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Pharmactuel Vol. 33 No. 3 Mai/Juin 2000
PHARMACOTHÉRAPIE THÉORIQUE
La maladie de Parkinson
Certitudes et controverses pharmacothérapeutiques (deuxième partie)
Nancy Sheehan, M.Sc., pharmacienne,
Centre hospitalier régional de Sept-Îles
La première partie de cet article a été publiée dans
le Pharmactuel de mars/avril 2000.
Résumé
La gestion des différents stades de la maladie de
Parkinson est détaillée dans cet article. Les grands élé-
ments controversés sont exposés, dont ceux sur la
propriété neuroprotectice de la sélégiline, la cytotoxi-
cité de la lévodopa et le lien de causalité entre la prise
de la lévodopa et l’apparition des fluctuations motrices
et des dyskinésies. La gestion des complications de la
maladie de Parkinson est très complexe. Le but ultime
de la pharmacothérapie est de permettre une fonction
motrice adéquate pour la plus grande portion de la
journée sans induire de dyskinésie et d’effet indési-
rable psychiatrique.
Approche pharmacothérapeutique
Maladie de Parkinson légère à modérée
La pharmacothérapie de la maladie de Parkinson (MP)
est compliquée par de nombreuses controverses qui pro-
viennent d’un manque d’études cliniques fiables (13).
Plusieurs écoles de pensée existent et chacune défend
une approche thérapeutique très distincte. Pour cette rai-
son, l’élaboration d’un algorithme thérapeutique approu-
vé par tous est quasi impossible.
Les cliniciens s’entendent toutefois sur le moment opti-
mal pour l’initiation d’un traitement symptomatique. Un
traitement pharmacologique devrait être offert aux
parkinsoniens qui présentent une incapacité fonctionnel-
le significative, c’est-à-dire une perte d’autonomie qui
nuit aux activités de la vie quotidienne et qui menace
l’emploi (8,10). Les patients avec une instabilité posturale
devraient également recevoir un traitement afin de dimi-
nuer le risque de chutes (10). Il est primordial de réaliser
que la notion d’incapacité fonctionnelle est subjective et
sujette à une variabilité interindividuelle importante. La
décision de débuter un traitement variera selon les
attentes du patient, son âge, les symptômes présents et
son type de travail. Par exemple, un bijoutier qui a une
atteinte unilatérale du côté de sa main dominante aura
plus d’incapacité qu’un professeur de littérature droitier
qui a une atteinte du membre supérieur gauche (10,16).
L’individualisation du traitement de la MP est la clé du
succès.
Lorsque le clinicien aura pris la décision d’instaurer un
traitement pharmacologique, il devra choisir le médica-
ment approprié. C’est sur cette question que les experts
se disputent. Les différentes possibilités sont une mono-
thérapie avec la sélégiline, l’amantadine, les anticholiner-
giques, les agonistes dopaminergiques ou la lévodopa, ou
encore l’utilisation concomitante d’une faible dose de
lévodopa avec une faible dose d’un agoniste dopaminer-
gique (10,16). Afin de présenter les éléments justifiant
chaque approche, il est fondamental de faire le tour des
controverses.
Si un diagnostic précoce de la MP était possible, il
serait souhaitable d’offrir aux patients un traitement avec
une propriété neuroprotectrice, soit un médicament
capable d’éliminer les facteurs étiologiques ou capable de
ralentir la cascade de la pathogènese (48). La sélégiline
est la première molécule que l’on croyait dotée de cette
capacité. Aujourd’hui, la neuroprotection de la sélégiline
est le centre d’un débat fulminant. Selon la théorie du
stress oxydatif, les inhibiteurs de la monoamine oxydase B
(MAO-B), en diminuant le catabolisme de la dopamine
cérébrale, diminueraient la production des radicaux
libres néfastes. Les résultats des études in vivo et in
vitro ont démontré que la sélégiline inhibe la conversion
du 1-méthyl-4-phényl-1,2,3,6-tétrahydropyridine (MPTP)
en son métabolite toxique, le MPP+. Le résultat obtenu
est une diminution du dommage des neurones dopami-
nergiques engendrée par l’administration du MPTP.
Cependant, les résultats d’études plus récentes nous indi-
quent que la propriété neuroprotectrice de la sélégiline
est indépendante de l’inhibition de la MAO-B. Un de ses
métabolites, la desméthylsélégiline, serait la composante
responsable de la neuroprotection. Ce métabolite indui-
rait une diminution de l’apoptose cellulaire par le biais
d’une synthèse protéique accrue. Une augmentation de la
production de substances endogènes protégeant les neu-
rones dopaminergiques des radicaux libres, comme le
glutathion et le superoxide dismutase, serait impliquée.
L’administration de la desméthylsélégiline est présente-
ment à l’étude et pourrait s’avérer plus sécuritaire et plus
efficace que l’administration de la sélégiline (10).
Toutefois, les résultats des études cliniques ne démon-
trent pas cette neuroprotection tant attendue. L’étude
DATATOP (Deprenyl and Tocopherol Antioxidative
Therapy of Parkinsonism) est une étude prospective, à
répartition aléatoire, à double insu et contrôlée par place-
bo comprenant 800 parkinsoniens avec une maladie peu
avancée (stades I et II). Les patients étaient répartis de
façon aléatoire en quatre groupes : sélégiline 10 mg/jour
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et placebo, tocophérol (vitamine E) 2 000 unités/jour et
placebo, sélégiline et tocophérol, ou deux placebos. Les
chercheurs documentaient pour chaque sujet le délai
avant l’apparition d’une incapacité fonctionnelle
assez importante pour nécessiter l’introduction de la lévo-
dopa (49). Cette mesure a été très critiquée puisqu’elle
demeure subjective et n’est pas en soi un marqueur fiable
de la neuroprotection (7,13). La sélégiline a permis de
retarder l’introduction de la lévodopa de neuf mois
(risque relatif = 0,50; IC95 % 0,41-0,62). Compte tenu que
les résultats des études préliminaires n’avaient pas asso-
cié d’effet symptomatique à la prise de la sélégiline, les
chercheurs ont conclu que la sélégiline offrait une neuro-
protection (49). À la suite de l’arrêt de la sélégiline, une
détérioration clinique des patients a démontré que la
sélégiline produisait un véritable effet symptomatique,
facteur confondant de grande importance (50). De plus,
les effets initiaux n’ont pas été maintenus et une deuxiè-
me phase de l’étude a soulevé la possibilité que la mala-
die des sujets ayant reçu la sélégiline pouvait progresser
plus rapidement (13,48). Plusieurs questions doivent être
éclaircies par des études cliniques avant qu’on puisse pro-
noncer les louanges d’une neuroprotection et suggérer
une utilisation répandue de la sélégiline. La sélégiline,
étant bien tolérée, est un choix thérapeutique adéquat en
monothérapie et en concomitance avec d’autres antipar-
kinsoniens. Même lorsqu’il n’y a plus de soulagement
notable des symptômes, quelques cliniciens souhaitent
maintenir la sélégiline au profil pharmacologique des
patients dans l’espoir d’apporter une neuroprotection.
Cependant, il faut garder à l’esprit que cette pratique, qui
n’est pas appuyée par les résultats d’études cliniques, peut
amener des effets indésirables, augmenter le risque d’in-
teraction médicamenteuse et augmenter les coûts (13).
L’étude DATATOP a permis de conclure que l’adminis-
tration d’une dose importante de vitamine E, un antioxy-
dant, ne ralentit pas la progression de la MP (49).
Cependant, il est possible que les antioxydants soient des
agents prophylactiques intéressants s’ils sont introduits
avant l’apparition des premiers symptômes de la MP,
c’est-à-dire avant que 80 % des neurones dopaminer-
giques soient déjà détruits (51).
L’amantadine et les anticholinergiques peuvent être uti-
lisés tôt dans l’évolution de la MP compte tenu de leur
faible efficacité. Ils doivent, cependant, être évités chez
les personnes âgées ou chez les personnes avec des
troubles cognitifs (10). L’amantadine, en bloquant le
recaptage de la dopamine et en inhibant les récepteurs
du N-méthyl-D-aspartate (NMDA), pourrait également
être un neuroprotecteur. Selon les résultats d’une étude,
l’amantadine augmente la survie des parkinsoniens (52).
L’utilisation des agonistes dopaminergiques en mono-
thérapie est une pratique de plus en plus recomman-
dée (10). Les résultats des récentes études précliniques
faites avec des cultures de neurones dopaminergiques
démontrent que les agonistes dopaminergiques auraient
des propriétés neuroprotectrices (53). En stimulant les
autorécepteurs D2 présynaptiques, les agonistes dopami-
nergiques diminueraient le turnover de la dopamine, soit
la synthèse, la libération et le catabolisme de ce neuro-
transmetteur. De plus, ils auraient des effets antioxydants
directs et inactiveraient les radicaux libres (14,53). Des
études cliniques n’ont cependant pas encore confirmé
ces hypothèses. Les agonistes dopaminergiques sont éga-
lement des épargneurs de la lévodopa. Ils permettent de
diminuer la dose de lévodopa de 10 à 30 % et de retarder
son introduction (2,10). Toutefois, les bénéfices de ces
propriétés sont controversés (13). Finalement, l’utilisa-
tion précoce des agonistes dopaminergiques en monothé-
rapie peut retarder l’apparition des fluctuations motrices
puisqu’ils stimulent les récepteurs dopaminergiques de
façon plus continue (14). Cet avantage est particulière-
ment souhaitable chez les jeunes parkinsoniens qui sont
plus à risque de connaître de fâcheuses fluctuations
motrices. Chez cette population, les experts recomman-
dent l’initiation de la pharmacothérapie avec un agoniste
dopaminergique (10). Lorsque cette stratégie devient
insuffisante, l’ajout de la lévodopa est indiqué (1,10).
Doit-on retarder l’introduction de la lévodopa ou mini-
miser la posologie de cet agent? Cette question fonda-
mentale influence toute l’approche pharmacothérapeu-
tique. Depuis des années, des cliniciens croient
fermement à la nécessité de retarder le plus possible l’ini-
tiation de ce puissant traitement (13). Trois hypothèses
théoriques expliquent cette pratique.
Premièrement, certains croient que la lévodopa est
cytotoxique pour les neurones dopaminergiques puis-
qu’elle permet une libération massive de dopamine qui
est ensuite convertie en radicaux libres (2,10). Les résul-
tats des études faites sur des animaux et des humains
sains ne démontrent aucune dégénérescence neurolo-
gique secondaire à la lévodopa, tandis que les résultats
des études faites sur des animaux avec un syndrome par-
kinsonien induit par le MPTP démontrent une détériora-
tion des neurones dopaminergiques à la suite de la prise
de la lévodopa. La lévodopa est potentiellement nocive
chez des animaux déjà sujets à un stress oxydatif et ayant
des mécanismes de défense compromis (10). Les résul-
tats des études cliniques qui tentent de documenter la
progression de la MP et l’espérance de vie des parkin-
soniens sous la lévodopa n’arrivent pas à démontrer l’im-
pact de cette dégénérescence neurologique (5). La pro-
gression de la MP est semblable chez les patients
recevant soit la lévodopa ou la bromocriptine (13). La
lévodopa augmente l’espérance de vie des parkinsoniens
en diminuant les complications induites par l’immobilité,
soit les maladies cardiovasculaires, les accidents vascu-
laires cérébraux, l’aspiration et les chutes (3,5).
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Deuxièmement, il y a une idée qui circule concernant la
durée d’efficacité de la lévodopa. Certains pensent que
les patients observent une tolérance à la lévodopa après
un certain nombre d’années d’utilisation. Pour cette rai-
son, les cliniciens retardent le début de la lévodopa jus-
qu’à ce que les patients soient incapables de tolérer leurs
symptômes, à défaut de diminuer grandement leur quali-
té de vie entre temps. La lévodopa devient moins efficace
avec le temps, mais cela est provoqué par la progression
incontournable de la maladie (3). Avec les années, appa-
raissent des symptômes non soulagés par la lévodopa,
soit l’instabilité posturale, les troubles de la démarche, de
la dysarthrie et des troubles cognitifs. Peu importe le
moment de l’introduction de la lévodopa, ces symptômes
apparaîtront à la même vitesse et répondront peu ou pas
à la lévodopa (17).
Finalement, il y a l’hypothèse que l’administration de la
lévodopa pendant de longue période engendre des fluc-
tuations motrices et des dyskinésies (13,17). Cette affir-
mation est partiellement véridique mais l’apparition des
fluctuations motrices est également secondaire à la pro-
gression de la MP (17). Avec les années, les boutons pré-
synaptiques des neurones dopaminergiques perdent leur
capacité d’entreposer la dopamine et de la libérer gra-
duellement dans la fente synaptique. Des fluctuations
importantes de la stimulation des récepteurs postsynap-
tiques en résultent et mènent aux complications
motrices. En pratique, il est difficile de distinguer l’im-
pact de la progression de la maladie et la durée d’utilisa-
tion de la lévodopa puisque ces deux facteurs sont sou-
vent reliés (13).
En résumé, peu d’études cliniques donnent des justifi-
cations pour retarder l’introduction de la lévodopa. Seule
la possibilité que la durée d’utilisation de la lévodopa soit
en partie responsable des fluctuations motrices encoura-
ge les cliniciens à initier un traitement avec un agent
autre que la lévodopa (17). Chez les personnes diagnosti-
quées après l’âge de 70 ans, soit des parkinsoniens avec
un plus faible risque de développer des fluctuations
motrices, la question du moment idéal pour introduire la
lévodopa ne devrait pas se poser (16). La lévodopa
devrait être débutée lorsque le patient rapporte une inca-
pacité fonctionnelle qui lui est significative (13,16). La
lévodopa est mieux tolérée que les agonistes dopaminer-
giques, l’amantadine, la sélégiline et les anticholiner-
giques chez les patients âgés et davantage en présence de
troubles cognitifs (10).
Dernier élément controversé. Doit-on débuter la lévo-
dopa avec la formulation régulière ou avec la formulation
à libération prolongée? La théorie imposerait l’adminis-
tration de la forme CR puisque celle-ci devrait permettre
une stimulation plus soutenue des récepteurs dopaminer-
giques et devrait retarder l’apparition des fluctuations
motrices (14). Il est important de reconnaître que les fluc-
tuations des concentrations plasmatiques de lévodopa
n’amènent pas nécessairement des fluctuations des
concentrations cérébrales de dopamine. Les patients
avec une maladie peu avancée ont, en général, des neu-
rones dopaminergiques encore aptes à entreposer adé-
quatement la dopamine et à la libérer graduellement (13).
En effet, les résultats d’une étude clinique prospective
(Sinemet CR First Study) ont rejeté l’hypothèse que la
forme CR, comparativement à la forme régulière, pouvait
retarder l’apparition des fluctuations motrices (10). Un
avantage pratique du Sinemet CRMD est qu’il peut être pris
deux fois par jour au lieu de trois fois par jour, amélio-
rant ainsi potentiellement l’observance du patient à son
régime médicamenteux. Cependant, plusieurs patients
avec un syndrome parkinsonien léger peuvent être
contrôlés adéquatement avec deux doses de SinemetMD
régulier par jour, et ce, à cause de la réponse de longue
durée de la lévodopa qui persiste pendant plusieurs jours.
En pratique, la formulation à libération contrôlée est
aussi efficace que la formulation régulière. Elle n’apporte
aucun bénéfice notable chez les parkinsoniens de stade
léger et s’avère plus dispendieuse. La formulation réguliè-
re est donc recommandée (13). La posologie devrait être
augmentée graduellement selon la tolérance et la réponse
du patient. En règle général, les cliniciens ajoutent un
agoniste dopaminergique lorsqu’un patient n’est pas adé-
quatement contrôlé par une dose quotidienne de lévodo-
pa de 600 à 800 mg (15).
Pour le traitement de la MP légère à modérée, la der-
nière stratégie thérapeutique possible est l’utilisation
concomitante de faibles doses de lévodopa et d’un ago-
niste dopaminergique. Cette association est clairement
bénéfique chez les patients avec une maladie plus avan-
cée présentant des fluctuations motrices (26,29,33).
Cependant, les études cliniques qui supportent cette
association sont absentes pour les patients avec une
maladie moins avancée (16). Même si quelques études
contredisent l’utilité de cette stratégie, plusieurs experts
anticipent une efficacité supérieure, une diminution de la
dose quotidienne de lévodopa et une diminution des fluc-
tuations motrices par le biais d’une stimulation plus
constante des récepteurs dopaminergiques (2,13).
Maladie de Parkinson avancée
Avec l’évolution de la maladie, la gestion de la sympto-
matologie et des complications motrices et non motrices
est de plus en plus complexe. Les fluctuations motrices
et les dyskinésies (mouvements involontaires cho-
réiques) apparaissent chez 20 à 50 % des patients après
cinq ans de thérapie (10,54). Ces complications motrices
deviennent souvent plus incommodantes que les symp-
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tômes cardinaux de la MP (10). Le but ultime de la phar-
macothérapie est de permettre une fonction motrice adé-
quate pour la plus grande portion de la journée sans
induire de dyskinésie. L’individualisation du traitement
est indispensable puisqu’il y a une grande variabilité inter-
individuelle dans la présentation des complications (1).
Idéalement, les patients devraient garder un journal pour
documenter l’apparition des akinésies et des dyskinésies.
Un journal des fluctuations motrices est également sou-
haitable en milieu hospitalier puisqu’il facilite l’ajuste-
ment médicamenteux (55). Le suivi des patients atteints
de la MP devient très laborieux pour toute l’équipe trai-
tante. Plusieurs ajustements médicamenteux sont néces-
saires selon la réponse clinique et la tolérance des
patients. Au cours de la progression de la maladie, les
patients deviennent plus sensibles aux effets indésirables
psychiatriques ainsi qu’aux dyskinésies (55). Par consé-
quent, la thérapie doit être limitée et la fonction motrice
est parfois sous optimale. Notamment, le seuil d’appari-
tion des dyskinésies diminue avec les années jusqu’à ce
que la dose de lévodopa nécessaire pour améliorer la
fonction motrice soit identique à celle qui induit des dys-
kinésies. Dans cette situation, les patients doivent déci-
der s’ils préfèrent subir des dyskinésies ou une incapacité
motrice. En règle général, les cliniciens et la famille des
patients préfèrent qu’ils connaissent des périodes d’aki-
nésie, tandis que les patients choisissent souvent les dys-
kinésies (1). Le traitement de la MP lors des stades avan-
cés n’est guère facile et parfois très décevant. Les
cliniciens doivent procéder en faisant constamment
des essais.
Fluctuations motrices et dyskinésies
Les fluctuations motrices correspondent à des varia-
tions de la fonction motrice au cours de la journée, tandis
que les dyskinésies sont des mouvements involontaires
anormaux souvent de type choréique (1). Les facteurs de
risque de ces complications motrices sont l’âge du
patient lors du diagnostic (les jeunes patients étant plus
susceptibles), la durée de la maladie, la durée d’utilisa-
tion de la lévodopa et l’utilisation de doses quotidiennes
élevées de lévodopa (54). Le mécanisme exact, tel qu’il
est mentionné précédemment, dépend de la dégénéres-
cence des neurones dopaminergiques. Étant incapables
d’entreposer et de libérer graduellement la dopamine
dans la fente synaptique, les neurones dopaminergiques
libèrent des quantités massives de dopamine de façon
pulsatile. Ces variations importantes des concentrations
de dopamine dans la fente synaptique permettent une sti-
mulation non continue des récepteurs postsynaptiques ce
qui les endommagent et produit les fluctuations motrices
et les dyskinésies (10,12,56).
Deux types de fluctuation motrice existent : l’effet
d’épuisement (wearing off) et le phénomène on/off.
L’effet d’épuisement correspond à une perte de la fonc-
tion motrice vers la fin de l’intervalle posologique de la
lévodopa (5). Tôt dans l’évolution de la maladie, la for-
mulation régulière de la lévodopa est efficace pendant
plus de quatre heures (10). Toutefois, plus la maladie pro-
gresse plus la réponse clinique de la lévodopa s’atténue
après deux à quatre heures. L’apparition de cette fluctua-
tion motrice devient prévisible et elle est dépendante de
l’horaire d’administration de la lévodopa. Les périodes
d’akinésie sont souvent accompagnées de troubles senso-
riels, psychiatriques et du système nerveux autonome. La
gestion de cette complication consiste à rapprocher les
doses de la lévodopa (55). Le moment approprié pour
donner une dose de lévodopa est lorsque le patient com-
mence à ressentir une diminution de l’effet clinique de la
dose précédente (10). L’ajout d’un antiparkinsonien avec
une longue demi-vie d’élimination, tel qu’un agoniste
dopaminergique, ou l’introduction de la formulation à
libération prolongée de la lévodopa est souvent béné-
fique (Tableau I) (5,10,55).
Le phénomène on/off est une fluctuation motrice
imprévisible puisqu’il n’est pas relié à l’heure d’adminis-
tration de la lévodopa. Les patients connaissent soudaine-
ment une intense akinésie (off) qui dure quelques
secondes à quelques minutes. Ensuite, ils connaissent à
nouveau une fonction motrice adéquate (on). Cette com-
plication motrice est extrêmement difficile à gérer.
Plusieurs stratégies pharmacothérapeutiques peuvent
être essayées (Tableau I) (10, 55).
Les dyskinésies, quant à elles, peuvent être divisées en
trois types (1). De façon plus courante, on retrouve la
dyskinésie de pic de dose qui est caractérisée par un
mouvement de type choréique au niveau du tronc, de la
tête, des membres et des muscles respiratoires (9). Ces
mouvements anormaux apparaissent lors de l’atteinte de
la concentration maximale de la lévodopa (54). Afin d’at-
ténuer cet effet indésirable, il s’agit de diminuer la dose
de lévodopa ou de passer à la formulation à libération
prolongée (Tableau I) (9,55).
La dystonie de fin de dose est la deuxième dyskinésie
possible. Cette dyskinésie est une contraction involontai-
re, soutenue et douloureuse des muscles, entre autres,
ceux des membres inférieurs (1). Typiquement, ces
contractions sont visibles tôt le matin ou tard en après-
midi lorsque les concentrations cérébrales de dopamine
sont très faibles et ils disparaissent à la suite de l’adminis-
tration d’une dose de lévodopa (9, 55). La gestion de ces
dystonies consiste à augmenter le traitement dopaminer-
gique et à rendre la stimulation des récepteurs dopami-
nergiques plus constante (Tableau I) (1,9).
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Finalement, la dyskinésie diphasique est une complica-
tion très rare. Des mouvements choréiques apparaissent
tôt après l’administration d’une dose de lévodopa et une
fois de plus à la fin de l’intervalle posologique (55).
Le patient connaît entre temps un moment de confort (54).
Les périodes de dyskinésies sont associées à l’augmen-
tation et à la diminution de la concentration plasmatique
de lévodopa et non au moment où la concentration est à
son maximum (55). Il est très difficile de gérer les dyski-
nésies diphasiques. Les fluctuations des concentrations
plasmatiques de la lévodopa doivent être atténuées
(Tableau I) (16).
Le Tableau I présente les principales stratégies utilisées
pour gérer les fluctuations motrices et les dyskinésies.
Toutes ces stratégies sont valables et peuvent être effi-
caces selon les individus. Les cliniciens doivent parfois
essayer plusieurs ajustements médicamenteux avant de
réussir à soulager ces complications.
Pour les complications motrices plus résistantes, l’utilisa-
tion de l’apomorphine en sous-cutané, de façon sporadique,
peut être bénéfique pour renverser des périodes intenses
d’akinésie. Des perfusions sous-cutanées ou des injections
répétitives d’apomorphine sont bénéfiques dans les cas
plus récalcitrants (10). De plus, l’administration d’une solu-
tion de lévodopa offre parfois un meilleur contrôle des fluc-
tuations motrices et des dyskinésies (10,55). Cette forme
liquide permet une augmentation plus graduelle de la
dose de lévodopa. Ceci est bénéfique puisque les patients
rendus à un stade avancé de la maladie sont plus sen-
sibles et peuvent réagir abruptement à une petite aug-
mentation posologique. Cette stratégie échouera sans la
motivation du patient. À chaque jour, le patient doit pré-
parer la solution de lévodopa en triturant dix comprimés
de lévodopa/carbidopa 100/25 régulier et en ajoutant 2 g
d’acide ascorbique et 1 litre d’eau (10). Ceci produit une
solution de lévodopa à une concentration de 1 mg/mL. La
première dose de la journée demeure identique à celle
prise sous forme de comprimés. Ensuite, le patient doit
prendre une dose à toutes les heures. Les cliniciens peu-
vent débuter en prescrivant la même dose quotidienne
mais doivent ensuite faire des ajustements posologiques
aux trois à cinq jours. Le patient doit être avisé que plu-
sieurs semaines seront nécessaires pour faire ces ajuste-
ments posologiques et qu’il connaîtra une détérioration
motrice importante pendant cette période (1). En pra-
tique, la solution de lévodopa est peu utilisée en raison
de sa complexité.
Une autre possibilité est l’absence de réponse clinique
après l’administration d’une dose de lévodopa. Deux
notions pharmacocinétiques peuvent expliquer cette
situation. Une diminution de la vidange gastrique peut
ralentir l’absorption duodénale de la lévodopa. Afin de
remédier à ce problème, l’administration du cisapride
(PrepulsidMD) peut être tentée (5,10). L’administration de
la lévodopa en perfusion entérale via le duodénum est
parfois essayée dans les cas plus sévères (5).
Deuxièmement, les acides aminés neutres provenant
d’une alimentation riche en protéines peuvent faire com-
pétition à la lévodopa lors de son absorption intestinale
et lors de sa pénétration au travers de la barrière hémato-
encéphalique (16). Le rôle de la diététiste devient alors
très important. En plus de prendre les comprimés régu-
liers de lévodopa/carbidopa à jeun, une redistribution des
protéines dans la diète quotidienne devra être envisagée
Tableau I : Gestion des fluctuations motrices et des dyskinésies (1,5,9,10,14,16,55)
Effet d’épuisement (wearing off) Lévodopa :Sintervalle posologique ±Adose quotidienne
Lévodopa : passage forme régulièreFCR
Agoniste dopaminergique : introduire ouAdose quotidienne
Sélégiline/Amantadine/ Inhibiteur COMT (si disponible) : introduire
Phénomène on/off Lévodopa : Adose quotidienne
Lévodopa : passage forme CRFrégulière
Agoniste dopaminergique : introduire ouAdose quotidienne
Sélégiline/Inhibiteur COMT (si disponible) : introduire
Dyskinésie de pic de dose Lévodopa :Schaque dose, fractionner les doses
Lévodopa : passage forme régulièreFCR
Agoniste dopaminergique : introduire et Sposologie de la lévodopa
Sélégiline : cesser
Dystonie de fin de dose Lévodopa : passage forme régulièreFCR
Lévodopa : introduire une dose CR au coucher ±Adose quotidienne
Agoniste dopaminergique : introduire ouAdose quotidienne
Baclofen : introduire
Toxine botulinique de type A
Dyskinésie diphasique Lévodopa : passage forme CRFrégulière
Lévodopa :SouAdose quotidienne,Anombre de prises
Agoniste dopaminergique : introduire ouAdose quotidienne
Sélégiline : cesser
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