4 JOËL BELLAÏCHE
Chebotarev. Cependant, alors que pour Serre et Murty-Murty-Saradha ces techniques supposaient de
changer, souvent plusieurs fois, l’extension de corps de nombres considérée et de traduire, de manière
parfois un peu délicate, les résultats pour une extension en termes d’une autre, elles deviennent dans
le langage de la complexité de Littlewood des lemmes élémentaires sur les représentations des groupes
finis. Ainsi, la complexité de Littlewood permet non seulement d’obtenir dans certains cas de meilleurs
résultats, mais aussi de retrouver plus simplement des résultats de [25] ou [21].
Quand la table des caractères d’un groupe fini Gest connue, on peut en théorie calculer la complexité
de Littlewood λG(D)de n’importe quel ensemble invariant par conjugaison D, et la comparer avec la
majoration de Cauchy-Schwarz p|D|. La table des caractères est connue dans plusieurs cas particuliè-
rement importants dans les applications : celui où Gest abélien, celui où Gest le groupe symétrique
Sn, pour lequel on dispose d’une description combinatoire de la table des caractères, ou encore celui
où Gest un groupe fini de type de Lie, où la théorie de Deligne-Lusztig et les travaux subséquents
de Lusztig donnent une description complète des caractères. "En théorie" seulement, car le calcul se
révèle souvent extrêmement difficile, même dans le cas abélien. Nous donnons dans cet article un certain
nombre de tels calculs dans des cas où nous avons pu les mener à bien : intervalles dans Z/nZ(la borne
de Cauchy-Schwartz n’est pas du tout optimale), intervalles dans (Z/nZ)∗(la borne de Cauchy-Schwarz
est essentiellement optimale), générateurs de Z/nZ(la borne de Cauchy-Schwartz n’est pas optimale),
dérangements dans Sn(la borne de Cauchy-Schwartz n’est pas optimale), matrices de traces fixées dans
GLn(Fℓ)(la borne de Cauchy-Schwarz est essentiellement optimale) ou dans GSP4(Fℓ)(elle ne l’est
pas). Comme cette liste le suggère, il reste beaucoup à faire, en particulier une étude systématique en
utilisant la théorie de Deligne-Lusztig de la complexité de Littlewood de l’ensemble des matrices de trace
donnée dans un sous-groupe de type de Lie de GLn(Fℓ).
Notons par ailleurs qu’il n’est pas difficile de voir (cf. §2.1) que λ(f)est égale à la norme d’algèbre
||f||A(G)de f, une notion introduite par Pierre Eymard en 1964 pour une fonction fsur un groupe
localement compact ([9]), et bien plus ancienne dans le cas d’un groupe abélien localement compact G,
puisque dans ce cas ||f||A(G)est la norme L1de la transformée de Fourier ˆ
fde G. Que cette notion,
fondamentale en analyse harmonique, soit importante an arithmétique est évident depuis les travaux
de Hardy et Littlewood. Rappelons à ce sujet la conjecture de Littlewood (d’où les noms "norme de
Littlewood", et "complexité de Littlewood") selon laquelle, pour Dun sous-ensemble fini de G=Z,
on a ||1D||A(G)≫log |D|. La conjecture de Littlewood (maintenant un théorème) a fait l’objet de
nombreuses recherches et généralisations, notamment aux cas des groupes abéliens localement compacts.
Tout récemment, sa généralisation au cas d’un groupe fini non nécessairement abélien (c’est-à-dire au
cas que nous considérons ici) a fait l’objet d’un article de Tom Sanders [23]. Puisque pour la conjecture
de Littlewood et ses variantes, on cherche à minorer ||1D||A(G), tandis que nous cherchons au contraire
ici à le majorer, nos résultats sont essentiellement disjoints, et en fait, complémentaires, de ceux de
[23]. Notons qu’il ne semble pas que les applications au théorème de Chebotarev fassent partie des
motivations de Tom Sanders.
1.3. Le plus petit nombre premier ptel que Frobp∈Det l’invariant ϕG(D).On reprend les
notations du paragraphe précédent : L/Qune extension finie de groupe de Galois G, ramifiée exactement
aux diviseurs premiers de M, et D⊂Gun sous-ensemble stable par conjugaison. A ces données on