REIGN OF DARKNESS Manon Brouillat REIGN OF DARKNESS Creatures of Phaniel - Préquelle Cet ebook a été publié sur www.bookelis.com ISBN : 979-10-227-2596-5 © Manon Brouillat, 2016 Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction, intégrale ou partielle réservés pour tous pays. L’auteur est seul propriétaire des droits et responsable du contenu de cet ebook. Ô Puissantes Ténèbres qui jamais ne faiblissez ! Voyez venir votre règne ! La force dévastatrice du ciel m’empêchait de continuer. Les rafales de vent me cinglaient la peau, me brisaient les tympans, me repoussaient en arrière. La nature elle-même voulait me voir à genoux face à la puissance de l’Empereur Anthracite. Mais il était hors de question que j’abandonne. Pas en ce moment si crucial. Les nuages me menaçaient de leurs éclairs blancs mais ne me touchaient pas. Du moins pour le moment. Et c’était ce qui me donnait espoir. Il fallait que j’atteigne la Forêt des Elfes. Je serai en sécurité auprès d’eux. Et le peuple elfique m’aidera à mettre un terme à la tyrannie d’un homme au cœur plus noir que l’ébène. Je le savais. Depuis la nuit des temps, nos deux peuples étaient proches. Ils m’aideront en ces jours si obscurs. Soudain, le tonnerre fit rage dans le ciel et m’arracha à mes pensées. Je savais qu’il était risqué de voler si près d’un orage d’une telle ampleur, mais que faire d’autre ? Mon espèce est la seule à avoir la faculté de voler. Je ne pouvais en aucun cas prendre la route empruntée par les humains – ceux qui n’avaient aucun pouvoir. L’Empereur était à mes trousses. Et ses démons avaient soif de sang. Il me fallait continuer le combat, même si cela devait conduire à ma mort. La souffrance de notre monde devait cesser. L’Empereur payera de ses actes. Un grognement rauque s’échappa de mes lèvres, mais le vent était si puissant que je n’entendis presque rien. Je ne ressentais que mon corps vibrer. La colère enflait en moi, elle me consumait de l’intérieur. Mais si je laissais ce sentiment me dominer, jamais je ne connaîtrai la paix. Alors je fermai les yeux, laissant la pluie pénétrer mon âme et me laver de cette colère infâme. Lorsque je les ouvris à nouveau, je me sentis apaisé. Ou plutôt, les souvenirs me laissèrent en paix. Et ce moment de répit était délicieux. Je connaissais si bien le ciel que mes ailes savaient vers quel horizon me porter. Il m’était presque inutile de garder les yeux ouverts, alors je me laissais bercer par la puissance de l’immense azur et m’isolais dans un coin de mon âme. Il n’y avait qu’ainsi que je pouvais me débarrasser une bonne fois pour toutes des souvenirs qui me hantaient depuis des jours. Soudain, le temps sembla s’arrêter en me laissant seul face au passé. La pluie cessa de marteler ma peau, l’orage ne gronda plus. Les souvenirs s’affichèrent derrière mes paupières, et la bataille sanglante ressurgit. Je la voyais encore. Ma bien-aimée. Ses yeux ambrés, parsemés de paillettes dorées, étincelaient de mille feux, peu de temps avant la bataille. Avant de rejoindre les premiers rangs pour détruire l’un des deux derniers piliers de l’apogée de la puissance de l’Empereur Anthracite. La Forteresse du Nord et du Sud. Ma bien-aimée me regardait et posait sur moi ses yeux remplis d’amour. Mais c’était aussi de la peur que je voyais, tapie dans un coin de ses doux iris. C’était une guerrière, mais même les meilleurs ressentent la peur. Ceux qui ne la ressentent pas ne sont pas dignes d’avoir une âme. Les images se succédaient, et la bataille défilait dans mon esprit à une telle vitesse que je ne distinguais rien. Et la seconde suivante, je la revis. Ma bienaimée, blessée et agonisante. Au milieu du carnage, elle se mourrait doucement. Le souvenir de ses râles me déchira de nouveau le cœur en deux. Je voulais arrêter cette souffrance que je ressentais, mais il fallait que j’aille jusqu’au bout si je voulais m’en libérer. Alors j’observais ma moitié hurler de douleur. Tout-à-coup, le moi du souvenir se rapprochait, et mon doux amour lui chuchotait des mots. Ils résonneront à jamais dans mon esprit… « C’est bientôt la fin… Pars, maintenant. Mais ne m’oublie pas. Ne m’oublie jamais. C’est ce qui fera ta force. Maintenant, jure que tu feras tout pour libérer notre monde ! Jure-le… » disait-elle avant de pousser son dernier souffle. Mais il y avait bien pire que la mort de ma compagne. Le trépas se répandait tout autour de nous. La bataille faisait rage et tous nos alliés tombaient, abattus par des démons. L’ennemi était fort. Très fort. Trop fort. Et mes semblables ainsi que d’autres créatures se mourraient peu à peu. La désolation hantait la forteresse de l’Empereur Anthracite. Soudain, je refis surface. La réalité me frappa de plein fouet, comme un rappel à l’ordre.