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2011
NUMERO 19
Ce bulletin est rédigé et diffusé par la Pharmacologie Médicale et le CHU de Montpellier sans aide de l'industrie pharmaceutique.
Précisions : la fameuse liste de médicaments sous surveillance
L’Afssaps rappelle que tous les médicaments commercialisés en France font l’objet d’une surveillance de leurs
effets indésirables après
leur mise sur le marché. En effet, ce n’est qu’après une utilisation à large échelle et sur une population "tout
venant" que le profil de tolérance de ces médicaments peut être apprécié. Certains médicaments font l’objet d’une
surveillance plus spécifique:
soit parce qu’il s’agit d’une nouvelle substance active ou d’une nouvelle classe pharmacologique. Les
plans de gestion des risques ou PGR, mis en place à partir de 2005 constituent une surveillance renforcée
de ces nouvelles classes.
soit, pour un médicament déjà commercialisé, en raison de la détection de nouveaux signaux qui
nécessitent un approfondissement. La surveillance spécifique peut prendre la forme d’une enquête de
pharmacovigilance. Il s'agit de vérifier si ce signal nécessite une modification du résumé des
caractéristiques du produit, une information au prescripteur ou une mesure plus spécifique envers le
médicament (conditionnement, étude complémentaire, restriction d'usage voir retrait)
PHARMACOVIGILANCE
Quoi de neuf depuis Octobre au niveau de l'Afssaps?
Des contre-indications
Antihistaminiques de 1
ère
génération, mucolytiques, fenspiride
Les spécialités mucolytiques (acétylcystéine, carbocistéine), mucofluidifiantes (benzoate de
méglumine) et l’hélicidine sont contre-indiquées chez l’enfant de moins de 2 ans depuis le 29 avril 2010, compte
tenu du risque de majoration de l’encombrement bronchique, confirmé par les résultats de l’enquête de
pharmacovigilance mise en place par l’Afssaps à la suite de la notification de cas d’encombrement des voies
aériennes et d’aggravation de bronchiolite aiguë du nourrisson.
Par ailleurs à compter du 15 mars 2011, plusieurs sirops (ou solutions buvables) utilisés dans le traitement des
toux bénignes sont contre-indiqués chez les nourrissons de moins de 2 ans. Il s’agit de médicaments appelés
antihistaminiques H1 base de prométhazine, alimémazine, oxomémazine, chlorphéniramine et pimétixène
existant sous de nombreux noms de marque) et du fenspiride.
En effet, ces médicaments n’ont pas clairement fait la preuve de leur efficacité et peuvent être associés à des
effets indésirables. De plus leur effet sédatif pourrait être nocif en cas d’encombrement bronchique.
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De nombreux retraits
Retrait du buflomédil
Le buflomédil (Fonzylane®) a fait l'objet de plusieurs enquêtes de pharmacovigilance depuis 1997. Les risques
soulevés portaient sur des mésusages et notamment des surdosages. Malgré des mesures prises (information
changement de conditionnement), un certain nombre de notifications (60%) font toujours état d'un mésusage
évocateur de surdosage, et dans certains cas d’une évolution fatale. Au total, l'ensemble des membres de la
Commission nationale de Pharmacovigilance a conclu que le profil de tolérance du buflomédil était inacceptable
dans les conditions actuelles de l'AMM, et demandé son retrait en Février 2011.
Retrait du dextropropoxyphène
C'est définitif, c'est la fin de la saga dextropropoxyphène (Di-antalvic®, Propofan®), retrait définitif à partir du 1
er
mars 2011
Retrait du sitaxentan
Retrait du marché mondial de la spécialité sitaxentan (Thelin®) utilisé dans l'hypertension artérielle primitive suite à
la survenue de cas non prévisibles d’atteintes hépatiques graves.
Arrêt commercialisation du mésilate de pergolide
Le mésilate de pergolide Célance® est un agoniste dopaminergique, indiqué dans le traitement de la
maladie de Parkinson. Il existait un risque d'atteinte valvulaire et les laboratoires Lilly ont décidé d'arrêter la
commercialisation.
Des lettres aux prescripteurs
Lenalidomide et risque thromboembolique
L'utilisation concomitante de lenalidomide (Revlimid®) et de dexamethasone chez les patients
atteints de myelome multiple augmente le risque d'accidents thromboemboliques veineux et artériels
Risques hépatiques et dronédarone
Des cas d’atteintes hépatiques à la suite d’un traitement par dronedarone (Multaq®), incluant deux cas
d’insuffisance hépatique ont été rapportés chez des patients traités par la dronédarone. Parmi ceux-ci, certains
sont survenus précocement après le but du traitement. Des tests hépatiques sont actuellement préconisés tous
les mois pendant 6 mois puis à 9 et 12 mois, puis régulièrement par la suite.
Ostéonécroses de la machoire
On connaissait le risque lié aux biphosphonates, il faut actuellement penser aux risques sur-ajoutés
- traitement par bevacizumab (Avastin®) utilisés chez les patients atteints de cancer bronchique, rénal, sein ou
colorectal
- traitement par sunitinib (Sutent®), inhibiteur de protéine kinase indiqué dans le traitement de tumeurs malignes
avancées ou métastatiques stromales, gastrointestinales, neuroendocrines du pancréas, ou rénales.
Nitrofurantoïne et toxicité hépatique, pulmonaire
Nouvelle lettre d'information: Furadoine®, Furadantine® et Microdoine® ont déjà fait l'objet de modifications des
résumés des caractéristiques des produits en 2005 et d'une communication auprès des professionnels de santé en
2006 sur le risque de survenue d’effets indésirables graves, principalement pulmonaires (pneumopathies
interstitielles, fibrose) ethépatiques (cytolyse, hépatite chronique active, cirrhose), lors de traitements prolongés
La déclaration d’un effet indésirable médicamenteux (EIM) ou d'une dépendance est une obligation légale qui permet de
détecter et d'évaluer la fréquence de survenue de ces effets (Décret du 13 mars 1995). Il faut considérer cette déclaration
obligatoire non pas comme une contrainte administrative, mais comme un devoir de santé publique dont les patients et
le corps médico-pharmaceutique sont les bénéficiaires directs.
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La minute de réflexion «Les glitazones sont-
elles maudites?»
Parmi les traitements du diabète de type 2, s’il est une classe
pharmacologique qui a donné de grands espoirs et donné lieu à une foultitude de
publications, c’est bien celle des glitazones. Les pharmacologues vigilants,
« empêcheurs de progrès » pour certains, ne se sont pas laissés aveugler par les
sirènes, qu’elles s’appellent ciglitazone, euglitazone ou troglitazone. Ces glitazones
ont été rapidement abandonnées au cours des essais cliniques et…juste avant l’AMM pour la dernière. La
deuxième génération, rosiglitazone et pioglitazone, à grand renfort de tambours et de trompettes, blokbusters de
leur firme et médicaments phares, devaient apporter un nouvel éclairage et changer l’avenir du diabète de type 2
et…du syndrome métabolique.
Ayant obtenu l’AMM en 2002, sur le critère intermédiaire de la diminution de l’HbA1c, ces glitazones n’ont
pas tardé à faire parler d’elles pour leurs effets indésirables : prise de poids, insuffisance cardiaque,…tous
ces effets ayant déjà été observés lors des études précliniques…Du fait de l’effet « moyen » pour ne pas dire
négatif de la rosiglitazone sur les lipides, nos « Grands Penseurs » ont inventé les agonistes PPAR « hybrides »
(en réalité appelés mixtes), actifs à la fois sur les paramètres glucidiques et lipidiques via leur action sur les PPAR
gamma et PPAR alpha respectivement. Ces agonistes PPAR mixtes appelés « Glitazars » ont eu une vie courte et
remplie de « hazard » malchanceux en particulier la survenue de cancers urothéliaux chez le rat. Comme nous
l’expliquent souvent les « Grands Experts », le rat n’est pas l’homme et la plausibilité pharmacologique
indispensable pour le versant efficacité a une moindre valeur pour le versant tolérance. Je rappelle juste ici que la
cible pharmacologique que représentent les PPAR est ontologiquement très largement conservée au cours de
l’évolution des espèces. Nos « glitazars » ne sont donc toujours pas nés, car morts au milieu des années 2000,
avant l’obtention d’une AMM.
La pioglitazone a toujours montré de meilleurs résultats sur le bilan lipidique que sa sœur, la rosiglitazone,
sans doute en partie d’une potentielle activité agoniste PPAR alpha….Comble du comble, la rosiglitazone est
supprimée du marché en septembre 2010 (soit 8 ans après l’obtention de son AMM)…pour augmentation
du risque cardiovasculaire, ce qui est assez intéressant dans le diabète de type 2, le critère fort de morbi-
mortalité est la baisse de ce même risque cardiovasculaire. Sans commentaire…
Bon, revenons à nos préoccupations initiales de pharmacologues vigilants, la
pioglitazone a devant elle un grand avenir, celui de la « glitazone » restée le plus longtemps
sur le marché ! Mais en septembre 2010, nouvel épisode, une alerte de la FDA sur un
risque « potentiel » (non démontré à ce jour) de cancers de la vessie… Cela semble
nous rappeler quelque chose et amène à se poser la question d’une potentielle erreur de
suffixe ……
Et si une « glitazone » pouvait cacher un « glitazar ». Bien évidemment, cette histoire ressemble à toutes les
histoires de médicaments et pourrait aussi s’intituler « Dans les arcanes de l’évaluation du bénéfice/risque
certains Experts sont vigilants et d’autres plutôt somnolents ».
Dr Dominique Hillaire-Buys
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Les statines: un point sur les effets indésirables
Les statines sont des médicaments hypolipémiants dont la spécificité est d'inhiber
une enzyme clé de la synthèse du cholestérol: HMG-Co A réductase. Cinq molécules sont
actuellement commercialisées. Les plus anciennes sont les statines de première génération d'origine
naturelle extraite d'un pénicillium: la simvastatine (Lodalès
, Zocor
) et la pravastatine (Elisor
, Vasten
).
La fluvastatine (Fractal
, Lescol
) appartient à la deuxième génération. La troisième génération est
constituée de l'atorvastatine (Tahor
) et la rosuvastatine (Crestor
) d'origine purement synthétique Les
statines sont des médicaments bien tolérés, certains effets indésirables sont bénins et communs à toutes
les molécules, généralement transitoires: troubles gastrointestinaux, céphalées,
asthénie. D'autres sont plus graves et plus rares. Nous allons en faire ici une synthèse.
1. Effets indésirables musculaires:
L'incidence des effets musculaires au cours des essais cliniques, toute
symptomatologie et gravité confondues, se situent autours de 5% sans différence
significative versus placebo. Cette fréquence est également celle observée pour une élévation modérée
des CPK (Créatine Phospho Kinase). L'élévation conjointe des CPK et la présence d'une myalgie sont en
revanche plus rare. Les myalgies sous statines sont fréquentes, généralement réversibles en 2 à 3
semaines après arrêt du traitement. Les douleurs musculaires sont diffuses affectant le plus souvent les
muscles proximaux avec une sensation de faiblesse musculaire et de tension douloureuse. Ces myalgies
peuvent ne pas être associées à une élévation des CPK, alors que d'authentiques lésions musculaires
imputables aux statines sont présentes (anomalies histologiques avec dysfonctionnement de la fonction
mitochondriale réversibles à l'arrêt du traitement). Les myopathies associent les douleurs musculaires à
une élévation des CPK. Leur incidence est de l'ordre de 0.1 à 0.5% et est dose-dépendantes. Les myosites
associent myalgies et augmentation des CPK (<10N). La rhabdomyolyse correspond à un syndrome
consécutif à la destruction du muscle strié. Myalgie et élévation significative des CPK (>10N) sont
systématiquement présentes. La libération de quantité importante de myoglobine dans les urines peut être
dosée et colore celles-ci en brun. Les manifestations cliniques touchent préférentiellement les cuisses.
L'électromyogramme montre une atteinte myogène et la biopsie musculaire met en évidence une nécrose
des fibres musculaires associée à des zones de régénération. L'incidence des rhabdomyolyses observées
sous statines est très faible. Certains facteurs favorisants ont été évoqués parmi lesquels: l' âge (>80ans),
le sexe (féminin), un IMC bas, une polymédication, une insuffisance rénale, un diabète, une hypothyroïdie,
la consommation excessive d'alcool, une AEG, un traumatisme ou une chirurgie récente, une activité
physique intense.
Le mécanisme de toxicité musculaire des statines reste mal élucidé. Une des hypothèses fréquemment
citée est une diminution des concentrations mitochondriales d'ubiquinone intervenant dans la production
d'énergie cellulaire (ATP). Une diminution des réserves d'ATP altère le fonctionnement normal de la cellule
musculaire et peut en expliquer la destruction. Un déficit en ubiquinone est observé dans certaines
myopathies mitochondriales.
La toxicité musculaire étant souvent concentration-dépendante, attention aux doses élevées de
statine et aux situations les concentrations peuvent s'élever (IR, interactions
médicamenteuses)
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2. Autres effets indésirables de l'appareil locomoteur: tendinites, ruptures de tendons, arthralgies
Une revue de la base nationale de pharmacovigilance réalisée par le CRPV de Rouen en 2008, rapporte une
série de 96 patients sous statines ayant présenté des troubles tendineux: tendinites (N=
==
=63) et rupture de
tendon (N=
==
=33). Les tendinopathies surviennent dans plus de la moitdes cas (59%) durant la première
année de traitement et intéressent toutes les molécules. La réintroduction a été positive dans tous les cas
elle a été réalisée. Ces tendinopathies concernent le plus souvent le tendon d'Achille comme pour la
plupart des médicaments induisant ce type d'effets indésirables (fluoroquinolones).
Des arthralgies et arthropathies sont également décrites avec l'ensemble des
statines hydrophiles (pravastatine, rosuvastatine) comme lipophiles
(atorvastatine, fluvastatine, simvastatine).
3. Toxicité rénale
Bien que des cas de protéinurie et d'hématurie ont été décrits, le traitement par statines au long cours ne
semble pas représenter une cause d'insuffisance rénale en l'absence de rhabdomyolyse. Toutefois, en cas
de rhabomyolyse, la myoglobine exerce un effet toxique direct sur les cellules de l'épithélium tubulaire et
peut entraîner la formation de cylindres obstruant les tubules rénaux. De plus, la myoglobine peut inhiber
la synthèse du monoxyde d'azote par les cellules endothéliales et induire une
vasoconstriction intrarénale et une ischémie. Cette insuffisance rénale aiguë peut se
compliquer d'une acidose métabolique, d'hyperkaliémie, d'hypocalcémie,
d'hypophosphatémie. Le pronostic dépend de la sévérité de l'atteinte rénale et de la
présence ou non de complications.
4. Effets hépato-biliaires: augmentation des transaminases, hépatites,
pancréatites
Les effets indésirables hépatiques liés au statines sont rares (1 à 2%) avec
principalement des augmentations des transaminases (ASAT, ALAT) sans
répercutions cliniques. Cette augmentation est dose-dépendante. Elle survient le
plus souvent après quelques mois de traitement et dans la plupart des cas les
transaminases reviennent aux valeurs initiales sans arrêt du traitement. Le mécanisme toxique évoqué est
une altération de la membrane de l'hépatocyte à l'origine d'une fuite enzymatique plutôt qu'une toxicité
directe. Néanmoins, on retrouve dans la littérature des cas isolés d'hépatites et de pancréatites. Ce qui est
remarquable c'est que dans certains cas l'effet semble lié à la molécule elle même et n'est pas un effet
classe puisque l'effet se produit au moment d'un switch de molécule. En pratique, il est recommandé de
contrôler périodiquement les transaminases pendant la première année de traitement et de l'interrompre
en cas d'élévation persistante des ASAT et des ALAT au delà de trois mois.
Les ASAT ne sont pas spécifiques du foie, on les retrouve également à concentrations élevées dans
le myocarde, le muscle, le rein et le pancréas.
5. Effets indésirables neurologiques: neuropathie
On retrouve des cas de polyneuropathie et neuropathie périphérique ayant fait l'objet de publications et de
notifications spontanées. Il s'agit principalement d'atteintes sensitives ou sensitivomotrices se
manifestant par des paresthésies et des sensations d'engourdissement des membres inférieurs et/ou de
perte de sensibilité. Une diminution voir une abolition des réflexes ostéotendineux (achilléens
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