double statut du dollar favorise les Etats-Unis et les maintient dans une position de "benign neglect". De plus, une telle
attitude constitue une des origines des tensions croissantes sur le marché pétrolier, qui mèneront au second choc pétrolier,
l'OPEP cherchant à compenser par la hausse des prix la forte dépréciation du dollar, monnaie de facturation pour les pays
producteurs.
2. 1980-85 : restriction de la liquidité internationale, envol du dollar et des taux d'intérêt.
C'est sans doute cette période qui illustre le mieux le rôle central du dollar dans le nouveau système de changes flottants :
toute l'économie mondiale est suspendue aux prises de décisions de la Banque Fédérale américaine. Or, depuis 1979, c'est
le tournant monétariste ; l'objectif de stabilité l'emporte et ce choix s'impose progressivement à l'ensemble des pays
développés : "jamais la gestion unilatérale de la monnaie mondiale n'a été aussi nette" (J.-P. Delas in "Les relations
monétaires internationales").
Après une récession brutale en 1981-82, les Etats-Unis retrouvent une forte croissance (+ 6,8 % en 1984) qui les rapproche
du plein-emploi. La politique monétariste, impulsée par Paul Volker, à la tête des la Banque Fédérale américaine depuis
1979, renforce considérablement le dollar, qui atteint le niveau record de 10,61 F en mars 1985. Cette évolution
s'accompagne d'un vaste mouvement de polarisation des flux financiers. Surtout, dollar fort et taux élevés se combinent
pour alimenter une crise de la dette touchant les pays du Tiers-Monde, alors fortement endettés : la crise mexicaine de l'été
1982 illustre parfaitement l'effet massue de l'endettement.
3. Depuis 1985 : "zones cibles" et stabilisation laborieuse du système monétaire.
Les Etats-Unis, plus que jamais au cœur du système monétaire international veulent prolonger la croissance économique des
années 83-84. Or, devant l'ampleur des déficits jumeaux, l'instrument budgétaire ne peut plus être sollicité: avec la loi
Gramm-Rudman-Hollings, le Congrès obtient même l'engagement d'un retour à l'équilibre budgétaire à l'horizon 1993. La
relance ne peut plus être obtenue que par la baisse des taux d'intérêt et la baisse du dollar. Une telle baisse ne peut être que
concertée au niveau international afin d'éviter un "crash landing" (c'est à dire effondrement brutal) du dollar. C'est le sens de
l'accord du Plazza (1985) et surtout de l'accord du Louvre (1987): les évolutions sont reprises en main grâce à l'instauration
de "zones-cibles" (Target Zones – à expliquer). C'est donc bien le retour à une certaine forme de coopération monétaire, à une
gestion concertée des taux de change qui a permis cette très relative stabilité depuis 1987: ne faut-il pas voir là un échec patent
du flottement pur et un démenti cinglant aux tenants de ce principe ? Mais il s'agit d'une coopération a minima, de faible
portée. Les évolutions récentes montrent bien qu'une guerre monétaire discrète mais réelle se déroule actuellement:
- Préciser ici les évolutions euro/dollar: la faiblesse entretenue du dollar, comme instrument de la politique
conjoncturelle américaine de résorption des déficits jumeaux.
- La politique chinoise de yuan faible qui dope ses exportations.
III. ... et qui finalement n'atteint pas les objectifs fixés.
1. La notion d'ajustement automatique liée aux changes flottants a fait long feu.
Les fait se sont chargés de démentir cette vision bien optimiste ; loin d'avoir développé leur autonomie, les économies
nationales sont soumises, plus que jamais, à la contrainte extérieure. Les partisans des changes flottants soulignent
toutefois qu'aucun système ne semble aujourd'hui en mesure de les remplacer; les quelques voix réclamant un retour à des
changes fixes, voire à un étalon-or rénové, ne rencontrent guère d'échos. De plus, les changes fixes ne sont pas non plus
une réussite totale là où ils sont appliqués. (cas des currency boards en Asie du Sud est ou en Argentine, qui ont débouché
sur des crises monétaires et financières conséquentes). Les évolutions dont nous avons rendu compte ont progressivement
orienté le SMI vers le polycentrisme monétaire.
On peut montrer également que la naissance du SME est liée, d'une certaine manière, aux problèmes résultant de la mise en
place des changes flottants. C'est la création du SME en 1979, en réaction aux incertitudes liées aux changes flottants:
comment construire une Europe économiquement cohérente dans un contexte de fluctuations erratiques du dollar ?
2. Les changes flottants ont nettement favorisé l'émergence des phénomènes de bulles spéculatives.
L'année 1985 marque également le début d'une série de crises financières: krach boursier en octobre 1987, et surtout la
crise contemporaine, la plus grave depuis 1945; la vertigineuse croissance des marchés de produits dérivés,
conséquence, entre autres, de la mise en place des changes flottants a conduit à l'instauration d'une véritable économie
casino. Cette situation engendre un important risque systémique (à expliquer). D'où les propositions visant à améliorer la
régulation du "non-système" actuel. Trois voies sont le plus souvent évoquées:
La proposition de l'économiste américain James Tobin fondée sur la taxation des opérations financières internationales (à
discuter et à critiquer)
Le choix d'un SMI centré sur le DTS, proposition soutenue notamment par la Chine.
Un renforcement important de la coopération ùmonétaire et financière internationale (à discuter également).
Conclusion
Pour reprendre le mot de Churchill, les changes flottants sont le pire des systèmes à l'exception de tous les autres. C'est ce
qu'affirment aujourd'hui encore les libéraux, après vingt années de fonctionnement du "non-système monétaire international"
né des accords de la Jamaïque.
Certes, il n'est pas envisageable, en l'état actuel, de revenir sur des évolutions aussi fondamentales que la globalisation
financière et la mondialisation des échanges. Il semble illusoire, également, de penser qu'un retour à un système de changes
fixes soit possible à court terme. Mais la situation qui prévaut depuis 1987 ressemble bel et bien à un démenti des thèses
libérales: le système des changes flottants ne s'autorégule pas. Si une relative stabilisation a pu être retrouvée, c'est grâce à une
coopération monétaire minimale, qui marque d'ailleurs la pas aujourd'hui, et qu'il faudrait encore développer pour parvenir à
une véritable gestion concertée du flottement.