Architectures

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Le musée Guggenheim Bilbao © FMGB
Architectures
ART ET CULTURE
Architectures
Une collection documentaire de trente films de 26 mn.
> du samedi 26 février au samedi 14 mai 2005 à 20.15
26 février
La maison de verre
INÉDIT
5 mars
L’abbatiale Sainte Foy de Conques
INÉDIT
12 mars
Les thermes de pierre
19 mars
Le musée Guggenheim de Bilbao
INÉDIT
26 mars
La Galleria Umberto 1er
2 avril
La saline d’Arc et Senans
INÉDIT
9 avril
L’école de Siza
16 avril
Le bâtiment Johnson
23 avril
L’Opéra Garnier
30 avril
La maison de Jean Prouvé
Contact presse : Céline Chevalier /
Nadia Refsi / Rima Matta
01 55 00 70 41 / 23 /40
[email protected] /
[email protected]
INÉDIT
7 mai
Le couvent de la Tourette
14 mai
La médiathèque de Sendaï
INÉDIT
1
Architectures
Du 26 février au 14 mai 2005,
ARTE diffuse 12 numéros dont 6 inédits
de la collection Architectures.
Cette série de films de 26 minutes est consacrée aux réalisations les plus marquantes de l’architecture, de ses
prémices jusqu’aux dernières créations des grands architectes d’aujourd’hui. Une enquête sur le terrain à la
recherche du désir de l’architecte...
Architectures est coproduite par ARTE France, Les Films d’Ici, la Direction de l’architecture et du patrimoine, le musée du Louvre, le Centre Pompidou et le musée d’Orsay
Chaque film traite d’un seul bâtiment choisi pour son aspect exemplaire, pour le rôle de jalon qu’il a joué ou
qu’il joue dans l’évolution de l’architecture. Le bâtiment est exploré de fond en comble, décortiqué depuis les
fondations jusqu’aux couvertures. Un travail sur le terrain fait apparaître des questions pratiques et simples, et
la façon dont l’architecte y a répondu.
Chaque film repose sur un tournage réel minutieux dans le bâtiment, avec l’aide de moyens sophistiqués. Une
maquette du bâtiment, réalisée spécialement pour chaque film, permet de montrer de façon claire et ludique ce
qui autrement est invisible : les étapes de la conception du bâtiment, son principe constructif, l’agencement des
espaces etc...
Bien plus lisibles que les plans ou les croquis, ces maquettes démontables rappellent que la véritable force de
la grande architecture est d’être simple comme un jeu d’enfant.
Enfin, dans les films consacrés aux réalisations d’aujourd’hui, l’architecte intervient lui-même brièvement,
apportant un éclairage plus subjectif en contrepoint de l’enquête du film.
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Architectures en DVD
Architectures vol 4 .
Sortie DVD le 22 mars 2005
Une co-édition
ARTE Vidéo / La Réunion des musées nationaux
Avec le soutien du Ministère de la culture et de la
communication, Direction de l’architecture et du
patrimoine.
Prix DVD : 24 €
version trilingue : français, anglais, allemand
Au programme
La saline d’Arc et Senans
La maison de verre
Le musée Guggenheim de Bilbao
La maison de Jean Prouvé
La médiathèque de Sendaï
L’abbatiale Sainte Foy de Conques
Déjà parus
DVD Volume 1 : Le Bauhaus de Dessau ; L’Ecole de Siza ; Le Familistère de Guise, une cité radieuse au 19ème ;
Nemausus 1, une HLM des années 80 ; Le centre Georges Pompidou ; La Caisse d’Epargne de Vienne
DVD Volume 2 : Le bâtiment Jonhson ; La Galleria Umberto 1er ; Satolas-TGV, un monument à la campagne ;
Les thermes de pierre ; L’Ecole des Beaux-Arts de Paris
DVD Volume 3 : Le musée Juif de Berlin ; L’Opéra Garnier ; Le Couvent de la Tourette ; La Casa Milà ; L’auditorium
Building de Chicago ; Le Centre Municipal de Säynätsalo
CONTACTS PRESSE ARTE VIDEO
Henriette Souk 01 55 00 70 83/ [email protected]
Maud Lanaud 01 55 00 70 86/ [email protected]
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Retrouvez
Architectures
sur www.arte-tv.com
Le site Internet d’ARTE accompagnera et prolongera ces 12 numéros d’Architectures
en leur consacrant un grand dossier spécial, qui s’enrichira au fur et à mesure des
diffusions sur ARTE.
Parmi les thèmes proposés :
• Une biographie complète des architectes
• Des photos, des plans et des croquis de chaque bâtiment présenté
• Une liste de liens et une bibliographie exhaustive
• Des interviews exclusives des auteurs et des architectes
• Une partie thématique concernant l’utilisation des nouvelles technologies
dans le domaine de l’architecture avec de nombreux exemples
www.arte-tv.com/architectures
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samedi 26 février à 20.15
inédit
La maison de verre
Architecte : Pierre Chareau
Réalisation : Richard Copans et Stan Neumann
Image : Richard Copans
Coproduction : ARTE France, Les Films d’Ici, le Ministère de la culture et de la communication, Direction de l’architecture et du patrimoine,
le Centre Pompidou (2004)
L’histoire de La maison de verre construite à Paris entre 1928 et 1932 par Pierre Chareau pour le docteur Dalsace
commence par un étonnant bricolage. Le docteur Dalsace est propriétaire d’un petit immeuble de deux étages du XVIIIème
siècle sur un terrain du 7ème arrondissement. Il veut le raser et faire construire à la place une villa moderne, dont il confie
la réalisation à son ami Chareau. Mais le second étage est occupé par une vieille locataire qui refuse de quitter les lieux.
Chareau va donc conserver ce dernier étage tel quel, évider tout ce qui est en dessous et glisser dans le vide ainsi créé
une structure d’acier habillée de verre, qu’on appellera la maison de verre. De ce geste étonnant, à la fois inventif et
légèrement irrespectueux, est née une construction singulière, une maison-tiroir, une machine à habiter pleine de
surprises et de trouvailles, une œuvre mythique aussi inclassable que Pierre Chareau lui même.
Chareau est un dandy insouciant qui franchit librement les frontières
entre mobilier, aménagement intérieur et architecture proprement
dite. Il crée des meubles originaux et astucieux, décore les appartements de la très grande bourgeoisie, signe les décors des films de
Marcel L’Herbier. C’est un touche à tout de génie, un architectebricoleur. Aujourd’hui il ne reste presque plus rien des aménagements intérieurs et des meubles qui l’ont rendu célèbre. Des cinq
bâtiments qu’il a construits, seule la maison de verre a subsisté.
Par sa structure d’acier et la fluidité de ses espaces intérieurs, la
maison de verre appartient au mouvement moderne. Par le matériau
de ses façades, faites de pavés de verre, translucides mais pas transparents, utilisés jusque là pour les sols et les plafonds, elle tient un
autre langage. Côté cour, la grande façade est entièrement faite de
ces pavés de verre et ne comporte aucune fenêtre. C’est un mur qui
ne laisse passer que la lumière. Ce refus de toute ouverture sur la
façade principale c’est l’affirmation d’un repli sur l’intérieur, d’un chez
soi absolu qu’aucune ouverture sur le dehors ne relativise. C’est toute l’ambiguïïté de la maison de verre. Son esthétique
l’apparente à un prototype futuriste projeté vers l’avenir, son organisation et son fonctionnement interne la tirent vers le
passé, vers ce dix-neuvième siècle bourgeois dont elle est peut être, dans le domaine de l’habitat individuel, l’ultime chef
d’œuvre. La structure de Chareau s’élève sur trois niveaux – au rez-de-chaussée le cabinet du docteur Dalsace, gynécologue et obstétricien, au premier étage, le salon et la salle à manger, au troisième étage les appartements privés du couple.
Le traitement formel des trois étages de la maison est homogène – mêmes matériaux, même style, même mélange de
rudesse et de raffinement dont les grands piliers d’acier de la structure, peints en rouge et soulignés par un mince placage
d’ardoise noire, sont le meilleur exemple. Mais le traitement spatial de chaque niveau est tellement différent, que malgré
cette unité formelle de l’ensemble on a le sentiment de trois univers distincts. Le décor change d’étage en étage, mais
aussi entre côté cour et côté jardin. D’où une sensation de surabondance, encore démultipliée par l’incroyable collection
de meubles et de mécanismes que Chareau a créés pour l’agrément de ses clients.
Tout ici semble avoir été pensé, tout geste anticipé. Le confort domestique ritualisé, traité de façon quasi obsessionnelle.
Des mécanismes les plus rugueux, comme les systèmes à vérins commandant l’ouverture des fenêtres et des ventilations,
jusqu’à la pure géométrie des portes pivotantes, des cloisons mobiles, de placards cylindriques, de meubles qui s’ouvrent
et se ferment en tous sens, tout ici renvoie à l’utopie d’une maison-machine, où l’espace cesse d’être sacralisé pour
devenir comprimable et consommable, carburant d’une maison-moteur.
Mais cette frénésie de mouvement renvoie aussi au théâtre et au cinéma, espace d’illusions, mise en scène, et glorification
de l’apparence. Cinéma que Chareau cite directement en mettant en place à l’extérieur de la maison de grands projecteurs
qui, la nuit venue, doivent se substituer à la lumière du jour.
C’est une boîte à malices à l’échelle d’une maison. Un jouet à la fois exquis et inquiétant. Mais par ses contradictions
mêmes la Maison de Verre échappe à son statut d’objet décoratif et esthétique et rejoint les interrogations des architectes
d’aujourd’hui sur la notion même d’habiter.
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samedi 5 mars à 20.15
inédit
L’abbatiale Sainte Foy de Conques
Réalisation : Stan Neumann
Image : Ned Burgess – Montage : Catherine Gouze
Coproduction : ARTE France, Les Films d’Ici, le musée du Louvre (2004)
Au début du neuvième siècle, une petite abbaye, construite sur l’emplacement d’un ancien ermitage, périclite dans un site
sauvage et hostile de l’Aveyron. Mais en 866 l’abbaye parvient à se procurer, en les volant, dit la chronique, dans un
monastère d’Agen, les reliques d’une jeune vierge martyrisée au IIIème siècle : Sainte Foy. Et c’est le miracle. Grâce à la
sainte, la petite abbaye perdue au milieu de nulle part se met à prospérer.
Vers le milieu du XIème siècle le succès est tel que l’ancienne église de l’abbaye ne suffit plus : il faut en construire une
nouvelle, plus grande et plus belle, tant pour honorer la sainte que pour mieux accueillir les foules de pèlerins. Ce sera
l’église abbatiale Sainte Foy de Conques, l’un des ouvrages les plus importants construit dans la France du XIème siècle.
Sa beauté, sa cohérence, son site, un petit village à l’écart des grands axes de circulation médiévaux, son aspect novateur,
son état de conservation et la présence du Trésor et de la Majesté de Sainte Foy en font un des plus beaux exemples
d’architecture romane en France.
Ce qu’on appelle l’architecture romane (le terme date du XIXe siècle) c’est à dire la renaissance architecturale qui eut lieu
en Europe Occidentale entre le XIe siècle et le XIIe siècle. C’est une période d’invention et de grande énergie créatrice qui
se traduit essentiellement par la construction de grandes églises
monumentales, souvent attachées à une abbaye. Par ses pratiques,
cette architecture ressemble peu à la nôtre. Elle est collective et
anonyme. Il n’y a pas d’architecte connu, pas de « maître
bâtisseur » identifié. A l’exception des pierres taillées sur les
quelles les tailleurs laissent leur marques, rien n’est signé. On ne
sait pas qui fait les plans, comment s’organisent les chantiers.
L’église est accrochée à flanc de colline, une position héritée de
l’ermitage d’origine, mais totalement inadaptée pour un édifice de
cette taille. De l’extérieur elle semble massive et compacte,
presque trapue. A l’intérieur on est surpris de découvrir une nef
lumineuse de 22 mètres de haut. Tout a l’air subitement simple,
clair et léger. C’est à l’opposé du vieux cliché qui veut que l’architecture romane soit basse et sombre. Cette volonté d’élévation
monumentale, qui tient de l’acte de foi est une des marques de
l’architecture romane. Elle donne naissance à un nouveau
système de construction, plus sophistiqué, plus rationnel : piliers, arcs, bas côtés, tribunes constituent autant d’éléments
qui s’épaulent les uns les autres et permettent au bâtiment de monter en hauteur, de gagner en lumière.
La « modernité romane », c’est aussi l’apparition sur les chapiteaux sculptés et sur le tympan, de la figure humaine, qui
remplace peu à peu l’ancienne sculpture purement géométrique et ornementale. Mais plus étonnante encore que la beauté
de ces figures est leur position : systématiquement asservies à l’architecture dont elles soulignent les articulations, elles
sont dispersées dans l’immense volume de la nef, pratiquement invisibles à neuf mètres au dessus du sol, comme si elles
n’avaient pas besoin de notre regard pour exister.
Mais Conques s’est aussi construit sur une contradiction. C’est à la fois l’église de l’abbaye, conçue pour une communauté recluse et l’ église des pèlerins accueillant un flux constant de fidèles venus de loin pour se recueillir un instant
devant la statue reliquaire de la Sainte. Il faut donc construire deux églises en une, assurer à la fois la séparation et la
cohérence. Alors que la nef et le transept de l’église reprennent pratiquement tel quel le plan traditionnel de la basilique
romaine, le chevet de l’église est totalement repensé pour répondre à ces nouveaux besoins. C’est là que se trouve l’autel,
c’est là aussi que sont exposés les reliques de la Sainte. C’est l’espace le plus sacré de l’édifice, qu’il faut à la fois ouvrir
et interdire, montrer et protéger, qui devient ainsi le lieu de l’innovation architecturale.
C’est à Conques qu’on a mis au point le prototype de ce nouveau type d’église qu’on appelle l’église de Pèlerinage, et qui
dans les décennies suivantes sera repris partout en France et en Espagne.
Exposition au musée du Louvre du 10 mars au 6 juin 2005 / Hall Napoléon
La France romane au temps des premiers Capétiens, 987-1152
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samedi 12 mars à 20.15
Les thermes de pierre
Architecte : Peter Zumthor
Réalisation : Richard Copans
Image : Richard Copans - Montage : Sophie Rouffio
Coproduction : ARTE France, Les Films d’Ici, le Ministère de la culture et de la communication, Direction de l’architecture et du patrimoine,
le Centre Pompidou (2000)
Vals les Bains est une petite commune de mille habitants entre Zurich et Locarno. On y exploite depuis un siècle une eau
qui jaillit de la montagne à 29° pour moitié utilisée par l’établissement thermal qui comme la source et la fabrique d’eau
minérale est propriété des habitants de la commune. Dans les années 90, la fréquentation du complexe touristique et
thermal est en chute constante. La commune décide de construire un nouvel établissement et Peter Zumthor remporte le
concours organisé à cet effet. Les Thermes sont inaugurés en
1996. Le bâtiment imaginé par Zumthor est d’abord un volume :
un parallélépipède qui semble à moitié enfoui à flanc de
montagne. De la route qui traverse le village, plus bas, on ne
voit qu’un grand mur qui semble fait de pierres plates, avec de
larges ouvertures qui ressemblent plus à des failles qu’à des
fenêtres. Si l’on s’approche, les couches de gneiss, cette pierre
traditionnelle utilisée pour les toits des chalets, se superposent
par la tranche, toutes identiques et de la même épaisseur, et
tracent dedans comme dehors des lignes horizontales
semblables. Le bâtiment de Zumthor est là pour renouveler
l’idée des thermes tout en en respectant le principe avec rigueur:
le contact de l’eau transforme. Or ce ne sont pas juste ses
composants minéraux qui agissent mais la mise en scène savante des états de l’eau, de la pierre et de la lumière qui
produisent une mise en condition, une expérience à la fois spirituelle et sensuelle. C’est l’architecture qui crée un monde
où tous les sens sont sollicités, qui fait passer de l’aube à l’obscurité, de la nuit au jour, de la joyeuse convivialité du grand
bain à la solitude d’une petite caverne à l’écart. Créer cette expérience globale, c’est le rêve de tout architecte. Le paradoxe
réside ici dans le fait que c’est une commande aussi contraignante et archaïïque que des thermes qui a permis à Zumthor
de proposer cette infinie variation de sensations. Il conçoit l’architecture comme une enveloppe, un contenant sensible pour
la vie même composant avec les rythmes des pas sur le sol, la concentration du travail ou le silence du sommeil. Ici, la
pierre, l’eau jouent ce rôle de contenant qui renvoie à la condition de curiste déclinée de toutes les manières possibles. Un
univers de lignes, où tout est coupé à angles droits et où pourtant il n’y a pas de place pour la monotonie grâce aux effets
de lumières, aux réflexions dans l’eau, aux matières et à la disposition des volumes. Un monde où l’on passe de l’espace
public à l’intime et traversant des espaces qui semblent plus empruntés au paysage qu’à l’architecture, un paysage de
dédales et de tunnels, de cavernes où les fenêtres sont des béances, où tout le vocabulaire de la géologie est convoqué en
écho à la montagne. L’histoire des nouveaux thermes de Vals pourrait se conclure par un happy end : la clientèle afflue, le
taux de remplissage de l’hôtel est remonté en flèche et l’Architecture triomphe. Et l’histoire se poursuit : à nouveau bain,
nouvelle clientèle, il faut rénover l’hôtel et Zumthor réfléchit à un nouveau dessin.
7
samedi 19 mars à 20.15
inédit
Le musée Guggenheim de Bilbao
Architecte : Frank O’Gehry
Réalisation : Julien Donada
Image : Jean-Pierre Schaffner - Montage : Muriel Breton
© FMGB
Coproduction : ARTE France, Les Films d’Ici, le Ministère de la culture et de la communication, Direction de l’architecture et du patrimoine,
le Centre Pompidou (2004)
Pour comprendre ce bâtiment, il est nécessaire de le replacer dans son contexte : le déclin d’une ville industrielle et d’un port
au Nord de l’Espagne, l’ambition de la Fondation Guggenheim d’utiliser ses énormes réserves d’œuvres pour créer des filiales,
des musées qui attireront des visiteurs dans d’autres pays : il y avait New-York et Venise. Il pourrait y avoir Salzbourg, Berlin,
Las Vegas et… Bilbao. Les commanditaires ont des ambitions clairement définies et de puissants moyens. Bien sûr, la ville
a déjà réfléchi à la question de l’emplacement : les anciennes caves Alhondiga, 28.000m2, un bâtiment de brique enserré dans
le plan orthogonal de l’ancienne ville. Invité par Thomas Krens, directeur de la fondation Guggenheim, Gehry propose un
nouveau site : une ancienne usine de bois, au croisement de la
rivière et d’une autoroute, à la lisière de la ville et du port des
containers. Un carrefour de la ville, une concentration d’énergie et
de flux, une visibilité sous plusieurs axes. C’est ce site qui sera
finalement retenu. A la suite d’un concours qui oppose Isozaki,
Coop Himmelblau et Frank Gehry, c’est l’architecte américain qui
est choisi le 21 Juillet 1991.
Le musée Guggenheim de Bilbao est surprenant. Au bout de la
rue, ou au détour du fleuve, une sculpture plus haute que les
immeubles brille au soleil ou sous la pluie. Son volume est à la
mesure du site, dont il constitue le pivot. Le pont autoroutier
traverse le bâtiment ; la rivière baigne les fondations. Ce volume
d’ensemble est un enchevêtrement de formes courbes, qui se
déploient, fusionnent, s’élèvent dans le ciel, s’allonge sous le pont. Un paysage chaotique au premier abord, des canyons, des
blocs suspendus. Une composition animale. Un organisme vivant, au bord du mouvement. Une sculpture géante. Une image
forte. Celle dont les commanditaires ont rêvé. Le musée de Frank Gehry c’est d’abord cela, une composition faite de volumes
autonomes collés ensemble, mais c’est aussi une circulation immédiatement compréhensible pour les amateurs d’art : chaque
volume (chaque salle) est clos sur lui-même, parfois profitant d’un puits de lumière zénithale central. Chaque circulation,
couloir, palier ou escalier, ouvre des vues sur la ville. Il est à la fois baroque et parfaitement fonctionnel.Bien sûr, la peau du
bâtiment joue un rôle majeur : une peau séparée des volumes des salles d’exposition par une charpente d’acier, une peau de
titane et de verre qui, par endroits, semble se détacher du corps du bâtiment ou tenir comme les écailles d’un poisson. C’est
l’autre aspect du bâtiment : à la fois animal et high-tech.
Le pari des commanditaires est gagné. Ils attendaient 500.000 visiteurs par an. Ils en ont 850.000. En trois années les visiteurs
ont dépensé autant dans Bilbao que le coût de construction du musée. Succès économique qui marque un exemple de plus
dans la transformation des vieilles villes d’Europe.
8
samedi 26 mars à 20.15
La Galleria Umberto 1er
Architecte : Emmanuele Rocco
Réalisation : Stan Neumann
Image : Richard Copans - Montage : Stan Neumann et Claire Le Villain
Coproduction : ARTE France, Les Films d’Ici, le musée d’Orsay (2000)
La Galleria Umberto 1er est l’un des derniers passages couverts construits en Europe. Elle est à la fois l’accomplissement
et le chant du cygne de l’une des figures architecturales les plus emblématiques du XIXe siècle, qui l’a inventé et auquel il
n’a pas survécu, sinon sous la forme appauvrie et dégradée de la galerie marchande ou du mall. Les passages couverts
apparaissent et se multiplient d’abord en France puis en Europe à partir de 1820. Il s’agit de créer au cœur des villes des
espaces protégés répondant à deux objectifs : percer de
nouvelles rues exclusivement piétonnes pour désengorger
l’ancien tissu et offrir au commerce de détail un lieu ouvert à
tous, mais à l’abri des intempéries. Cette dualité est la marque
du passage qui désigne à la fois la voie de communication et
l’ensemble de bâtiments qui enveloppent cette voie, le vide et le
plein, faisant du passage le lieu de l’ambiguïïté : ambiguïïté entre
espaces privé et public, et entre aménagement urbain et spéculation immobilière. La Galleria Umberto 1er appartient à la
dernière génération de passages, la phase monumentale. Sa
création est la conséquence directe de l’épidémie de choléra qui
frappe l’Italie en 1884. On décide alors de raser le quartier où
l’épidémie a pris naissance et de construire à la place un énorme
passage couvert, symbole de modernité et de progrès. Il s’agit aussi de rivaliser avec Milan qui a inauguré 25 ans plus tôt
la mode des passages monumentaux avec la galerie Vittorio Emmanuele. Pour Naples, qui adopte pour son passage le
même plan cruciforme, l’objectif est de faire plus riche et plus grand. Il s’agit enfin de gagner de l’argent en construisant
au cœur de la ville des milliers de mètres carrés de boutiques, de bureaux et d’appartements bourgeois, tout un quartier
luxueux qui veut se démarquer de l’ancienne ville. Ce quartier se veut autonome à tel point que la totalité du dessous de
la galerie est aménagée comme une petite ville souterraine vouée à la vie nocturne, au loisir et au plaisir comprenant
restaurants, cafés, salles de jeu et de billard, et même un théâtre – le premier café chantant d’Italie, inauguré un an à peine
après le Moulin Rouge de Paris. La galerie ne parviendra jamais à s’imposer comme cette enclave de luxe dont rêvaient
ses promoteurs. Les appartements, inadaptés au climat napolitain, se vendront mal. Ils seront progressivement occupés
par des ateliers et des bureaux, tandis que le théâtre du sous-sol deviendra un cinéma de quartier, puis un cinéma porno
avant de fermer définitivement dans les années cinquante. Pourtant le projet est une formidable réussite. Il n’est pas de lieu
à Naples dans lequel les napolitains de toutes les couches sociales se reconnaissent mieux que dans cette galerie aux airs
de palais renaissance, mâtiné d’arc de triomphe romain. C’est le succès de la conception monumentale de cet espace
public, abrité par la grande verrière, mais ouvert par tout temps et à tous.
9
samedi 2 avril à 20.15
inédit
La saline d’Arc et Senans
Architecte : Claude-Nicolas Ledoux
Réalisation : Richard Copans et Stan Neumann
Image : Richard Copans et Katell Djian - Montage : Stan Neumann et Juliette Garcias
Coproduction : ARTE France, Les Films d’Ici, le musée du Louvre (2004)
La saline d’Arc et Senans (1775-1779) a été réalisée par l’Architecte Claude-Nicolas Ledoux en Franche-Comté. Elle est
aujourd’hui classée « patrimoine mondial » par l’Unesco car c’est un ensemble unique dans l’histoire de l’Architecture.
C’est tout à la fois un monument, une révolution esthétique, un
site industriel novateur, le noyau d’une cité idéale (qui ne verra
jamais le jour) et une utopie architecturale qui servira de
référence et de source d’inspiration aux plus grands architectes
modernes de Gropius à Le Corbusier.
Ledoux fait partie de ceux que l’on appelle « les architectes
visionnaires », considérés aujourd’hui comme les précurseurs
de la modernité architecturale. Dans les décennies précédant la
Révolution Française, ces architectes revendiquent le « droit à la
passion », voire à la « furie architecturale ». Il pratiquent une
architecture de la démesure qui n’a que faire des subtilités du
classicisme. Elle joue sur des effets de volume et de contraste
poussés à l’extrême, c’est une architecture qui parle en images
simples et fortes « au peuple », une architecture de masse. De ces « visionnaires » Ledoux est le seul à avoir beaucoup
construit. La saline est son œuvre la plus importante. Manufacture Royale fabriquant du sel par évaporation d’eau de source
salée, la saline est un site clos aux allures de forteresse, construite au bord d’une forêt abritant hors la loi et brigands. Les
onze bâtiments qui la composent-fabrique, administration et logements des ouvriers- sont disposés en demi-cercle,
symbole de la course du soleil, mais aussi figure carcérale de la surveillance.
Au centre se trouve la maison du directeur, ornée d’un oculus géant, auquel rien ne semble pouvoir échapper comme dans
le célèbre Panopticon de Bentham. L’ensemble comprend aussi une chapelle et une prison. C’est à la fois un outil industriel modèle et le noyau d’une future Citée Idéale dont Ledoux dresse les plans, imaginant dans le moindre détail l’aspect
et le fonctionnement de ses bâtiments monumentaux, pas moins d’une cinquantaine, allant d’une « Maison des Lois » à
une « Maison des Plaisirs », un bordel, sans oublier l’église et un étonnant cimetière sphérique.
Mais la Révolution de 1789 met brutalement fin à la carrière de Ledoux, et la Cité Idéale ne sera jamais construite.
Reste la saline, un ensemble unique d’une force peu commune. Mélange d’une architecture industrielle, rationnelle et
rigoureuse, et d’une esthétique nouvelle fondée sur la disjonction et le contraste, l’exaltation d’une force primitive,
cyclopéenne, et exploitant comme jamais avant dans l’architecture européenne, le jeu de la lumière et des ombres, le choc
des masses et des volumes. L’effet est délibérément théâtral : il s’agit de frapper d’un grand coup l’imagination du
spectateur. Ledoux voulait que la saline soit bien plus qu’une simple usine à sel. Elle devait marquer le point de départ
d’une nouvelle architecture qui reviendrait aux sources, aux principes naturels (et géométriques) comme le Contrat Social
de Rousseau dont Ledoux est un fervent partisan. Et surtout une architecture qui aurait le pouvoir de reformer la société
humaine, de la refonder dans une nouvelle Cité Idéale.
Il n’existe pas un homme sur terre qui ne soit susceptible d’être secouru par un architecte.
Cette foi quasi-religieuse dans le pouvoir politique de l’architecture est une absolue nouveauté. C’est aussi le fil rouge qui
relie directement Ledoux aux grands architectes modernes du XXe siècle
10
samedi 9 avril à 20.15
L’école de Siza
Architecte : Alvaro Siza
Réalisation : Richard Copans et Stan Neumann
Image : Richard Copans - Montage : Stan Neumann et Claire Le Villain
Coproduction : ARTE France, Les Films d’Ici, le Ministère de la culture et de la communication, Direction de l’architecture et du patrimoine,
le Centre Pompidou (1999)
Je sculpte mes bâtiments au bord de l’excès et je reviens sans cesse au fonctionnalisme comme à un garde fou. (Alvaro Siza)
Alvaro Siza, né en 1933, est aujourd’hui un des grands architectes européens. Il a reçu, en 1992, le Pritzker Price. Il est né à
Porto, il y vit, il y travaille. Outre l’école d’Architecture de Porto, ses bâtiments les plus connus sont le musée de SaintJacques de Compostelle et le pavillon du Portugal à l’ Exposition Universelle de Lisbonne. L’école d’Architecture de Porto est
le seul bâtiment public qu’il a pu construire dans sa propre ville.
C’est aussi une de ses œuvres les plus importantes. Siza est
devenu architecte par hasard. Il voulait être peintre et sculpteur
mais ses parents ne le voulaient pas. Pour les persuader de le
laisser entrer à l’école des Beaux Arts, il leur a menti en disant
qu’il voulait devenir architecte. Et il l’est devenu. Toute son œuvre
porte l’empreinte de cette dualité : d’un côté, un formidable travail
plastique qui joue à bousculer les angles droits, à pousser les
masses au déséquilibre et de l’autre, la rigueur, une totale
économie de vocabulaire et de moyens. De cette tension permanente naît une qualité rare dans l’architecture contemporaine :
l’émotion.
L’école d’architecture est située sur des terrasses escarpées
surplombant le fleuve Douro, l’un des plus beaux sites de Porto. L’architecture de Siza joue constamment avec cet
escarpement, ces terrasses, ce triangle. Mais c’est aussi un site impossible – butant côté terre sur une autoroute. Siza résout
cette difficulté en se protégeant de l’autoroute par un grand bâtiment qui fait barrage et en s’ouvrant du côté du fleuve par quatre
drôles de petites tours pavillons. Ces dernières sont suffisamment éloignées les unes des autres pour ouvrir sur le paysage.
Ces différents bâtiments, reliés entre eux par des communications souterraines, forment un ensemble cohérent, un lieu ouvert
qui laisse entrer l’air du dehors. Cette façon de respirer, de dialoguer avec le monde au large, est une des grandes forces de
Siza. Le grand bâtiment est le lieu du collectif : services administratifs, salle d’exposition, bibliothèque. Trois grands espaces
distincts mais soudés ensemble par une superbe géométrie. Les quatre petites tours abritent les salles de cours. L’histoire de
leur genèse est elle aussi exemplaire de la démarche de l’architecte. Sa première intuition était de planter sur le site un grand
bâtiment carré, fermé sur une cour intérieure et faisant écho au palais épiscopal, un des plus beaux bâtiments anciens de la
ville, qui occupe la même position par rapport au fleuve, mais dans la vieille ville. Puis l’architecte a commencé à regarder, il
a vu l’autoroute dont il fallait se couper, et le fleuve sur lequel il voulait s’ouvrir, et il a commencé à faire des trous dans le
beau quadrilatère. Exit le palais de l’évêque. Entrent les tours. De banales tours HLM des années se profilent à l’arrière plan,
au delà de l’autoroute quand on regarde l’école depuis la rive opposée du fleuve. Siza décide alors de rendre hommage à ce
paysage si caractéristique de l’architecture contemporaine : ses pavillons seront de petites tours, un peu de guingois, pas tout
à fait dans le droit chemin. Il faut être un très grand architecte pour être capable de dialoguer aussi bien avec la grande architecture du XVIIe qu’avec les formes les plus communes de l’architecture d’aujourd’hui. Dans cette école qui a l’architecture
même pour objet, Siza parvient à créer une œuvre qui tourne le dos à tous les poncifs de la modernité - il joue de l’opacité
plutôt que de la transparence, de l’épaisseur, de la matérialité plutôt que de la légèreté, des obliques et des courbes plutôt que
de la droite froide et raisonnable. Il en résulte un bâtiment qui ne ressemble à rien de connu - sinon à d’autres œuvres de Siza
– et qui pourtant sait tout le temps rester simple, lumineux, et chaleureux - à l’image de l’homme qui l’a conçu.
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samedi 16 avril à 20.15
Le bâtiment Johnson
Architecte : Frank Lloyd Wright
Réalisation : Frédéric Compain
Image : Pierre Boffety - Montage : Alberto Yaccelini
Coproduction : ARTE France, Les Films d’Ici, le Ministère de la culture et de la communication, Direction de l’architecture et du patrimoine,
le Centre Pompidou (2000)
A deux cents kilomètres de Chicago, à Racine, Wisconsin, dans un quartier périphérique, sur une parcelle urbaine peu
attrayante : les bureaux administratifs de la compagnie Johnson construite par Frank Lloyd Wright. L’une des œuvres
maîtresses de l’architecte contemporain. En 1936, Johnson décide de faire construire un nouveau bâtiment. Il rencontre
Frank Lloyd Wright. Il est alors considéré comme le plus grand architecte vivant, n’ayant pourtant qu’à 68 ans que deux
commandes à son actif. Il vit retiré dans une sorte de phalanstère, d’école d’architecture aux allures de microcosme idéal
et se perd dans une utopie rêveuse de cité de
science fiction, qu‘il voudrait étendre à tout le pays. Entre
l’architecte et le commanditaire, les relations ne sont pas
simples : Johnson, qui certes veut un édifice moderne, est à la
fois subjugué et effrayé par les projets de cité du futur de Frank
Lloyd Wright. Les discussions entre les deux hommes sont
âpres, Johnson refuse notamment de changer l’emplacement du
bâtiment, mais l’architecte a besoin de cette commande. Dès
lors qu’il veut oublier l’environnement, l’architecte conçoit un
monde forcément fermé sur lui-même. Ce qui surprend de
prime abord, c’est que le bâtiment semble impénétrable : pas de
fenêtres, mais des façades de Pyrex, de longs murs de brique,
des courbes, partout il se dérobe, on ne sait par où rentrer. Vu
d’en haut, il a ce profil caréné comme le fuselage d’un avion ou la coque d’un bateau, comme une image du futur. Vu d’en
bas, il cache et il protège. Fermé aux sollicitations du monde extérieur, il est le “monde“, un lieu qui incite à la concentration et au travail. Dans ce cocon, un vaste hall, un espace central ouvert sur toute la hauteur et des mezzanines sans
cloison entourent la grande salle de travail où sont réunies environ 200 personnes. Un espace autosuffisant, avec un
chauffage au sol et un ingénieux système de ventilation, avec une insonorisation particulièrement soignée. Une sorte de
cathédrale vouée au travail. Et pourtant, rien d’oppressant dans ce lieu, la lumière descend du plafond et de la saignée au
niveau de la corniche. C’est avant tout un lieu sensuel, aux couleurs chaudes - le fameux rouge cheerockee inventé par
Frank Lloyd Wright - et aux volumes arrondis. L’architecte avait promis à Johnson une construction où chacun pourrait se
sentir comme dans une forêt de pins et il imagine une forêt de colonnes en formes d’arbres : un sabot de métal au sol, une
colonne cylindrique très fine qui monte en s’élargissant pour se terminer par une élégante coupe circulaire. Ce qui frappe
effectivement, c’est le souci et le raffinement du détail : il y a quarante formes de briques, des sections différentes pour les
tubes en Pyrex. Frank Lloyd Wright a choisi toutes les harmonies de couleurs autour du rouge des murs jusqu’au tissu des
fauteuils. Il a crée tout le mobilier, des tables aux poignées de portes. L’émulation que crée la construction du siège de
l’entreprise est telle que le chantier d’origine se prolonge. Commanditaire et architecte se prennent au jeu. En 1944, la
nécessité d’un lieu de recherche pour les nouveaux produits, conduit Johnson à accepter la proposition de Frank Lloyd
Wright : une tour de 14 niveaux qui s’élève au dessus du parking, directement reliée aux espaces de bureaux, une tour où
les murs extérieurs ne portent rien, où tout l’équilibre du bâti repose sur une colonne centrale. Un tour de force technique
qui pourtant ne survivra pas à son auteur : la tour est aujourd’hui fermée pour des raisons de sécurité et les laboratoires
ont déménagé. Le bâtiment administratif de Johnson relance la carrière de Frank Lloyd Wright. Il meurt en 1959 à 90 ans
laissant plus de 30 chantiers en projet. Quelques changements sont à peine venus altérer le bâtiment d’origine. Le culte
que lui vouent les employés, l’omniprésence de l’édifice dans la communication de l’entreprise le confirment. L’œuvre de
Frank Lloyd Wright est devenue l’image de marque de Johnson, une sorte de label.
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samedi 23 avril à 20.15
L’Opéra Garnier
Architecte : Charles Garnier
Réalisation : Stan Neumann
Image : Richard Copans et Ned Burgess - Montage : Stan Neumann et Claire le Villain
Coproduction : ARTE France, Les Films d’Ici, le musée d’Orsay (2000)
L’édifice conçu par Garnier est considéré comme l’un des joyaux de l’architecture du XIXe siècle. Il étonne par la variété et
la richesse des matériaux utilisés, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur, et par la profusion de ses ornements. Dès son inauguration, l’Opéra a connu un engouement sans précédent. Au
moment où Charles Garnier se présente au concours, il est un
jeune architecte quasiment inconnu du public. Issu d’un milieu
modeste, il a fait ses classes à l’Ecole des Beaux-Arts puis il
devient lauréat du prestigieux Prix de Rome. Charles Garnier
remporte le concours de l’opéra en 1860, parmi les quelques
171 projets présentés dans l’anonymat. Les travaux, soumis aux
vicissitudes de la vie politique française vont durer trente ans.
L’opéra de Garnier est l’oeuvre de toute une vie. Il est l’occasion
pour l’architecte d’affirmer que l’édifice doit être une œuvre
commune qui associe tous les arts. Pour édifier le temple de
l’Art lyrique, Garnier veut y conjuguer les disciplines qui entrent
dans la désignation générique de ”Beaux Arts” (l’architecture, la
peinture et la sculpture) auxquelles il adjoint les arts décoratifs. A la condition cependant que tous ces arts plastiques frères
de l’architecture acceptent d’être entièrement subordonnés à cette dernière. Ainsi Garnier dessine tout, esquisse les
moindres détails, supervise le travail des artistes, peintres et sculpteurs, qui oeuvrent au décor. Le Palais Garnier est conçu
comme une bulle qui isole les spectateurs du monde extérieur pour les préparer à rentrer dans l’univers rêvé du spectacle
d’opéra. Tout est conçu pour un confort qui doit couper de son cadre urbain hausmanien du monde réel. La volonté de
préparation, de conditionnement du spectateur explique aussi sans doute le développement du parcours prévu depuis son
arrivée jusqu’à la salle. On peut y voir l’analogue architectural de l’ouverture musicale : servir de passage d’un monde à
l’autre. Au contraire, la salle de spectacle elle-même est relativement peu décorée pour ne pas interférer avec ce qui se
passe sur la scène. Mais c’est le seul moment où le bâtiment cède au profit du théâtre. Les spectateurs deviennent eux
mêmes les acteurs de la pièce préparée par l’architecte. C’est d’ailleurs avec le Palais Garnier que se produit une petite
révolution des mœurs. Au lieu de rester dans leurs loges, pour y recevoir des visites, pendant l’entracte, les spectateurs
arpentent les couloirs et les foyers sous le prétexte d’admirer les peintures. Classicisme et rationalisme se conjuguent dans
un même bâtiment. Le classicisme placé sous le signe de la raison et de l’ordre pouvait assez facilement admettre une
architecture régie par la fonction. Même si l’on oublie souvent de créditer Garnier de cette proclamation, en accordant
beaucoup plus d’importance à l’aspect décoratif du bâtiment, il n’en demeure pas moins que l’Opéra juxtapose des volumes
hétérogènes, chacun reflétant exactement l’intérieur, c’est à dire la fonction. Cette rencontre entre tradition et modernité
s’illustre également dans le choix des matériaux que fait Garnier pour construire le nouvel opéra. La salle du Palais Garnier
est une immense construction de fer déguisé, habillé, mais c’est bel et bien le premier opéra reposant sur une structure
métallique. Garnier voulait un palais-spectacle, un rival de l’opéra lui même. Et pour l’édifier, il a mobilisé à peu près tous
les moyens, jusqu’à rêver d’être le directeur de l’opéra et non pas seulement l’architecte du lieu.
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samedi 30 avril à 20.15
inédit
La maison de Jean Prouvé
Architecte : Jean Prouvé
Réalisation : Stan Neumann
Image : Katell Djian - Montage : Stan Neumann et Juliette Garcias
Coproduction : :ARTE France, Les Films d’Ici, le Ministère de la culture et de la communication, Direction de l’architecture et du patrimoine,
le Centre Pompidou (2004)
Loger sa famille, la mettre à l’abri dans une maison individuelle. C’est ce vieux rêve de tous les français que Jean Prouvé
réalise en 1954, pour sa femme et ses enfants. Jean Prouvé est né en 1901. C’est un ingénieur autodidacte, un architecte
sans diplôme. Le Corbusier dit de lui : « c’est le type même du Constructeur ». Dans une France où le béton est roi, Prouvé
est l’homme du métal, de la tôle pliée puis de l’aluminium. Dès
les années trente, il essaie de rationaliser la conception de ses
bâtiments, rêvant d’une industrie de l’habitat qui construirait des
maisons avec la même précision que celle avec laquelle on
construit voitures et avions. C’est ce qu’il appelle « remettre
l’architecture à l’endroit ». Il conçoit plusieurs modèles de
maisons individuelles à bas prix, en kit, et à monter soi-même,
prêtes pour la fabrication en série. Des maisons intelligentes,
fonctionnelles et nécessairement belles. Mais aucun de ces
prototypes ne débouche sur de véritables commandes. La
France de la pierre et du béton trouve trop modernes, trop
simples ce qu’on appelle alors dédaigneusement des machines
à habiter.
En 1953 Prouvé perd le contrôle de son usine, l’œuvre de sa vie. C’est dans ces circonstances dramatiques qu’il se lance
dans la construction de sa propre maison, sur un terrain situé sur les hauteurs de Nancy, réputé inconstructible à cause de
sa très forte pente. La perte de son usine oblige Prouvé à renoncer à la structure initialement prévue. Privé de son outil,
disposant de très peu d’argent, il est obligé d’improviser. Toute la famille s’y met avec l’aide de quelques amis et d’ouvriers
fidèles. La maison sera construite en quelques semaines, l’été 1954.
J’ai fait ma maison avec des restes, dit-il. En fait la maison est constituée d’éléments préfabriqués, comme il se doit pour
une maison Prouvé, mais des pièces préfabriquées que Prouvé avait conçues pour ses autres projets et qu’il a réussi à
récupérer dans les stocks de son ancienne usine. Ainsi, les panneaux de la façade équipés de fenêtres à guillotine et volets
métalliques, avaient été conçus à l’origine pour des maisons d’urgence, destinées aux réfugiés des régions sinistrées de
la seconde guerre mondiale, tandis que les célèbres panneaux à hublots recouverts d’aluminium viennent d’un prototype
de Maison Tropicale et de l’étonnante Méridienne de l’observatoire de Paris. Cette maison de bric et de broc, dont tous les
éléments s’assemblent entre eux sans problème parce qu’ils découlent d’une même pensée constructive, devient ainsi une
sorte d’abrégé de la pensée de Prouvé sur l’habitat individuel et le métier d’architecte. La maison elle même est simple :
un programme minimum, une économie spartiate de l’espace et des matériaux. Cette simplicité est la marque de Prouvé.
C’est la même pensée constructive qui prévaut, le même refus intransigeant de tout effet de style, toute recherche formelle,
qu’il qualifie de maquillage, voire d’escroquerie.
Je n’ai pas de style, je n’ai jamais dessiné de formes, dit-il, j’ai fait des constructions qui avaient une forme.
Mais la Maison de Nancy incarne aussi un autre rêve : celui d’une architecture qui échapperait à la planche à dessin, qui
pourrait s’inventer sur le chantier même, dans un aller retour constant entre la réflexion et la pratique.
La maison de Nancy incarne de façon particulièrement émouvante les idées et la liberté de ce constructeur de génie dont
se réclament aujourd’hui aussi bien Renzo Piano, Santiago Calatrava, Jean Nouvel ou Rem Koolhas.
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samedi 7 mai à 20.15
Le couvent de la Tourette
Architecte : Le Corbusier
Réalisation : Richard Copans
Image : Richard Copans - Montage : Sophie Rouffio
Coproduction : ARTE France, Les Films d’Ici, le Ministère de la culture et de la communication, Direction de l’architecture et du patrimoine,
le Centre Pompidou (2002)
Le Corbusier (1887-1965), architecte, entre autres, de la Villa Savoye, de l’Unité d’Habitation n°1 de Marseille, de la
Chapelle de Ronchamp, de la ville de Chandigarh en Inde, fait partie des incontournables de l’architecture du XXe siècle. Le couvent de la Tourette, construit entre
1953 et 1960 à Eveux près de Lyon, est la dernière grande oeuvre de cet architecte
en France. C’est une oeuvre de maturité dont la force, la richesse et la complexité
sont telles qu’en 1986 les architectes français l’ont choisie comme la seconde oeuvre
contemporaine la plus importante, après le Centre Pompidou de Piano et Rogers. Le
Corbusier s’était déjà confronté à l’architecture religieuse quelques années plus tôt
avec la Chapelle de Ronchamp. Par la suite, il a refusé toutes les autres propositions
d’édifices religieux. “Mon métier est de loger des hommes, je ne peux pas construire
des églises pour des gens que je ne loge pas”. S’il accepte de faire le couvent de La
Tourette, c’est à cause de la complexité même du programme. Le couvent doit abriter
80 étudiants, il doit être à la fois lieu d’habitation, lieu d’étude et lieu de prière.
L’architecte peut ainsi poursuivre sa réflexion aussi bien sur l’habitat que sur l’église,
et réunir dans un seul objet Ronchamp et l’Unité d’Habitation. Au lieu d’élever le
bâtiment depuis le sol, le Corbusier l’abaisse à partir de la ligne horizontale du toit
et va à la rencontre de la pente qu’il touche «comme il peut ». Il construit sur un plan
classique un quadrilatère autour d’une cour fermée. Les cellules des moines qui
disposent chacune d’une loggia occupent les deux étages supérieurs. Les salles
d’étude et les espaces de vie commune sont largement ouverts vers le paysage.
L’église fait volume à part, un bunker de béton aux proportions subtiles. C’est le
cloître qui surprend. Ce n’est pas un déambulatoire qui entoure la cour mais une
croix. La cour semble accumuler les volumes purs, une ville abstraite où se déploie « le jeu savant, correct et magnifique
des volumes assemblés sous la lumière ». Le couvent à peine inauguré se retrouvera à la convergence de deux grandes
crises, celle de l’église catholique et celle de la révolte étudiante. En 1970, il n’y a plus un seul étudiant à La Tourette.
Quelques frères résistent dans le couvent déserté car ils croient que l’Architecture du lieu incarne de façon unique la quête
spirituelle de l’ordre. Le lieu changera de fonction et deviendra un centre de colloques mais il restera dominicain sauvé par
l’ architecture.
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samedi 14 mai à 20.15
inédit
La médiathèque de Sendaï
Architecte : Toyo Ito
Réalisation : Richard Copans
Image : Richard Copans – Montage : Juliette Garcias
Coproduction : ARTE France, Les Films d’Ici,le Ministère de la culture et de la communication, Direction de l’architecture et du patrimoine,
le Centre Pompidou (2004)
En 1995 l’architecte japonais Toyo Ito remporte le concours pour la construction d’une médiathèque à Sendaï, une ville de
1 million d’habitants à 300 km au Nord de Tokyo. La proposition
se veut transparente et « sans barrières », c’est ainsi que les
associations de citoyens définissent le programme.
L’architecte et son ingénieur inventent une structure porteuse
d’un type nouveau qui rompt radicalement avec le poteau /
poutre de l’architecture moderne du XXème siècle.
Treize structures tubulaires cylindriques aux motifs ajourés, des
« tubes » implantés à travers tout le bâti traversent le bâtiment
de bas en haut et assurent la stabilité verticale et horizontale de
tout l’édifice. Ils sont tordus, inclinés, et semblent défier les lois
de la construction. Pourtant ils peuvent protéger le bâtiment de
séismes aussi puissants que celui de Kobe.
Les sept plateaux, sont de minces sandwichs de métal, dont
l’épaisseur ne dépasse pas 80 cm. Leur technique de construction s’apparente à la construction navale. Tubes et plateaux
définissent l’architecture du lieu. Il y a très peu de murs. Des rideaux, de grands panneaux coulissants, des parois translucides en polycarbonate délimitent à chaque étage quelques zones. C’est le mobilier qui définit l’espace.
Le programme est lourd et complexe : bibliothèques, consultation de la presse, accès Internet, un cinéma, galeries d’exposition, salles de conférence, un espace de consultation de DVD et vidéo, sans oublier l’espace public de ce bâtiment ouvert
7 jours sur 7 de 9 h à 22h.
Chaque étage a une personnalité différente, des fonctions distinctes, un mobilier, une lumière, un revêtement de sol unique.
Le bâtiment n’impose aucune identité visuelle. Chaque étage est singulier. L’effet est renforcé par l’ameublement original
créé pour chaque étage par un designer différent. La médiathèque se définit en déclinant un seul et même principe :
l’absence de murs, la flexibilité des espaces , la transparence.
Toyo Ito continue ainsi sa recherche d’une architecture évanescente et immatérielle, une architecture qui laisse à chacun le
soin de définir l’usage de l’espace, un espace ouvert, généreux, « sans barrières ».
Avec le soutien de la Fondation franco-japonaise Sasakawa
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La collection Architectures
Collection proposée par
Richard Copans et Stan Neumann
Coproduction
ARTE France
Unité de Programme / Thierry Garrel
Chargé de programmes / Luciano Rigolini
Les Films d’Ici
Marie Guirauden
le Ministère de la culture et de la communication,
Direction de l’architecture et du patrimoine
Michel Clément / Ann-José Arlot / Elisabeth Henri
le Centre Pompidou
Délégation à l’action culturelle audiovisuelle /
Anne-Michèle Ulrich
le musée du Louvre
Responsable des productions audiovisuelles /
Catherine Derosier-Pouchous
le musée d’Orsay
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L le Ministère de la culture et de la communication,
Direction de l’architecture et du patrimoine
Favoriser l’accès pour tous à l’architecture est un des objectifs menés par la Direction de
l’architecture et du patrimoine, dans le cadre des actions de promotion et de diffusion de
la culture architecturale qu’elle poursuit. C’est à ce titre qu’elle apporte son soutien à la
production et à la réalisation de films documentaires et qu’elle est partenaire depuis
plusieurs années de la collection Architectures aux côtés du Centre Pompidou et du
musée du Louvre.
L le Centre Pompidou
Le Centre Pompidou collabore à Architectures depuis ses débuts, en 1995. Après avoir
consacré plusieurs documentaires à des réalisations architecturales majeures contemporaines, la collection s'est progressivement ouverte aux chefs-d'oeuvre de l'ensemble
du XXe siècle.
L le musée du Louvre
Le musée du Louvre initie et coproduit depuis 1988 des films en partenariat avec des
producteurs indépendants. Au total, depuis 15 ans, 180 films ont vu le jour, représentant
environ 90 heures de programmes diffusés à la télévision, dans les salles audiovisuelles
du musée, dans des festivals et dans de nombreux programmes à caractère culturel et
édités par la Réunion des musées nationaux ou d’autres éditeurs.
En 2004 ont été coproduits : Impression, musée d’Alger de Patrice Chagnard ; Au Louvre
avec Miquel Barcelo de Valeria Sarmiento ; Napoléon, David et le sacre de l’image de Patric
Jean ; Les chevaux du Louvre de Jean-Luc Guntz ; Le trésor de Saqqara de F. Wilner ; Une
minute au musée, dessin animé de Serge Elissalde et Franck Guillou et un CD Rom : Artus
et le grimoire secret.
L la fondation franco-japonaise Sasakawa
La Fondation Franco-Japonaise Sasakawa est une fondation reconnue d’utilité publique par
décret du Premier Ministre du 23 mars 1990. C’est un organisme privé, sans but lucratif et
de statut français, qui a pour mission de « développer les relations culturelles et d’amitié
entre la France et le Japon ».
Elle exerce ses activités dans des domaines variés tels que l’éducation, les échanges de
jeunes, les arts plastiques et les arts de la scène, le journalisme, la recherche scientifique….
Mettant l’accent sur les aspects contemporains de la société et de la culture de la France et
du Japon, il lui a semblé naturel de s’associer avec les Films d’Ici et Arte pour la réalisation
de films d’architecture présentant au public français des bâtiments contemporains, représentatifs de l’évolution de l’acte construit au Japon comme la Médiathèque de Sendai de l’architecte Toyo Ito.
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