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Communication du 30 juin 2014 de M. Yvon GATTAZ
« L’ECONOMIE VUE PAR UN ENTREPRENEUR »
Le titre de cette communication que m’a proposé notre Président, et que j’ai, bien
entendu, accepté m’a, à la réflexion, plongé dans un abîme de perplexité. En effet,
il sous-entend que l’entrepreneur, ce micro-économiste de terrain a une vision de
l’Economie (avec une majuscule bien sûr) différente de celle des théoriciens
macro-économistes qui volent à une autre altitude et ont de ce fait une vue
panoramique et stratégique fort différente.
Ce serait en quelque sorte la dualité entre théorie et pratique parfois réputée
insoluble, alors qu’elle peut souvent se conclure par une véritable compatibilité.
Notre éminent et regretté confrère, Maurice Allais, aimait raconter ici-même la
plaisanterie d’Einstein qu’il a même consignée dans l’un de ses ouvrages :
- La théorie, c’est quand on sait tout et que rien ne marche,
- La pratique, c’est quand on ne sait rien et que ça marche quand même,
- Moi-même, Albert Einstein, j’ai réuni théorie et pratique car dans mon laboratoire,
rien ne marche et on ne sait pas pourquoi.
Je vais tenter, avec appréhension et modestie, de déceler la zone de compatibilité
entre théories macro-économiques (que je me permettrai de mettre ici au pluriel car
elles ont été nombreuses) et la pratique de terrain ou micro-économie. Et même je
vais inverser le fonctionnement de la longue vue en visant par l’oculaire et en
regardant par l’objectif.
Rappelons tout d’abord l’évidence connue de tous : la macro-économie n’est pas la
somme intégrale des micro-économies, mais elle ne peut s’en passer car les
entreprises sont ses constituants, ses molécules de base. Et la micro a précédé la
macro depuis que les premiers hommes ont vendu ou échangé leurs gibiers et leurs
récoltes.
L’économie est-elle vraiment une science ? Cette question agaçait mon ami Jean
Fourastié (également membre de notre Compagnie) qui me répondait sévèrement :
« Mais bien sûr, mais elle n’est pas une science exacte » et il n’aimait pas, on s’en
doute, qu’on l’appelât « science inexacte » compte tenu des différentes théories qui
ont pu être parfois contradictoires. Mais les sciences humaines, si larges, en sont là.
Contrairement aux historiens qui ne se trompent jamais, cher Jean Tulard, les
entrepreneurs se trompent toujours. Et les meilleurs sont ceux qui se trompent le
moins.