Une gouvernance économique mondiale depuis le sommet du G6 de 1975
L’Etat français n’est pas uniquement confronté à l’émergence d’une gouvernance européenne. Il
doit également faire face à une gouvernance mondiale. Celle-ci est même plus ancienne. Elle se
manifeste dans tous les domaines, en particulier, dans le domaine économique. Cette
gouvernance économique mondiale a été profondément transformée par le surgissement des
difficultés économiques au cours des années 70. L’étude prend comme point de départ le sommet
du G6 à Rambouillet en 1975.
Comment l’économie mondiale est-elle régulée ?
I. La naissance de la coopération entre les Etats
A) Le « système de Bretton Woods »
L’idée d’une coopération à l’échelle mondiale entre les Etats est relancée au lendemain de la
Seconde Guerre mondiale. Cette coopération est dominée par les Etats-Unis. Elle s’exerce en
particulier dans le champ économique occidental et ignore le bloc socialiste ainsi que, souvent, les
pays pauvres du Sud économique. Elle a deux buts essentiels : La stabilité des monnaies et
l’essor du commerce.
Ce sont les accords de Bretton Woods de 1944 qui ont donné naissance au système monétaire
international. Chaque Etat doit définir la valeur de sa monnaie en or ou en dollar. Les cours des
monnaies doivent être stables. Les balances des paiements doivent être équilibrées (flux de
marchandises, de services ou d’argent qui sortent - flux de marchandises, de services ou d’argent
qui entrent).
Le but du système est double :
- Assurer des taux de change stable entre les monnaies Il s’agit de faciliter le commerce
international.
- Eviter les désordres monétaires. On veut ainsi éviter le retour des difficultés de la crise de 1929.
Cette coopération économique à l’échelle mondiale entre les Etats donne naissance à deux
institutions : Le FMI et la Banque mondiale.
Le FMI doit veiller à la stabilité du système monétaire international. La Banque mondiale a
initialement soutenu la reconstruction de l’Europe et du Japon. Son objectif est devenu ensuite de
lutter contre la pauvreté et de favoriser le développement des pays du Sud. La Banque mondiale
finance des projets de développement.
Ce sont les accords du GATT (1944-95) qui organisent le système commercial mondial. Ils
interdisent toutes mesures protectionnistes visant à restreindre les échanges. Ils encouragent les
Etats à abaisser les tarifs douaniers.
B) La fin de Bretton Woods et le changement de contexte économique
Un contexte nouveau se met en place à partir des années 1970. L’accélération de la
mondialisation conduit à une progression spectaculaire des échanges internationaux, et les
investissements à l’étranger progressent également. En même temps, les Etats-Unis renoncent à
la convertibilité du dollar en or (1971). Le principe des taux de change fixe disparait, c’est la fin du
système de Bretton Woods.
La croissance devient faible et irrégulière. Le chômage augmente. Suite à la libéralisation des
échanges, les Etats s’effacent devant les acteurs privés. Les principales manifestations de la
libéralisation des économies sont la baisse des impôts, la réduction des dépenses des Etats, les
privatisations, les délocalisations...
L’effondrement du bloc soviétique en 1989-91 marque la fin du monde bipolaire. Les Etats-Unis
renoncent progressivement à une domination de la planète, et des puissances émergentes
s’affirment. Le monde devient multipolaire.
II. Les acteurs de la gouvernance économique mondiale depuis les années 1970
A) Les groupes d’Etats
La gouvernance économique mondiale est assurée par deux groupes d’Etats. Le G6 est en
1975. Il réunit 6 pays : les Etats-Unis, la France, le Royaume-Uni, la RFA, l’Italie, le Japon. Il s’est
ensuite élargi en G7 avec l’arrivée du Canada (1976). Il devient le G8 avec l’entrée de la Russie
en 1998. C’est un groupe informel de discussion et de coopération entre les dirigeants des
principales puissances économiques de la planète. L’efficacité du G8 est limitée, et il est accusé
d’être un « club de nantis ».
En complément au G8, le G20 est créé en 1999. Il ne remplace pas le G8, mais s’ajoute à lui. Son
but est d’ouvrir les relations aux puissances émergentes. Il comprend 19 pays plus l’Union
Européenne qui a son propre représentant. Le G20 est à son tour critiqué par les pays en
développement.
B) Les organisations internationales
La gouvernance économique mondiale est également assurée par trois organisations
internationales. Deux ont une existence ancienne et la troisième est plus récente. Le FMI et la
Banque mondiale continuent leur action. Ils interviennent de plus en plus auprès de pays endettés.
En échange de leur aide, ils imposent des Plans d’Ajustements Structurels. Ce sont des mesures
d’économies très sévères et souvent impopulaires. L’OMC, héritière du GATT, est créée en 1995.
Ce qui était de simples accords entre Etats est devenu une organisation internationale
permanente. La Chine entre dans l’OMC en 2001, ce qui est une victoire de la politique libérale
défendue par cette institution, mais la même année, elle entre dans une crise décisionnelle: le
cycle de négociations lancé à Doha n’a pas abouti jusqu’à nos jours, car les pays industrialisés et
les pays du «Sud» n’arrivent plus à trouver des accords commun concernant la baisse des tarifs
douaniers et la fin des subventions publiques pour certains secteurs d’activité, comme par
exemple l’agriculture. Des litiges individuels opposent aussi les pays du «Nord» entre eux, p.ex. en
ce qui concerne le soutien à l’industrie aéronautique (aides publiques pour Boeing/USA et
Airbus/UE).
C) Les acteurs non étatiques
La gouvernance économique mondiale n’est pas assurée que par des Etats réunis en groupes ou
en organisations internationales. Des acteurs non étatiques jouent un rôle de plus en plus
important dans la gouvernance économique mondiale. Ils sont en particulier présents dans les
grandes conférences internationales (Forum économique de Davos, sommets pour le
développement durable de l’ONU, par exemple). Il s’agit des firmes transnationales, des ONG ou
des syndicats.
III. Les critiques de la gouvernance économique mondiale
A) Laltermondialisme
L’altermondialisme est dans les années 1980. C’est une nébuleuse composée de nombreux
courants politiques ou associatifs. Ces courants sont contestataires et situés à gauche. Ils
condamnent la gouvernance mondiale libérale et réclament une autre gouvernance mondiale.
Leurs critiques portent sur 4 points principaux: les inégalités crées par la mondialisation (inégalités
Nord-Sud et inégalités à l’intérieur des grands ensembles territoriaux), le déficit démocratique
(institutions internationales dominées par les Etats les plus puissants qui n’associent pas la
population), la puissance des FTN ainsi que des acteurs de la finance internationale et les effets
néfastes sur l’environnement.
Le mouvement altermondialiste se manifeste par de grandes manifestations au moment des
sommets internationaux. Il se manifeste également par de grandes réunions internationales, les
forums sociaux mondiaux annuels. Le premier a eu lieu à Porto Alegre au Brésil en 2001.
B) Les effets de la crise financière
La crise financière depuis 2007 conduit à l’émergence de mouvements citoyens, comme, par
exemple :
1. « Occupy Wall Street » (occupation du Zucchotti Park à Manhattan, 2011, soutenue par le maire
de New York de l’époque, Michael Bloomberg, ainsi que les économistes Jeffrey Sachs et Joseph
E. Stiglitz, qui a conduit à des actions similaires dans d’autres métropoles du monde). Ce
mouvement créé le slogan « Nous sommes les 99% », qui est largement relayé par les médias
sociaux.
2. Les plateformes citoyennes des « indignés » d’où est issu, entre autres, « Podemos » en
Espagne qui a conquis les mairies de Barcelone (Ada Colau) et Madrid (Manuela Carmena) en
2015. D'autres plateformes citoyennes dirigent des villes comme Saragosse, La Corogne ou
Cadix. Sur leur programme, on peut trouver une baisse du salaire des élus, un audit des dettes
municipales, un blocage des expulsions immobilières.
3. Une autre conséquence de la crise est la transformation du G20 en un sommet annuel des
chefs d’Etat en 2008, et la création d’un Conseil de stabilité financière au sein de cette institution.
Au même moment, on assiste à l’émergence d’un nouveau «club» qui conteste l’hégémonie
occidentale dans la gouvernance économique mondiale. Il s’agit des BRICS, des pays à forte
croissance, dont le poids économique augmente.
C) La création des BRICS
Le terme «BRIC» est apparu pour la première fois en 2001 dans une note de Jim O’Neill,
économiste de la banque d'investissement Goldman Sachs. En 10 ans, la place des pays
concernés dans l'économie mondiale a fortement progressé : 16 % du PIB mondial en 2001, elle
atteint 27 % en 2011 et pourrait atteindre, selon certaines projections, 40 % en 2025. Leur premier
sommet a eu lieu en juin 2009 en Russie, et en 2011, l’Afrique du Sud a rejoint le groupe. Lors du
sommet de Fortaleza, au Brésil, en juillet 2014, les BRICS ont cidé la création d'une banque de
développement basée à Shanghai et d'un fonds de réserve qui pourraient accorder jusqu’à 350
milliards de dollars de prêts sans imposer les mêmes contraintes que le FMI et la Banque
mondiale.
Malgré les tentatives de stabiliser la gouvernance économique mondiale depuis la fin du système
de Bretton Woods et l’émergence de nouveaux acteurs dans ce domaine, l‘ampleur inédite de la
crise de 2008 et la crise de la dette européenne depuis 2010 démontrent qu’elle est encore très
déficitaire.
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