annonçant qui la fin des marques, qui un
sale temps pour les marques, qui la déroute
des marques. Cette démarche d’obso-
lescence programmée du savoir est devenue
systématique, voire caricaturale: elle a en
réalité pour fonction d’attirer l’attention sur
ses auteurs et, sous le prétexte d’une soi-
disant obsolescence des pratiques, d’en
vendre en réalité une autre, celle promue
par les cabinets de consultants en quête de
croissance des chiffres d’affaires via la cap-
tation de nouveaux clients.
La posture académique qui est la nôtre nous
évitera de tels travers. Le but de cet article
est d’inviter à la réflexion sur les pratiques
de marque. À l’aube de ce siècle nouveau,
on doit en effet s’interroger sur le nouvel
environnement des marques: les marchés
eux-mêmes. L’environnement qui présida le
lancement d’Ivory il y a près de cent ans, ou
même d’Ariel en 1967 est largement révolu.
Pour autant les pratiques d’hier sont-elles
obsolètes?
Certes sont nées de nouvelles facettes du
management, liées par exemple à la prise en
compte des intérêts de cet « allié » ambigu
mais de poids qu’est la grande distribution
concentrée, poursuivant ses propres objec-
tifs désormais et développant ses propres
marques. De ce fait, le Trade Marketing,le
Category Management, l’ECR sont deve-
nus parties intégrantes du fonctionnement
des entreprises performantes et une des clés
de leur survie dans des marchés dominés
par la grande distribution concentrée. De
plus, les entreprises se sont aussi adaptées
au nouveau contexte des pays matures où la
rétention du client ultra sollicité et zappeur
devient une préoccupation majeure: elles
furent heureusement aidées par l’arrivée
des nouvelles technologies de l’information
(internet, call centers, SMS, bases de don-
nées, etc.) dans la reconquête d’une relation
perdue, abandonnée à ceux qui sont natu-
rellement au contact du client final, les dis-
tributeurs eux-mêmes. Le marketing dit
relationnel, les CRM, les programmes de
fidélisation segmentés font aussi partie
aujourd’hui des outils de base de l’entre-
prise performante. Point n’est besoin d’y
revenir.
Nous nous concentrerons plutôt sur les pra-
tiques du branding plus particulièrement,
en soulignant les évolutions les plus signifi-
catives à nos yeux, ainsi que leurs raisons et
leurs hérauts. Le lecteur excusera le style
non académique de l’article: nous expri-
mons ici non nos certitudes, mais nos
convictions. Que les nombreux collègues,
chercheurs et chefs d’entreprise, respon-
sables de marketing et de vente qui les ont
façonnées en soient remerciés.
Le retour du risque perçu
La première fonction de la marque est, on le
sait, de réduire le risque perçu. C’est la pre-
mière attente des consommateurs d’une
marque: qu’elle garantisse la provenance,
donc la qualité. Dès lors qu’une situation
d’achat comporte un risque aux yeux des
consommateurs, ceux-ci cherchent à le
réduire, cela est naturel. Ce risque peut être
financier, d’où l’importance croissante de la
marque avec son prix unitaire. Il peut être
aussi physique, d’où le besoin de marques
rassurantes dans le domaine alimentaire.
On comprend alors le plus grand besoin de
marques dans les services (variables et
intangibles).
Le risque perçu par le consommateur croît
aussi avec la technologie du produit: il faut
des marques à forte réputation pour rassurer
le client qui achète un téléviseur ou une
machine à laver pour une certaine durée.
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