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PRÉSENTATION
1. L’ŒUVRE
RÉSUMÉ DE L’ŒUVRE
La marquise de Merteuil et le vicomte de Valmont se
jouent de la société pudibonde et privilégiée dans la -
quelle ils vivent. Se livrant à la débauche, ils ne ces-
sent, tout au long du livre, de se narrer leurs exploits
au travers des lettres qu’ils s’envoient – car ils ne se
fréquentent pas ouvertement – et qui constituent le
corps de l’intrigue. Mais, pour rivaux qu’ils soient, ils
n’en sont pas pour autant à égalité. Le vicomte de Val -
mont est un homme et, à ce titre, il peut se montrer
un libertin flamboyant au grand jour et sans rete-
nue. Les lettres qu’il écrit à la marquise de Merteuil
ne sont que le récit triomphant de ses aventures.
Il n’en va pas de même pour cette dernière. Si elle se
doit de rivaliser avec le vicomte sur le terrain des aven -
tures d’alcôve, la marquise de Merteuil, de plus, est
contrainte à la dissimulation. Son statut social (elle
est marquise), matrimonial (elle est veuve) et son sexe
(elle est une femme dans un monde dominé par les
hommes) l’obligent à la duplicité et à la tromperie. Si le
vicomte use aussi de ces armes, ce n’est que pour sé -
duire puis pour perdre, en les déshonorant, les femmes
dont il fait la conquête. Il ne fait que prendre un chemin
aisé qui ne transgresse que la morale de son époque.
Pour être son égale, la marquise de Merteuil doit, en
plus, réussir à s’extraire du rôle qui lui est dévolu.
Elle a déclaré la guerre aux hommes et, se voulant
«née pour venger [son] sexe » (lettre LXXXI), elle uti-
lise toute son intelligence pour conserver son indé-
pendance, ses amants et sa réputation. Toute la force
du roman réside dans la double narration de ces deux
intrigues entremêlées. Le récit de leurs aventures li ber -
tines respectives, de leurs stratégies et de leurs péri-
péties mais aussi le combat qu’ils se livrent l’un contre
l’autre. Un combat qui apparaît tout d’abord comme
un jeu de séduction pour ensuite se transformer en
rivalité destructrice. En définitive, les deux combat-
tants se prendront mutuellement ce qu’ils ont de plus
précieux. Le vicomte mourra en duel après avoir suc-
combé à l’amour de Madame de Tourvel dont il aura
pourtant causé la perte. Le brillant libertin agonisera
en amoureux désespéré d’avoir détruit celle qu’il aimait.
La marquise de Merteuil perdra sa réputation, que
toute sa vie elle s’était attachée à préserver, sa fortune,
en perdant un procès et sa féminité qu’une petite vé -
role flétrira en la défigurant.
L’AUTEUR
Pierre-Ambroise-François
Choderlos de Laclos est
né le 18 octobre 1741, dans
une famille de petite no -
bles se, à Amiens. Bon
élève, il se destine, dès
l’âge de 18 ans, à une
carrière militaire. Il est
élève à l’École d’artillerie
de La Fère (ancêtre de
l’École polytechnique)
puis intègre le Corps
royal d’artillerie. Promu lieutenant à 21 ans, le jeune
Choderlos de Laclos rêve de conquêtes et de gloire. Il
s’engage à la Brigade des Colonies afin de mener des
expéditions en outre-mer mais, en 1763, le traité de
Paris met fin à la guerre de Sept ans. Ses espoirs de
combats et d’aventures sont ruinés.
S’ensuit une longue période de paix durant laquelle il
mène une vie monotone en tant qu’officier de garni-
sons: il fait des manœuvres et inspecte des fortifica-
tions à Toul, Strasbourg, Grenoble, Besançon, Valence.
En 1778, il obtient le grade de capitaine en second de
sapeurs: il est responsable de la construction des in fra -
structures nécessaires aux armées de combat. En 1779,
la France rentre à nouveau en guerre contre l’Angle -
terre, il est envoyé à l’île d’Aix, près de la Rochelle afin
de travailler à la construction et à l’armement d’un fort;
c’est là qu’il commence Les Liaisons dangereuses. En
septembre 1781, il demande un congé, part pour Paris,
termine son roman, qui paraît au printemps 1782; il
remporte immédiatement un large succès et fait scan-
dale. En mai 1782, il regagne l’île d’Aix, fait la connais -
sance de Marie Soulange Duperré dont il a d’abord un
fils et qu’il épousera quatre ans plus tard.
En 1788, Laclos entre au service du duc d’Orléans, hos -
tile au régime et fervent défenseur d’une constitution
à l’anglaise; il devient son secrétaire, rédige ses dis-
cours et l’assiste dans ses diverses tentatives pour assu-
rer la Régence. En 1789, il suit le duc d’Orléans, exilé
en Angleterre, puis, revient, un an plus tard, en France;
il devient membre du Club des Jacobins et rédige Le
journal des amis de la Constitution dans lequel il re ven -
dique une monarchie constitutionnelle avec des minis-
tres élus démocratiquement et une place pour les hom -
mes de mérite contre le privilège de la naissance. Par
deux fois, et à cause de ses relations avec le duc d’Orléans,