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Les cahiers EPS de l'académie de Nantes n° 23 - décembre 2000
té, vécu, mentalités, acquis, pro-
jets…) tant scolaires (réussites,
échecs…) qu’extra-scolaires (milieu
social, activités extérieures…).
La leçon, c’est aussi et surtout un
temps et un lieu de rencontre entre
un adulte qui a pour fonction d’ensei-
gner et des élèves réunis en classe
pour apprendre. Il revient à l’ensei-
gnant, au regard du profil particulier
de ses élèves, de leurs personnalités,
d’instaurer le climat le plus propice
au développement des apprentis-
sages, d’établir une relation d’empa-
thie pour mobiliser les énergies
indispensables à ces apprentissages.
L’entrée en matière dans cette
réflexion ne semble pas aisée. Par
où commencer? Car de la poule ou
de l’œuf… Plusieurs options sont
défendables. Pour la clarté de la pré-
sentation, j’ai choisi de regarder,
dans un premier temps, vers l’évé-
nement lui-même ou, tout du moins,
sa partie émergente (la leçon), puis,
dans un second temps, d’analyser
les tenants de cet acte, ses causes,
ses raisons, ses motifs (l’avant
leçon) pour enfin, lors d’un troisiè-
me temps, en saisir les consé-
quences, les aboutissants (l’après
leçon). Assurément, ce découpage
du temps n’est pas à comprendre
dans sa linéarité car ces différentes
périodes s’entrecroisent, s’enchevê-
trent et sont indéniablement dépen-
dantes l’une de l’autre.
La leçon : entre théâ-
tralité et authenticité
Du point de vue du professeur
Son intervention en présence des
élèves se situe aux confins de trois
rôles, ceux de l’auteur, du metteur
en scène et de l’acteur, sans pour
autant oublier sa personnalité (qui il
est), ni les objectifs de sa fonction
(ce qu’il cherche à atteindre).
Le rôle d’auteur, il le tient essentielle-
ment avant la leçon, au moment de
sa préparation, sa planification. Il le
tient aussi pendant la leçon elle-
même, car tout n’est pas écrit; la part
de l’improvisation, de l’adaptation,
de l’ajustement doit rester réelle
pour pouvoir répondre à l’hétérogé-
néité des élèves et à la diversité de
leurs réponses.
La mise en scène incombe égale-
ment au professeur qui se doit tout
d’abord de planter le décor, chaque
leçon nécessitant la recréation d’un
certain univers, environnement, état
d’esprit, de relations, susceptibles
de susciter l’adhésion des élèves,
d’éveiller leur curiosité, en un mot
de les intéresser. Son imagination,
son inventivité, seront sollicitées
pour faire de la surprise et de la
nouveauté le balancier indispen-
sable de la récurrence et de la répé-
tition imposées pour produire des
apprentissages.
Il est aussi acteur, car enseigner,
c’est exercer une influence favo-
rable, c’est peser sur la situation
pour faire naître les apprentissages.
Mais ce rôle, il le partage également
avec les élèves dont on dit qu’ils doi-
vent être les acteurs de leurs appren-
tissages (le mot « acteur » est, dans
ce cas, porteur de plusieurs sens,
mais tous ont leur place ici, si cer-
taines conditions de dévolution des
responsabilités sont réunies par le
professeur). Acteur, il l’est assuré-
ment. Pour ce faire, il va chercher à
rendre opératoires les huit principes
structurateurs de la didactique de
l’EPS (énoncés par Michel Delaunay
dans la revue EPS de l’Académie de
Nantes, n° 6 en 1992) et devra s’atta-
cher à respecter, comme le théâtre
classique, la règle des trois unités :
de temps, de lieu et d’action.
–Unité de temps : la leçon repré-
sente, en effet, l’unité de temps des
apprentissages, même si un appren-
tissage a besoin de plusieurs unités
pour exister.
–Unité de lieu : un apprentissage a
besoin, pour éclore d’un contexte,
d’un support, d’une discipline d’ensei-
gnement, d’une activité physique et
sportive pour ce qui concerne l’EPS,
même si (et ce devrait être toujours le
cas), à moyen ou long terme, c’est la
réutilisation dans un autre contexte, le
réinvestissement de cet apprentissa-
ge, par opération de transfert, qui
sont visés. L’unité de lieu peut aussi
s’entendre, pour un enseignant d’EPS,
dans une autre acception : celle qui
renvoie à la sécurité des élèves et à la
responsabilité du professeur qui doit
pouvoir contrôler ce que font ses
élèves pendant son cours.
–Unité d’action : l’hétérogénéité
des élèves impose une approche dif-
férenciée de l’enseignement. Mais
cela ne signifie pas que l’enseignant
doive choisir des objectifs d’appren-
tissages fondamentaux différents
pour les élèves de la même classe;
cela le conduirait à diriger plusieurs
cours en même temps, ce qui n’est
pas souhaitable. Mais l’unité
d’action n’exclut pas, au contraire, la
diversité des expériences vécues par
les élèves au sein de la même unité
de temps d’apprentissage (la
leçon) : c’est, en effet, la dialectique
diversité– continuité qui doit être à
la base de la conception des ateliers
dans un cours d’EPS.
La leçon est donc faite pour appren-
dre. À l’obligation de la mise en
œuvre de ces principes et de ces
règles, une certaine obligation de
résultats est imposée à l’enseignant,
résultats sans lesquels la leçon per-
drait de sa pertinence et, en consé-
quence, de sa légitimité au profit
d’une simple animation : l’ensei-
gnant perdrait en crédibilité. Ces
résultats, il lui faudra bien les appré-
cier, les mesurer pour, d’une part,
satisfaire à l’exigence institutionnel-
le et, d’autre part, bâtir la suite de
son enseignement. Si l’on perçoit la
nécessité de l’acte d’évaluation, on
doit encore insister sur le fait qu’il
prendra en compte ce qui est ensei-
gné. Ici, le contexte institutionnel
actuel, au moins au lycée, invite les
enseignants à concevoir et organi-
ser leurs contenus d’enseignement
à partir de l’interaction permanente
des composantes culturelles et
méthodologiques des compétences
choisies.
Du point de vue des élèves
Saisir le sens des apprentissages
proposés, en percevoir l’unité et la
continuité, voire la contiguïté (dans
les APSA, au travers de l’EPS, mais
également dans les relations que la
discipline entretient, ou devrait
entretenir, avec les autres disci-
plines), en comprendre les exploita-
tions potentielles et les utiliser
concrètement, sentir les effets de
ces apprentissages, percevoir les
transformations en cours et avoir
conscience de progresser, éprouver
de l’intérêt pour apprendre, avoir la
possibilité d’échafauder et de mettre
en œuvre ses propres projets, res-
sentir la confiance qui vous est faite
par le professeur au travers des res-
ponsabilités qu’il vous donne et des