hyperlipidemie et diabete en cote d`ivoire etude transversale de 132

Médecine d'Afrique Noire : 1998, 45 (10)
Our patients were threatened by high risk of athero -
sclerosis since we found 53,8 % of hypertension, 27,3 %
of hyperuricemia and 50,8 % of obesity.
HYPERLIPIDEMIE ET DIABETE EN COTE D’IVOIRE
ETUDE TRANSVERSALE DE 132 CAS
A. LOKROU*
* Département d’endocrinologie et Maladies métaboliques - 01 BP V 166
- Abidjan 01 (Côte d’Ivoire).
RESUME
A l’instar de la maladie diabétique, les dyslipidémies
bénéficient d’un regain d’intérêt en raison de l’émer-
gence des cardiopathies ischémiques en Afrique Noire.
Cette étude préliminaire a concerné 279 patients dont
132 ont présenté une hyperlipidémie, soit 47,4 % des
cas. L’ h y p e rc h o l e s t é rolémie pure est la plus fréquente
des dyslipidémies (44 % des cas) suivie de
l’hyperlipidémie mixte (39,3 %) ; l’hypert r i g l y c é r i d é -
mie n’étant observée que dans 16,7 % des cas. C’est le
diabète de type II qui s’associe le plus fréquemment à
ces désordres lipidiques (69,8 %), le diabète de type I
n’étant impliqué que dans 7,6 % des cas. Parmi les
cardiopathies ischémiques, seule la prévalence de l’in-
f a rctus du myocarde semble digne d’intérêt (15,1 %).
Par ailleurs les patients examinés sont à haut risque
d ’ a t h é ro s c l é rose avec notamment, 53,8 % d’hypert e n -
sion artérielle, 27,7 % d’hyperuricémie et 50,8 % d’obé-
sité.
SUMMARY
Hyperlipidemia and diabetes mellitus in Ivory Coast
Cross-sectional study of 132 cases
Because of increasing incidence of ischemic heart
diseases, dyslipidemias like as diabetes mellitus, are
becoming more interesting for re s e a rchers in black
Africa.
This pre l i m i n a r y study of 279 diabetics revealed 132
hyperlipidemic subjects (47,4 %).
H y p e rc h o l e s t e rolemia was the most frequent (44 %).
We found 39,3 % of combined hyperlipidemia and 16,7
% of hypertriglyceridemia.
NIDD was the most frequent type associated with these
lipidic disorders (69,8 %) ; IDD has been observed in
7,6 % of cases.
Among ischemic heart diseases, only myocardial
infarction showed a high rate of prevalence (15 %).
INTRODUCTION
A l’instar de la maladie diabétique, les autres maladies
métaboliques autrefois considérées comme l’apanage des
pays nantis, voient leur prévalence s’accroître. S’agissant
du cas particulier des hyperlipidémies impliquées dans la
genèse des cardiopathies ischémiques en conjonction le
plus souvent avec le diabète et/ou l’obésité, aucun travail à
notre connaissance, ne leur a été consacré en Afrique sub-
saharienne.
L’objectif du présent travail est, par conséquent, d’étudier,
en première approche, les caractéristiques épidémiologi-
ques des hyperlipidémies chez les diabétiques en Côte
d’Ivoire et de définir leurs modalités associatives avec la
maladie diabétique.
MATERIEL ET METHODE
Il s’agit d’une étude transversale conduite du 1er janvier
1989 au 30 juin 1992 et ayant concerné 279 diabétiques
régulièrement suivis à la consultation des maladies
endocriniennes et métaboliques du CHU de Tr e i c h v i l l e .
Outre l’évaluation de la maladie diabétique tant sur le plan
clinique qu’évolutif chaque patient a bénéficié d’un bilan
lipidique incluant les paramètres suivants :
. cholestérolémie totale,
. triglycéridémie,
. HDL-cholestérol par une méthode de précipitation,
. LDL-cholestérol : celui-ci n’a pas été dosé mais calculé
à l’aide de la formule de Friedwald-Fredrickson.
Les principaux dosages ont été effectués par le laboratoire
de Biochimie de la Faculté de Médecine (Pr. F. Sié-
Kétékou). Les normes utilisées sont par conséquent celles
en vigueur dans ce laboratoire et qui se rapprochent d’ail-
leurs des critères du Consensus international :
Médecine d'Afrique Noire : 1998, 45 (10)
. cholestérolémie : 1,50 g/l à 2 g/l (normes fixées chez
l’Ivoirien),
. Triglycéridémie : inférieure ou égale à 1,50 g/l.
RESULTATS
Sur le plan épidémiologique, la prévalence globale des
dyslipidémies s’établit à 47,4%.
En effet sur 279 patients inclus, 132 ont présenté une
hyperlipidémie. la répartition des anomalies lipidiques
s’est faite comme suit :
. hypercholestérolémie : 58 cas (soit 44 %),
. hypertryglycéridémie : 22 cas (soit 16,7 %),
. hperlipidémie mixte : 52 cas (soit 39,3 %).
La répartition en fonction du sexe a montré que le sex-ratio
était égal à l’unité. En effet, 66 patients (50 %) étaient de
sexe masculin et 66 autres de sexe féminin. La répartition
était quasi similaire dans le groupe des diabétiques non
hyperlipidémiques avec 83 hommes (56,46 %) et 64
femmes (43,54 %).
L’étude de l’âge s’est caractérisée par la surmorbidité de la
tranche comprise entre 50 et 54 ans qui a regroupé à elle
seule 26,5 % des patients.
Les autres tranches les plus touchées étaient celles compri-
ses entre 40 et 44 ans (13,6 %) et 55-59 ans (11,5 %). En
revanche, les tranches d’âge extrêmes ont présenté une pré-
valence quasi anecdotique : 0,8 % entre 20-24 ans et 1,5 %
entre 85-89 ans.
Parmi les groupes socio-économiques, ce sont les fonction-
naires (46,2 % des cas) et les femmes au foyer.
L’étude de la répartition selon le groupe ethnique ne pour-
rait revêtir un intérêt particulier que par rapport aux habitu-
des alimentaires des différents groupes en présence.
En fait, celles-ci diffèrent très peu d’une région à l’autre,
mais le groupe Akan, composé d’un fort contingent de
lagunaires et de pêcheurs, pourrait être considéré comme
plus consommateur de poisson que les autres.
Il représente avec 69 patients, 52,2 % des diabétiques, suivi
du groupe Krou (forestier) avec 21 sujets, soit 16 % des
patients.
Cette répartition est similaire à celle de la population non
hyperlipidémique (53,4 % et 18 % respectivement) et reflè-
te en fait la répartition de la population générale de la Côte
d’Ivoire.
L’origine géographique, et singulièrement l’opposition
entre la provenance urbaine et rurale peut également
témoigner des habitudes alimentaires, les urbains ayant une
alimentation proche de celle des sujets occidentaux avec,
théoriquement, prédominance de sucres simples et d’huiles
riches en graisses saturées. Les urbains représentent, avec
124 patients, 94 % des dyslipidémiques. Mais la population
non hyperlipidémique présente également la même répar-
tition avec 86,39 % de sujets vivant en zone urbaine.
La répartition des anomalies lipidiques en fonction du type
de diabète a révélé la prépondérance du diabète non
insulino-dépendant. Mais il convient de préciser la répar-
tition des différents types de diabète dans la population
globale : 70,7 % des cas pour le DNID, 10,4 % pour le dia-
bète insulino-dépendant et 12,9 % pour le diabète “insu-
lino-nécessitant”.
Parmi les dyslipidémiques, la répartition a été la suivante :
. DNID : 92 cas (69,8 %),
. DIDA : 10 cas (7,6 %),
. TTG : 12 cas (9 %),
. DIN : 18 cas (13,5 %).
Par ailleurs, le tableau n°1 spécifie les données précédentes
chez 104 patients.
A. LOKROU
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Tableau I : Prévalence des hyperlipidémies en fonction du type de diabète
Type de Hyper-cholesterolémie Hyper-triglycéridémie Hyper-lipidémie mixte
diabète n % n % n %
DNID 24 80 27 71,05 21 58,33
DIN 3 10 5 13,15 6 16,67
TTG 2 6,7 4 1,053 3 8,33
DID 1 3,3 2 5,27 6 16,67
Total 30 100 38 100 36 100
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L’étude des complications du diabète sucré chez les dysli-
pidémiques a montré la prédominance des complications
infectieuses (36,4 % des cas). Les complications macro-
angiopathiques ont représenté 21,1 % des cas avec 3 %
pour les AVC et l’artérite des membres inférieurs et 15,1 %
pour l’infarctus - latent - du myocarde. Les troubles micro-
angiopathiques ont consisté en 28 cas de rétinopathie (21,2
%), 34 de néphropathie patente (25,8 %) et 23 cas de
polyneuropathie (17,4 % des cas).
Les autres facteurs de risque d’athérosclérose ont été
recherchés chez nos patients et se sont répartis ainsi :
. HTA : 53,8 % (71 patients),
. Hyperuricémie : 27,3 % (36 patients),
. Obésité (déterminée et par la formule de Lorentz et par
le BMI) : 50,8 % des cas (61 patients).
DISCUSSION
Ce travail princeps révèle une prévalence particulièrement
élevée des hyperlipidémies chez le diabétiques africain en
Côte d’Ivoire. La prééminence des hypercholestérolémies
pures peut surprendre. En effet, ce sont les hypertriglycéri-
démies qui prédominent classiquement chez le diabétique,
traduisant ainsi la carence insulinique (8).
Les autres données épidémiologiques ne présentent pas de
grande originalité. En revanche, la sur-morbidité des sujets
âgés de plus de 50 ans et la fréquence particulièrement
élevée de l’hypertension artérielle et de l’obésité expli-
quent sans doute la grande proportion de patients atteints
d’infarctus du myocarde.
La répartition des dyslipidémiques en fonction du type de
diabète révèle une prédominance du diabète non insulino-
dépendant. Il convient cependant de préciser que si les dia-
bétiques non insulino-dépendants présentaient le même
taux moyen de HDL-cholestérol (0,47 g/l) que les diabéti-
ques insulino-dépendants (0,42 g/l), en revanche ils avaient
un taux moyen de LDL-cholestérol plus bas (1,68 g/l
contre 2,05 g/l pour les DID).
Cette situation semble d’autant plus paradoxale que la pro-
portion d’obèses est nettement plus élevée dans le DNID
(31,7 % en utilisant le BMI) que le DID (1,7 %).
Pour le reste, aucun élément de comparaison n’existe dans
la littérature africaine. De même ce travail à visée pure-
ment descriptive, ne permet pas d’établir des corrélations
avec certaines complications évolutives comme par exem-
ple la rétinopathie mise en exergue par C.D. AGARDH et
coll. (1) ni de préciser le rôle des hyperlipidémies décrites
en tant que facteurs de risque cardio-vasculaire (3).
Enfin, l’absence de modification du taux de HDL dans le
DNID surprend et mérite d’être confirmée par un travail
ultérieur. Il en est de même pour le LDL-cholestérol dont
le taux, relativement bas dans le diabète de type II par
rapport au type I, mérite également confirmation.
En conclusion, ce travail préliminaire révèle que
l’association diabète-hyperlipidémie est fréquente en Côte
d’Ivoire et rend assez paradoxal le fait apparemment établi,
de la rareté des cardiopathies ischémiques chez le diabéti-
que africain.
D’autres travaux sont donc nécessaires d’une part pour
préciser les données rapportées ici, d’autre part, afin d’éta-
blir la prévalence des dyslipidémies dans la population
générale.
Ces travaux pourraient bien, à l’instar de ce qui s’est passé
pour la maladie diabétique, montrer que la notion commu-
nément admise, de l’hyperlipidémie apanage des pays
riches, est sans fondement et que celle-ci doit être systéma-
tiquement dépistée dans les groupes à risque, singuliè-
rement ceux d’Afrique Noire.
HYPERLIPIDEMIE ET DIABETE… 557
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