© IFIP Alimentation Phosphore : satisfaire les besoins pour maîtriser le coût alimentaire La formulation des aliments porcins repose depuis une dizaine d’année sur la digestibilité du phosphore. La prise en compte de la concentration énergétique de l’aliment, avec 0,22 g de phosphore digestible par MJ d’énergie nette en croissance, et 0,18 g en finition, permet d’ajuster les apports aux besoins, sans diminuer les performances. La recherche en nutrition animale a permis de réduire considérablement les teneurs en phosphore des aliments porcins. Dans les années 80, il n’était pas rare de formuler à plus de 6 g/kg d’aliment ! L’évolution des recommandations en phosphore du Corpen, parues en 1996 puis en 2003 (respectivement, 5,2 puis 4,8 g de phosphore par kg d’aliment croissance, et 4,5 puis 4,4 g/kg en finition) accompagnée de la généralisation de l’utilisation des phytases, ont incité la profession à prendre en compte, au fur et à mesure, les nouveaux acquis. Depuis une dizaine d’années, il est possible de formuler à l’aide du critère de digestibilité du phosphore. Des recommandations nutritionnelles d’apport ont été proposées sur cette base, mais elles étaient exprimées en g par kg d’aliment : 2,5 g de phosphore digestible par kg d’aliment croissance, et 2,0 g/kg en finition. Or, comme pour les acides aminés, il est plus précis de tenir compte de la concentration énergétique de l’aliment, et par conséquent de rapporter la teneur en phosphore digestible à la quantité d’énergie de l’aliment. Les nouveaux essais menés dans ce sens par l’IFIP ont permis de proposer des recommandations d’apport de phosphore digestible exprimées par unité d’énergie nette (MJ d’EN). Elles ont été établies en deux étapes. Quelle teneur en phosphore pour les meilleures performances ? Dans un premier essai comprenant 160 porcs, les performances de quatre régimes alimentaires d’engraissement, dont la teneur en phosphore (P) digestible varie, sont comparées (Tab. 1). Tous Tech Porc Recommandation établies en deux étapes : Les essais réalisés dans les stations expérimentales de Romillé (35) et Villefranche de Rouergue (12) permettent de comparer les effets de différents régimes sur les performances techniques, la qualité des carcasses, mais aussi la minéralisation osseuse. Essai 1 : Teneurs décroissantes en P digestible pour un même niveau énergétique • contrôle de la déminéralisation par dosage des cendres des métacarpes Essai 2 : Teneurs faible et forte en P digestible pour 2 niveaux énergétiques • mesure de la minéralisation osseuse à l’aide d’un scanner à rayons X (densité des radius) Novembre - Décembre 2014 - n° 20 13 14 Alimentation les aliments contiennent 9,7 MJ d’énergie nette (EN) par kg. Le plan d’alimentation est libéral, jusqu’à atteindre un maximum de distribution différent pour les femelles et les mâles castrés. En pratique, avec cette méthode, la consommation moyenne journalière d’aliment au cours de l’ensemble de l’engraissement est identique pour tous les régimes (2,48 kg par jour). Tableau 1 : Teneurs en phosphore digestible par MJ d’énergie nette des régimes et performances de l’essai 1 Régime 1 2 3 4 0,23/0,19 0,27/0,21 P digestible par unités d’EN, g/MJ Croissance/Finition 0,19/0,15 0,21/0,17 Performances en engraissement et taux de muscle des carcasses GMQ, g/j 893 921 906 903 IC, kg/kg 2,81 2,71 2,75 2,75 TMP, % 58,4 58,3 58,5 58,4 Malgré la forte disparité des teneurs en P digestible des régimes, les performances Pas de différence significative observée entre les différentes zootechniques sont peu affectées et il teneurs en P digestibles. n’existe aucune différence significative faire, dans ces conditions, une partie pour les caractéristiques de carcasse. Tout une mesure de la minéralisation osseuse des besoins des animaux, contribuant au plus peut-on constater une réduction à l’aide d’un scanner à rayons X. 160 porcs de ce fait à gommer les écarts entre les des performances pour le régime le plus sont utilisés pour comparer l’effet de régimes. Enfin, les recommandations faible en P digestible (régime 1). Mais les quatre régimes combinant deux concenproposées permettent déjà de écarts observés en vitesse de trations énergétiques des aliments (9,2 croissance et pour l’indice de “Importance du P réduire largement les teneurs et 9,8 MJ EN par kg d’aliment) et deux consommation sont trop faibles sur le développe- en P digestibles des aliments, niveaux d’apport en P digestible (0,25 et pour être significatifs avec le disment osseux.“ par rapport aux teneurs précé- 0,22 g de P digestible par MJ EN en croisdemment retenues : de 2,05 à positif expérimental de l’essai. sance, puis 0,20 et 0,18 g/MJ EN en fini2,25 g par kg d’aliment croissance, et de Notons que quatre porcs sont retirés de tion). Dans cet essai, le niveau d’apport 1,65 à 1,85 g par kg d’aliment finition, l’essai en raison de très faible croissance en P digestible le plus faible correspond à contre des recommandations initiales de dont deux appartiennent au régime le la valeur moyenne des recommandations 2,5 et 2,0 g de P digestible par kg d’aliplus faiblement pourvu en P digestible. issues de l’essai 1. ment croissance et finition (soit une diminution comprise entre 9 et 18 %). Compte tenu de l’importance du P sur le Les aliments sont distribués à volonté développement osseux, 40 métacarpes depuis l’entrée en engraissement (soit 25 % de l’effectif mis en place) sont jusqu’à l’abattage (soit de 27 à 113 kg Meilleure minéralisation prélevés à l’abattoir afin de réaliser le en moyenne) sous forme de farine humiosseuse pour le régime dosage des cendres de ces os. Il n’existe difiée à l’auge. A l’abattage, les caracconcentré en énergie et en pas de différence significative entre téristiques de carcasse (poids, taux de P digestible régimes pour ce critère, ce qui permet muscle, épaisseurs de lard et de maigre) de penser qu’il n’y a pas eu une quelsont enregistrées et les radius de la patte Afin de confirmer ces recommandations, conque déminéralisation des porcs avec avant gauche sont prélevés. un second essai est réalisé s’appuyant sur les régimes les moins concentrées en P Tableau 2 : Comparaison des performances d’engraissement, des caractérisdigestible. tiques de carcasse et de celles du radius des porcs selon les régimes Les résultats de ce premier essai conduisent à proposer une recommandation d’apport en P digestible comprise, entre 0,21 et 0,23 g par kg d’aliment en croissance, et, entre 0,17 et 0,19 g par kg en finition. Le niveau d’apport en P digestible du régime 1 n’est pas retenu pour plusieurs raisons. D’une part, l’effectif animal mis en place dans cet essai est peut-être insuffisant pour statuer sur l’écart de performances observé avec ce régime. D’autre part, le niveau de consommation journalière d’aliment est élevé pour tous les régimes. L’apport quotidien en P digestible est alors augmenté et tend peut-être à pouvoir satis- Tech Porc EN, MJ/kg P digestible, g/MJ 9,2 0,22/0,18 9,8 0,25/0,20 0,22/0,18 0,25/0,20 Performances d’engraissement GMQ, g/j 946 965 993 1014 IC, kg/kg 2,70 2,65 2,59 2,58 Caractéristiques de carcasse Rendement, % 78,6 78,8 78,7 78,8 TMP, % 60,0 60,0 58,9 58,6 1343 1503 Densité osseuse du radius Signal>1500HU, mm² 1328 Une densité osseuse plus élevée avec le régime le plus concentré en énergie et en phosphore. Novembre - Décembre 2014 - n° 20 1336 Alimentation Le niveau de consommation alimentaire des porcs est élevé (supérieur à 2,5 kg/j) mais ne diffère pas selon les régimes. La teneur en P digestible n’a pas d’incidence significative sur les performances d’engraissement, ni sur les caractéristiques de carcasse. Il est constaté un effet logique et attendu de l’augmentation de la concentration énergétique de l’aliment sur la vitesse de croissance, l’indice de consommation et le taux de muscle des carcasses. Le régime haut en énergie améliore la vitesse de croissance et l’indice de consommation, mais il détériore le TMP en raison d’une augmentation de l’épaisseur de lard des carcasses. Les mesures de densité osseuse réalisées avec le scanner n’indiquent aucun effet significatif de la teneur en P digestible dans le cas du régime à 9,2 MJ EN/ kg. Par contre, dans le cas des aliments à 9,8 MJ EN/kg, la minéralisation osseuse augmente significativement avec le régime à teneur plus élevée en P digestible. Il apparaît donc que, parmi les quatre régimes comparés, celui associant apports élevés en P digestible et en énergie entraîne un accroissement de la densité osseuse du radius. Mesure de la densité osseuse Le scanner à rayons X permet d’observer dans le détail la structure et la densité de l’os. Les radius sont nettoyés (cuisson à la vapeur), puis pesés après leur passage à l’étuve. Le scanner réalise des images espacées de trois mm représentant des coupes transversales du radius. Ces images sont composées de pixels de 0,59 mm². Chaque pixel est caractérisé par la valeur d’un signal (exprimé en unités hounsfield ou HU) représentatif du degré d’absorption des rayons X, et donc, de la densité osseuse. A partir des images de chacun des os, la surface (exprimée en mm²) de pixels ayant un signal supérieur à 1500 HU est déterminée. 0,22 g de P digestible en croissance, et de 0,18 g en finition par MJ d’énergie nette L’absence de différence significative des performances zootechniques et des caractéristiques de carcasses constatée dans ces deux essais permet de justifier d’une recommandation en P digestible de 0,22 g/MJ EN en croissance, et de 0,18 g/MJ EN en finition. Les mesures au scanner à rayons X visualisent plus finement les éventuelles différences de minéralisation osseuse. Dans le second essai, le régime concentré en énergie et en P digestible entraîne une augmentation de la minéralisation des radius, mais sans que les porcs des autres régimes présentent des signes cliniques de déminéralisation. Le fait que la minéralisation osseuse maximale soit obtenue avec des apports en calcium et P supérieurs à ceux maximisant les performances, pourrait permettre d’expliquer ce résultat. Ces recommandations d’apport en P digestible sont néanmoins obtenues à partir de conditions d’alimentation plutôt libérales. Dans le cas d’une alimentation plus restreinte, il est souhaitable de tenir compte du niveau moyen d’alimentation. Didier GAUDRE, Ifip – Institut du Porc [email protected] Porfal, le logiciel de formulation sous windows pour optimiser des rations alimentaires pour les porcs Simple Il suffit de sélectionner les matières premières disponibles et de choisir dans une liste les besoins alimentaires correspondant aux stades des animaux. La formule calculée instantanément. Interactif Toutes les matières premières, nutriments et formules sont organisés de telle sorte que les recherches sont simplifiées. Il est facile de les enrichir ou les adapter selon le contexte. Convivial et ergonomique A l’écran, l’utilisateur visualise les nutriments et a accès aux calculs. Il peut stocker les formules et les fichiers matières premières, contraintes, besoins. C’est l’outil d’aide à la décision pour l’achat des matières premières et la formulation destiné aux techniciens et éleveurs qui fabriquent leur aliment à la ferme Tech Porc Contacts techniques : Didier Gaudré, [email protected] - Tél : 02 99 60 98 20 Laurent Alibert, [email protected] - Tél : 05 62 16 61 70 Contact commercial : Claude Montariol, [email protected] - Tél : 01 58 39 39 56 Novembre - Décembre 2014 - n° 20 15