soldat Français, son pantalon rouge 35e RAP stationné à Tarbes son casque à pointe Le 23 octobre 1842, Frédéric Guillaume IV de Prusse fait adopter par tous les états allemands (Wurtemberg, Bade, Saxe, Oldenburg, etc…), une nouvelle coiffure militaire. Ce couvre-chef, fait de cuir bouilli, porte en son sommet une pointe, dont le rôle premier est de dévier les coups de sabre donnés par l’ennemi. Un jonc en laiton, placé à l’arrière, va de la pointe à la nuquière pour remplir le même office de glissement de la lame. La bombe du casque est en acier pour les cuirassiers, ces derniers étant les combattants les plus exposés aux coups lors des charges lancées à cheval. La pointe du casque a joué son rôle protecteur jusqu’aux dernières années du XIXe siècle. Sa présence deviendra une tradition purement décorative lors de l’adoption du modèle 1895, qui coiffera le soldat allemand à l’entrée en guerre en 1914. Le casque à pointe sera abandonné en 1915 au profit du casque d’acier. Les casques des artilleurs étaient ornés, non pas d’une pointe, mais d’une boule. Son utilité visait à éviter que les servants des pièces d’artillerie ne se blessent entre eux lorsqu’ils procédaient aux opérations de mise en œuvre de leurs canons Adjudant –chef Thierry Simon Expert armement-munitions du musée de l’artillerie 21-24 août 1914 CHARLEROI L’aile gauche franco-britannique est débordée et se replie pour éviter l’encerclement. 25 août 1914 FRANCE Joffre signe l’ordre de repli général ; sa limite Sud est fixée sur l’Aisne, puis 4 l’Aube. Le 26 juillet 1829, le pantalon rouge fait son apparition dans l’infanterie française par décret royal. Fortement influencé par la pression des producteurs de garance (Rubia-Tinctorum).du département du Vaucluse, le ministère adopte cette couleur issue d’une plante cultivée pour sa racine qui fournit la teinture rouge, l’alizarine. Afin de remplacer le pantalon blanc jugé trop salissant, cette culotte rouge fait son apparition le 14 juin 1830 à Sidi-Ferruch lors du débarquement en Algérie. Puis les cuirassiers, les carabiniers, le train des équipages, les généraux…..adoptent cette couleur. Cela permet de se repérer sur le champ de bataille parmi la fumée épaisse des poudres. Chaque belligérant adopte tacitement une couleur dominante afin de différencier les troupes (les Anglais portent une veste rouge, les Prussiens, bleue foncée…). On invoque aussi que le sang est moins visible que sur le blanc, de quoi rassurer le soldat blessé et éviter de démoraliser les autres…. Puis c’est la guerre de 1870-1871 et malgré de nombreuses recherches sur le camouflage, le pantalon garance s’impose comme étant le symbole du soldat français. Alors que l’État-major des armées travaille depuis des années sur une tenue de couleur Réséda (mélange de marron et de gris clair), la pression politique et journalistique est telle que rien n’y fait. Les projets d’uniformes moins voyants sont rejetés par les députés. Mais le plus incroyable réside dans le fait que la production française de garance est arrêtée depuis la fin du XIXème siècle, jugée non rentable ! Depuis 1868, la couleur rouge est obtenue par un colorant chimique… préparé par une firme allemande qui approvisionne les teinturiers !!! Aussi, le 2 août 1914, les fantassins français partent au combat comme des coquelicots au milieu des champs, vêtus de culottes de couleur rouge made in Allemagne. Ces cibles faciles à repérer vont subir des pertes cruelles, évaluées à plus de 310.000 morts entre le 6 août et le 13 septembre 1914. Major Richard Maisonnave Adjoint du Conservateur du musée de l’Artillerie Casque à pointe Badois modèle 1895 29 août 1914 GUISE L’aile droite française freine les Allemands. Les Anglais sont sauvés, le repli continue. Casque d’artilleur Prussien modèle 1895 30 août 1914 PARIS Les Allemands cherchent à encercler les armées françaises ; Paris est sauvée ! 3-4 septembre 1914 PARIS Gallieni prépare une nouvelle armée contre le flanc Ouest des Allemands . LA MARNE, MIRACLE, DRAME et OPPORTUNITE 5 - 10 septembre 1914, six jours qui changent le cours de la Guerre ! Dès le 5 septembre, le général Gallieni qui manqua être nommé à la tête des armées françaises en 1912, prend l’initiative de faire sortir, vers le Nord-Est, une partie de troupes de la garnison de Paris qu’il commande. Faisant usage des trains et des autocars, il renforce ainsi la VIe Armée française (Général Maunoury) qui menace désormais le flanc allemand dans la vallée de l’Ourcq. Il sait que les Anglais du Maréchal French et la Ve Armée française (Général Franchet d’Esperey) sont prêts à attaquer avec lui. Le 6 septembre, premier jour de la bataille de la Marne, quatre armées allemandes se heurtent à la contre-offensive française. Sur l’Ourcq, l’attaque de la VIe Armée (Maunoury) attire contre elle toute l’aile gauche allemande (1re Armée von Kluck). Au centre, les Armées Franchet d’Esperey (Ve), Foch (IXe) et de Langle de Cary (IVe) se battent sur le cours de deux petites rivières, le Grand et le Petit Morin, et en Champagne contre les 2e, 3e et 4e Armées allemandes (Von Bulow, von Hausen, von Wurtemberg). A l’Est, l’Armée Sarrail (IIIe) peine autour de Verdun contre la 5e Armée (Kronprinz) et l’Armée de Castelnau (IIe) défend Nancy. Le 7 septembre est la journée la plus critique de la campagne. Sur l’Ourcq, Maunoury est malmené par von Kluck. Au centre, Foch tient ses positions avec difficultés face à von Bulow et von Hausen qui convergent contre lui. A l’Est, Sarrail manque être rejeté dans Verdun. Mais dans la soirée, la première bonne nouvelle pour Joffre arrive : un trou de plus de 30 kilomètres a été décelé entre l’aile droite sur l’Ourcq et le centre allemand sur le Petit Morin. Les Anglais du Marechal French et la Ve Armée de Franchet d’Esperey se préparent à s’y engouffrer. Le 8 septembre, les Armées Maunoury, Foch, de Langle de Carry et Sarrail sont toujours au plus mal : Celle de Maunoury ne doit son salut qu’à l’arrivée de 10.000 hommes de renfort, venus de Paris en autocars et même en Taxis ! Celle de Foch réduite à la moitié de son effectif de départ a été rejetée des marais de Saint-Gond et se bat pour tenir Fère Chamepenoise. Celles de Langle de Carry et de Sarrail sont épuisées par trois jours d’attaques ennemies incessantes. Mais dans la Brie, deux armées progressent : les Anglais depuis Coulommiers et la Ve Armée de Franchet d’Esperey depuis La Ferté-Gaucher exploitent la brèche entrevue la veille. Celle-ci devient un trou béant de plus de 40 kilomètres dans la soirée du 8 septembre. Le 9 septembre, sur l’Ourcq, von Kluck (1re Armée) considère qu’il a vaincu Maunoury (VIe Armée) et que l’entrée dans Paris est de nouveau à l’ordre du jour. En plaine de Champagne, Foch (IXe) et de Langle de Carry (IVe) sont au plus mal. Fère-Champenoise n’a pu être conservée et le camp de Mailly est traversé par la cavalerie allemande. Au sud de l’Argonne, Sarrail (IIIe) tente de sauver Bar-le-Duc, ultime route encore libre pour aller à Verdun. Le Grand Quartier Général allemand à Luxembourg ordonne une attaque générale en Champagne pour le lendemain. Mais l’épuisement gagne aussi les armées allemandes : face à Nancy, les attaques contre le plateau du Grand Courroné prennent fin et surtout, autour de ChâteauThierry, c’est le sauve-qui-peut ! Face aux Anglais de French et à Franchet d’Esperey (Ve) qui avancent vers le Nord-Est, il n’y a plus qu’un rideau de cavaliers ennemis qui refluent. Les colonnes de ravitaillement de la 2e Armée de von Bullow sont bousculées et son aile droite est menacée d’encerclement. En milieu de journée, de La Ferté-sous-Jouarre à Champaubert, le repli Allemand se fait dans l’urgence et le désordre. Régiments d’aujourd’hui dans la tourmente d’hier Un document historique L’ordre du jour du commandant en chef des armées le 6 septembre 1914 Ayant décidé d’arrêter le mouvement de retraite de ses armées pour passer à l’offensive, le général Joffre fait connaître aux troupes, le 6 septembre, que le moment est venu de vaincre ou de mourir. Au cours de toute l’épopée révolutionnaire et napoléonienne, aucune proclamation n’a dépassé celle-là en grandeur et en simplicité. MESSAGE DU COMMANDANT EN CHEF 6 Septembre, 9 heures. Au mo me n t où s’engage une bataille dont dépend le Salut du pays, il importe de rappeler à tous que le moment n’est plus de regarder en arrière. Tous les efforts doivent être employés à attaquer et refouler l’ennemi. Une troupe qui ne peut plus avancer devra, coûte que coûte, garder le terrain conquis et se faire tuer sur place plutôt que de reculer. Dans les circonstances actuelles, aucune défaillance ne peut être tolérée. Signé : JOFFRE. Message à communiquer immédiatement à tous, jusque sur le front. A la vue de ce texte, tous nos lecteurs, étrangers aussi bien que français, pourront mesurer avec émotion comment la pensée du chef a pu être transmise en peu de temps jusqu’aux plus humbles des héros de la Marne : Et, presque au même instant, sur ce front immense qui s’étend des bords de l’Ourcq jusqu’à Belfort, chacun de nos hommes a fait sienne la volonté du chef : nous vaincrons ! 28e Régiment d’artillerie de campagne Parti de sa garnison de Vannes le 6 août 1914, le 28e RA de campagne, sous les ordres du colonel Darde se concentre dans la région de Vouziers - Ardennes. Artillerie du 11e Corps d’armée, il franchit la frontière belge et participe à la Bataille de Charleroi. Dès lors, au coude à coude avec leurs camarades du 35e RAC, les artilleurs du 28e RAC harcèlent l’ennemi et le ralentissent comme ils peuvent, chaque jour, du 24 aout à Sedan jusqu’à Laffincourt le 1er septembre. En plein cœur des combats autour de Fère Champenoise durant la Bataille de la Marne, les artilleurs du 28e RAC font partie de la IXe Armée du général Foch qui, au prix de pertes importantes, arrête la pointe de l’avancée allemande en plaine de Champagne. Plusieurs batteries arrêtent l’infanterie ennemie à moins de 100 mètres de distance. Par la suite, le régiment participe à la Course à la mer et notamment le 25 septembre à la Bataille d’Albert, dans la Somme, département où il combattra jusqu’en avril 1915. 61e RA stationné à Chaumont 28e GG stationné à Haguenau 61e Régiment d’artillerie de campagne Parti de sa garnison de Verdun dès le 1er aout pour occuper une position de couverture, le 61e RA de campagne, sous les ordres du colonel Boichut, forme ensuite l’artillerie de la 42 e Division d’infanterie. Engagé en Moselle occupée, il participe au combat de Pierrepont le 22 et y gagne le surnom de « Diables noirs » que lui donne l’ennemi. Sous les ordres du général Grossetti, cette division organique de la IXe Armée du général Foch pendant la Bataille de la Marne, intervient sur tout le plateau de Sézanne et sauve la situation face au marais de Saint-Gond les 6 et 7 septembre, à Mondement le 8 et FèreChampenoise le 9. A chaque fois, les tirs du 61e RAC sont décisifs pour arrêter l’ennemi ou appuyer l’infanterie. La même situation se répète fin octobre 1914 lors de la Bataille de l’Yser vers Dixmude, où les canons de 75mm du 61e RAC font encore la décision. L’étendard du 61e RA garde la mémoire de ces combats avec les inscriptions SAINT-GOND 1914 et L’YSER 1914. Le 10 septembre, la bataille est coupée en deux : à l’Ouest les armées allemandes (1re 2e et 3e) reculent face aux hommes de Maunoury (VIe), French (Anglais), Franchet d’Esperey (Ve) et Foch (IXe). En revanche à l’Est, von Wurtemberg (4e) attaque encore contre de Langle de Carry (IVe) à Maurupt et le Kronprinz (5e) fait de même contre Sarrail (IIIe) dans la vallée de l’Aire. Mais galvanisées par le succès obtenu plus à l’Ouest, ces deux armées françaises résistent victorieusement et, à 17h45, von Moltke le général en chef allemand, commande le repli général. Du 11 au 13 septembre, les armées alliées progressent au rythme de la retraite des Allemands. Mais le 14 septembre matin, le repli cesse et les combats reprennent de Verberie sur l’Oise à Avocourt, près de Verdun. La bataille a quitté le cours de la Marne et des deux Morins pour s’installer dans la vallée de l’Aisne. Qui a gagné la bataille de la Marne ? Dans une bataille d’une ampleur aussi forte - 250 kms de front -, d’une durée aussi longue - 5 jours - et mettant aux prises autant d’hommes - 1,5 million environ -, il n’est pas possible de désigner un responsable unique pour la victoire de la Marne. Aussi quand un journaliste interrogea le général Joffre en lui demandant qui avait gagné la bataille de la Marne, celui-ci répondit avec humour : « Je ne sais pas qui l’a gagnée, mais je sais qui l’aurait perdue ! » En effet, désigner un fautif est toujours plus facile, le général von Moltke, vaincu de la Marne et remplacé rapidement, le découvrira très vite à ses dépens. Ce qui reste sûr, c’est que l’énergie des soldats Français provoqua l’admiration de tous, à commencer par celle des généraux Allemands. 5 septembre 1914 OURCQ L’aile gauche française, renforcée par taxis, autocars et trains, attaque de l’Ourcq à la Marne. 6 septembre 1914 MARNE L’aile gauche franco-britannique prend l’avantage. centre peine à 5 Le arrêter l’ennemi. 7 septembre 1914 MARNE Le centre français défend le plateau de Sézanne et les marais de SaintGonds. 8 septembre 1914 MEAUX L’aile gauche française repasse la Marne. Le centre est bousculé à Fère Champenoise. 9 septembre 1914 FERE CHAMPENOISE Le centre français en grande difficulté se sacrifie et arrête les Allemands. LA COURSE A LA MER et LE DEBUT DES TRANCHEES 68e RAA stationné à La Valbonne Un document historique Le rapport du Marechal French du 17 septembre 1914 (extrait) Le 8 septembre, l’ennemi poursuivit sa retraite vers le Nord et notre armée, pendant toute la journée, fut engagée avec succès contre de fortes arrière-gardes sur le Petit Morin ; par-là, elle contribua efficacement à la progression des armées françaises à notre droite et à notre gauche, armées contre lesquelles l’ennemi dirigeait ses plus grands efforts. Des deux côtés, l’ennemi fut refoulé et fort maltraité. Le 1er Corps d’armée anglais rencontra une résistance opiniâtre à La Trétoire, au Nord de Rebais. L’ennemi occupait une forte position avec de l’infanterie et du canon sur la rive Nord du Petit Morin ; il en fut délogé avec de grosses pertes. Plusieurs mitrailleuses, de nombreux prisonniers tombèrent entre nos mains, plus de 200 cadavres allemands furent laissés sur le terrain. 1er RAMa stationné à Chalons en Champagne 11e RAMa stationné à La Lande d’Ouée Régiments d’aujourd’hui dans la tourmente d’hier Groupes d’artillerie de campagne d’Afrique 1 à 5 Venant d’Algérie ou de Tunisie, les Groupes d’artillerie d’Afrique 1 à 7 sont engagés progressivement sur le Front du Nord-Est pendant la 1re Guerre mondiale. Les 1er, 2e et 3e GACA d’Algérie, rattachés à la 37e Division, s’embarquent à Oran le 4 août, débarquent à Sète et sont engagés en Belgique. Ils prennent part à la Bataille de Charleroi le 22 août, à la Bataille de Guise le 29 et aux combats de Montmirail sur le Petit Morin, les 7, 8 et 9 septembre, au plus fort de la Bataille de la Marne. Ils tiennent ensuite le front autour de Carlepont dans l’Oise. Le 5e GACA de Tunisie est intégré dans l’artillerie de la 45 e DI. Il est engagé dans la Bataille de l’Ourcq et combat à Penchard le 6 septembre et Chambry le 7, avant de finir l’année à l’Est d’Arras. Depuis 2004, le 68e RAA garde la mémoire de ces combats sur son étendard avec l’inscription LES DEUX MORINS 1914, initialement portée sur l’étendard unique des Groupes d’artillerie d’Afrique. 1er Régiment d’artillerie coloniale Parti de ses garnisons de Marseille et de Paris, le 1 er RA colonial se regroupe en gare de Revigny-sur-Ornain, le 12 août 1914. Il forme l’artillerie de la 2e Division du Corps d’armée colonial et franchit la frontière belge en direction de la Forêt des Ardennes le 21. En deuxième échelon lors du combat de rencontre de Neufchâteau, ses canons couvrent le repli des unités lorsqu’elles Neufchâteau franchissent la Semois le 23, puis la Meuse le 27 août. Après l’épisode du repli général, du 29 août au 5 septembre, les canons de 75mm du 1er Colonial, installés au sud-est de Vitry-leFrançois, interdisent tout franchissement du canal de la Marne à la Saône pendant la Bataille de la Marne. Puis dès le 11, ils appuient la poursuite jusque dans la région de Massiges où le appu Corps colonial s’illustrera lors des trois batailles de Champagne. En mai 1929, le 1er Groupe du 1er RAC donnera naissance au 11e RAC qui garde aussi la mémoire de ces combats. Et après… ? La guerre ne s’arrête pas avec la Bataille de la Marne. En effet, si le front s’étend à partir du 14 septembre 1914, entre l’Oise (la Verberie) et la frontière Suisse, du côté de Bâle, il existe toujours un trou béant avec la zone tenue par l’armée Belge qui se défend avec courage autour de la place forte d’Anvers. Du 15 septembre au 15 novembre 1914, Français et Allemands vont essayer de s’engouffrer dans ce trou, pour déborder l’adversaire. Cet épisode est appelé La Course à la mer. Au rythme de leur déplacement vers la mer du Nord, les armées se rencontrent sur l’Aisne vers Soissons (15 septembre), puis sur l’Oise autour de Noyon (17 septembre), sur la Somme à l’Ouest de Péronne (25 septembre), dans le Nord devant Arras et Lens (27 septembre). Enfin les combats se fixent en Belgique où le Roi Albert 1er a pris la courageuse décision d’abandonner Anvers pour se lier aux armées alliées dans la région de l’Yser (7 octobre). Pendant un mois encore, l’offensive bat son plein pour tenter de rompre le front adverse. A Nieuport, Ypres et Dixmude, les combats des fusiliers marins et des tirailleurs sénégalais sont dignes de la légende la plus pure, face à une nouvelle armée allemande formée de novices, dont l’inexpérience n’a d’égal que l’inconscience du danger lors des assauts. Pour éviter la rupture, et la prise d’Ypres dernière grande ville Belge non envahie, Albert 1er dit « Le roi-chevalier » ordonne l’inondation de la vallée de l’Yser, en faisant relever les écluses des canaux et polders. Désormais la bataille est figée. Les fusiliers marins du Contre-amiral Ronarc’h défendent Dixmude dans la vallée de l’Yser Les états-majors de deux côtés cherchent à conserver les positions, tout en économisant les hommes et les munitions. Une guerre statique commence qui vise à épuiser l’ennemi. Sur près de 650 kilomètres de la Mer du Nord à la frontière Suisse, les tranchées s’organisent, à l’initiative des Allemands. Les hommes se transforment en taupes et creusent trois rangs successifs de retranchements où ils vont se battre, vivre et souvent mourir. Localement, une trêve semble avoir eu lieu le soir de Noel 1914 entre certains soldats Français, Britanniques et Allemands, à laquelle les officiers mirent rapidement fin. Dès le lendemain, les combats reprennent. Major R. Maisonnave Adjoint du Conservateur du musée de l’Artillerie Un document historique Le remplacement du général von Moltke, 11 septembre 1914 10 novembre 1914 (Aquarelle de Paul Thiriat) Leur résistance héroïque, y compris dans les tranchées inondées, fut soutenue par les Diables noirs du 61e Régiment d’artillerie de Campagne. 93e RAM stationné à Varces D’une santé qui va en se détériorant rapidement et usé par de longues années à la tête de l’armée allemande qu’il commande depuis 1906, Helmuth von Moltke ne dirige pas vraiment ses sept armées, mais laisse agir leurs généraux selon la dernière version du plan Schlieffen. Après le début du conflit, il n’intervient qu’à deux reprises : fin août en validant l’abandon de la prise de Paris comme objectif immédiat et le 10 septembre en ordonnant le repli général. Ce manque d’énergie et d’implication dans la conduite des opérations lui vaut d’être remplacé par Erich von Falkenhaym, ministre de la guerre et membre du Grand Quartier Général à Luxembourg, auprès de l’Empereur Guillaume II. Couvert d’honneurs, mais tenu en dehors des décisions militaires, von Moltke mourra d’une crise cardiaque en 1916. Le général Helmuth von Moltke était sous surveillance du Grand Quartier Général tant son état de santé précaire et son indécision étaient devenus de notoriété publique depuis l’hiver 1913-1914. Au dernier jour de la Bataille de la Marne, l’Empereur envoie un de ses plus fidèles généraux, le vieux Hans von Plessen, vétéran de la guerre de 1870-71, qui constate l’incapacité du chef d’état-major allemand : « Vers 22 heures, je le trouvais assis à une petite table [...] Il était très agité, nerveux et voyait tout en noir. Je suis resté jusqu’à minuit auprès de lui et j’ai tenté de le calmer et de le consoler. » 17e GA stationné à Biscarosse Le lendemain, Falkenhaym le remplace. Si Joseph Joffre fut « peut-être » le vainqueur de la Marne, son adversaire Helmuth von Moltke dit « le Jeune » en fut assurément le premier vaincu. Lieutenant-colonel Philippe GUYOT Conservateur du musée de l’Artillerie 10 septembre 1914 MARNE Battus sur l’Ourcq et la Marne, les Allemands se replient. Le centre français est sauvé. 13 septembre 1914 NANCY La défense française du Grand Couronné est victorieuse. Nancy est sauvée ! 20 septembre 1914 PICARDIE L’armée française de Lorraine, vite déplacée par voie ferrée, débute le combat en Picardie. 4 octobre 1914 ARTOIS Les ennemis cherchent à se déborder mutuellement entre 6 Compiègne et Lens. 10 octobre 1914 FLANDRES Liés à l’armée Belge, les Francobritanniques se battent sur l’Yser, d’Ypres à Dixmude 1er Régiment d’artillerie de montagne Parties de leur garnison de Grenoble le 9 août, les batteries du 1 er RA de montagne, fortes de 205 hommes chacune, sont réparties entre la 64e Division de réserve à Gap et la 74e Division de réserve à Montmélian. Jusqu’au 22, les équipes de pièces, pour la plupart formées de réservistes, s’entraînent avant de rejoindre le front autour de Saint-Dié dans les Vosges. Engagées aux côtés des groupes des 1er et 54e RAC, elles prennent part à la Bataille de la Mortagne jusqu’au 2 septembre. Dissociées à compter de cette date, elles participent pendant les trois derniers mois de 1914, tant à la défense de la crête des Vosges (3e, 42e et 43e Bie) qu’aux opérations dans la Somme (44e Bie), la défense contre les avions de la ville et du parc d’aviation de Sainte-Menehould (46e Bie), la lutte à courte distance dans les bois du massif d’Argonne (48 e Bie) ou la défense des abords du Chemin des Dames (51 e Bie). En 1924, le 1er RAM prend l’appellation de 93e RAM. 17e Régiment d’artillerie de campagne Parti de sa garnison de La Fère le 5 aout 1914, le 17 e RA de campagne se regroupe autour de Stenay. Il forme l’artillerie de la 3e Division d’infanterie (2e Corps) et franchit la frontière belge. Au contact de l’ennemi le 22 août, à Robelmont et Villers-laLoue, les canons de 75mm subissent les feux de l’artillerie lourde allemande. Ils parviennent cependant à jalonner l’avance ennemie à Cesse le 27, Saint-Mard le 29 et Bar-les-Buzancy le 31. Lors de la Bataille de la Marne du 6 au 9 septembre, le 17e RAC tient le choc près de Vitry-le-François entre Blesmes et Montoy. Après la poursuite, il se bat en limite Ouest de l’Argonne. Face à un ennemi déterminé, le 17e RAC se déploie au nord de Vienne-laVille où son chef de corps, le colonel Aubrat, tombe au champ d’honneur le 15 septembre. Toutefois son intervention est décisive pour la stabilisation du front. L’étendard du 17 e GA garde la mémoire de ces combats avec l’inscription ARGONNE 1914. 4 novembre 1914 FRANCE Les alliés occidentaux cessent toute offensive, pour économiser leurs troupes. 15 novembre 1914 FRANCE BELGIQUE De la Suisse à la Mer du Nord, le front se stabilise sur plus de 500kms de tranchées. Les Allemands épuisés, mettent fin à la guerre de mouvement, pour près de 4 ans... LA GRANDE GUERRE DEVANT CHEZ NOUS Médaille commémorative de l’entrée des troupes allemandes dans Paris… en 1914. La Gendarmerie dans la Grande Guerre Frappée, jamais attribuée ! L’article premier du décret du 20 mai 1903 (abrogé par la loi n°2009-971 du 3 août 2009) qui régit la gendarmerie, stipule qu’elle est une force instituée pour veiller à la sûreté publique, d’assurer le maintien de l’ordre et l’exécution des lois. Une surveillance continue et répressive constitue l’essence de son service. Son action s’exerce dans toute l’étendue du territoire, quel qu’il soit, ainsi qu’aux Armées. Elle est particulièrement destinée à la sûreté des campagnes et des voies de communication. Lorsque la mobilisation générale est décrétée le 2 août 1914, les gendarmes des brigades territoriales sont chargés de placarder sur les murs des mairies les affiches officielles de mobilisation détenues dans toutes les unités. Ils organisent le départ des mobilisés vers leur lieu de rassemblement. Aux armées, ils assurent des missions de prévôtés. Leur tenue est fixée par la notice descriptive du 9 décembre 1914. Exemple de la confiance de l’Allemagne dans le succès attendu ! La gendarmerie a tenu aux armées un rôle difficile, obscur et ingrat mais nécessaire. De nombreux gendarmes, notamment des gardes républicains, se sont engagés en qualité de volontaires dans les unités combattantes. En effet, le gouvernement ne voulait pas créer des unités composées uniquement de gendarmes. Si bon nombre de soldats considéraient les gendarmes comme des « planqués », la réalité est nettement plus nuancée. Beaucoup ont vécu l’inconfort et les risques des combats dans les tranchées. De plus, une grande majorité de gendarmes se sont battus dans les régiments d’infanterie. A l’intérieur du pays, les gendarmes assurent leur missions traditionnelles, le maintien de l’ordre et la recherche des déserteurs ou insoumis, bien que le service pâtit du manque d’effectifs. Initialement les déserteurs sont peu nombreux (1,5% en 1914), mais les défections et désertions se multiplient avec l’envoi au front de nouvelles classes d’appelés. Les déserteurs sont passibles des travaux forcés ou de la peine de mort. Cependant les soldats en fuite n’ont souvent rien à perdre et acquièrent vite la réputation d’hommes prêts à tout plutôt que d’être pris. La mission de recherche des déserteurs est dangereuse pour les gendarmes pour les raisons invoquées précédemment. Plusieurs dizaines d’entre eux sont tombés sous les coups des réfractaires. En 1920, la gendarmerie a publié le chiffre de 66.678 arrestations de déserteurs pendant la durée de la guerre. Aux armées, le Gendarme assure les missions de Prévôté : police des cantonnements militaires, lutte contre les abus de boissons, lutte contre les actes de pillage, d’espionnage, de défaitisme, contrôle de la circulation et des civils dans les zones des armées, transfert de prisonniers de guerre. La mission de prévôté bien que peu connu, a été cruciale pendant le conflit. Le haut commandement lui a toujours attaché beaucoup d’importance. Les prévôts ont notamment joué un rôle de premier plan dans le redressement de l’armée française après les premiers revers. Sur les 18.000 gendarmes du service prévôtal, 700 sont morts en service, 3.500 cités avec attribution de la croix de guerre. Daniel BAERT Adjudant-chef de Gendarmerie en retraite Association des Collectionneurs pour la Sauvegarde du Patrimoine de la Maréchaussée à la Gendarmerie ACSPMG 18 février 2014 CONFERENCE L’association Arts et sociétés invite J.Y. Le Naour : LA LEGENDE NOIRE DES SOLDATS DU MIDI Chapelle de l’Observance Août 1914, les armées du Kaiser envahissent la France avec un objectif hautement symbolique : Nach Paris ! Certaines de leurs succès, les autorités allemandes font dessiner et frapper la médaille commémorative de cet évènement historique, à distribuer bientôt à leurs troupes victorieuses. A Berlin, nombreux sont ceux qui se rappellent de l’image du chancelier Prussien, Otto von Bismark traversant à cheval la Galerie des glaces du château de Versailles, après y avoir fait proclamer l’Empire Allemand unifié ! Se fondant sur la victoire de février 1871, à l’issue de laquelle la France perd l’Alsace et une partie de la Lorraine, les dirigeants Allemands anticipent le succès futur… C’est compter sans la pugnacité des troupes françaises qui font échouer le rêve du Kronprinz. Les médailles de la victoire, en bronze, ne seront jamais distribuées. Transportées discrètement dans dix wagons plombés, elles finiront fondues dans les hauts-fourneaux de Dresde. Rarissime vestige numismatique du XXème siècle, cette médaille représente à l’avers l’Arc de triomphe de Paris d’où jaillit dans un rayonnement d’apothéose les dates 1871-1914 ainsi que la Tour Eiffel évoquant la notification radiotélégraphique à tous les peuples consternés de l’écrasement définitif de la France. Au revers, entourant une croix de fer frappée d’une couronne impériale et du W. de Wilhelm (Guillaume II), la devise « Résolus au dehors, unis au-dedans » Major R.Maisonnave Adjoint du Conservateur du musée de l’Artillerie Régiments d’aujourd’hui dans la tourmente d’hier 3e RAMa stationné à Canjuers Un rarissime casque d’essai d’artillerie, modèle 1902 3e Régiment d’artillerie coloniale Parti de ses garnisons de Paris - Fort de Charenton et de Toulon, le 3e RA colonial, sous les ordres du colonel Lenfant, se regroupe dans la région de Revigny-sur-Ornain, le 13 août 1914. Il forme l’artillerie organique du Corps d’armée colonial et entre en Belgique. Poussés vers l’avant lors du combat de rencontre de Neufchâteau, les 75mm du 3e RAC se sacrifient pour tenter de recueillir leurs camarades du 2 e RAC et subissent de lourdes pertes. En alternance avec le 1 er RAC, ils couvrent le repli des unités lors du passage de la Meuse, les 27 et 28 août. Après l’épisode du repli général, du 29 août au 5 septembre, le 3e Colonial d’artillerie, installé au sud-est de Vitry-le-François, vers Ecriennes, interdit toute avancée ennemie dans le secteur de la 3e DIC pendant la Bataille de la Marne. Puis dès le 11, il appuie la poursuite jusque dans la région de Berzieux, puis Massiges où le Corps colonial s’illustrera lors des trois batailles de Champagne. Les gens d’armes des siècles passés portaient, pour se protéger des coups assénés avec diverses armes blanches et casse-têtes, des casques métalliques afin de dévier la frappe. Avec l’arrivée des armes à feu, ces protections étaient jugées obsolètes et illusoires. De ce fait, les casques disparurent des champs de bataille jusqu’au début du XXème siècle. La poudre des canons portait les projectiles de plus en plus loin et au début du XIXème siècle des Shrapnels (projectiles à fragmentation multiple) causèrent énormément de blessures à la tête. Durant la guerre de 1870, c’est encore coiffé d’un shako de cuir bouilli modèle 1860 que l’artilleur sera victime du prussien… Ce n’est qu’en 1902 qu’est mis à l’essai, aux 13ème et 54ème Régiment d’artillerie, un nouveau casque en tôle d’acier comme celui qui est présenté dans les collections du musée de l’Artillerie de Draguignan. Le premier type a une bombe nue sur le sommet et porte un sautoir de bombardes sur sa face avant. Un porteplumet permet, pour la grande tenue, l’adjonction d’un plumet écarlate en plumes de coq. Une visière et couvrenuque cerclés de cuivre assurent une protection frontale et arrière de la tête. Les critiques de l’époque jugent avec sévérité l’esthétique du casque, car lorsque le plumet est porté, il masque l’attribut de l’artillerie. Sans le plumet, « il ressemble à un vase renversé qui aurait perdu son anse ». Même si ce casque est mal jugé, « il protège bien des projectiles, est bien équilibré et peu visible de loin ». Le second modèle, toujours en tôle d’acier bruni, possède une demi-sphère au sommet, pour l’aération de la bombe. Ce dispositif permet en outre la fixation, soit d’un plumet de crin pour la troupe, soit d’un plumet écarlate en plumes de coq pour les officiers. Là encore, le sautoir de bombardes est masqué. Ces modèles d’essai, des années 1905/1906, ne séduisent pas plus et ne sont pas adoptés. En 1914, l’artilleur comme ses frères d’armes, part donc avec un képi de tissu et sa protection dérisoire face aux éclats d’obus. Malgré la distribution d’une cervelière (sorte de grosse louche posée entre le képi et le crane) les blessures à la tête, au début du conflit, sont multiples. Le casque d’artillerie modèle 1902, se rencontrera occasionnellement sur le front, porté par certains officiers jusqu’en 1915. Les coiffures d’essai disparaissent ensuite au fond des tranchées ou des greniers, ce qui explique la rareté d’une telle pièce. Major R. Maisonnave Adjoint du Conservateur du musée de l’Artillerie 18 mai 2014 JOURNEE PORTES OUVERTES Présentations dynamiques, découverte de l’armée de Terre, jeux et détente Ecoles militaires de Draguignan 31 mai 2014 THEATRE Le moral des troupes présente : POILU’S PARK , une pièce d’A.C. David 7 Théâtre en Dracénie septembre 2014 - mars 2015 EXPOSITION La C.A.D. présente : BARGEMON 14-18 LA VIE AVANT TOUT 17-18 octobre 2014 COLLOQUE La Fédération historique de Provence étudie : PROVENCE EN GUERRE Musée Camos - Bargemon Musée de l’artillerie NOS AMIS, NOS VOISINS Le musée des Arts et Traditions Populaires de Dracénie et Les archives départementales du Var Banque de données mémorielle Exposition La Vie à l’arrière Le musée communautaire des Arts et Traditions Populaires de Draguignan et les Archives Départementales du Var s’associent pour produire une exposition qui relatera la vie des varois à l’arrière tout au long de la Grande Guerre. Correspondances et témoignages vous permettront d’apprécier les changements qui ont suivi l’ordre de mobilisation et l’organisation mise en place afin de pallier l’absence des hommes partis sur le front. Nous ferons un focus sur les travaux d’archéologie contemporaine menés par la communauté d’agglomération du Douaisis et la ville d’Arras. Ainsi nous sera révélée la vie sur les champs de bataille. Les Archives départementales du Var, en association avec le Musée communautaire des Arts et Traditions Populaires de Draguignan, prévoient de constituer une banque de données sur les mémoires de guerres et en premier lieu sur la Grande Guerre 1914-1918. Cette banque de données permettra de consulter des images numérisées, accompagnées de notices, de documents, d'objets, de lieux de mémoires (notamment les monuments au morts), d'écouter des témoignages oraux, de consulter des ressources bibliographiques. Toutes ces données seront géolocalisées et consultables, à partir de juin 2014, sur un site Internet dédié : www.memoires-deguerres.var.fr" Par ailleurs, le musée-galerie Camos de Bargemon enrichira le propos en présentant une exposition relative aux combattants du village, aux hôpitaux militaires bénévoles et à un personnage illustre : l’officier aviateur Léon Bourjade. Le musée municipal d’Art et histoire de Draguignan LC2R Draguignan propose toute l’année un programme d’expositions temporaires variées, en complément de son exceptionnelles collection d’histoire locale et d’art, avec notamment quelques œuvres du musée du Louvre. Le Laboratoire de Conservation, Restauration et Recherches restaure les collections publiques et privées, notamment métalliques. Régulièrement sollicité, il restaure diverses armes (sabres, fusil…) ou plaques d’identifications militaires et poursuit des recherches pour améliorer les traitements. Membre du comité de pilotage technique du musée, il lui apporte son expertise. Il intervient à la demande pour des conférences parfois en liaison avec l’équipe du musée ou lors des journées du patrimoine. FERRIE Un collège, un général, des héros En 2014, le collège général Ferrié participe au centenaire de la Grande guerre par deux projets issus d’une double légitimité : un projet local autour de la figure illustre du général qui a donné son nom au Collège et un projet national de mémoire des anciens élèves de l’établissement Morts Pour La France au cours de la Grande Guerre. Gustave Ferrié (1868-1932) : l’homme qui sauva la Tour Eiffel Originaire de Savoie, Gustave Auguste Ferrié passe son baccalauréat en 1884 au Collège-Lycée de Draguignan qui porte son nom depuis 1932. Elève de l’Ecole Polytechnique en 1887 et ingénieur des transmissions radiophoniques quatre ans plus tard, il œuvre au comité franco-britannique chargé d’étudier les développements de la télégraphie sans fil –nom ancien de la radiophonie, avec l’ingénieur Marconi. Il expose ses travaux à l’exposition universelle de 1900 et invente, trois ans plus tard, un nouveau récepteur électrolytique relié à une antenne, installée sur le dernier étage de la tour Eiffel : La portée de l’émetteur est tout d’abord de 400 kms puis passe, en 1908, à plus de 6.000kms. Ferrié vient de trouver une utilité à la tour Eiffel. Celle-ci ne sera pas démontée, comme prévu initialement. Elle deviendra même, au cours de la Grande Guerre, le premier centre d’écoute des communications ennemies, permettant de déjouer certaines offensives ennemies comme en septembre 1914 lors de la Bataille de la Marne. Gustave Ferrié deviendra ensuite général inspecteur de la télégraphie militaire, membre de l’académie des sciences et Grand-Croix de la Légion d’honneur. Il meurt au Val-de-Grâce en 1932, d’une crise d’appendicite. Dracénois de 1882 à 1884, bachelier et titulaire du prix Claude Gay, il est toujours présent dans la cité du dragon, tant par ses descendants que par son nom inscrit depuis 1934 au fronton du collège public implanté au cœur de la ville. Nos remerciements vont, tout particulièrement, aux personnes et institutions suivantes : Mr Mark SMITH MA, conservateur du Royal Artillery Museum, et LTC (UK) David IFFLAND, LCL (RFA) Franck ROSEMANN, ADC (er) Daniel BAERT, ADC (er) Gervais CADARIO, Mme Maud CHACORNAC infographiste, le personnel de la bibliothèque des Ecoles militaires de Draguignan groupé autour de Mme FOUASSON, MAJ (R) Michel DELANNOY, M Michel PISTONNE, ADC SIRAULT, M Beaudoin SMIT photographe. Le Musée de la Grande Guerre à Meaux(77), la Mairie de Joncherey (90), L’association des amis du musée de l’Artillerie à Draguignan (AMAD) est une association type loi 1901 qui a pour but le le Service du soutien du musée. Grâce à son action, le musée peut mieux déminage de recevoir le public, enrichir les collections et s’ouvrir sur La garde (83), l’extérieur. A titre d’exemple, l’ouverture du musée de BERNARD ma l’artillerie au public est réalisée à 75% par des personnels Boutique à salariés par cette association. Toulon (83). L’adhésion à l’AMAD, concrétisée par un don de 25 euros A.M.A.D. minimum par an, est défiscalisable. De plus, l’AMAD édite un bulletin d’information et d’histoire et d’étude qui permet de suivre les activités du Musée de l’artillerie et de l’association : expositions temporaires, visites, conférences, publications. Les numéros de ce bulletin sont consultables à la boutique du musée. Des héros ! Retrouver la trace et rendre hommage aux élèves qui les ont précédés sur les bancs du collège Ferrié, est le but que se sont fixés, en 2014, les élèves de deux classes de 3 e conduits par leurs professeurs d’Histoire-Géographie et d’Arts plastiques. Ce projet, conçu avec le musée de l’artillerie, est proposé à la labellisation du comité du centenaire. Comme toutes les activités du musée, l’exposition « La Marne, regards croisés » n’aurait pu voir le jour sans le soutien de l’AMAD. Site internet : musee.artillerie.asso.fr Un exemple du travail en cours : l’histoire de Julien Labat. Le musée de l’Artillerie est ouvert au public, du dimanche au mercredi inclus. 9h-12h et 13h3017h30. Groupes sur réservation, de préférence le jeudi. Né à Draguignan en 1882, avocat et conseiller municipal, Julien Labat est rappelé lors de la mobilisation au 112e Régiment d’infanterie qui sera engagé avec le XVe corps, au sein de la IIIe Armée en Lorraine. En pleine Bataille de la Marne, le 8 septembre 1914, le lieutenant Julien Labat mène une charge à la baïonnette pour reprendre le village de Vassincourt. Il tombe sous le feu des mitrailleuses ennemies. Il sera cité à l’ordre de la division en février 1915, puis en juin de la même année, la ville de Draguignan débaptisera la Rue du Champs de Mars pour lui donner son nom. Inhumé sur son lieu de mort, son corps sera rapatrié pour des obsèques municipales en 1921. ENTREE GRATUITE Jean-François Botella Professeur d’histoire-géographie au collège Ferrié Porteur du projet Centenaire 8 Fermé du 15 décembre au 15 janvier Délégation au patrimoine