directions de la connaissance humaine, de telle sorte qu’en
s’étendant à tout et même en embrassant tout, elle ne
laissait plus guère à son esprit le temps d’inventer sur rien
(Sainte-Beuve, 1851, p. 263).
Son opinion ne peut qu’être confirmée par les efforts
maladroits que les partisans même de Condorcet ont déployés
pour, si l’on peut dire, lui venir en aide. Incompréhension de la
démarche ou réel embarras ? L’auteur peut, à l’évidence, ne pas
avoir innové dans tous les domaines : qui songerait à le lui
reprocher ? Mais certains plaidoyers, même s’ils proviennent de la
défense, sont accablants. “Il y a eu des géomètres plus grands que
lui”, affirme Antoine Diannyère dans sa Notice. “Il y a eu des
philosophes qui ont mieux éclairé la métaphysique, l’économie
politique, la législation ou la morale […]. Il y a eu des hommes qui
ont paru plus érudits que lui […]. Il y a eu des écrivains plus grands
et plus agréables” (A. Diannyère, an IV, pp. [121/122] 39-41). Toutes
ces affirmations, bien sûr, sont suivies de “mais…” et d’une liste de
bonnes raisons pour faire, quand même, l’éloge de l’auteur.
Cependant, l’embarras demeure, et la péroraison tourne court :
“Enfin, il est le créateur de la philosophie la plus consolante et la
plus encourageante, de celle du perfectionnement de l’espèce
humaine” (ibid.), ce qui, précisément, avait été nié quelques pages
plus tôt (ibid., p.19) et la paternité attribuée à Turgot et à Price…
Pour finir, notre enquêteur éprouve en économie une
perplexité analogue à celle que ses collègues peuvent ressentir
ailleurs, lorsqu’il se heurte au jugement péremptoire de Joseph
Schumpeter (à tort ou à raison, une autorité en la matière), selon