EDITORIAL
MAI2013
MERKUR 1
Réforme du dialogue social en entreprise:
de nouvelles contraintesinutiles pour lesentreprises
et néfastes pour l’investissement étranger
Au lieu de moderniser et de simplifier la structureet le
fonctionnement desorganesde représentation du personnel,
le projet de loiportantréformedu dialogue social au sein des
entreprisescréera un déséquilibre au profit desreprésentants
du personnelet du pouvoirsyndical et ajoutera desnouvelles
obligationsàla charge des employeurs.C’estexactement le
signal politiqueàne pas envoyerauxentreprisesluxembour-
geoiseset auxinvestisseurs étrangersen périodede criseet
de concurrenceinternationaleexacerbée.
Dans sa moutureactuelle,le projet de loivisant àréformer
le dialogue social àl’intérieurdes entreprises, et donc le fonc-
tionnement actuel desdélégationsdu personnelet descomi-
tésmixtes d’entreprise,ne trouve pas l’aval de la Chambre
de Commerce quirappelle dans sonavis commun avec la
ChambredesMétiersla propositionquiavaitétéfaiteaux
employeurs au coursde la tripartite parle précédentGouver-
nement –dont la compositionétaitsimilaireàl’actuel Gou-
vernement –d’optersoit pour uneréformedu dialogue social
àl’intérieur desentreprises(DSIE),soit pour l’introduction
du statut unique.Il estfort déplorable quequelques années
seulement aprèsl’introduction du statut unique et faisantfi
de ce choix, uneréformedu DSIEsoit àprésentimposéeaux
employeurs parle biaisd’un projet de loi.
Celui-ci vise àréformer le dialogue social àl’intérieurdes
entreprises, spécialement lesmodalitésde mise en placeet de
fonctionnement desreprésentationsdu personnelquesont,
dans toutes lesentreprisesoccupant au moins15 salariés,les
«délégationsdu personnel»et dans lesentreprisesde plus de
150salariés,les«comitésmixtes d’entreprise».
Si la Chambrede Commerce comprendqu’une réforme
en la matière estutileau vu deschangementsimportants
intervenus auxniveauxéconomique et social depuis l’adop-
tion deslois du 6mai1974 et du 18 mai1979 ayantinsti-
tuécesdifférents organesde représentation du personnel,
il estprimordial àsesyeux quele dialogue social soit conçu
dans le respectdu principe de la simplificationadministra-
tive et qu’iln’entravepasla bonnemarche de l’entreprise.
Pourtant et en dépitde la volontéaffichée parlesauteurs
du projet de loide rendre le dialogue social plus efficace et
rationnelet d’en améliorerla qualité, ni la structure, ni le
fonctionnement desorganesde représentation du person-
nel, ne sont modernisés et simplifiés par lesnouvellesdis-
positionsproposées.
Quantàla suppressiondu «comité mixted’entreprise»
(existantactuellement dans lesentreprisesde plus de 150
salariés), elle ne constituepasunesimplificationde la struc-
ture du dialogue social dans la mesure oùle projet de loi
prévoitde transférer l’ensemble de sescompétences, ycom-
pris lescompétencesde codécision,àla «délégation du per-
sonnel».Or,la nouvelle procédurede codécision envisagée
parle projet de loicompliqueradavantage, voireparalysera,
la prisede décision étantdonnéquele nombre d’interlocu-
teurs au sein de la «délégation du personnel»sera plus impor-
tant qu’ausein du «comité mixted’entreprise»,quela pos-
sibilité d’unecodécision avec le «bureau de la délégation du
personnel»(plutôtquela délégation elle-même)estinutile-
ment compliquée, et qu’enfin la médiationne permettra pas
de résoudre tous lescasde désaccordentrela «délégation du
personnel»et le chef d’entreprise.
La Chambrede Commerce s’oppose aussiformellement
àl’extension de la codécision auxquestionsayanttraitàla
formation professionnellecontinue,au motifqu’elleconsti-
tueuneingérenceinacceptable de la «délégation du person-
nel»dans la gestiondesressources humaines,et donc dans la
stratégie même de l’entreprise. A cela s’ajoutent de nouvelles
obligationsàla charge desemployeurs quicontribuerontà
surenchérirle coûtdu dialogue social de manière considé-
rableet injustifiable: augmentation du tempslibrerému-
néré àaccorder auxdélégués pour leur permettred’exercer
leur activité,augmentation desmoyens humains (conseillers,
experts, secrétariat) et matériels (local et moyende transport
appropriés,modesde communication) devant êtremisàleur
disposition, supplément d’heures de formation au profit des
délégués et suppléants élus pour la première fois,maintien
automatiquedu salaireen casde licenciement pour faute
graved’un déléguédu personnel …
Finalement,il faut reprocherauxauteursdu projet de loi
d’avoirprivilégié uneapproche qu’ondoit qualifierde«quan-
titative»et nonqualitative, créant ainsiun déséquilibre au
profit desreprésentantsdu personnelet du pouvoirsyndical,
àla fois injustifié et inapproprié. Bref,le projet de loiconsti-
tueun mauvaissignal politiquenonseulementàl’intention
desentreprisesluxembourgeoises, mais aussipour l’attracti-
vité futuredu Luxembourg àl’égarddesinvestisseursétran-
gers.Le texteintégral de l’avis commun estdisponible sur
lessitesde la Chambrede Commerce (www.cc.lu)et de la
ChambredesMétiers (www.cdm.lu). n