Des questions démographiques aux droits en matière de santé sexuelle et reproductive (DSSR). – L’ENGAGEMENT MONDIAL DE LA SUÈDE DANS LA SANTÉ SEXUELLE ET REPRODUCTIVE ET LA QUESTION DES DROITS Tabledesmatières Introduction2 Conflitsetdéveloppement‐laquestiondémographiquedanslacoopérationsuédoiseau développement1958‐19943 LesconférencesduCaireetdePékin10 Delaparoleàl'action‐lesoutiendelaSuèdeauxDSSRaprèsleCairex14 Conclusion23 Remerciements24 Introduction Il s'est passé beaucoup de choses depuis l'adoption du plan d'action (Programme of Action) lors de la conférence internationale sur la population et le développement (CIPD) au Caire en 1994. Les services de santé à l'attention des femmes sont aujourd'hui beaucoup mieux développés, et le risque de mourir en couches est moins élevé. De plus en plus de femmes survivent à la grossesse et à l'accouchement, et sont également plus nombreuses à décider seules du nombre d'enfants qu'elles veulent avoir. Un plus grand nombre d'entre elles a aujourd'hui accès à des services de santé maternelle, sans compter que la durée de vie moyenne aussi bien des femmes que des hommes a augmenté. Tellement de choses se sont améliorées. Le soutien de la Suède contribue au plus haut degré à améliorer les droits et les libertés des femmes. Mais il y a encore beaucoup de défis à relever. En moyenne, 800 femmes meurent chaque jour en raison de grossesses ou d'accouchements, dont 200 environ sont des adolescentes. Tous les ans, environ 22 millions d'avortements risqués sont pratiqués, souvent suite à une grossesse non désirée. Pouvoir décider de son propre corps est encore loin d'être une évidence pour un grand nombre de femmes et de filles, et ce droit continue d'être bafoué. La question des droits des femmes n'est pas seulement liée à la pauvreté, mais dépend également d'un certain nombre d'autres facteurs. En Europe, le droit à disposer de son propre corps peut être limité par la conception du rôle que doit jouer la femme dans la société. De même, les moyens déployés pour la santé maternelle sont souvent réduits dans les pays atteints de crise économique. En Suède, certaines opinions veulent limiter le droit légal à un avortement sans risques, qui existe depuis 1975. Les 23-25 avril 2014, la Suède accueillera la conférence internationale des parlements pour le suivi de la CIPD des Nations Unies, et a souhaité apporter sa contribution à cette occasion. Le Ministère des affaires étrangères a de ce fait élaboré la publication « Des questions démographiques aux droits en matière de santé sexuelle et reproductive (DSSR)- L'engagement mondial de la Suède dans la santé sexuelle et reproductive et la question des droits ». L'objectif est de décrire brièvement l'engagement de la Suède par le passé dans les questions démographiques et comment il a évolué vers des actions pour les DSSR, notamment en ce qui concerne l'égalité des sexes et les droits de l'homme. Nous avons l'espoir que nos expériences puissent inspirer d'autres pays à promouvoir des décisions pouvant contribuer à des évolutions dans le domaine des DSSR. Cette publication décrit l'engagement de la Suède pour les DSSR depuis les années 50, durant la Conférence du Caire en septembre 1994 et par la suite. Une partie importante de ce cheminement a consisté au changement de la focalisation sur les questions démographiques pour aller vers les DSSR. Le sujet a également petit à petit évolué en étant d'abord uniquement une question de santé publique, jusqu'à se trouver au centre des actions pour l'égalité des sexes et pour la lutte pour les droits de l'homme universels. Par la présentation et l'illustration de ce travail, nous pouvons apprendre comment nous pouvons réussir dans la poursuite des efforts visant à garantir la santé reproductive et sexuelle pour toutes les femmes, les hommes et les jeunes dans le monde. Je suis très fière que la Suède ait participé aux questions de DSSR à un niveau mondial et qu’elle continue à le faire. J'espère et je crois que la Suède a contribué à ce que des milliers de femmes et d'hommes aient une situation meilleure grâce à ce soutien. Mon espoir est que cette publication puisse inspirer une poursuite du travail pour un monde plus égalitaire en général et entre les sexes en particulier. Poursuivre ce fort engagement est nécessaire. Hillevi Engström, Ministre de la coopération au développement Conflitsetdéveloppement‐laquestiondémographiquedanslacoopération suédoiseaudéveloppement1958‐1994 LesdébutsdelacoopérationaudéveloppementdelaSuède La sexualité et la reproduction ont depuis longtemps été une partie importante du développement de la société en Suède. Des formations pour sages-femmes ont existé depuis le début du 18ème siècle. Dès 1938, l'interdiction d'informer sur les moyens de contraception a été supprimée; en 1944, le recours à l'avortement est devenu possible dans certaines circonstances, et les sanctions pénales pour raisons d'homosexualité ont été abrogées. L'éducation sexuelle dans les écoles a commencé dès le début du 20ème siècle et est devenue obligatoire en 1955. Le premier centre de consultation pour jeunes a ouvert en 1970 à Falun, et en 1975 les femmes ont obtenu le droit de décider d'avorter jusqu'à la 18ème semaine de grossesse. La vision plus libérale sur la sexualité qui s'est développée en Suède a permis de parler plus ouvertement de la sexualité et de la planification familiale, et lui a donné l'occasion de jouer le rôle de pionnière dans les questions démographiques et de planification familiale lorsque la coopération au développement a sérieusement démarré. Ainsi, depuis la moitié des années 1950, la Suède a commencé à soulever ces questions à plusieurs niveaux. Par exemple, elle a pris l'initiative audacieuse d'aborder, au sein de l'Assemblée mondiale de la Santé, qui est l'instance dirigeante de l'Organisation mondiale de la Santé, la question de l'excision des femmes. Mais la résistance a été très forte. La résolution proposée par la Suède a été mise en minorité. Nos pays voisins se sont abstenus de voter, et le seul oui était celui de la Suède. Lors d'une réunion de femmes à New Delhi en 1955, les représentants de l'ex-Ceylan prirent contact avec les délégués suédois pour discuter de possibilités de coopération au développement et de planification familiale. En 1958, la Suède a démarré une action de coopération au développement qui était la première en son genre dans le monde. En 1961, un deuxième projet de planification familiale a été entamé au Pakistan. L'importancedelaquestiondémographique Au début des années 1950, deux nouveaux moyens contraceptifs ont été introduits: la pilule et le stérilet (DIU). Ils ont eu une importance révolutionnaire car leur découverte coïncidait avec la prise de conscience que la relation entre la diminution de la mortalité infantile et une fertilité élevée dans les pays en voie de développement entraînait une augmentation plus rapide de la population. La mortalité dans les pays en voie de développement avait en l'espace de 20 ans diminué aussi vite que durant les 100 dernières années dans les pays industrialisés, faisant augmenter leur population de 2,5 à 3 pour cent par an. Les signaux d'alarme devinrent de plus en plus importants durant les années 1960. La planification familiale, souvent appelée auparavant limitation des enfants ou contrôle des naissances, est devenue dans beaucoup de pays, mais surtout dans les parties industrialisées du monde, le moyen le plus important de réduire l'augmentation démographique et même de sauver le monde d'une catastrophe démographique. Le président américain Lyndon B. Johnson trouvait qu'investir un dollar américain dans la planification familiale avait plus de valeur qu'investir cent dollars dans le « développement ». Mais il y avait aussi des régimes, surtout sur le continent africain, qui souhaitaient voir leur population augmenter le plus vite possible. La population de la Tanzanie par exemple, qui s'élevait dans les années 1950 à environ sept millions, c'est-à-dire qu'elle était aussi importante que celle de la Suède, atteint aujourd'hui les 48 millions d'habitants. Alors que la Suède a aujourd'hui une population de neuf millions d'habitants. LacoopérationaudéveloppementdelaSuèdeconcernantlapopulationetlaplanification familiale1965‐75 Ces perspectives étaient donc en arrière-plan lorsque la coopération au développement de la Suède, dans le domaine de la planification familiale, continuait d'augmenter. Le parlement suédois décida aussi d'exclure la planification familiale du principe de concentration des terres, qui s'appliquait sur la coopération au développement bilatérale. La Suède soutenait des initiatives concernant la planification familiale dans plus de 30 pays en Afrique, en Asie et en Amérique centrale. Les premières coopérations au développement dans ce domaine consistaient en des livraisons de moyens contraceptifs. L'Asdi (Agence suédoise de coopération internationale au développement) était ainsi pendant un certain temps le plus grand acheteur au monde de préservatifs et a réussi par ce moyen à mettre la pression sur les prix pour avantager les autres pays. Du personnel suédois travaillait sur des questions liées à la planification familiale au Ceylan, au Pakistan, en Tunisie et même petit à petit au Kenya. L'éducation sexuelle devint également une partie de la coopération au développement. La conception de la coopération au développement reflétait une croyance exagérée dans la technique, en l’espèce dans les moyens contraceptifs modernes. On croyait ainsi que le seul fait d'avoir accès aux moyens contraceptifs incitait ceux qui en avaient besoin à les utiliser. Mais les nouvelles méthodes de planification familiale n'étaient apparemment pas suffisantes. Les experts ont alors exigé que les actions en matière de planification familiale devaient être « motivées ». Les actions pour l'information, l'éducation et la communication se sont développées. La Suède y a par exemple contribué en fournissant des presses d'imprimerie, du papier et a soutenu la mise en place de centres spéciaux pour l'information sur la planification familiale. Des recherches sur la façon d'influencer le comportement humain furent entamées et des experts en marketing engagés. On réfléchit sur les couleurs les plus agréables, la conception des images et les arguments les plus vendeurs. Cette stratégie fut un échec de la même façon que la précédente centrée sur les moyens contraceptifs. Les solutions techniques n'étaient pas suffisamment adaptées à la situation et aux besoins des êtres humains, et étaient perçues comme inadéquates par la majorité d'entre eux. Le fait que des dizaines de millions d'avortements se pratiquaient tous les ans, dont la plupart étaient illégaux et se déroulaient dans des circonstances médiocres, ne pouvait pas automatiquement traduire une demande de planification familiale. Plusieurs des plus grands pays asiatiques avaient à cette époque des programmes nationaux de planification familiale basés sur la démographie. C'était souvent les donateurs qui mettaient la pression sur les pays pour organiser ce qu'on appelait des programmes séparés verticaux. Certains trouvaient même que les services de santé étaient un poids pour la planification familiale, qui devait plutôt être menée séparément et avec une possibilité de distribuer, comme n'importe quel autre produit, non seulement des préservatifs mais aussi des pilules. D'autres allaient même jusqu'à considérer les services de santé moins efficaces pour le développement que la planification familiale « pure », car leur conséquence était la réduction de la mortalité, ce qui contribuait donc à un développement démographique encore plus rapide. Mais le travail pionnier de la Suède durant les années 1950 et 1960 qui consistait à soulever des questions de démographie, de planification familiale et de sexualité au sein d'organes internationaux, a été couronné de succès à la fin des années 1960. Les Nations unies ont ainsi accordé en 1965 pour la première fois une coopération technique pour la planification familiale, et ont reconnu la planification des naissances comme un droit humain. Mais dix ans devaient encore s'écouler avant que le droit de la femme à prendre certaines décisions au même niveau que l'homme ne soit accepté. Déjà en 1966, la Suède a été le premier pays à soutenir l'International Planned Parenthood Federation (la Fédération internationale pour la planification familiale (IPPF), qui avait été fondée en 1953 par Elise OttosenJensen entre autres, et avec l'Association suédoise pour l'éducation sexuelle (RFSU) comme organisation membre. La Suède était aussi la première à soutenir l'UNFPA, le Fonds des Nations unies pour la population lorsqu'il a été mis en place en 1969. De même, le programme de recherche de l'OMS sur la reproduction humaine, Special Programme of Research, Development and Research Training in Human Reproduction (Programme spécial de recherche, de développement et de formation à la recherche en reproduction humaine/ HRP) a démarré ses travaux sur une initiative suédoise au début des années 1970. Untournantdansledébatdémographique En même temps que les questions de reproduction et de planification familiale ont été mis à l'ordre du jour international, une polarisation accrue s'est produite. D'un côté il y avait ceux qui mettaient l'accent sur les questions démographiques et l'importance de réduire l'augmentation de la population avec la planification familiale comme outil principal. De l'autre côté il y avait des groupes, souvent issus de la gauche politique, qui remettaient en question non seulement l'existence des problèmes démographiques, mais aussi les possibilités d'effet quelconque de la planification familiale. D'un point de vue des droits, deux aspects étaient importants dans le cadre de la planification familiale : le droit des femmes à éviter la contrainte et l'influence d’autrui, et celui de disposer d’une liberté de choix par l’accès à un service de planification familiale qualifié. Les groupes féministes en plein essor ont fortement mis l'accent au début de leurs actions sur le droit des femmes à ne pas subir des mesures de coercition ou d'influence. C'étaient principalement des femmes des pays en voie de développement qui affirmaient l'incohérence dans la revendication des droits en matière de reproduction dans une société qui par ailleurs vivait une situation d'inégalité entre les sexes, mais aussi économique et sociale. Leur lutte commença ainsi à inclure la libération et l'indépendance de la femme. Les différents mouvements organisés par les femmes avaient pour point commun de critiquer le point de vue selon lequel la femme est un instrument de limitation de la natalité et ainsi de l'augmentation démographique. Ils exigeaient plutôt une politique permettant à la femme de prendre le contrôle de son propre corps et de sa propre vie. Cela supposait non seulement un accès à des moyens de contraception sûrs mais aussi des circonstances économiques et sociales rendant possibles les choix liés à la reproduction. La conférence sur la population de 1974 à Bucarest a en quelque sorte représenté un revirement dans le débat sur les questions démographiques. Les pays en voie de développement protestaient contre un investissement unilatéral sur la planification familiale et argumentaient pour des subventions visant un développement socio-économique et une égalité accrue. La conférence s'est terminée par une déclaration affirmant que la planification familiale devait faire partie d'une politique générale de santé et de bien-être : « Le développement est le meilleur moyen contraceptif ». Mais les changements de fonds ont tardé à venir. La Banque mondiale a commencé à soutenir la planification familiale dès la fin des années 1960. Mais ce n'est que vingt ans plus tard qu'elle commença à accorder des crédits à des projets de santé, et encore dix ans avant que ces derniers ne constituent une partie essentielle de son programme de crédit. Lasuppressiondesaidesàlaplanificationfamilialeentantquemesuredémographique L'éparpillement de l'aide suédoise sur un grand nombre de pays en dehors de ceux faisant partie du programme a diminué par la suite. En revanche les aides accordées à l'IPPF (Fédération internationale pour la planification familiale) et au Fonds des Nations unies pour la population, l'UNFPA, qui étaient actifs dans un grand nombre de pays, ont augmenté. La planification familiale dans les grands pays asiatiques, souvent séparée des services de santé, a reçu dans les années 1970 le soutien de l'Asdi pour ses expérimentations basées sur des récompenses et des objectifs quantitatifs. Mais les tensions ont augmenté entre les programmes de planification familiale organisés à part et les services de santé de base. Car d'un point de vue financier et de ressources humaines, la planification familiale était privilégiée. Des récompenses (incentives) -et dans certains cas des sanctions (disincentives)- ainsi que des objectifs quantitatifs commençaient à être appliqués aux personnels. Ils pouvaient parfois recevoir un complément de salaire en fonction du nombre « d’acceptants » de la planification familiale (tel que formulé à ce moment-là). Dans certains pays asiatiques, les programmes de planification familiale étaient menés séparément des autres services de santé, ce qui diminuait la confiance de la population. Des études montraient que la plupart des gens avaient des informations sur la planification familiale et qu'ils étaient nombreux à affirmer vouloir planifier leur famille. Mais seulement une partie d'entre eux mettaient cela en œuvre. En Suède et au sein de l'Asdi, le point de vue qui considérait la planification familiale comme principalement un instrument de réduction de l'augmentation démographique recevait de plus en plus de critiques. Cette tendance s'accrut à cause du traitement catastrophique de la planification familiale en Inde vers la moitié des années 1970, où le gouvernement appliqua des mesures sévères, dont des stérilisations forcées. L'opposition devint violente et poussa le gouvernement à sa chute. En Suède, un débat animé se lança dans les médias, menant à des critiques tellement violentes que la Suède décida en 1980 d'arrêter le soutien à la planification familiale en Inde. Au Bangladesh, les méthodes indiennes ont été appliquées, notamment le programme de stérilisation et le système de récompenses et de sanctions. Et ce qui était caractéristique, c'est que l'on se concentra sur la stérilisation des femmes, qui nécessitait une opération beaucoup plus importante et plus risquée comparée à la stérilisation des hommes. C'est ainsi qu'on découvrit au début des années 1980, qu'un grand nombre de femmes étaient décédées au cours des quelques 180 000 opérations de stérilisation. D'un point de vue éthique, le fait que les femmes aient été attirées ou obligées à se faire stériliser et à risquer de se blesser ou même de mourir était inacceptable, et l'aide suédoise fut donc suspendue. C'est ainsi que s'arrêta la discussion sur l'aide au développement suédoise concernant la population. Après plus de dix ans d'hésitations, la Suède avait finalement décidé d'abandonner son ancienne ligne de conduite. Mais le problème est qu'il n'y avait toujours pas d'autre alternative. Unventderenouveau La conférence sur les soins de santé primaires à Alma Ata fera entrer l'année 1978 dans les annales de l'histoire de la santé et des services médicaux. C'est là que le concept de soins de santé primaires (primary health care/ PHC) fut lancé et internationalement reconnu. La santé maternelle et infantile et planification de la famille (maternal and child health including family planning/ MCH) fut définie comme un des huit éléments en faisant partie. La déclaration d'Alma Ata a apporté un fort soutien au travail des services de santé sur la planification familiale, avec ce que cela représentait pour la santé des mères et des enfants. Les arguments pour une intégration de la planification familiale dans les services de santé s'intensifièrent. La CEDAW (Convention on the Elimination of All Forms of Discrimination against Women/ Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes) a été adoptée en 1979 et est devenue une plateforme pour les droits des femmes, y compris la sexualité et la planification familiale. C'est la seule convention des droits de l'homme qui met l'accent sur la nécessité de mettre la santé reproductive des femmes et leurs droits comme un préalable à une société nondiscriminante. La conférence sur la population à Mexico en 1984 a impliqué une transition supplémentaire dans la vision sur les questions démographiques. La place de la planification familiale comme faisant partie des soins de santé maternelle et infantile y a été affirmée plus fort qu'avant. Une plus grande attention a été accordée au rôle de la femme et à son importance. La question de la planification familiale en tant que droit humain individuel, ainsi que les aspects éthiques de l'influence sur l'individu sont également devenus plus importants. Mais durant la conférence, une attitude restrictive sur les avortements a en même temps été prégnante. Et la délégation suédoise a regretté publiquement que la conférence n'ait pas soulevé les problèmes importants liés aux avortements risqués. La question des services de santé maternelle était encore jusqu'au milieu des années 1980 subordonnée à la santé des enfants, où de grands progrès avaient été accomplis pour améliorer leur santé et leur survie. La MCH est devenue en pratique une question liée à la santé de l'enfant, même si l'on savait que les différences existantes entre les pays industrialisés et les pays en voie de développement concernant les soins de santé maternelle étaient beaucoup plus importantes que celles qui existent dans d'autres aspects de la santé. En ce qui concernait la mortalité infantile par exemple, la différence entre les pays ayant les plus hauts niveaux et ceux ayant les niveaux les plus bas était de 1:20, alors que celle concernant la mortalité maternelle était de 1:200. Dans un article de 1985 devenu maintenant classique dans The Lancet, la question a été posée par Rosenfield et Maine : « Where is the 'M' in MCH? » (Où est le 'M' dans MCH?) C'était le point de départ pour un engagement plus fort dans les questions liées aux soins de santé maternelle, à un niveau mondial et à l'intérieur des pays. Deux ans après, en 1987, l'initiative Safe Motherhood (Maternité sans risques) a démarré lors d'une conférence à Nairobi, impliquant principalement une relation encore plus forte entre la planification familiale et les services de santé et la question de la condition de la femme. Ce sont ces points de vue, ainsi que l'affirmation du droit de la femme sur son propre corps et le droit de tous les êtres humains à des services de santé reproductifs, qui ont mené vers le concept « santé sexuelle et reproductive » en 1992, représentant ainsi une perspective globale. Versunenouvellefaçondepenserlacoopérationaudéveloppement En ce qui concerne la planification familiale, les conflits des années 1970 et 1980 ont entraîné beaucoup de confusion et de passivité dans le domaine de la coopération au développement. Le soutien aux programmes de planification familiale en Inde et au Bangladesh avait été interrompu. L'aide suédoise à la planification familiale dans le cadre des services de santé n'était plus d'actualité dans ces pays. Dans les pays africains, le principe d'intégration aux soins de santé a été accepté en ce qui concernait l'aide au développement suédoise, mais il n'a en pratique pas eu de grandes conséquences. Les services de santé maternelle étaient tellement médiocres qu'ils fournissaient à peine un service digne de ce nom. En 1982, une nouvelle politique de coopération au développement suédoise a été mise en place dans le domaine de la santé, considérant les soins prénatals et infantiles, y compris la planification familiale, comme un domaine prioritaire parmi trois. Il a été constaté que les effets de la planification familiale étaient minimes en ce qui concernait la politique démographique. Ils devaient plutôt être utiles au « droit des êtres humains à décider eux-mêmes de combien d'enfants ils voulaient avoir et à quel rythme, de façon libre, informée et responsable » (paragraphe 29 de la Déclaration de la conférence internationale sur la population à Bucarest en 1974). La coopération au développement suédoise devait maintenant contribuer à la mise en place de services de soins prénatals et infantiles, où la planification familiale était naturellement incluse. Le principe impliquait aussi qu'il devait y avoir une offre variée de méthodes contraceptives, que le choix du client ne devait pas être influencé par des récompenses à d'autres personnes que lui-même, et que la décision concernant des méthodes irréversibles telles que la stérilisation ne devait pas être influencée. La Suède entama en même temps un soutien à des programmes prénatals nationaux et des formations de sages-femmes entre autres en Éthiopie et en Angola. LesannéesprécédantlaConférenceduCaire En 1990, la Suède a mis en place de nouvelles lignes directrices « Population et planification familiale, des lignes directrices pour la coopération au développement ». Contrairement aux lignes directrices précédentes, celles-ci faisaient une différence entre la macro-perspective, c'est-à-dire la relation entre l'augmentation globale de la population et l'environnement, et la micro-perspective, c'est-à-dire le fait d'avoir pour point de départ la condition de la femme. Il n'était donc plus question d'essayer de résoudre les problèmes démographiques mondiaux par des mesures en direction de la femme seule. Au début des années 1990, les influences de groupes féministes internationaux et suédois ainsi que d'organisations privées sont devenues fortes, influençant le débat en Suède sur la coopération au développement, surtout autour du rôle des femmes et de leurs droits. Il devint de plus en plus clair par la suite que les lignes directrices suédoises de 1990 avaient besoin d'une réécriture pour mettre en avant l'égalité entre les sexes et pour redéfinir le concept de planification familiale, qui traditionnellement excluait des services rendus en termes de moyens contraceptifs, les personnes qui n'étaient pas mariées ou qui ne voulaient pas fonder de famille. Le point de départ étaient les expériences suédoises dans le domaine des soins et du travail des jeunes, ainsi que les premiers engagements de la Suède en matière de planification familiale, qui s'étaient formés grâce à des expériences suédoises, mais aussi grâce aux savoirs et aux connaissances en provenance d'académiciens et de praticiens du monde entier. Le nouveau document, qui était prêt juste avant la Conférence du Caire, avait pour titre « Sexual and reproductive health- an action plan » (Santé sexuelle et reproductive- un plan d'action) et reçut le statut informel de ligne politique. Il mettait l'accent sur les jeunes et les femmes, sur l'accès aux moyens contraceptifs et aux avortements sans risques, ainsi que le contrôle des infections sexuellement transmissibles, y compris le SIDA/VIH, et les capacités de construction et de légifération. LesconférencesduCaireetdePékin LespréparatifssuédoispourlaConférenceinternationalesurlapopulationetle développement En vue de la Conférence du Caire, le gouvernement suédois a décidé de s'y consacrer pleinement. La Suède avait son histoire et ses propres expériences acquises lors de précédentes actions de coopération au développement. Elle allait pouvoir s’en servir comme base pour poursuivre son soutien dans les actions relatives à la population et au développement ainsi qu’à la santé et aux droits des femmes. Les expériences suédoises allaient maintenant être utilisées pour influencer l'opinion internationale sur ces questions. Mais pour cela il était nécessaire d'avoir une base bien réfléchie, bien argumentée et bien documentée. Le gouvernement décida alors de mettre en place un comité national pour la conférence des Nations unies sur la population et le développement dès 1991, trois ans avant la conférence. Il était constitué de parlementaires, d'experts et d'ONG (organisations non-gouvernementales), réunissant ainsi un large éventail de savoirs. Le comité national s'est vite mis d'accord sur la position que la Suède devait avoir au Caire : mettre l'accent sur les questions de sexualité, de vie conjugale et du pouvoir des femmes sur leur procréation. Le comité prépara un document présentant sa position, qui allait être utilisé comme une base pour les négociations à venir, et commanda aussi quelques publications. Ainsi, la publication « Reproductive Health Revisited » (La santé reproductive revisitée) a été distribuée au Caire et lors de plusieurs réunions préparatoires, par exemple à New York et à Harare. Elle présentait le point de vue de la Suède sur l'avortement, le rôle important de la sage-femme dans la prévention des grossesses non désirées et des MST (maladies sexuellement transmissibles), le traitement de la stérilité, l'information sexuelle ainsi que la vie des jeunes en Suède. La publication était construite de manière factuelle et scientifique mais présentait en même temps une image attirante, qui impliquait parfois des défis à relever pour beaucoup de pays. Elle abordait par exemple la question de la sexualité des adolescents et la vision de la Suède en ce qui concernait l'enseignement sexuel. Durant la conférence du Caire, la Suède a également distribué une publication présentant la situation des femmes en Suède depuis le 19ème siècle, ainsi qu'une publication commandée par des scientifiques auprès de l'Université de Harvard –« Population Policies Reconsidered » (Les politiques démographiques réexaminées)- imprimée en dizaines de milliers d'exemplaires. Cette publication allait influencer les points de vue sur la question démographique, et caractériser les négociations au Caire. La Suède a aussi soutenu une étude qui résulta dans la publication « Human Rights in Population Policies » (Les droits de l'homme dans les politiques démographiques). L'Asdi a participé à des pré-conférences de la conférence du Caire, permettant ainsi de nouer des contacts avec « Women's Caucus », c'est-à-dire avec le grand réseau d'organisations de femmes qui se sont focalisées sur l'introduction d'un nouveau point de vue sur les questions démographiques à la CIPD. L'Asdi a également financé une partie de ce travail de réseau par un soutien à la Coalition Internationale pour la Santé des Femmes, qui a joué un rôle clé dans les travaux. Dans le cadre de ces préparatifs, elle a aussi organisé en 1993 à Harare, en coopération avec la SAREC (l'Agence suédoise pour la coopération avec les pays en développement en matière de recherche) une conférence sub-régionale avec les pays du sud de l'Afrique. La réunion a permis de mettre l'individu au centre et d'invoquer l'importance des droits des femmes et de l'égalité des sexes, questions devenues depuis centrales dans le programme du Caire. Les parlementaires issus de différents pays qui ont participé à la réunion ont élaboré une « Déclaration en vue de la CIPD », qui demandait par exemple la légalisation des avortements. LaConférenceinternationalesurlapopulationetledéveloppementauCaire,laCIPD, 1994 Gro Harlem Bruntland, alors premier ministre de la Norvège, a inauguré la conférence avec un discours qui a en quelque sorte mis le ton à toute la conférence. Elle a soulevé des questions telles que les droits, la santé, les ressources et le droit des jeunes à l'éducation et à la santé reproductive, avec la planification familiale comme un droit pour tous. Elle a souligné entre autres qu'elle ne pouvait pas comprendre comment le terme de santé reproductive pouvait être interprété comme une incitation à l'avortement, ou que l'on puisse considérer l'avortement comme une méthode contraceptive. Au contraire, d'après elle, l'expérience montre que le nombre d'avortements n'augmente pas s'ils sont légalisés, mais qu'ils deviennent par contre moins risqués pour les femmes. Beaucoup croyaient qu'il serait difficile de se mettre d'accord sur ce qui n'avait pas été réussi lors des pré-réunions à New York. Il paraissait surtout presque impossible d'arriver à un consensus sur la question de l'avortement. La résistance était politique et religieuse, avec un appui du Vatican qui pesait lourd. Les craintes étaient grandes de ne pas arriver à un accord sur les autres questions de santé et de droit, particulièrement importantes pour la santé des femmes, des jeunes et des enfants. Mais le résultat de la CIPD au Caire fut plutôt un revirement de la perception qu'avait le monde des questions démographiques. S'agissant auparavant uniquement de planification familiale, de courbes démographiques et de contrôle de la population, le champ s'était maintenant élargi pour inclure la santé sexuelle et reproductive et les droits liés à la reproduction, ainsi que d'autres questions liées à la population telles que la migration et l'urbanisation. Les pays nordiques insistèrent et de façon très déterminée, avec plusieurs autres pays, sur le droit à des avortements sans risques et légaux. Les points essentiels pour la Suède étaient les conditions des femmes et leurs droits, surtout dans le domaine de la santé, et le droit des jeunes au savoir et au pouvoir de décider de leur sexualité et de leur reproduction. Plusieurs arguments ont été présentés durant le débat sur l'avortement, allant de l'avortement en tant que droit, à l'impossibilité de parler d'avortement sans risques. Le « drafting committee » (comité chargé de la rédaction), qui devait écrire sur la question de l'avortement, n'arrivait pas à un consensus et désigna de ce fait un groupe moins important chargé de rédiger une proposition, incluant les représentants nordiques. Le résultat était des formulations proclamant l’avortement comme « a public health issue » (une question de santé publique), et que « in circumstances where it is not against law, abortion should be safe » (dans les cas où il n'est pas illégal, l'avortement devrait être sans risques). La décision impliquait aussi que les femmes avaient droit aux mêmes soins post-avortement, qu'il ait été légal ou pas. Le document final a été adopté avec consensus même si des réserves avaient été formulées sur certaines parties, par exemple de la part du Vatican. Il n'y avait rien sur l'avortement en tant que droit, et d'ailleurs personne ne s'y était sérieusement attendu. D'un point de vue suédois, cela paraissait très insuffisant, mais avait quand même été vécu comme une victoire pour les droits des femmes. Arriver à se mettre d'accord sur des mesures préventives contre les grossesses non désirées et les maladies sexuellement transmissibles, y compris le SIDA/VIH, était également un pas en avant pour les femmes du monde entier. Globalement, d'un point de vue de la Suède, la Conférence internationale sur la population et le développement a constitué des avancées par rapport aux conférences précédentes sur les questions démographiques. Plusieurs facteurs ont contribué à l'influence de la Suède sur les résultats de la conférence. En plus de l'ambitieux travail d'influence mené dans différentes réunions préparatoires au sein et à l'extérieur des Nations unies, la Suède avait beaucoup de contacts avec la Fédération internationale pour la planification familiale et avec d'autres ONG internationales, que ce soit avant ou après la conférence. Mais les délégués suédois ont aussi eu le sentiment que le long processus interne de préparations et d'ancrages avait permis à la Suède de mener et de réussir dans les négociations. De même, le consensus politique de la Suède et la coopération nordique dans ces domaines, ont joué un rôle important pour la délégation suédoise, en lui permettant de savoir jusqu'à quel point elle pouvait promouvoir certaines questions de DSSR dans les négociations. La question du droit à l'avortement était précisément un bon exemple de consensus entre tous les partis politiques. LaconférencedePékinsurlesfemmes,1995 Durant la conférence de Pékin sur les femmes en 1995, les droits des femmes étaient placés encore plus au centre, permettant ainsi de mettre en avant et d'améliorer les questions de DSSR. Dans le discours prononcé par la femme du président américain à cette époque, Hilary Clinton rappela que « Women's rights are human rights » (les droits des femmes sont les droits de l'Homme). C'était justement cette formulation qui avait été affirmée lors de la conférence des Nations unies en 1993 à Vienne et qui se retrouve dans les paragraphes introductifs de la plateforme de Pékin. Les DSSR y ont été associés à une perspective plus large d'égalité des sexes qui soulignait aussi les droits des femmes à la terre, à l'héritage, à la propriété et à l'influence politique à tous les niveaux. De même, la plateforme de Pékin affirma dans son paragraphe 96 que « les droits des femmes incluent également leur droit à contrôler leur sexualité, de façon libre et responsable, y compris la santé sexuelle et reproductive, sans obligation, discrimination ou violence ». Le plus important était que les droits sexuels et reproductifs des femmes étaient perçus comme une condition préalable à leur participation à tous les niveaux de la société. Les États se sont aussi engagés dans le cadre de la plateforme de Pékin à lutter contre la violence faite aux femmes et aux filles, que ce soit en temps de paix ou de guerre, et à protéger et assister les victimes de violence. Et les références à la culture, aux traditions et à la religion ne devaient jamais mettre de côté les droits humains des femmes. L'actiondelaSuèdelesannéessuivantlesconférencesduCaireetdePékin La période suivant le Caire et Pékin était productive d'un point de vue suédois. Les préparations nationales avaient permis de construire une base de savoirs et de critiques. La Suède pouvait ouvertement contribuer à la promotion des questions de DSSR aussi bien dans la coopération au développement que dans différents contextes et négociations internationaux. En 1999, elle contribua ainsi à la mise en place de la résolution « Key actions for the further implementation of the Programme of Action of the International Conference on Population and Development » (Actions-clés pour une mise en oeuvre du Programme d'Action de la CIPD) lors d'une session spéciale de l'assemblée générale des Nations unies. Le ton de la résolution était plus dur concernant les jeunes, l'accès à un avortement sans risques là où il était légal, ainsi que l'accès à des soins après un avortement risqué. L'avortement a été exprimé comme un droit et une nécessité pour arriver à l'égalité des sexes, et non pas comme une méthode de planification familiale. Delaparoleàl'action‐lesoutiendelaSuèdeauxDSSRaprèsleCaire UnestratégiesuédoisedecoopérationaudéveloppementpourlesDSSR La conférence du Caire a constitué un revirement de 180 degrés du point de vue du problème démographique : alors qu'il était considéré comme une conséquence du comportement sexuel individuel des personnes, il était maintenant considéré comme un produit de la pauvreté, de l'inégalité et de l'exposition aux risques. Le terme « population issues » (questions démographiques) a depuis été utilisé par la Suède uniquement pour qualifier la coopération au développement relative à la démographie et aux recensements, et pour éclairer les conséquences de la poursuite de l’accroissement démographique, par exemple dans les débats sur les ressources naturelles et l'urbanisation. Le plan d'action suédois pour une santé sexuelle et reproductive de 1994 a été considéré conforme au plan d'action du Caire, et a été à la base des travaux sur une nouvelle stratégie de coopération au développement : ”Strategy for Development Cooperation – Sexual and Reproductive Health and Rights” (SRHR) (Stratégie pour la coopération au développement- Droits en matière de santé reproductive et sexuelle) lancé en 1997. La Suède était la première à y inclure la notion de droits (« and Rights »), le dernier « R » de SRHR. Au Caire c'était le terme SRH qui était utilisé, car le terme de droits sexuels était encore controversé. Cette stratégie a donné la priorité aux droits de l'homme et à l'égalité des sexes, aux avortements sans risques, à la santé des jeunes et aux mesures contre l'excision des femmes, la discrimination et la violence sexuelle, sans oublier les aspects évidents tels que les services de santé maternelle et les soins pour les nouveaux-nés, les conseils, le service et l'accès aux moyens contraceptifs et des mesures contre le SIDA/VIH et autres MST. PuisvintleSIDA/VIH... A partir de la moitié des années 1980, la menace du SIDA a été vécue comme tellement importante que de nouveaux programmes spéciaux visant à lutter contre le SIDA et le VIH ont été mis en place, à un niveau national et international. Petit à petit, il est devenu important de coordonner et d'intégrer des mesures contre le SIDA et les autres MST avec des mesures visant à prévenir les grossesses non désirées et à rendre les avortements moins risqués. Durant cette première période chaotique, la Suède a choisi de canaliser de nouvelles ressources supplémentaires dans sa coopération au développement pour la lutte contre le SIDA/VIH, par le biais d’organisations internationales, surtout l'OMS et le PNUD. La première stratégie suédoise concernant le SIDA/VIH, « Investir pour les générations à venir », a été mise en place en 1999. L'intégration recommandée des questions relatives au SIDA/VIH dans tous les secteurs de la coopération au développement, ont clairement séparé les raisons de la contamination au VIH des effets de l'épidémie du SIDA. L'organe suédois de la coopération au développement, l'Asdi, a instauré dès l'an 2000 d'un côté un secrétariat central pour le VIH et le SIDA, et de l'autre une équipe régionale pour le VIH et le SIDA dans le sud de l'Afrique. Le ministère des affaires étrangères a créé un poste d'ambassadeur du SIDA. Ces mesures ont beaucoup renforcé le travail de la Suède contre le SIDA/VIH. A la fin des années 1990, il devint de plus en plus clair que le SIDA/VIH n'allait pas disparaître de luimême, et que la Suède et d'autres États donneurs avaient besoin d'investir des ressources bien plus importantes pour s'attaquer au problème. La bonne renommée de la Suède dans l'égalité des sexes et dans les questions de DSSR lui ont donné de bonnes conditions pour agir plus fortement. Au printemps 2001, une grande avancée pour la coopération au développement internationale concernant le SIDA/VIH eut lieu lors de la première session spéciale sur le SIDA/VIH au sein de l'assemblée générale des Nations Unies. Contrairement à d'autres négociations internationales similaires précédentes, le SIDA/VIH a facilité la discussion autour de la sexualité et de l'égalité des sexes en relation avec la santé sexuelle. Il était clair que le VIH se répandait le plus vite en Afrique parmi les hétérosexuels, et que les femmes étaient les plus exposées, aussi bien en raison de leur physiologie que de la répartition des pouvoirs. Mais le SIDA/VIH était aussi un grand enjeu pour les personnes LGBT et leurs organisations dans le Nord et le Sud. Lors de la négociation, le défi était d'amener tous les pays à se mettre d'accord sur une résolution, y compris les pays qui n'admettaient même pas l'existence de personnes ayant une orientation sexuelle différente ou une autre identité sexuelle. Le document final insistait sur les droits de l'homme pour les porteurs du VIH, pour les femmes et les filles, et aussi pour que toutes les formes de discrimination puissent être éliminées. La dépendance mutuelle des DSSR et des questions de SIDA/VIH était considérée dès le début aussi bien comme une menace qu'une opportunité. La menace était que les ressources déployées pour les actions concernant le SIDA/VIH étaient devenues tellement importantes que la coopération au développement concernant les DSSR était passée au second plan. L'opportunité était l’apparition d’un effet de synergie. Car beaucoup de mesures de prévention contre le SIDA/VIH étaient identiques aux actions concernant les DSSR, par exemple l'enseignement sur la sexualité et l'égalité des sexes, la prévention de la contamination sexuelle et la distribution de préservatifs. La Suède a mis en avant la question de l'intégration des actions concernant les DSSR dans les programmes sur le SIDA/VIH dans plusieurs contextes, par exemple par des aides importantes à l'ONUSIDA et au Fonds mondial de lutte contre le SIDA, la tuberculose et le paludisme, et à travers un grand programme régional en Afrique du Sud. Denouvellespositionssuédoises En 2003, le gouvernement suédois a adopté une nouvelle politique de développement, cette fois bien plus large, « Responsabilité commune : La politique de la Suède pour un développement global ». Les deux nouveaux points de vue, c'est-à-dire la perspective des gens pauvres et celle des droits, étaient à la base de l'élaboration d'une nouvelle politique concernant les DSSR, et ont par la suite marqué la coopération au développement suédoise à ce sujet. Le monde avait changé depuis la stratégie concernant les DSSR de 1997. De nouvelles formes de coopération au développement ont été introduites selon des accords internationaux pour une assistance plus efficace, qui s'appelait l'agenda de Paris. De plus, la nouvelle politique de coopération au développement des États-Unis avec « the Global Gag Rule » avait fait augmenter le besoin de financement pour les organisations qui travaillaient sur les DSSR et qui avaient perdu le soutien des États-Unis. En 2006, le gouvernement a adopté « la politique internationale de la Suède pour les DSSR ». Cette nouvelle politique était construite sur la base des documents adoptés au Caire et à Pékin, et sur les expériences de la stratégie concernant les DSSR et des actions de coopération au développement dans ce domaine. La pierre angulaire était l’égale valeur de tous les êtres humains et l’indivisibilité des droits de l'homme. On affirma que l'analyse des pouvoirs basés sur le sexe était un élément central pour mener un bon travail dans le domaine des DSSR. La politique des DSSR a adopté treize domaines stratégiques, dont six traitaient des rôles des sexes, des identités et des droits de l'homme, cinq de la santé reproductive, deux de la santé et des droits sexuels, et une de l'amélioration des aptitudes organisationnelles. Les nouveaux domaines étaient une plus grande attention accordée aux personnes LGBT, à la prostitution et au trafic sexuel des êtres humains. Quelques années plus tard, la Suède a adopté une nouvelle politique pour la coopération au développement concernant le SIDA/VIH, « le droit à un avenir » en 2009, et la « Politique pour l'égalité des sexes, pour le droit des femmes et leur rôle dans la coopération internationale de la Suède au développement 2010-2015 ». LacoopérationaudéveloppementdelaSuède Les objectifs du millénaire pour le développement de 2000, notamment l'objectif n°5 sur une amélioration des services de santé maternelle, ont promu la coopération au développement concernant les DSSR. Mais ce n'est qu'en 2006, lorsque la santé sexuelle a été introduite comme objectif partiel propre (Objectif du millénaire pour le développement ou OMD n° 5B) avec entre autres la Suède comme promoteur principal, que tout l'agenda du Caire sur la santé reproductive et sexuelle a été installé. L'intérêt politique augmenta progressivement, et le manque d'avancées pour les OMD n°4 et 5 commença à attirer petit à petit l'attention. Très tôt, la Suède a eu la réputation d’être un donateur actif dans le domaine des DSSR. La Direction de la coopération pour le développement (DCD-CAD) de l'OCDE a en 1996 remarqué que la Suède avait augmenté son soutien à la santé reproductive, et l'identifia en 2000 comme « the champion on SRHR issues » (la championne sur les questions de DSSR). La coopération au développement de la Suède a progressivement changé après le début du nouveau millénaire. L'agenda de Paris de 2005 a imposé de nouvelles exigences aux donateurs de coopération au développement. Pour la Suède, cela impliqua une transition des programmes principalement sectoriels, c'est à dire verticaux, vers une assistance plus large à tout le secteur de la santé dans un même pays ou à toute une organisation. Cela ouvrait moins de possibilités pour piloter directement l'utilisation des moyens suédois, mais permettait d'en ouvrir d'autres au niveau d'un pays qui pouvait, avec des ministères et d'autres donateurs, influer sur les questions de DSSR dans un contexte plus large. Une grande partie de la coopération au développement suédoise concernant les DSSR va aujourd'hui à trois organisations internationales, dont l'activité est dans la même ligne que la politique de la Suède dans ce domaine : l'IPPF, l'UNFPA et l'OMS. La Suède a également soutenu le Fonds Mondial et l'ONUSIDA depuis leur institution. De même, elle soutient le Partenariat pour la santé de la mère, du nouveau-né et de l'enfant (PMNCH), ainsi que l'initiative H4+, une coopération entre six organes des Nations unies. Une grande partie de la coopération au développement bilatérale de la Suède va pour le soutien du développement des systèmes de santé dans un grand nombre de pays. Tous ces programmes ont des composantes concernant les DSSR ou le SIDA/VIH. Par ailleurs la Suède soutient des programmes mondiaux et régionaux pour le développement de normes, de savoirs, de méthodes, d'aptitudes et d'influences à un niveau mondial et régional, et des « International Training Programmes » (ITP/ Programmes de formation Internationaux), visant à transmette des compétences suédoises en matière d'enseignement. Les composantes concernant les DSSR existent aussi dans les aides pour la démocratie/droits de l'homme, dans les actions au travers d'organisations privées et dans la coopération humanitaire. Lessoinsdesantématernelle Les actions de coopération au développement contre la mortalité maternelle ne sont pas controversées, contrairement à la plupart des autres actions en matière de DSSR, mais ont longtemps été négligées car elles sont complexes, coûteuses et dépendantes d'un système de santé qui doit fonctionner à tous les niveaux, y compris avec du personnel qualifié et des hôpitaux de qualité. La politique de la Suède concernant les DSSR de 2006 était claire : toutes les personnes doivent avoir accès à un service de santé reproductive, à un bon service de santé pour les accouchements, et toutes les femmes doivent avoir le pouvoir de décider de tout ce qui concerne leur propre santé. Un des avantages de la Suède comme acteur de la coopération au développement concernant les DSSR est l'expérience suédoise des sages-femmes, qui ont été formées depuis 1708 et ont institué leur propre fédération dans les années 1880. Dans les années 1840, la santé des femmes en Suède était au même niveau que celle aujourd'hui dans beaucoup de pays pauvres. Mais après des réformes qui ont duré 50 ans, le nombre de sages-femmes formées a augmenté, et la mortalité maternelle a diminué. Aujourd'hui les sages-femmes incarnent les DSSR, et pas seulement en Suède. Elles sont nécessaires, tant pour leurs larges domaines de responsabilité que par leurs savoirs professionnels sur la reproduction et la sexualité et les droits y attenant. C'est pourquoi le rôle de la sage-femme en tant que consolidation de la formation d'autres personnels dans les domaines de l'accouchement a constitué une partie importante de la coopération au développement suédoise en ce qui concerne la maternité, vers par exemple l'Angola, l'Éthiopie, le Nicaragua, l'Inde et le Bangladesh. Le Réseau de Recherche des Sages-femmes africaines, initié en 1993, a aussi été soutenu durant plusieurs années. La Confédération internationale des sages-femmes (ICM) a pu, grâce aux aides de l'Asdi, contribuer à la mise en place de fédérations nationales pour les sages-femmes dans beaucoup de pays pauvres. L'ICM et l'Asdi ont pris en 2006 l'initiative pour un programme mondial pour les sages-femmes au sein de l'UNFPA, qui a été inclus dans Maternal Health Thematic Fund (Fonds thématique d’affectation spéciale pour la santé maternelle/ MHTF). Son objectif est d'atteindre les sages-femmes dans les pays les plus pauvres du monde avec des formations les concernant. Desavortementslégauxetsansrisques Les avortements risqués constituent une des raisons les plus fréquentes de mortalité maternelle, surtout en ce qui concerne les filles et les jeunes femmes. Comme dans beaucoup d'autres pays, la Suède a eu dans le passé une législation restrictive en matière d'avortement. Mais dans les années 1950 et 1960, l'avortement a commencé à être perçu différemment, et en 1975, une nouvelle loi sur l'avortement a été promulguée, donnant à la femme seule le droit de décider d'avorter avant la 18ème semaine. La Suède a ainsi osé affirmer le besoin d'avortements légaux et sans risques. Dans la politique concernant les DSSR de 2006, il est affirmé que « le manque d'accès des femmes à des avortements légaux et sans risques constitue un obstacle à leur jouissance des droits de l'homme. C'est pourquoi la Suède va soutenir des actions qui visent à rendre les avortements accessibles, sans risques et légaux pour toutes les femmes ». Dans les coopérations avec les pays, l'aide au développement étatique dans le domaine de l'avortement n'a pas été remise en question, à part quelques exceptions. Mais depuis 1989, l'action « régulation de la menstruation » (MR) au Bangladesh est soutenue comme une méthode d'avortement jusqu'à la neuvième semaine et est pratiquée par quelques organisations privées. Au Kenya, le développement de la méthode « Manual Vacuum Aspiration » (Aspiration manuelle intra-utérine) a été financé dans les années 1990 pour les femmes arrivant aux services de santé avec des lésions graves dues à un avortement risqué et illégal. La Suède trouvait que la question de l'avortement a été le plus efficacement promue à travers des organisations internationales ayant des compétences techniques. Un exemple est le financement du grand rapport de la Banque mondiale sur la question globale de l'avortement, écrit en 1993 par un gynécologue suédois. Un autre exemple est le financement des premières lignes directrices de l'OMS sur l'avortement : « Safe abortion : Technical and Policy Guidance for Health systems » (Avortement sans risques : guide technique et politique pour les systèmes de santé). Les organisations internationales privées sont d'importants canaux pour le soutien aux questions d'avortement. Une telle organisation est l'Ipas, fondée en 1973 et soutenue par la Suède depuis le début des années 1990 par des aides centrales. La Suède est maintenant le deuxième plus grand donateur de l'organisation. Ipas se focalise sur l'accès à des avortements sans risques à travers des aides à la construction de services cliniques et la formation du personnel, ainsi que le changement de l'opinion à un niveau mondial. Ipas était aussi un acteur central dans l'institution du « Maputo Plan of Action » (le Plan d'action de Maputo) (2006) de l'Union africaine, une politique progressive qui a soulevé la question des avortements sans risques. Dans ce contexte, on peut aussi souligner que l'IPPF, qui a reçu beaucoup de soutiens de la part de l'Asdi, est un des acteurs mondiaux les plus importants pour la promotion des avortements sans risques et pour empêcher les avortements risqués. L'assistance aux avortements sans risques est politiquement sensible. Pour neutraliser les conséquences du Global Gag Rule de 2001, la Suède a soutenu la fondation d'une « Safe Abortion Action Fund » globale (Fonds d'action pour l'avortement médicalisé), une « Global Abortion Meeting » (Réunion globale sur l'avortement) et plusieurs réunions au sein de « International Consortium for Medical Abortion » (Consortium International pour l'Avortement Médicamenteux/ICMA). Un soutien a aussi été accordé aux organisations Gynuity et Guttmacher Institute pour les recherches sur les avortements médicamenteux. L'accèsauxmoyensdecontraception La politique suédoise concernant les DSSR affirme que l'accès aux informations et aux moyens de contraception, y compris les préservatifs, sont essentiels pour que l'individu puisse décider s'il veut avoir des enfants et à quel moment. Cependant, l'accès à un service de moyens contraceptifs de qualité et la liberté de choix, en tant que facteurs importants pour la santé des femmes, ont été partiellement oubliés dans les controverses sur les précédentes aides démographiques et même après la CIPD. Le Vatican a en plus continué à combattre le travail sur les méthodes contraceptives modernes. Mais la Suède a depuis la CIPD financé de grands programmes ayant les moyens contraceptifs comme composante importante, entre autres au sein de l'aide aux secteurs de santé au Bangladesh, en Ouganda, en Zambie et autrefois au Kenya. La Suède est également un des plus grands donateurs à la Fédération internationale pour la planification familiale, qui durant l'année 2012 a dispensé des conseils à environ 45 millions de jeunes, a distribué 190 millions de préservatifs et 43 millions autres méthodes contraceptives. La question de l'accès aux moyens contraceptifs et leur utilisation est venue à l'ordre du jour à nouveau, par exemple lors de la rencontre au sommet de 2012, « FP 2020 ». Un mouvement mondial a démarré pour assurer l'accès aux moyens contraceptifs pour les 120 millions de femmes qui aujourd'hui n'ont pas l'aide qu'elles souhaiteraient avoir. Une nouvelle forme d'aide a été instaurée en 2013 lorsque l'Asdi, en collaboration avec d'autres donateurs et fondations privées, a participé à un partenariat avec l'industrie des médicaments pour augmenter fortement l'utilisation de deux nouveaux moyens de contraception efficaces sur le long terme. Une garantie financière participe désormais à ce que le prix du moyen contraceptif soit divisé par deux et puisse ainsi atteindre les femmes dans les pays les plus pauvres. Un exemple de coopération de la Suède avec le secteur privé, dans le domaine du SIDA/VIH, est le programme « Universal Access to Female Condoms » (l'Accès universel à des préservatifs féminins) qui est mené par quelques organisations hollandaises. L'objectif est de rendre les différentes formes de préservatifs accessibles, car ils permettent de donner le contrôle à la femme et d'augmenter ses chances d'éviter la contamination et la grossesse. Lesjeunes,lesDSSRetl'éducationsexuelle La sexualité des jeunes et l'identité sexuelle sont principalement guidées par le prisme des normes et des valeurs culturelles, avec des conséquences sur la marge de manœuvre des jeunes personnes et leurs possibilités d'exprimer leur sexualité, de se protéger contre les MST et d’éviter les grossesses non désirées. L'OMD 5B sur la santé reproductive, créé en 2006, est devenu un indicateur de l'atteinte des objectifs en termes de grossesse chez les jeunes, « Adolescent Birth Rate » (Taux de natalité des adolescents). Une demande claire aux pays du monde a de nouveau été affirmée après la CIPD, celle de cibler les jeunes dans les actions concernant les DSSR. La Suède a longtemps soutenu des actions pour le droit des jeunes à décider de leur propre sexualité et pour leur donner la possibilité de se protéger contre le risque de grossesse non désirée, ou d'être contaminés par le VIH ou par d’autres infections sexuellement transmissibles. La Suède a essayé dès les années 1960 et 1970 de soutenir les actions d’éducation sexuelle. Mais cette ambition a malheureusement souvent atterri entre les différents secteurs. Le secteur de la santé avait des difficultés à atteindre les jeunes, et le domaine de l'enseignement était difficile à engager. Mais à partir des années 1980, la Suède est devenue pionnière dans son soutien aux organisations privées, qui tentaient, à travers les centres d'accueil pour les jeunes, d’atteindre les jeunes filles avec des enseignements sur la sexualité. L'épidémie du SIDA/VIH a par la suite fait augmenter la demande d'actions pour les jeunes, surtout en termes d'enseignement combiné SIDA/VIH et sexuel. Entre autres, la Suède a pu contribuer à la production par l'UNESCO de « International Technical Guidance on Sexual Education Curriculum » (Guide technique international pour les programmes d'éducation sexuelle) et attribuer des subventions à grande échelle pour améliorer l'enseignement sexuel dans l'est et le sud de l'Afrique. Le soutien de l'Asdi et sa coopération avec des organisations privées, comme l'Association suédoise pour l'éducation sexuelle, a également été important pour soutenir des questions difficiles concernant les DSSR, le sexe et le pouvoir. L'égalitédessexesetlesDSSR Les stratégies suédoises sur l'égalité entre les hommes et les femmes confirment que l'égalité des sexes est la base d'un travail efficace sur les DSSR. Cela avait également été exprimé dans les plans d'actions du Caire et de Pékin, et dans les stratégies de la Suède sur les DSSR et le SIDA/VIH. La Suède travaille avec quatre domaines des DSSR : le soutien aux réseaux de femmes, le travail avec les hommes et les garçons, les actions contre la violence faite aux femmes, et les questions de LGBT. Le rôle des hommes et des garçons La Suède a depuis la CIPD essayé d'attirer l'attention sur les rôles des hommes et des garçons et leur responsabilité dans l'égalité des sexes, des DSSR et dans la prévention du virus du SIDA. Ce problème relève typiquement de l'influence et du dialogue, c'est pourquoi la Suède a choisi de soutenir des réseaux et des organisations privées, qui diffusent de la publicité par des publications et des réunions internationales. Déjà en 1999, une réunion a été organisé à Lusaka, « Men's choices, Men's voices, How can we gain from improved gender equality? » (Les choix des hommes, les voix des hommes, que pouvons-nous gagner de l'égalité entre les sexes?) Il s'agissait de sexualité, de paternité et d'identité masculine dans une société en changement. Il existe des réseaux masculins actifs dans les questions de DSSR. Une des plus grandes est « Men Engage » (Les hommes s'engagent), qui a été soutenue par la Suède durant plus d'une décennie. C'est une organisation parapluie fédérant 400 organisations privées et plusieurs organes des Nations unies, travaillant avec les hommes et les garçons afin de promouvoir l'égalité des sexes, prévenir la violence contre les femmes et l'exploitation sexuelle des enfants, et éviter la contamination par le virus du SIDA. En Suède, l'organisation « Les hommes pour l'égalité des sexes » fait partie de ce réseau. Le soutien pour le SIDA/VIH a été accordé à leur réseau actif africain, appelé « Sonke, Gender Justice » (Sonke, la justice des sexes). La violence en raison du sexe La violence en raison du sexe est définie en Suède comme : « Tout préjudice ou souffrance que subit une femme ou une fille, un homme ou un garçon, ou qui a une influence négative sur la santé physique, sexuelle ou psychique de la personne, sur son développement ou sur son identité. Les raisons de la violence trouvent leur origine dans des relations de pouvoir inégales basées sur le sexe et dans la discrimination hommes-femmes ». De plus, la violence en raison du sexe est un crime contre les droits de l'homme et un grand facteur de risque dans la diffusion de la contamination par le virus du SIDA et l'augmentation de la mortalité maternelle. Les viols et autres violences sexuelles sont souvent utilisés comme une stratégie consciente et une arme dans les guerres et les conflits. Un grand nombre de résolutions des Nations unies sur les femmes, sur la paix et la sécurité a attiré l'attention sur ce problème, et le travail de la Suède sur ce sujet a beaucoup augmenté en volume durant la dernière décennie. La Suède participe aussi au travail des Nations unies dans le domaine « UN action against sexual violence in conflict » (Campagne des Nations Unies contre la violence sexuelle en temps de conflit). Dans la coopération au développement concernant les catastrophes, la Suède a décidé de ne financer que les actions qui citent dans leurs rapports comment la violence basée sur le sexe est gérée dans les actions menées en temps de catastrophes. Le droit à disposer de son propre corps et de sa propre sexualité Le dernier « R » dans SRHR concerne les droits sexuels. Cette partie des DSSR touche principalement à la question des droits, au pouvoir, au fait de ne pas subir de répressions, et au droit de tous les êtres humains à disposer de leur propre sexualité, constituant une partie fondamentale de la liberté humaine. Le terme implique également la reconnaissance du droit des êtres humains à une autre conception sexuelle que l'hétérosexuelle. C'est pourquoi la politique concernant les DSSR de 2006 a mis l'accent sur la situation des homosexuels, des bisexuels et des transsexuels, et a insisté pour que la Suède augmente ses compétences sur les orientations et les identités sexuelles dans ses coopérations au développement. La coopération au développement de la Suède dans le domaine du VIH se focalise souvent sur les hommes qui ont des rapports sexuels avec des hommes, par exemple à un niveau régional en Afrique à travers un soutien à l'IHAA (International Hiv/Aids Alliance/ Alliance internationale du VIH/SIDA), et dans cinq pays en Afrique à travers l'”International Gay and Lesbian Human Rights Commission” (IGLHRC/ Commission Internationale de Droits de l'Homme pour les Gays et Lesbiennes). Pourl'avenir Une série de réunions internationales dans les années 2010 ont constitué une poursuite des négociations compliquées sur les DSSR, que ce soit au sein de l'assemblée générale des Nations unies ou du conseil des Nations unies pour les droits de l'homme. Elles ont traité de tous les sujets : les descriptions des droits des enfants et des filles, les mariages forcés, les jeunes, les femmes dans le monde rural, les défenseurs féminins des droits de l'homme, les questions familiales, le trafic sexuel, la santé globale et les orientations pour l'agenda post-2015. La position de la Suède dans les négociations post-2015 soulève les DSSR comme une question prioritaire, en partie dans le cadre du droit de tous d’avoir accès à la santé, et en partie pour la promotion de l'égalité des sexes, qui doit aussi devenir un objectif en soi. La Suède consacre aujourd'hui plus d'argent que jamais pour les DSSR dans sa coopération au développement (y compris le SIDA/VIH), s’élevant à 300 millions d'Euros en 2012. La Suède est maintenant le plus grand donateur au budget de base du Fonds des Nations unies pour la population, et le troisième plus grand donateur dans son aide globale. Elle est également très active dans les conseils d'administrations de l'UNFPA, de l'ONUSIDA, de l'UNICEF, du Fonds Mondial, de la Banque mondiale et de l'Alliance mondiale pour les vaccins et la vaccination, afin de s'assurer que la perspective de l'égalité des sexes et de la question des droits soient imprégnés dans les travaux de ces organisations. La Suède continue à défendre les DSSR dans les négociations globales et par des soutiens financiers. Lors de la réunion au sommet des chefs d'État à New York en septembre 2013, le premier ministre suédois Fredrik Reinfeldt a mis l’accent sur l'égalité des sexes et les DSSR. A la conférence de presse qui a suivi, il a été rapporté qu'un journaliste avait demandé si le premier ministre n'avait pas d'autre chose de plus important à soulever que l'égalité des sexes. Cette réaction au discours de Reinfeldt montre encore une fois que l’importance de la Suède dans les questions d'égalité des sexes et des DSSR est toujours d'actualité. Les dernières années, la coopération nordique autour des questions d'égalité des sexes et des DSSR est devenue de plus en plus importante et constitue dorénavant une partie centrale de la participation de la Suède dans les négociations des Nations unies. Les politiques des cinq pays nordiques, leurs stratégies et leurs modèles de financement reflètent désormais des pensées et des convictions communes : que l'égalité des sexes et les DSSR sont fondamentaux pour le développement. Ils sont d'accord sur l'importance de combattre la tendance chez les pays conservateurs à réduire le large champ des DSSR à une simple question d'avortement et de LGBT. Conclusion L'engagement global de la Suède dans les DSSR a aujourd'hui plusieurs facettes, comme il en ressort par ce qui a été présenté, de la même façon qu'est le concept lui-même. Les actions dans les domaines non controversés de services de santé maternelle, y compris le rôle des sages-femmes, a avec les années augmenté en volume. La Suède a par ailleurs de nouveau attiré l'attention sur les manques criants en moyens contraceptifs dans les pays pauvres, et a commencé à jouer un rôle plus actif dans ces questions. Les actions dans les domaines controversés, qui touchent beaucoup au concept de droit, ont également augmenté, mais sont encore difficiles à intégrer dans les aides bilatérales de santé ou dans les programmes des Nations unies. Elles incluent des contributions pour des avortements légaux et sans risques, dans la santé sexuelle et reproductive des jeunes et leurs droits, dans des actions concernant les rôles des hommes et des garçons, la violence liée au sexe et le droit de tous d'exprimer son orientation sexuelle. Le fort soutien politique de la part du gouvernement et du parlement a permis un développement rapide de la politique et des programmes de coopération au développement concernant les DSSR. Il a également influencé la forme des actions de coopération au développement et a placé de nouveau la Suède dans la ligne de front dans beaucoup de questions sensibles et controversées. Chaque temps a ses défis. Aujourd'hui une grande mission consiste à défendre les avancées qui ont été atteintes durant des décennies en termes de santé sexuelle et reproductive des femmes et des hommes et leurs droits, mais qui continuent à être menacées dans beaucoup d'endroits dans le monde. Les DSSR impliquent une reconnaissance de la valeur égale de tous, et constituent un outil contre les visions basées sur le sexe de la personne, visions qui limitent la vie des êtres humains, leur liberté de choix et leurs droits. Dans le monde d'aujourd'hui, ce sont surtout les femmes pauvres qui sont menacées par les limitations des DSSR. C'est pourquoi ces droits constituent la pierre angulaire des actions de la Suède dans la lutte contre la pauvreté et le renforcement des droits des femmes. Remerciements Les auteurs tiennent à remercier les personnes suivantes pour leur précieuse contribution à cette publication: Björn Andersson, Lennart Båge, Klara Backman, Dalton Barrientos, Sophie Becker, Lisbeth Björk, Ros-Mari Bålöw, Sofia Dohmen, Paul Dover, Jenny Egermark, Lena Ekroth, Pia Engstrand Carolyn Hannan, Therese Hyden, Su¬sanne Jacobsson, Alireza Javaheri, Ulrika Hertel, Karolina Kvarnare, Christina Larsson, Susanne Lokrantz, Hans Lundborg, Anders Molin, Ann Måwe, Anders Nordström, Kwabena Osei-Danquah, Maria Parent, Erin Person, Eva-Charlotte Roos, Julia Schalk, Ann Svensén, Prudence Woodford-Berger, Eva-Marie Wikström. Cette publication est disponible en anglais, espagnol, français, russe et arabe à cette adresse: www.ipci2014.org Les auteurs de la publication d'origine: Gerd Johnson-Latham, Katarina Lindahl, Bo Stenson, Eva Wallstam Les points de vue et les appréciations présentes dans la publication sont celles propres aux auteurs. La publication a été regroupée par: Bo Stenson Traduction en français par: Språkservice i Sverige AB Rédactrice du contenu: Sarah Thomsen © 2013 Le Ministère des affaires étrangères et les auteurs Numéro d'article: UD13.035