Dans ce mouvement, De Keersmaeker démontre que la danse ne peut être qu'une simple illustration de la musique. Pour elle, son travail consiste en
réalité à aborder un aspect essentiel de l'écriture musicale et d'en faire un fondement de sa grammaire chorégraphique, que ce soit par l'utilisation de
l'espace, du temps ou du geste lui-même. Ainsi la partition de Violin Phase, qui est structurée en rondo, implique par analogie l'utilisation du cercle pour
la composition chorégraphique.
Troisième mouvement : Come out
Ce mouvement d'environ 11 minutes a été écrit avec Jennifer Everhard et joué indépendamment de l'ensemble pour sa première en octobre 1981 à la
Tisch School of the Arts de NYU. Sous deux lampes suspendues, les danseuses, assises sur leurs tabourets, répètent leurs mouvements de bras et de
bustes, sans se lever, de manière extrêmement saccadée et chaotique, mais en tournant progressivement au rythme de la phrase enregistrée « Come out
to show them » de Come Out, la seconde œuvre écrite par Reich en 1966. Cette partie est une illustration assez figurative du contexte historique de la
composition de Reich, écrite dans à la suite des émeutes de la population afro-américaine réclamant l'application des droits civiques. En particulier, les
mouvements des danseuses miment la phrase initiale : « I had to, like, open the bruise up and let some of the bruise blood come out to show them »
(signifiant : J'ai du ouvrir mes bleus et laisser le sang couler pour leur prouver) sous la lumière crue de deux lampes rappelant un interrogatoire dans un
poste de police.
Quatrième mouvement : Clapping Music
Également écrit lors de son retour à Bruxelles en 1982, ce mouvement final est constitué par le déplacement en diagonale des deux danseuses au travers
de la scène sur la base d’un simple mouvement synchrone/asynchrone de leurs pieds allant des demies-pointes aux pieds à plat sur le sol, avec flexion
brusque des genoux en tension accompagnée d'un mouvement opposé des bras. Il dure 4 à 5 minutes sur les battements de mains de Clapping Music
(1972) réalisé en direct par deux personnes (dont Steve Reich en 1985).
Steve Reich, né Stephen Michael Reich le 3 octobre 1936 à New York, est un musicien et compositeur américain de renommée internationale. Il est
considéré comme un des pionniers du minimalisme et de la musique répétitive. Pour caractériser son œuvre, et spécialement ses compositions de la
période 1965-1976, il préfère utiliser l'expression musique de phases (traduite de l'américain) pour la différencier de la musique répétitive
Biographie
Steve Reich est né dans une famille juive de New York en 1936. Il suit d'abord des études de philosophie, obtenant son diplôme de la Cornell University
en 1957, puis poursuit des études de musique de 1957 à 1958 à la Juilliard School of Music de New York, essentiellement dans les classes de piano et de
percussions. De 1961 à 1963, il étudie également la composition avec Darius Milhaud et Luciano Berio au Mills College à Oakland en Californie où il
obtient son Master of Art. En novembre 1964, il participe en tant que musicien à la création de In C de Terry Riley, œuvre fondatrice du courant
minimaliste.
Ses deux premières œuvres It's Gonna Rain (1965) et Come Out (1966) sont très expérimentales et partiellement le fruit d'un hasard technique lui faisant
utiliser le principe du phase/déphase. Elles sont également le reflet d'une conscience politique notamment en faveur du mouvement des droits civiques
aux États-Unis. Steve Reich poursuit toutefois son apprentissage musical, en particulier des percussions africaines, à l'Institut d'études africaines de
l'Université du Ghana où il passe l'été 1970, puis du gamelan indonésien en Californie de 1973 à 1974. En 1971, il fonde son propre ensemble Steve
Reich and Musicians pour la recherche et l'exécution de sa première pièce d'envergure, Drumming.
Parallèlement à ces années d'apprentissage, il compose une œuvre originale basée sur la technique de la répétition et l'utilisation de bruits de la vie
quotidienne. Il ne délaisse pas pour autant les instruments traditionnels pour lesquels il compose de nombreuses pièces instrumentales ou orchestrales.
Son œuvre est reconnue dès 1971, avec l'enregistrement de Drumming chez la Deutsche Grammophon, faisant de lui une des figures de la musique
contemporaine américaine et, particulièrement, de l'école de la musique dite répétitive, aux côtés de Terry Riley et Philip Glass. S'écartant de ses
recherches musicales antérieures pour s'orienter vers un travail sur le rythme, la pulsation, et la « notion de variation timbrique de surface », il compose
quelques-unes de ses œuvres les plus connues dans les années 1970-80, comme Music for 18 Musicians (1976), Eight Lines (1979), The Desert Music
(1984) ou Different Trains (1988).
Technique musicale
Steve Reich déclare que ses influences musicales fondamentales sont les œuvres de Bach, Bela Bartók (dont Mikrokosmos), Igor Stravinsky et le jazz avec
en particulier les compositions de John Coltrane (dont Africa/Brass). Il écrit également que l'autre grande influence sur sa musique vient du cantus
firmus, mélodie des organums de Pérotin, compositeur de l'École de Notre-Dame de Paris au XIIe siècle. Les premières œuvres de Steve Reich (au milieu
des années 1960) sont construites sur le principe du décalage graduel de l'exécution des motifs musicaux, créant par phasage/déphasage, des sonorités
nouvelles. Il a l'idée de faire passer en continu deux boucles du même son, jouées simultanément au départ, puis accélérées progressivement l'une par
rapport à l'autre. Ce procédé, issu de son travail sur bande magnétique, a pour effet de générer de nouvelles figures sonores à partir du même matériau
musical. Il est utilisé pour la première fois dans la pièce fondatrice It's Gonna Rain en 1965, puis dans Come Out et Melodica en 1966. Il est aussi
appliqué aux instruments (Piano Phase, Violin Phase et Reed Phase en 1967).
La musique de Reich procède alors souvent par récupération de sonorités quotidiennes, comme par exemple des annonces et des sirènes de trains dans
Different Trains (1988) ou des sirènes de voitures de secours et des alarmes de voitures dans City Life (1995). Le discours articulé occupe également une
place importante, souvent sous une forme répétée comme pour The Cave (1990) ou Three Tales (2002). Une forme de chant discontinu constitue ainsi
une partie importante de son œuvre.