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Jeudi 9 décembre 2004 :
La pauvreté et l'Union européenne
Présidence : Jacinta De Roeck
Vice-Présidence : Olga Zrihen
Avec les sénateurs Mia De Schamphelaere (modératrice) et Nathalie de T'Serclaes
Experts : Ludo Horemans (vice-président de l'European Anti Poverty Network), Francine
Mestrum (réseau belge de lutte contre la pauvreté), Lut Goossens (coordinatrice de l'asbl De
Link), Toon Walschap (responsable emploi de l'asbl De Link) et Manuel Chiquero (expert de
terrain)
Le groupe de travail interparlementaire "Quart Monde" organise chaque année plusieurs
rencontres entre les responsables en charge de la politique de la lutte contre la pauvreté (dont
l'ensemble des parlementaires belges) et les associations au sein desquelles les plus pauvres ont
la parole. Ces associations sont souvent très actives au niveau européen. Dans le cadre de la
Semaine européenne, les membres du panel veulent ainsi connaître le travail accompli par leurs
collègues européens. Plusieurs orateurs seront invités et la question sous-jacente sera chaque fois
de savoir ce que nous pouvons apprendre de leur part et ce qu'ils peuvent éventuellement tirer
comme conclusions de notre action.
Quelques impressions du débat
De l’avis de toutes les personnes présentes, la lutte contre la pauvreté en Europe a encore un long
chemin à parcourir. Pour l’heure, l’Europe est encore trop un système économique et pas assez
une union sociale. Il n’existe toujours aucun plan politique cohérent de lutte contre la pauvreté au
niveau européen. Comme ce sont les États membres individuels qui ont la compétence en ce
domaine, il est d’autant plus facile de se décharger de cette responsabilité. C’est au Sommet de
Lisbonne et au Sommet de Nice qu’une première impulsion a été donnée. Pour la première fois,
des étapes précises on été définies pour lutter contre la pauvreté, et une date butoir a aussi été
fixée : 2010.
Selon M. Ludo Horemans, président du Réseau européen des associations de lutte contre la
pauvreté et l’exclusion sociale, si l’on veut atteindre les objectifs d’ici là, il doit encore se passer
pas mal de choses. Voilà pourquoi il faut que les associations qui représentent les pauvres
continuent à s’investir dans le débat et à faire entendre leur voix en Europe. "
Selon Mme Francine Mestrum, du Réseau belge de lutte contre la pauvreté, les services
publics sont fortement remis en question dans la directive de l’ancien commissaire européen
pour le Marché intérieur, Frits Bolkestein. La libéralisation des services est inéluctable, mais il y
a encore beaucoup à dire au sujet du contenu de cette directive. Le secteur des services doit rester
accessible à l’ensemble de la population. Or on peut craindre que la directive ne touche à certains
correctifs sociaux prévus pour les moins nantis. L’Europe doit abandonner l’idée que la
croissance économique résoudra automatiquement la pauvreté.
La Belgique détient, en matière de lutte contre la pauvreté, divers atouts dont l’Europe pourrait
s’inspirer. La Belgique possède un solide réseau d’associations où les pauvres s’expriment. Elles
réunissent les revendications des pauvres et peuvent peser sur la politique. Un autre point positif
est l’existence d’une formation d’expert du vécu en pauvreté. Les membres de De Link
expliquent comment, grâce à un travail de formation, des démunis deviennent un maillon clé
entre les pouvoirs publics et les pauvres. Les experts ainsi formés suggèrent des solutions
différentes de celles proposées par les pouvoirs publics. Ils s’efforcent de rendre aux pauvres une
image positive d’eux-mêmes, car de longues années de misère pèsent sur leurs épaules comme
une chape de plomb et de souffrance. Cette image négative de soi les empêche de suivre une
formation, ce à quoi tente précisément de remédier l’expert de vécu.
La pauvreté est une injustice fondamentale. Selon les personnes présentes, notre société doit
intégrer cette donnée et veiller à développer une économie intrinsèquement sociale. La
libéralisation ne peut avoir pour effet de priver des gens de certains biens d’utilité publique
comme le gaz et l’énergie. Ils estiment qu’il faut définir, au niveau européen, une politique
cohérente de lutte contre la pauvreté disposant de compétences suffisamment larges. Les
participants considèrent que c’est l’occasion rêvée de faire aussi de l’Europe une union sociale
forte.
Les personnes présentes appellent aussi le monde politique et les parlementaires à être attentifs à
une nouvelle forme de pauvreté. En raison de l’instabilité du marché du travail et de l’économie,
les gens risquent beaucoup plus de perdre leur emploi et de ne jamais en retrouver un. Le risque
de tomber dans la pauvreté s’en trouve accru et le nombre de gens qui connaissent cette situation
est plus grand qu’on ne l’imagine. Les personnes présentes insistent pour que l’on s’attaque à
cette nouvelle pauvreté, car elle désarticule la société.
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