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I-2-1. La thèse de la neutralité structure de propriété- performance
Cherchant le lien entre l’indice de concentration13 et la performance, Demsetz H.,
Lehn K., (1985) concluent que la structure de détention du capital est endogène au processus
de maximisation du profit et que toutes les structures subissent la même agressivité
environnementale qui les conduit au même objectif. Cette thèse est partiellement confirmée
par Charreaux G., (1991) lorsqu’il établit que la performance des fonds propres est
indifférente à la forme organisationnelle. Jacquemin A., Ghellin E., (1978) vont dans le
même sens pour les grandes entreprises françaises.
. I-2-2. La thèse de la non neutralité structure de propriété- performance
Elle s’inscrit dans la logique des droits de propriété ou logique de la primauté des
intérêts individuels dans le comportement des partenaires sociaux. En conformité avec les
prévisions d’Adam Smith, de Berle et Means et de Jensen et Meckling, les travaux
empiriques qui y sont favorables distinguent deux principaux sens qui cohabitent : la
convergence des intérêts entre dirigeants et propriétaires lorsque , détenant ou contrôlant une
part non significative ou rien du tout, le dirigeant ne peut se passer du contrôle externe et par
conséquent recherche la performance ; l’enracinement lorsque les dirigeants , propriétaires
ou mandataires, détiennent ou contrôlent une part significative du capital, se passent du
contrôle externe et recherchent leurs propres intérêts (ou ceux de leurs mandants par transfert
des richesses) au détriment de l’intérêt général. La performance est ainsi compromise14.
Les travaux empiriques sont, entre autres15 , ceux de :
- Djelassi M., (1996) qui, dans le cas des entreprises françaises cotées, établit une relation
positive entre la performance et les entreprises contrôlées à actionnaire principal détenant
entre 0 et 20% du capital (convergence) et une relation négative au delà de 20%
(enracinement).
- Morck R., Schleifer A., Vishny R.W., (1988). Dans le cas des entreprises américaines,
lorsque l’actionnaire principal détient entre 0 et 5% de propriété, il y a une relation
positive avec la performance (convergence), entre 5 et 25%, elle est négative
(enracinement) et au delà de 25% elle est positive (convergence).
Ces études (I-1 et I-2), au demeurant parcellaires, sont effectuées dans un
environnement disposant de marché financier. Dans ce contexte, la dette et la structure de
propriété disciplinent les dirigeants. Seuls les indicateurs boursiers de performance sont
sensibles à la structure financière et à la structure de propriété face à la neutralité des
indicateurs comptables16.
Notre étude se particularise par l’absence des indicateurs boursiers de performance,
faute de marché financier17. Et nous nous posons la question de savoir si les indicateurs
comptables, les seuls utilisés dans cette recherche, continueront à être neutres (confirmation
des travaux occidentaux et américains et par là confirmation du caractère discriminant du
13 L’indice utilisé par Demsetz et Lehn est donné par l’expression logarithmique LC=log (C /(100-C) ), C étant le
pourcentage du capital détenu par le(s) principal(aux) actionnaire(s). Leech D., Leahy J.(1991) utilisent le même indice.
14 Ce lien négatif entre l’enracinement des dirigeants et la performance de l’entreprise peut être remise en cause dans une
entreprise manageriale. En effet, pour s’enraciner dans un contexte de relation d’agence, les dirigeants procèdent le plus
souvent à des investissements spécifiques liés à leur savoir-faire qui échappent au contrôle des actionnaires. Par conséquent,
ces dirigeants, qui accroissent ainsi leur capital managerial dans cette firme, ont intérêt à ne pas être licenciés et par là
évitent tout conflit avec les actionnaires en s’alignant aux objectifs de maximisation de la valeur de ces derniers.
15 Lire aussi Holderness C. G., Sheenan D. P.(1988) ; Leech D., Leahy J, (1991) ; Mourgues , 1987).
16 Les principaux indicateurs boursiers sensibles sont, le Q de Tobin (valeur de marché de la firme/valeur comptable de la
firme), le ratio de Marris (capitalisation boursière/actif net comptable), la mesure de Sharpe ( (espérance de rentabilité
boursière –taux de rentabilité sans risque)/ écart type de la rentabilité boursière). Quant aux indicateurs comptables,
généralement insensibles, il y a le taux de rentabilité économique, le taux de rentabilité d’exploitation.
17 Il faut noter que dans le cadre de l’apurement de sa dette vis à vis des entreprises et des ménages, l’Etat camerounais a
procédé à la titrisation de cette dette par émission des obligations du trésor à coupon zéro. Mais ces titres, qui sont en
principe négociables, n’ont aucun effet d’un véritable marché financier.