Tas de sable et parabole
Une introduction à la physique des milieux granulaires
Frédéric Élie, juillet 2014
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S'il existe un domaine omniprésent, tant dans les études théoriques que dans les applications
pratiques, vaste et qui implique tous les savoirs en physique et en chimie, c'est bien celui des
matériaux. Et à l'intérieur de ce domaine, celui des matériaux granulaires est lui aussi
omniprésent, touche toutes les technologies, les applications, et les processus de la nature: par
exemple, la construction (les mélanges utilisés pour les matériaux de construction utilisent des
milieux granulaires), le packaging (le conditionnement des structures pulvérulentes, tant en
cosmétique qu'en pharmacie nécessite de maîtriser le comportement de ces milieux...), les
ouvrages du génie civil (digues, gestion des dunes...), la compréhension et la prévision des
avalanches ou du recul des falaises et des zones côtières, la formation et la stabilité des dunes
de sable dans le désert, ou des talus utilisés ou formés par des remblais (et les glissements de
terrain), les techniques industrielles qui utilisent les milieux granulaires, telles celles des silos (et
la prévention des dangers associés comme ceux liés aux explosions de poussière), les sables
mouvants, etc., etc.
Les milieux granulaires sont caractérisés par deux choses: la portée des interactions internes
mises en jeu, et leur comportement par rapport à la matière fluide et la matière solide. Pour la
première caractéristique, les milieux granulaires existent sur des échelles allant du
mésoscopique (quelques pouillèmes de millimètres) jusqu'aux macroscopiques (puisque des
systèmes, comme les anneaux de Saturne, se comportent aussi, collectivement, comme des
matériaux granulaires!), en passant par les échelles intermédiaires. Pour la deuxième
caractéristique, les milieux granulaires, de par leurs comportements collectifs, ne se comportent
ni comme des assemblages solides, ni comme des milieux continus fluides: bien que constitués
d'éléments solides (les grains solides), les interactions entre ces éléments au sein des milieux
granulaires sont des mécanismes collectifs; la compréhension détaillée de ces mécanismes font
encore l'objet de recherches fondamentales, et l'enjeu est qu'elle permet de maîtriser les
techniques de mise en œuvre des structures matérielles et aussi de comprendre et de prévenir
les dysfonctionnements et accidents, parfois dramatiques, liés à ces structures (avalanches,
explosions, effondrements, glissements de terrain, dispersion de nuages pulvérulents...).
Ni fluide, ni solide, un milieu granulaire, en effet ne se comporte pas comme un solide puisqu'il
est déformable, dispersible et écoulable, ni comme un liquide puisque, par exemple, lorsqu'on le
comprime il se dilate (c'est le phénomène de dilatance de Reynolds)! En tant que milieu constitué
d'un très grand nombre de grains solides, il n'est pas comme un solide, à cause par exemple de
l'existence de l'effet de voûte. Cet effet est responsable d'un grand nombre de comportements
des milieux granulaires: comportement singulier des écoulements dans un récipient à travers un
orifice (silos, sabliers) où le matériau s'auto-bloque (effet Janssen) ou bien s'écoule
régulièrement quel que soit son niveau comme dans un sablier (effet Beverloo); application de
l'effet de voûte aux ballasts de chemins de fer (comment se fait-il qu'un train de plusieurs
©Frédéric Élie – http://fred.elie.free.fr, juillet 2014 - page 1/67