DG Trésor / SER de Berlin 6 février 2017 Allemagne : Relations économiques bilatérales 1. Eléments sur la coopération économique franco-allemande et l’attractivité de la France pour les investisseurs allemands En 2015, l’équipe de Business France a enregistré 141 projets d’investissements allemands, qui ont créé 3612 emplois. Il s’agit du meilleur résultat enregistré par l’investissement allemand en France. L’Allemagne se situe en seconde position en termes d’investissements créateurs d’emplois en France, derrière les USA mais assez loin devant l’Italie qui est troisième. Les secteurs les plus actifs ont été l’automobile, les transports et l’énergie, soit les secteurs de force de l’industrie allemande. Plus du tiers de ces investissements ont été réalisés dans des unités de production, ce qui confirme l’attractivité de la France sur l’accueil d’activités productives. Dans les classements internationaux et notamment Ernst & Young, aucun pays en Europe ne fait mieux. En matière de R&D le résultat des investissements allemands est également spectaculaire ; en effet, la moitié des emplois créés par investissements dans la R&D en France sont d’origine allemande. En 2016 Business France a détecté de l’ordre de 160 projets, les chiffres définitifs notamment en termes de création d’emplois ne sont pas encore disponibles. La coopération économique franco-allemande s’est particulièrement renforcée depuis 2013 dans les domaines suivants : Energie, avec une coopération institutionnelle de haut niveau entre directions en charge de l’énergie (ayant permis par exemple d’aboutir à des positions communes dans le cadre des négociations européennes comme la sécurité d'approvisionnement en gaz ou les énergies renouvelables) et une coopération entre les agences Ademe et dena, centrée sur l’émergence de projets concrets en matière de transition énergétique; les deux agences expertisent actuellement un projet transfrontalier autour de la notion des smart grids, avec l'appui de Cyril Roger Lacan, PDG de l’entreprise Tilia, missionnée par Ségolène Royal et impliquant les entreprises Enedis et Innogy; l’année 2016 a également été celle d’un élargissement des compétences de l'Office franco-allemand de la Transition Energétique (OFATE), auparavant centré sur les énergies renouvelables, qui a célébré ses 10 ans; ces trois acteurs (Ademe, dena et OFATE) ont lancé une plateforme commune http://www.plateforme-f-a.fr/; la coopération porte également sur la recherche d'une solution franco-allemande pour la reconversion du site de Fessenheim, avec l'appui du Land de Bade-Wurtemberg. Climat, avec de nombreux efforts communs réalisés en amont et en aval de la COP21 : au niveau européen pour l’élaboration du cadre énergie-climat 2030 en 2014 constituant la base de l’ « INDC » de l’UE ; par la présidence allemande du G7 en 2015 dont la déclaration des Leaders a souligné la nécessité d'une « décarbonation » de l'économie ; en organisant le dialogue climatique annuel de Petersberg sous présidence franco-allemande en juillet 2015 ; par l’implication conjointe franco-allemande dans de nombreuses initiatives de l’Agenda de l’Action (Alliance mondiale pour les Bâtiments et la Construction, MobilizeYourCity, Energies renouvelables en Afrique, InsuResilience, Pacte sur l’eau, Océans, Under2MOU, prix du carbone) et à présent par la présidence allemande du G20 qui a vu la création d’un nouveau groupe de travail sur le climat, accolé au groupe de travail existant sur l’énergie, groupes qui traitent ensemble en particulier de la réduction des subventions aux énergies fossiles et de la nécessaire tarification du carbone par les pays du G20. Cette question de la tarification du carbone s’incarne au niveau européen par les discussions actuelles sur la réforme du système ETS, qui à la fois éviterait fuites de carbones et établirait un vrai signal prix, et où la France travaille à un rapprochement avec l’Allemagne, peu aisé du fait de l’arbitrage décidé au niveau national allemand lors de l’adoption de son plan climat 2050, au moment de la COP22 à Marrakech, très favorable à l’industrie. Economie numérique, avec en particulier deux conférences franco-allemandes sur l’économie numérique (27 octobre 2015 à Paris, 13 décembre 2016 à Berlin), qui ont fait progresser la coopération dans les domaines de l’économie des données, du financement de l’innovation, de l’industrie du futur (« Industrie 4.0 » en allemand) et qui ont également permis d’explorer de nouveaux domaines de coopération. Le soutien des startups et la coopération entre grandes entreprises et startups sont également un sujet prioritaire pour les entreprises françaises et allemandes et ont donné lieu à plusieurs initiatives en 2016 : évènement « French German EUnicorns Day Berlin » le 9 mai 2016 à l’ambassade, en coopération avec Roland Berger et la FAZ, avec une quinzaine de startups numériques françaises venues de France ; colloque annuel des conseillers du commerce extérieur de la France (CCEF) de juin 2016 consacré aux startups françaises à Berlin ; lancement d’un « French Tech Hub » à Berlin à l’automne 2016, avec deux évènements de lancement ayant réuni respectivement 200 et 400 personnes autour de témoignages de startups en forte croissance (ex : Sigfox, Qwant, Synthesio, la ruche qui dit oui, etc. ). Suite à la rencontre bilatérale des ministres M. Sapin et S. Gabriel le 13 décembre 2016, un projet de fonds franco-allemand pour le soutien à la croissance des startups est à l’étude entre les ministères de l’économie. Electromobilité et mobilité automatisée et connectée : la coopération institutionnelle a été renforcée en 2015-2016 entre les ministères français et allemands compétents : réunion à Berlin, le 6 juin 2016, du premier groupe de travail franco-allemand sur l’électromobilité et le véhicule automatisé et connecté ; une deuxième réunion s’est tenue le 18 novembre 2016 à Paris sur le volet « véhicule automatisé et connecté » uniquement ; le volet « électromobilité » devrait lui aussi faire l’objet d’une deuxième réunion, au printemps 2017 ; signature le 29 septembre par les ministres français et allemand des transports d’une déclaration francoallemande relative à «une « initiative franco-allemande sur la mobilité électrique et numérique », annonçant en particulier (i) un appel à projets pour navettes autonomes entre Strasbourg et Kehl en vue du Congrès ITS à Strasbourg, en juin 2017 et (ii) la mise en place d’un site d’expérimentation transfrontalier, dont le tracé exact (entre la Sarre et la Lorraine) a été officialisé par les ministres le 8 février 2017 à Berlin. Outre un échange entre administrations sur le retour d’expérience, cette coopération franco-allemande pourrait, à terme, favoriser les coopérations industrielles. transports : intense coopération politique entre les Ministres Vidalies et Dobrindt sur des sujets stratégiques au niveau européen, que ce soit dans le ferroviaire (finalisation du quatrième paquet ferroviaire), l’aérien (mandat donné à la Commission européenne pour lutter contre la concurrence déloyale des compagnies financées par les pays du Golfe), ou le transport routier de marchandises (lutte contre le dumping social par le lancement de « l’Alliance du routier » le 30 janvier 2017 à Paris avec 9 neuf pays européens). commerce extérieur : les secrétaires d’Etat M. Fekl et M. Machnig se sont étroitement concertés sur les principaux enjeux de la politique commerciale européenne ; leurs positions communes ont inspiré les propositions de la Commission européenne sur le règlement des différends Etat-investisseur (amélioration du CETA avec le Canada, proposition d’inclusion dans le TTIP) ; les positions concertées de la France et de l’Allemagne ont également permis de faire avancer les décisions concernant les droits antidumping en matière d’acier ainsi qu’en faveur de la modernisation des instruments antidumping. réciprocité en matière de contrôle des investissements directs étrangers et de marchés publics : dans le contexte d’une forte croissance en Europe (et surtout en Allemagne) des investissements directs étrangers et d’une dissymétrie de l’ouverture des marchés et des marchés publics de pays tiers, le Premier ministre a souhaité au sommet économique de la Süddeutsche Zeitung à Berlin en novembre 2016 une concertation franco-allemande étroite en faveur d’un contrôle renforcé des investissements directs étrangers, prenant en compte la nécessité d’obtenir un niveau d’ouverture symétrique des pays tiers. 2. Eléments de contexte Au premier semestre 2016, les échanges de biens entre la France et l’Allemagne représentent, selon les douanes françaises, 17% des échanges totaux de la France, 28% de ses échanges avec l’Union européenne et 36% de ses échanges avec la zone euro. L’Allemagne est le premier partenaire commercial de la France, devant l’Italie puis les Etats-Unis dont la part dans les échanges français s’élève, dans les deux cas, à environ 7,5%. L’Allemagne est le premier client de la France loin devant les Etats-Unis ; elle absorbe, au premier semestre 2016, 16,9% des exportations françaises. Elle est également son premier fournisseur loin devant la Chine ; elle représente 17,2% des importations françaises. Alors que les exportations totales de la France ont baissé en comparaison semestrielle, celles en direction de l’Allemagne ont augmenté de plus de 2% (soit une hausse de quelque 800 M€). Elles atteignent 37,6 Md€ au premier semestre 2016. Les importations de la France depuis l’Allemagne s’élèvent quant à elles à 43,5 Md€ ; elles ont diminué de près de 3% (-1,2 Md€), soit un recul plus important que pour l’ensemble des importations françaises. Il découle de la hausse des exportations et de la baisse des importations avec l’Allemagne que le déficit commercial s’est réduit d’un quart (environ -2 Md€) en comparaison semestrielle. Avec 5,9 Md€, il s’agit néanmoins du deuxième déficit commercial le plus élevé de la France après celui avec la Chine. La dépendance commerciale de l’Allemagne à la France est moindre. Selon Destatis, l’office fédéral des statistiques, la France est, avec une part de 8% dans les échanges allemands, le premier partenaire de l’Allemagne devant les Etats-Unis (7,7%), au premier semestre 2016. Sur l’année complète 2015, les Etats-Unis étaient devenus, pour la première fois, le premier partenaire commercial de l’Allemagne. La France est le troisième fournisseur de l’Allemagne, derrière la Chine, les Pays-Bas et devant les Etats-Unis et son deuxième client juste derrière les EtatsUnis. La France et l’Allemagne s’échangent essentiellement du matériel de transport (35% au premier semestre 2016), des produits chimiques, parfums et cosmétiques (11%), des machines industrielles et agricoles (10%), des produits métallurgiques et métalliques (8%), des produits des industries agroalimentaires (6%), des produits en caoutchouc et en plastique, produits minéraux divers (5%), des produits informatiques, électroniques et optiques (5%), des équipements électriques et ménagers (4%) et des produits pharmaceutiques (4%). Parmi les vingt premiers produits d’exportation français se trouvent les parfums et produits pour la toilette ainsi que des produits agricoles ou agroalimentaires (produits laitiers et fromages, céréales (sauf riz), légumineuses et oléagineux et vins de raisin), alors que les vingt premiers biens importés depuis l’Allemagne sont exclusivement des produits industriels ou des matières premières. La réduction du déficit commercial bilatéral de presque 2 Md€ au premier semestre 2016 par rapport au premier semestre 2015 est, en grande partie, due à une évolution positive du secteur aérospatial qui représente 20% des échanges franco-allemands. Si ce secteur est excédentaire au premier semestre 2016, l’automobile (9% des échanges) reste largement déficitaire même si la sous-traitance automobile est légèrement excédentaire. La baisse du déficit bilatéral s’explique également par un net repli des importations d’hydrocarbures en raison de la chute de leur prix et de la clémence de l’hiver passé. L’amélioration du taux de couverture du commerce extérieur de la France avec l’Allemagne pourrait donc être passagère dans la mesure où elle ne traduit pas une hausse générale de la compétitivité à l’exportation française mais repose uniquement sur les échanges, très variables d’une période à l’autre, entre les sites de production allemands et français d’Airbus et sur la facture énergétique par nature volatile. Selon la Bundesbank, le stock d’investissements directs allemands en France s’élève à 34 Md€ fin 20141. Il enregistre un recul de 11% fin 2014 par rapport à fin 2010 et un recul de presque 6% par rapport à fin 2013. De 4e pays d’accueil avec près de 5% du stock fin 2010, la France est passée 6e avec moins de 4% du stock fin 2014, en raison notamment de la régulière progression de la Chine (3% du stock allemand fin 2010 contre 6% fin 2014). Le stock allemand en France est à 34% placé dans les industries manufacturières (par ordre décroissant : chimie, automobiles, machines et équipements électriques), à 22% dans le commerce/réparations automobiles, à 13% dans les activités financières et d’assurance, secteurs dans lesquels le désengagement allemand a été très net au cours de l’année 2014, et à 11% dans les activités immobilières. 2 344 entreprises implantées sur le territoire français sont considérées comme des investissements directs allemands2. Elles génèrent un chiffre d’affaires d’environ 157 Md€ et emploient 333 000 personnes. Avec 26 Md€ fin 2014, le stock d’IDE français en Allemagne a, quant à lui, chuté de 26% depuis 2010 mais a, en revanche, crû de plus de 3% par rapport à fin 2013. Son stock n’arrive plus qu’en 7e position avec une part inférieure à 6% en 2014 alors qu’il occupait la 4e place en 2010 avec une part de 9%. La part du stock d’IDE 1 2 Les dernières données annuelles de la Bundesbank disponibles sur les stocks d’investissements directs portent sur l’année 2014. Entreprises résidentes dont le total des actifs dépasse 3 M€ et dont 10% des parts ou des droits de vote sont détenus par un non résident. français en Allemagne dans le secteur industriel a considérablement progressé (de 10% en 2010 à 21% en 2014), en raison notamment d’une importante augmentation des investissements pharmaceutiques. Celle des activités financières et d’assurance a, par contre, diminué passant de 47% fin 2010 à 37% fin 2014. 1 212 entreprises implantées en Allemagne sont considérées comme des investissements directs français. Elles génèrent un chiffre d’affaires de 147 Md€ et emploient 281 000 personnes. Le nombre d’entreprises est resté quasiment stable par rapport à 2010, alors que les effectifs ont augmenté de 8% et le chiffre d’affaires de plus de 10%.