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Joseph Vogl
Préface
Les crises financières récurrentes de ces dernières décennies
permettent de supposer que l’économie capitaliste ne se com-
porte pas comme elle le devrait. Car selon les calculs des théories
économiques courantes, ces effondrements et ces crashs ont une
probabilité maximale de un pour n milliards et ne peuvent donc,
en réalité, absolument pas se produire ; selon les doctrines de la
science économique, ce qui s’est passé sur les marchés depuis 2007
n’était ni prévu, ni prévisible. Sans tenir compte de ce que ces pré-
tendues « crises » ne sont guère souhaitables, elles fournissent un
indice sur le fait que les situations exceptionnelles font peut-être
partie du fonctionnement régulier de l’économie et illustrent en
outre une crise de ce profil théorique qui mise sur la tendance
interne à la stabilisation des marchés, et tout particulièrement
des marchés financiers. Dans la mesure où les crises, les irrégu-
larités et les turbulences économiques n’ont aucune autre signi-
fication que le fait que les états actuels du système ne peuvent
pas nécessairement être déduits d’états passés, ni les états futurs
d’états présents, et que le cours du système est donc lui-même
devenu erratique et opaque, elles nourrissent le doute sur la capa-
cité de l’appareil conceptuel notoire classique et néoclassique