L’hypothèse d’instabilité financière minima oeconomica Collection dirigée par Joseph Vogl Hyman P. Minsky L’hypothèse d’instabilité financière Édition préparée et préfacée par Joseph Vogl Traduit de l’anglais par François-Xavier Priour diaphanes Titre original : « The Financial Instability Hypothesis: Capitalist Processes and the Behaviour of the E ­ conomy » in Charles P. Kindleberger & Jean-Pierre Laffargue (éd.), Financial ­Crises: Theory, History, and Policy, 1982. © Maison des sciences de l’homme et Cambridge U ­ niversity Press. ISBN 978-2-88928-002-5 © diaphanes, Bienne-Paris 2013 Tous droits réservés www.diaphanes.fr Joseph Vogl Préface Les crises financières récurrentes de ces dernières décennies permettent de supposer que l’économie capitaliste ne se comporte pas comme elle le devrait. Car selon les calculs des théories ­économiques courantes, ces effondrements et ces crashs ont une probabilité maximale de un pour n milliards et ne peuvent donc, en réalité, absolument pas se produire ; selon les ­doctrines de la science économique, ce qui s’est passé sur les marchés depuis 2007 n’était ni prévu, ni prévisible. Sans tenir compte de ce que ces prétendues « crises » ne sont guère souhaitables, elles fournissent un indice sur le fait que les situations exceptionnelles font peut-être partie du fonctionnement régulier de l’économie et illustrent en outre une crise de ce profil théorique qui mise sur la tendance interne à la stabilisation des marchés, et tout particulièrement des marchés financiers. Dans la mesure où les ­crises, les irrégularités et les turbulences économiques n’ont aucune autre signification que le fait que les états actuels du système ne ­peuvent pas nécessairement être déduits d’états passés, ni les états futurs d’états présents, et que le cours du système est donc lui‑même devenu erratique et opaque, elles nourrissent le doute sur la capacité de l’appareil conceptuel notoire classique et néoclassique 5 de la ­théorie ­économique – ­équilibre, autorégulation, efficience, attentes rationnelles – à appréhender la dynamique des processus économico-financiers. Ce qui est en question, c’est donc de savoir si le caractère spécifique des processus économiques se manifeste dans des phases de stabilité pour ainsi dire intemporelles ou, à l’inverse, dans les situations particulières qui les séparent, dans des anomalies ou exceptions apparentes. Dans le contexte de ces questions, les textes que Hyman Minsky a consacrés à l’instabilité de l’économie financière moderne connaissent un regain d’actualité. Depuis les années 1960, Minsky (1919–1996), qui a été l’élève de Joseph Schumpeter à Harvard et a enseigné en tant que professeur d’économie à la ­Washington ­University de Saint-Louis (États-Unis), a élaboré de manière systématique son hypothèse de l’instabilité financière, et a ainsi été pendant longtemps l’une des rares voix divergentes dans un concert de dogmes économiques alors dominé par les modèles néoclassiques de l’équilibre, les théories des marchés efficients, le néolibéralisme de Milton Friedman et l’école de Chicago. Se considérant comme un post-keynésien, Minsky ne se souciait pas seulement de compléter la théorie économique moderne par une théorie des crises qui, avec un œil sur la Great Depression des années 1930 et les premières grandes crises financières de l’aprèsguerre, entre 1966 et 1974, démontrerait comment les phases de stabilité mènent à l’instabilité, et les beaux élans à des déséqui­ libres manifestes dans l’évolution financière. Lorsque Minsky nie vouloir réconcilier la General Theory de John Maynard Keynes avec des hypothèses relevant de la théorie de l’équilibre, et réduire ses conséquences aux interventions de l’État-providence en temps 6 de crise, ce sont plutôt les fondements empiriques et épistémo­ logiques du savoir sur les mécanismes des processus économiques qui sont eux-mêmes en question. La ligne de l’interprétation que Minsky fait de Keynes présente certaines analogies avec ces grands projets que Louis Althusser ou Jacques Lacan, par exemple, ont initiés pour reconfigurer, sur le plan théorique et méthodologique, leur champ de travail spécifique par la relecture des auteurs canoniques. Tandis que les variantes de la théorie classique fournissent tout au plus des explications anecdotiques aux crises financières, Minsky prend les « trous logiques dévastateurs » comme condition d’une tentative visant à concevoir les processus anormaux et l’instabilité systémique comme la règle générale de l’économie capitaliste. Il consacre ses études à la relation entre l’instabilité et les qualités structurelles du système financier ; ses travaux se fondent sur l’hypothèse, pas tout à fait inhabituelle, selon laquelle le capitalisme n’est pas concevable sans capitalistes ni institutions et pratiques capitalistes. Une économie capitaliste hautement développée n’est par conséquent pas structurée uniquement par la propriété privée et les intérêts liés aux profits, par les marchés des biens et des prestations de service, mais aussi par les cash flows et les liens d’obligation qu’ils entraînent. Des entreprises qui tirent profit de la production et de la vente de marchandises ou de prestations de services y sont mises en relation avec des acteurs dont les gains résultent de la fabrication et de la distribution de dettes. Dans ces entrelacs entre productions et investissements, entre création de crédits et rendements, les différentes unités ­économiques agissent comme des « intermédiaires financiers » 7 qui prennent en permanence des décisions sur les portefeuilles. Selon Minsky, l’a priori de l’économie capitaliste réside dans la mécanique des marchés financiers et dans des structures de financement qui utilisent la mobilisation de capital pour coordonner les vœux des investisseurs et de ceux qui délivrent les crédits. Les bénéfices actuels valident les investissements passés, les décisions actuelles sur l’investissement et le financement sont définies par les attentes de profits futurs. Dans ce milieu d’affaires, tous les acteurs sont confrontés à des perspectives inconfortables sur des futurs incertains, et donc exposés au drame des décisions spéculatives. Le point de départ de toute opération est cette collusion temporelle que représente la corrélation entre argent actuel et argent futur. Les prix des valeurs patrimoniales et des biens d’investissement sont directement inspirés par les perspectives de rendement et de risques, et déterminés par des paiements qui n’interviennent pas maintenant, mais dans l’avenir. Les prix sont définis par le jeu des attentes de prix futurs. Cela signifie, premièrement, que la circulation de l’argent et du crédit, les investissements et les marchés des capitaux se présentent comme des manifestations critiques à l’égard du temps et « consommatrices de temps », et reposent sur des attentes à l’égard du futur et des perspectives de profit. Les décisions d’investis­ sement sont toujours prises sous conditions d’insécurité. Invoquant Keynes, Minsky exige que les théories économiques entrent en contact avec la réalité, là où elles tiennent compte de l’indétermination, des incertitudes et des effets d’un « perfidious future » (Keynes). La théorie économique doit se pencher sur l’efficacité des « relations intertemporelles » ; et Hyman Minsky a introduit 8 les forces obscures d’un écoulement irréversible du temps dans la modélisation des processus économiques. Dans le cadre d’un mécanisme de financement élémentaire, c’est-à-dire à la condition que le marché financier traite des questions de liquidité et se structure par le biais des obligations créées par l’investissement et le crédit, la monnaie, deuxièmement, ne saurait être conçue comme un auxiliaire neutre ou « masquant » qui structurerait simplement le théâtre où se rencontrent les partenaires d’échange et la balance des offres et des demandes. La formation des prix n’est comprise ni comme la définition d’un rapport entre des biens en pénurie, ni – c’est le cas dans les théories quantitatives de la monnaie – comme une fonction de la masse monétaire régulable sur le marché ; la masse monétaire proprement dite est définie par les proportions dynamiques entre la création de crédit et les remboursements. Dans une économie moderne du capital et du crédit, tous les paiements sont des promesses de paiement, et la monnaie elle-même fait office de médium doté d’une efficacité propre, qui transfère dans le temps présent le pouvoir d’achat futur. Quand Minsky postule la non-neutralité de la monnaie, cela signifie que les dimensions économiques dites « réelles » dépendent directement du truchement des dimensions monétaires et financières. L’argent ouvre des accès au marché afin de financer des investissements ou des titres patrimoniaux ; avec de l’argent, on achète aujourd’hui des biens en capitaux afin de réaliser, demain, des profits. Dans la fonction monétaire, les structures d’obligation des processus de financement deviennent manifestes. 9 Troisièmement, cela forge un certain conventionnalisme des relations économiques (économico-financières). Lorsque l’on ne dispose que d’une quantité faible ou nulle de ­connaissances sur des évolutions futures, on a tendance à faire appel à des conventions qui semblent garantir une stabilité. Investisseurs et financiers sondent des situations patrimoniales aptes à protéger contre les revers dus au hasard, ils adaptent leurs portefeuilles à la marche prévisible de l’histoire et aux hypothèses sur la manière dont les affaires pourraient évoluer dans le futur. On peut ainsi suivre l’hypothèse selon laquelle des mouvements attestés dans le passé se reproduisent dans le futur ; à moins que l’on ne suppose que les évaluations actuelles du marché se fondent sur l’évaluation correcte de perspectives futures. Mais on est surtout tenté de lier notre propre estimation aux estimations des autres, et à l’opinion moyenne en général. Lorsque les marchés financiers opèrent comme des machines à produire des prix de financement, les valeurs dépendant du marché se forment en fonction de ce que pourrait être, selon l’opinion moyenne, l’opinion moyenne sur ces valeurs. Le marché financier fonctionne comme un système d’anticipations qui obligent les acteurs économiques à deviner ce que le marché lui-même peut bien penser de l’avenir. Dans les prix des marchés financiers se répercutent les échos des points de vue collectifs, transformés en normes, et dans la mesure où chaque paiement exprime une opinion sur ce qu’on peut attendre en général, les profils de décision s’adaptent à la norme. Sur ce terrain, où la simple allocation de quantités de marchandises est remplacée par la représentation de perspectives de gains et de risques, et où les horizons actuels de prix sont rétrocouplés 10 avec des horizons futurs de prix, les marchés ne peuvent plus graviter autour de quantités existantes, de biens rares et de référents de valeurs fixes ou « réels ». Leurs acteurs n’opèrent pas avec des quantités connues, mais avec des opinions sur des opinions. Cela rend des entités apparemment fiables comme l’offre, la demande et leur force de stabilisation non seulement méconnaissables, mais tout simplement impossibles à connaître. Les mécanismes de l’­offre et de la demande ne valent que pour un domaine où l’on opère avec des budgets fixes, mais sont inopérants là où entrent en jeu conditions de financement et attentes de futur. La démonstration du fait que l’économie d’échange pourrait être cohérente et compensatoire, distributive et allocative, ne prouverait donc rien quant au fonctionnement de l’économie financière. Sur les marchés financiers, il n’y a pas de saturation, et il convient d’opérer une stricte distinction entre le besoin de biens d’investissement et le besoin de biens de consommation. Ces éléments – obligations, incertitude, non-neutralité de la monnaie et conformisme des décisions économiques – sont des pivots essentiels de l’hypothèse d’instabilité financière d’Hyman Minsky. Selon celle-ci, dans une économie financière moderne – caractérisée par des acteurs orientés vers le profit, un système bancaire, un commerce de titres en capitaux et de titres patrimoniaux –, ce sont justement les situations économiques stables et riches en perspectives qui mettent en marche un cercle de financement diabolique. Ce qui vaut ici, c’est l’efficacité d’une structure intrinsèquement capitaliste, et donc le fait que les unités ­élémentaires de cette économie ne consistent pas dans des rapports d’échange, mais dans des structures d’obligation, 11 c’est-à-dire qu’elles nouent les unes avec les autres des décisions d’investis­sement et de financement, et les réfèrent à un futur incertain et aux risques de profit que celui-ci présente. Sous cette condition, dans les périodes de croissance robuste et de projections de long terme positives – Minsky l’a entre autres observé à l’aune du boom des investissements aux États-Unis à partir de 1963 –, il n’y a dans un premier temps aucune bonne raison de ne pas étendre le champ des investissements au-delà du cadre du financement garanti. Il semble plutôt plausible de compenser par de nouveaux investis­sements l’espoir justifié en de futurs revenus rapportés par les capitaux, et d’intensifier les demandes de financement. Cela conduit d’une part à ne plus utiliser les revenus des investissements pour rembourser les crédits, mais pour réinvestir, à se fier à un processus de capitalisation « spéculatif » et à refinancer par des crédits ceux qui parviennent à échéance. D’autre part, le besoin croissant de financement qu’éprouvent les instituts financiers cherchant à maximiser le profit, motive l’invention de « nouveaux » types de monnaie et d’instruments financiers, sous la forme de substituts de monnaie ou de portefeuilles. Dans ce processus au sein duquel toute innovation financière et toute utilisation étendue des pratiques de financement antérieures augmentent le volume de financement, les investissements supérieurs sont – pour simplifier – couplés à des profits en croissance, les profits à des prix en augmentation pour les titres patrimoniaux (comme les actions), et ceux-ci, à leur tour, à des prix supérieurs pour les investissements. En d’autres termes : dans des conditions économiques favorables, il est plus facile de se procurer des crédits et le volume d’investissement augmente. La masse monétaire 12 effective s’accroît et les prix eux aussi en hausse du capital productif augmentent la demande de crédit de même que la propension à le financer. Dans ce climat d’attente où les investissements augmentent, les marges de sécurité diminuent, les préférences de liquidité sont réduites, l’offre de monnaie se développe, la circulation des dettes s’intensifie et l’extension des opérations de financement entraîne un mouvement interactif d’augmentation des titres de patrimoine et des prix des biens d’investissement. Il en résulte obligatoirement, selon Minsky, une structure pyramidale dans laquelle la compensation des dettes en souffrance se fait par d’autres investissements, plus risqués. Face au recul des moyens liquides dans le rapport à la valeur de marché des patrimoines en capital détenus dans les portefeuilles, on constate une croissance des obligations, dont le remboursement dépend de l’augmentation des gains purs, d’une augmentation du financement extérieur et du service de la dette. Cela donne lieu à un système qui se maintient et s’accélère par lui-même et s’« euphorise » à l’aide de rétrocouplages positifs avec son propre horizon d’attente. Les structures de création de liens obligatoires et un contexte d’endettement général se trouvent donc dans une relation de couplage immédiat avec des profils d’attente. Le facteur critique de cette dynamique tient au rapport entre deux flux contraires de capitaux, c’est-à-dire entre les revenus du capital et les obligations du crédit, dans la relation entre l’obligation fixe ou prévue à terme et des perspectives de revenus susceptibles d’être attendus, mais toujours incertains et variables. La situation précaire apparaît pour finir là où la nécessité de remplir des contrats de f­inancement exige ou bien de nouveaux emprunts, ou bien la 13 vente de titres ­patrimoniaux, ce qui peut entraîner d’une part d’onéreuses options de financement et une hausse des coûts d’investissement, et d’autre part des pertes et une pression sur les prix constatés sur les marchés secondaires, c’est-à-dire une baisse des prix du capital. Lorsque, par la suite, une augmentation des préférences de liquidité, et par là même une mise en danger de la liquidité en général, ou bien, à l’inverse, une chute des prix, surviennent dans les biens patrimoniaux, cela peut, partant d’acteurs individuels et se propageant par le biais d’une intrication en cascade et de l’interdépendance garantie par la structure des banques, avoir des effets en retour sur tout le système économique – une spirale d’investissements qui se réduisent, de gains qui diminuent, de placements qui s’effondrent. Le cours du système a atteint sa péripétie, le point où son déroulement devient totalement incertain, prend un caractère turbulent et fait émerger tout autant l’option d’une poursuite des opérations que celle d’un collapsus. L’hypothèse de Minsky sur l’instabilité financière affirme par conséquent que les crises et les effondrements manifestes ne dérivent pas simplement de bouleversements extérieurs, de coups de théâtre fiscaux ou politiques, mais sont produits par les paramètres et les mouvements propres à l’économie financière elle-même. Contrairement à ce qui se passe dans les systèmes cybernétiques et dans les systèmes qui se régulent eux-mêmes, le marché financier est inquiété par sa quiétude, déstabilisé par sa stabilité, et c’est précisément son fonctionnement efficient qui devient totalement dysfonctionnel. La stabilité a un effet déstabilisant. « Chaque phase stable est transitoire, et dans un monde de finance capitaliste, lit-on chez Minsky, il est tout simplement faux 14 d’affirmer que si tous les participants au jeu poursuivent leurs propres intérêts, l’économie trouve un équilibre. » Une analyse de l’offre et de la demande – avec la perspective de compensation et d’équilibre – n’explique pas le comportement d’une économie capitaliste, et les processus de financement de celle-ci opèrent de telle sorte qu’ils développent eux-mêmes des « forces endogènes déstabilisantes ». Ce qui signifie que les institutions financières du capitalisme sont « en soi ruineuses. Au lieu d’admirer les qualités des marchés libres, on devrait accepter l’idée que le domaine des marchés libres efficients et souhaitables est limité. » Selon Minsky, l’économie moderne est rythmée par des phases cycliques et transitoires, et le passage obligatoire du financement assuré au financement pyramidal, en passant par le financement spéculatif, est une caractéristique non pas périphérique, mais centrale, de la structure financière capitaliste. Pour ce qui concerne les marchés des capitaux, les crises sont donc toujours des crises de circulation et, en tant que telles, des crises de la liquidité. Le rapport réciproque entre les innovations financières, les volumes d’investissement et la circulation des dettes s’est révélé être une description plausible des dynamiques économico-financières des quatre dernières décennies, et la théorie de l’instabilité financière formulée par Minsky peut, mieux qu’aucune autre, fournir un fond autorisant la compréhension de la dernière crise financière en date, celle des années 2007 et suivantes. On a ainsi pu relever sur les marchés financiers, d’une part, le couplage de différents processus de capitalisation mis en œuvre dans des conditions économiques de départ tout à fait solides et selon des procédures de décision ou des horizons d’attentes parfaitement rationnels. Les 15 prix de l’immobilier, en hausse depuis les années 1990, en particulier aux États-Unis, ont ensuite entraîné un besoin accru de financement, puis ont suscité l’invention de nouveaux instruments financiers, provoquant à leur tour une hausse des revenus du capital, la recherche d’autres possibilités d’investissement et par conséquent de nouvelles augmentations des prix de l’immobilier. L’augmentation de la valeur du capital existant a entraîné l’émission d’obligations à risques et, pour finir, l’acceptation de placements incertains. C’est ce qui s’est produit dans le cas de ce que l’on a appelé les « titrisations » : des distributeurs de crédit, c’est-à-dire des banques d’affaires ou d’hypothèques, ont transformé des crédits immobiliers accordés en obligations, ont couvert celles-ci avec des paiements d’intérêts rétroactifs, et les ont découpées en différentes tranches, puis vendues sur les marchés secondaires sous forme d’asset-based securities. Des banques d’investissement ont combiné ces derniers à d’autres emprunts et les ont distribués sous un nouvel emballage de valeurs patrimoniales à risques ou de perspectives de revenus divers, des collateral debt obligations. Par différentes cascades, prolongeables à l’envi, non seulement il a ainsi été possible d’augmenter autant qu’on le désirait l’offre de financement destinée à répondre à la demande croissante de capitaux, mais on a en outre détaché les passifs, c’est-à-dire les risques liés au crédit, des bilans de ceux qui, à l’origine, avaient distribué le crédit ; on les a dispersés, diversifiés et, dans une certaine mesure, garantis, et ce, par la logique de ces produits dérivés dans lesquels les perspectives de vendeurs ayant une aversion pour les risques correspondent avec celles d’acheteurs présentant un goût pour le risque. Le besoin de financement a été 16