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OUI de Gabriel AROUT
Les acteurs invesssent le lieu de jeu avec le texte et le contexte historique (la pe-
te et la grande histoire). Je voudrais que le public ressente l’ambiance mais ne la subisse pas
et que les personnages soient dans une tension verbale. Que les moments de violence soient
bien précis dans le jeu des acteurs an que, par eet de bascule, les silences soient plus forte-
ment habités.
Nous avons là comme une paron musicale, chaque personnage suit la sienne,
pour enn s'accorder et jouer ensemble, avoir foi en l'homme et reconnaître la fraternité dans
le malheur.
Cee histoire peut se passer à n'importe quelle époque lorsque deux êtres que
tout oppose, se retrouvent dans la même situaon. Ne faudrait-il pas s'interroger sur la haine
de l'autre ?
C’est l'atrocité même de leur situaon qui leur fait suivre ce chemin, au cours du-
quel ils se dépouillent peu à peu et se délestent de leur personnalité sociale, pour ne garder
que ce qu'ils ont d'essenel.
Chacun au début se cherche, s'invest, apprend pour mieux apprécier ses derniers
instants puis ils vont se réfugié dans ce qu'ils connaissent le mieux : Max, dans sa défense de la
race pure, Raphaël, dans sa défense du peuple juif. Mais ni l'un ni l'autre ne croit à ses convic-
ons, à ses idées. Ce sont avant tout deux hommes face à un ennemi commun et invisible.
Qui va gagner la pare ? Jusqu'où ces hommes peuvent-aller pour pouvoir survivre
à cee expérience ? Tuer l'autre pour vivre, survivre ou bien chercher à faire connaissance ?
Cee «rencontre» pourrait, au premier abord, paraître peut-être assez banale,
mais Gabriel Arout arrive à en faire une véritable rencontre humaniste. Eecvement, le dan-
ger serait que ces deux personnages puissent se haïr, vu leurs origines. Mais nous apprenons,
au fur et à mesure, que Max a aimé autrefois une lle d'origine juive et cet amour, il l'a enfouie
au n fond de son subconscient. Nous apprenons aussi qu'il n'a pas été S.A. par convicon,
mais pris dans l'engrenage du fanasme. Prise de conscience de Max de sa situaon...
La queson, je pense, que G. Arout soulève, est de savoir pourquoi l'homme de-
vient blessant, injurieux et haineux avec celui qu'il ne connaît pas ? Puis il nous montre qu’il
sut de discuter avec l'autre, de le connaître pour voir en n de compte que l'autre est pareil :
un homme.
Certes diérent, mais avec les mêmes choses qui font que nous sommes des
hommes, au sens large. L'être humain est sur terre pour prendre avant tout du plaisir à la vie.
Mais voilà, l'être humain est un «drôle d’animal» qui peut se montrer aussi bienveillant que
nuisible avec celui qu’il ne connaît pas.
Kader Roubahie
« Oui est le mot le plus net, le plus franc, le plus clair de la langue humaine, peut-être, aussi le plus tendre et, assu-
rément, le moins équivoque et le plus généreux. »
Gabriel Arout