Dossier pédagogique - Théâtre de la Ville

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SCHAUBÜHNE BERLIN
ROMEO CASTELLUCCI
FRIEDRICH HÖLDERLIN
D’APRES SOPHOCLE
CRÉATION
Ödipus
der
Tyrann
EN ALLEMAND SURTITRÉ EN FRANÇAIS
20 < 24 NOVEMBRE 2015
찞 émilie paillot graphiste - © Arno Declair -
RC BOBIGNY 562 128 397
-
LICENCES 1-1051016/2-1051017/3-1051015
- impression Stipa
{ AU THÉÂTRE DE LA VILLE }
Dossier pédagogique SAISON 2015 I 2016
ÉTABLI PAR LE TNB theatredelaville-paris.com
2 PLACE DU CHÂTELET PARIS 4 • 01 42 74 22 77
PIERRE CHODERLOS DE LACLOS
CHRISTINE LETAILLEUR
Les Liaisons dangereuses
CRÉATION
Pierre Choderlos de Laclos
& MISE EN SCÈNE Christine Letailleur
SCÉNOGRAPHIE Emmanuel Clolus, Christine Letailleur
LUMIÈRES Philippe Berthomé
EN COLLABORATION AVEC Stéphane Colin
COSTUMES Thibaut Welchlin
ASSISTÉ D’Irène Bernaud
SON Manu Léonard
MAQUILLAGES Suzanne Pisteur
COIFFURES Clémence Magny
ASSISTANTE À LA MISE EN SCÈNE Stéphanie Cosserat
DE
AVEC
ADAPTATION
Dominique Blanc MME DE MERTEUIL
Vincent Perez VALMONT
Fanny Blondeau CÉCILE DE VOLANGES
Stéphanie Cosserat UNE COURTISANE
Julie Duchaussoy MME DE TOURVEL
Manuel Garcie-Kilian DANCENY
Guy Prévost LE CURÉ
Karen Rencurel MME DE ROSEMONDE
Richard Sammut LE CHASSEUR
Véronique Willemaers MME DE VOLANGES
Théâtre National de Bretagne, Rennes.
Fabrik-Théâtre/Compagnie Christine Letailleur – Théâtre de la Ville-Paris – Théâtre National de Strasbourg –
Prospero (Théâtre National de Bretagne, Rennes, Théâtre de Liège, Emilia Romagna Teatro Fondazione, Schaubühne
am Lehniner Platz, Göteborgs Stadsteatern-Théâtre national de Croatie/World Theatre Festival Zagreb, Festival
d’Athènes et d’Epidaure).
PRODUCTION DÉLÉGUÉE
COPRODUCTION
Le texte de l’adaptation de Christine Letailleur est édité aux Solitaires Intempestifs.
AVENTURES LIBERTINES
Dominique Blanc et Vincent Pérez, dans une gamme de jeux inouïe.
Les Liaisons dangereuses, qui ne connaît cet ouvrage aux adaptations si nombreuses ? Rédigé par Choderlos
de Laclos en 1781 (alors capitaine dans l’armée), le livre connut immédiatement scandale et succès. Faisant
le récit des aventures libertines de Merteuil et Valmont, il offre à Dominique Blanc et Vincent Pérez une
gamme de jeux inouïe. Séduction et rivalité destructrice, l’incessant combat…
Véritable « machine de guerre », le roman épistolaire est un champ de bataille vertigineux dont Christine
Letailleur garde la sève : entièreté du récit et richesse de la langue, « érotisme de tête », rythme haletant et
dénouement dramatique. En débusquant le jeu des libertins et des manipulés, des témoins et du chasseur,
l’adaptatrice rappelle l’impitoyable cruauté de l’œuvre licencieuse, sa beauté littéraire et l’actualité du sujet,
aussi.
Sylvie Martin-Lahmani
2
© Brigitte Enguerand
SOMMAIRE
3
Les Mots, des armes vénéneuses p.
4
Présentation
p.
5
Piste pédagogiques
p. 10
Ressources pédagogiques
p. 12
Extrait de l’adaptation
p. 14
Corpus de textes
sur le libertinage
p. 16
Évolution du personnage
de Cécile de Volanges
p. 18
Rencontre I Tournée I
Presse I À lire
p. 20
LES MOTS, DES ARMES VÉNÉNEUSES
Au rythme de la parole, Christine Letailleur scrute dans le roman épistolaire
de Choderlos de Laclos les rouages qui transforment insidieusement un jeu
de séduction en véritable champ de massacre.
Rapatrié dans l’enceinte du théâtre par Christine Letailleur, le roman de Choderlos de Laclos s’y déploie avec
une incroyable et troublante évidence. Parce que plus encore que l’action somme toute répétitive (les coucheries, les tromperies, les adultères), ce sont les mots qui sont le nerf de ce diabolique récit. Ces mots
qu’échangent à flux constant la marquise de Merteuil (Dominique Blanc) et le comte de Valmont (Vincent
Perez), soudés par un pacte dont eux seuls connaissent les termes, ces mots, donc, sont des armes vénéneuses, imbibées d’un poison sans remède. Dans un décor à deux étages qui expose autant qu’il occulte
celles et ceux qui l’habitent, le traversent ou le hantent de nuit comme de jour, le va-et-vient des personnages s’accomplit au rythme de la parole. Lettres échangées avec frénésie, face-à-face colériques ou feutrés,
révélations, injonctions, suppliques, menaces, prières… Le verbe, ici rebondi de la page à la scène, est un protagoniste qu’il convient de ne jamais lâcher du regard. Par lui, se profile le pire de ce que les humains sont
capables d’accomplir. Car au-delà du complot intime qui se trame entre deux ex-amants en mal d’aventures
pimentées, on entend peu à peu s’élever une chanson dont le refrain a de quoi inquiéter. Cette chanson
raconte la transformation insidieuse d’un jeu de séduction en véritable champ de massacre. Elle met en
perspective les rouages qui font d’un défi amusé, inconséquent, volage, une guerre aveugle, vouée à buter
sur son point de non-retour, laissant derrière elle un sol jonché de cadavres. Il y a dans la confrontation
entre Merteuil et Valmont une radicalisation effrayante. Où les mène-t-elle ? À l’absolu. C’est ce pas en avant
fatidique, le pas de trop, que Christine Letailleur scrute avec vigilance. Personne n’en sortira indemne. Ni
Merteuil, ni Valmont, ni celles et ceux sur qui s’exerce leur cruauté. Détruire à en perdre la tête, jusqu’à se
détruire soi-même. Cela fait froid dans le dos.
© Brigitte Enguerand
Joëlle Gayot
4
PRÉSENTATION
1. L’ŒUVRE
L’AUTEUR
Pierre-Ambroise-François
Choderlos de Laclos est
RÉSUMÉ DE L’ŒUVRE
La marquise de Merteuil et le vicomte de Valmont se
jouent de la société pudibonde et privilégiée dans laquelle ils vivent. Se livrant à la débauche, ils ne cessent, tout au long du livre, de se narrer leurs exploits
au travers des lettres qu’ils s’envoient – car ils ne se
fréquentent pas ouvertement – et qui constituent le
corps de l’intrigue. Mais, pour rivaux qu’ils soient, ils
n’en sont pas pour autant à égalité. Le vicomte de Valmont est un homme et, à ce titre, il peut se montrer
un libertin flamboyant au grand jour et sans retenue. Les lettres qu’il écrit à la marquise de Merteuil
ne sont que le récit triomphant de ses aventures.
Il n’en va pas de même pour cette dernière. Si elle se
doit de rivaliser avec le vicomte sur le terrain des aventures d’alcôve, la marquise de Merteuil, de plus, est
contrainte à la dissimulation. Son statut social (elle
est marquise), matrimonial (elle est veuve) et son sexe
(elle est une femme dans un monde dominé par les
hommes) l’obligent à la duplicité et à la tromperie. Si le
vicomte use aussi de ces armes, ce n’est que pour séduire puis pour perdre, en les déshonorant, les femmes
dont il fait la conquête. Il ne fait que prendre un chemin
aisé qui ne transgresse que la morale de son époque.
Pour être son égale, la marquise de Merteuil doit, en
plus, réussir à s’extraire du rôle qui lui est dévolu.
Elle a déclaré la guerre aux hommes et, se voulant
« née pour venger [son] sexe » (lettre LXXXI), elle utilise toute son intelligence pour conserver son indépendance, ses amants et sa réputation. Toute la force
du roman réside dans la double narration de ces deux
intrigues entremêlées. Le récit de leurs aventures libertines respectives, de leurs stratégies et de leurs péripéties mais aussi le combat qu’ils se livrent l’un contre
l’autre. Un combat qui apparaît tout d’abord comme
un jeu de séduction pour ensuite se transformer en
rivalité destructrice. En définitive, les deux combattants se prendront mutuellement ce qu’ils ont de plus
précieux. Le vicomte mourra en duel après avoir succombé à l’amour de Madame de Tourvel dont il aura
pourtant causé la perte. Le brillant libertin agonisera
en amoureux désespéré d’avoir détruit celle qu’il aimait.
La marquise de Merteuil perdra sa réputation, que
toute sa vie elle s’était attachée à préserver, sa fortune,
en perdant un procès et sa féminité qu’une petite vérole flétrira en la défigurant.
né le 18 octobre 1741, dans
une famille de petite noblesse, à Amiens. Bon
élève, il se destine, dès
l’âge de 18 ans, à une
carrière militaire. Il est
élève à l’École d’artillerie
de La Fère (ancêtre de
l’École polytechnique)
puis intègre le Corps
royal d’artillerie. Promu lieutenant à 21 ans, le jeune
Choderlos de Laclos rêve de conquêtes et de gloire. Il
s’engage à la Brigade des Colonies afin de mener des
expéditions en outre-mer mais, en 1763, le traité de
Paris met fin à la guerre de Sept ans. Ses espoirs de
combats et d’aventures sont ruinés.
S’ensuit une longue période de paix durant laquelle il
mène une vie monotone en tant qu’officier de garnisons : il fait des manœuvres et inspecte des fortifications à Toul, Strasbourg, Grenoble, Besançon, Valence.
En 1778, il obtient le grade de capitaine en second de
sapeurs: il est responsable de la construction des infrastructures nécessaires aux armées de combat. En 1779,
la France rentre à nouveau en guerre contre l’Angleterre, il est envoyé à l’île d’Aix, près de la Rochelle afin
de travailler à la construction et à l’armement d’un fort;
c’est là qu’il commence Les Liaisons dangereuses. En
septembre 1781, il demande un congé, part pour Paris,
termine son roman, qui paraît au printemps 1782 ; il
remporte immédiatement un large succès et fait scandale. En mai 1782, il regagne l’île d’Aix, fait la connaissance de Marie Soulange Duperré dont il a d’abord un
fils et qu’il épousera quatre ans plus tard.
En 1788, Laclos entre au service du duc d’Orléans, hostile au régime et fervent défenseur d’une constitution
à l’anglaise ; il devient son secrétaire, rédige ses discours et l’assiste dans ses diverses tentatives pour assurer la Régence. En 1789, il suit le duc d’Orléans, exilé
en Angleterre, puis, revient, un an plus tard, en France ;
il devient membre du Club des Jacobins et rédige Le
journal des amis de la Constitution dans lequel il revendique une monarchie constitutionnelle avec des ministres élus démocratiquement et une place pour les hommes de mérite contre le privilège de la naissance. Par
deux fois, et à cause de ses relations avec le duc d’Orléans,
5
il est emprisonné. Il échappe in extremis à la guillotine.
En 1799, Laclos appuie le coup d’État du 18 Brumaire
qui permet au général Bonaparte de devenir 1er Consul
et réintègre l’armée. En 1802, Bonaparte le fait servir avec le grade d’inspecteur général d’artillerie dans
l’armée du Rhin, puis, en Italie. Il se fait remarquer
pour l’invention d’un nouveau modèle d’obus. Atteint
de dysenterie, Laclos meurt à Tarente le 5 septembre
1803.
Laclos restera l’auteur d’un seul roman : Les Liaisons
dangereuses, chef d’œuvre attesté de la littérature française du XVIIIe. Il composa, cependant, durant sa carrière militaire quelques écrits sans grand intérêt littéraire : un livret d’opéra-comique ; quelques poésies ;
des Épîtres à des femmes célèbres de l’époque ; des
contes en vers un peu lestes ou anticléricaux, dans la
tradition de La Fontaine.
En 1787, il adresse à l’Académie française un Éloge de
Vauban qui s’avère être, en fait, un réquisitoire, ce qui
lui vaudra d’être renvoyé de son poste, à Metz. En
1783, il commence un traité sur les moyens de perfectionner l’éducation des femmes, publié sous le
titre : De l’éducation des femmes dans lequel il porte une
critique sévère à l’égard de ce que la société réserve
aux femmes.
Aujourd’hui, l’ouvrage, qui retrace les manipulations
et les perfidies de deux aristocrates libertins, est
considéré comme une œuvre majeure de la littérature française du XVIIIe siècle – l’un des plus grands et
l’un des meilleurs romans de la langue française
selon André Gide – il est largement diffusé et paraît
à la Pléiade en 1979.
Après avoir fait plusieurs adaptations dont, pour les
plus récentes, Hinkemann d’Ernst Toller, Phèdre de
Ritsos, Le Banquet de Platon, j’ai choisi de revenir au
XVIIIe siècle avec Laclos. J’avais déjà, en 2006, adapté
et mis en scène La Philosophie dans le Boudoir de Sade.
Le XVIIIe siècle est un siècle que j’affectionne tout particulièrement et l’œuvre de Laclos me passionne en
son entièreté : son esprit, son intelligence, sa fable, sa
construction, son intrigue, ses personnages mais aussi
sa langue, son style, son rythme narratif. D’autre part,
la cérébralité du texte me plaît beaucoup. Chez le
libertin, tout est dans l’art du langage ; Valmont et
Merteuil se plaisent à se mettre en scène dans leurs
récits, à se raconter leurs exploits, à s’écouter. Mise à
part, quelques scènes libertines de Valmont, l’œuvre
fait montre d’un érotisme de tête… Enfin, l’épistolaire
est un matériau sur lequel j’avais envie de me pencher
en tant qu’adaptatrice.
Laclos a conçu un roman brillant et fort : il a fait de la
séduction et de l’amour, un champ de bataille. Le roman est toujours d’actualité et soulève encore, aujourd’hui, des questionnements sur le rapport amoureux ; au fond, les dilemmes de l’amour que révèlent
les personnages de Laclos restent encore les mêmes
aujourd’hui…
Comme le dit très justement Biancamaria Fontana :
« Le roman est construit sur un modèle géométrique,
sobre, classique, concis, époustouflant par son rythme
narratif qui ne laisse aucun espace vide. Certains l’ont
comparé à une forteresse, à un iceberg, à une machine
de guerre. »
2. LA PIÈCE
NOTE DE CHRISTINE LETAILLEUR
LES LIAISONS DANGEREUSES, « UNE MACHINE DE GUERRE »
Laclos commença à rédiger, vers 1778/79, son roman
épistolaire qu’il intitula Le Danger des liaisons mais
qu’il publia, en 1782, sous le titre Les Liaisons dangereuses. Le roman fit scandale et provoqua un flot de
commentaires. La marquise de Conflans aurait confié
« avoir fermé sa porte à Laclos », avouant « qu’elle aurait eu peur de se retrouver avec lui » ! Restif de la Bretonne note, avec ironie, que « des jeunes filles se prostituèrent pour obtenir une copie des Liaisons dangereuses après que leurs mères leur avaient interdit de
lire le livre ». On a dit même que la reine, Marie-Antoinette, en gardait un exemplaire dans une reliure
rendue discrètement anonyme…
Après la mort de Laclos, le roman tombe dans l’oubli. Au XIXe siècle, il est rejeté par la critique littéraire
qui le regarde comme « une œuvre licencieuse mineure,
produit douteux de la culture agonisante de l’Ancien
régime ». À plusieurs reprises, il est poursuivi pour
son immoralité, interdit à la vente et à la diffusion.
Même si Baudelaire, Nerval, les Goncourt se repenchent sur le roman, il faudra attendre les années 1930
pour que Malraux et Gide le fassent redécouvrir.
Christine Letailleur, juin 2013
L’ADAPTATION ET LA MISE EN SCÈNE
Je souhaite, par le travail d’adaptation et de mise en
scène, faire ressortir la théâtralité inhérente à l’œuvre.
Bien que Les Liaisons dangereuses soit un roman épistolaire, composé en 175 lettres, l’œuvre est contaminée par le théâtre. Dès le début, les protagonistes nous
sont présentés ainsi que les différents enjeux ; le cours
des événements suit une réelle progression digne d’une
pièce de théâtre et avance à un rythme haletant, créant
un suspens qui nous maintient en haleine jusqu’au
bout.
L’œuvre se clôt de manière forte, inattendue, faite de
rebonds et aboutit à une réelle fin dramatique.
6
L’intrigue est astucieuse et très bien agencée. Construite
en contrepoint, avec des parallélismes de situations, elle
comprend, également, les récits des aventures libertines de Valmont et Merteuil mais aussi le récit de
leur combat – combat qui nous apparaît d’abord sous
la forme d’un jeu de séduction et qui, peu à peu, se
révèle être celui d’une rivalité destructrice.
Quant aux personnages, loin d’être des figures froides
et désincarnées, ils endossent la carrure de personnages dramatiques : chacun a son caractère, son propre
langage et son propre style.
Ainsi, les libertins ont un style qui varie en fonction
de leurs interlocuteurs.
On remarquera que Valmont ne s’adresse pas de la même manière à Cécile, à Mme de Tourvel ou à la marquise de Merteuil. Lorsqu’il s’adresse à son chasseur,
personnage populaire chargé d’épier Mme de Tourvel,
il sait adopter un langage familier… On pourrait classer les personnages comme suit : les roués et libertins,
incarnés par Valmont et Merteuil; les manipulés et victimes représentés par Cécile, Mme de Tourvel et Danceny ; les témoins directs de l’histoire étant Mme de
Volanges et Mme de Rosemonde.
Pour l’adaptation, j’ai choisi de suivre la fable en sa
totalité, dans sa chronologie.
Je travaillerai sur ses quatre parties en prenant en
compte, les mouvements, les parallélismes de situations, les accélérations, les ressorts dramaturgiques
et tout ce qui contribue à l’élaboration de l’action.
Je garderai, bien évidemment, les deux acteurs principaux du drame : le couple Merteuil-Valmont, ainsi
que les personnages indispensables au récit : Cécile,
Tourvel, Danceny, et des figures secondaires comme
Mme de Volanges et Mme de Rosemonde qui apportent leur touche et nous révèlent le dénouement de
l’histoire. Le chasseur est également un personnage
secondaire que je garderai car il nous éclaire sur la
mentalité de Valmont.
Par ailleurs, il est assez drôle de voir dialoguer Valmont
dans un langage familier avec lui.
Les personnages secondaires, les petites scènes courtes
et enlevées, comme la scène de Valmont et de la courtisane, les promenades de Tourvel et Rosemonde etc.
créent du rythme, apportent des respirations et redynamisent l’action afin de mieux nous replonger,
ensuite, dans la cérébralité du texte.
Je travaillerai bien évidemment sur la langue du XVIIIe
siècle. La langue est, ici, la sève même de l’œuvre. Les
jeux de mots, les sous-entendus, les métaphores, les
exagérations du langage, les points d’exclamations, etc.
sont un réel plaisir, un divertissement de l’esprit. Je
souhaite, en restant au plus proche de l’œuvre, en
restaurer l’âme, tout en créant des scènes, des dialogues, des monologues et des tirades.
Je souhaite, dans la mise en scène, garder trace des
lettres. Elles sont le véritable matériau dramaturgique,
elles stimulent l’action, l’engendrent. Elles sont, à la
fois, une arme mais aussi celles qui dévoilent, nous renseignent sur la psychologie des personnages, leurs
tactiques etc.
Ainsi, des lettres circuleront, s’échangeront à vue, en
cachette ; une lettre sera dérobée, une autre dictée,
recopiée ou encore embrassée, jetée, déchirée…
Les acteurs seront en costumes d’époque afin de replonger le spectateur dans l’univers historique et social auquel appartiennent Les Liaisons dangereuses : celui
de l’aristocratie de la fin du XVIIIe siècle juste avant la
Révolution. L’ouvrage de Laclos reflète les habitudes
et la mentalité de cette noblesse. Les costumes (couleurs, formes, lignes) seront étudiés et travaillés en
fonction des personnages ; ainsi, par exemple, Mme
de Tourvel et Cécile porteront des couleurs dans les
tons pastels, plus pâles, plus discrets, que ceux des
libertins…
Les personnages évolueront dans un décor simple et
dépouillé mais conçu selon une certaine géométrie qui
permettra de mettre en scène plusieurs espaces (salon,
boudoir, jardin…) dans un seul, d’avoir, également,
une rapidité de circulation et de disparition d’acteurs.
Le décor sera doté de trois murs (un mur à cour, un à
jardin et un au fond) et muni d’un étage, plus exactement, d’un balcon, sorte de corridor, qui permettra
un jeu d’acteurs et des circulations sur deux niveaux,
des tableaux simultanés… À cour et jardin, les balcons
auront chacun un escalier afin qu’un acteur au premier étage puisse descendre, directement au plateau.
Le mur du fond, sur ses deux niveaux, comportera des
fenêtres (ouvertures dans les murs) pour créer du
hors champs. Il y aura aussi des portes (ouvertures
dans les murs) au premier étage et au plateau.
L’ÉQUIPE ARTISTIQUE
CHRISTINE LETAILLEUR
Christine Letailleur a suivi des cours au Conservatoire
d’Art Dramatique d’Amiens ; elle est titulaire d’une
licence de philosophie, d’une maîtrise de sociologie et
d’un DEA en études théâtrales (sous la direction de Jean
Jourdheuil et Robert Abirached).
Comme comédienne, elle a travaillé avec le Carquois
d’Amiens dans les mises en scène de Jacques
Labarrière :
Le prix Martin d’Eugène Labiche,
Le Désir attrapé par la queue de Picasso,
Monsieur Bonhomme et les incendiaires
de Max Frisch,
La Folle envie de Maupassant…
Elle a tourné Un samedi sur la terre de Diane Bertrand…
7
© Brigitte Enguerand
• La Vénus à la fourrure ou les confessions d’un suprasensuel, d’après le roman de Sacher
• Masoch au TNB à Rennes dans le festival Mettre
Elle a reçu le premier prix du jury professionnel au
Festival International de théâtre universitaire (Amandiers de Nanterre) pour sa mise en scène de Matériau Müller, en 1994, et, pour son adaptation et sa mise
en scène de Poème brûlé d’après Vélibor Colic, en
1996. Elle a travaillé sur La Bataille d’Arminius de
Kleist, montée par Jean Jourdheuil (1996) et a suivi
les ateliers de recherches de Stanislas Nordey aux
Amandiers (1995/1998) dont elle a été assistante à la
mise en scène pour La Puce à l’oreille de Feydeau.
Elle a été permanente artistique au Théâtre Gérard
Philipe de Saint-Denis (1998/2002).
En 2001, elle a monté, au Théâtre Gérard Philipe de StDenis, Médée de Hans Henny Jahnn, mis en espace
les Poésies et Forces d’August Stramm. Elle a adapté
et créé Pasteur Ephraïm Magnus de Hans Henny Jahnn
au Théâtre national de Bretagne (1re partie en 2004
et intégrale en 2005); l’intégrale a été reprise au Granit
de Belfort et au Théâtre national de Gennevilliers
(2006). Elle a conçu et mis en scène à la Maison de
la poésie :
Le Nouvel ordre socio-affectif selon Houellebecq (2005)
et Houellebecq ou la souffrance du monde (2006).
Elle a adapté et mis en scène :
• La Philosophie dans le boudoir ou les instituteurs immoraux de Sade au TNB de Rennes et au Théâtre de
Gennevilliers en 2007. Tournée, en 2008, au TNS de
Strasbourg, au Granit de Belfort, aux Salins de Martigues, à la MC de Grenoble… Édition aux Solitaires
Intempestifs.
en Scène 2008, reprise en 2009 au Théâtre national
de la Colline. Édition aux Solitaires Intempestifs.
• Hiroshima mon amour de Marguerite Duras : au
Théâtre de Vidy-Lausanne et au Festival Mettre en
Scène en 2009. Tournée en 2010-2011, en France et
au Baryschnikov Arts Center à New York, aux Festivals de Perm (Russie), de Shizuoka (Japon). Reprise en
2012 à Rennes, au Théâtre de la Ville de Paris et au
festival de Zagreb (Croatie).
• Le Château de Wetterstein de Wedekind au
Théâtre de Vidy-Lausanne et au Théâtre national de
Bretagne, au Festival Mettre en scène 2010. Première
mise en scène du texte en France.
• Le Banquet, ou l’éloge de l’amour d’après Platon
dans le cadre du festival Mettre en Scène 2012, reprise au TNB à Rennes et en tournée en mars- avril
2014.
• Phèdre, d’après Yannis Rítsos, au TNB en 2013
• Hinkemann d’Ernst Toller, au TNB en octobre 2014,
repris au Théâtre national de la Colline en marsavril 2015.
Pour Radio France, elle a réalisé des enregistrements
de La Vénus à la fourrure, d’Hiroshima mon amour et,
prochainement, du Château de Wetterstein et adapté
des textes de George Bataille et de Casanova.
Christine Letailleur est artiste associée au TNB
depuis janvier 2010.
8
DOMINIQUE BLANC
VINCENT PEREZ
Elle s’est construit une carrière de comédienne aussi
exceptionnelle au cinéma qu’au théâtre, où elle a
notamment travaillé avec Antoine Vitez, Luc Bondy,
Jean-Pierre Vincent, Marc Paquien ; au cinéma avec
Louis Malle, Claude Chabrol, Régis Wargnier, Michel
Deville ou encore Jeanne Labrune. Pour la télévision
elle tourne avec, entre autres, Nina Companez et Claire
Devers. À l’opéra elle est dirigée par Peter Sellars.
Régulièrement saluée pour ses interprétations (quatre Césars pour Milou en mai de Louis Malle, Indochine de Régis Warnier, Ceux qui m’aiment prendront le train de Patrice Chéreau et Stand-By de Roch
Stéphanik), Dominique Blanc reçoit en 2008 le prix
de la meilleure interprète féminine à la Mostra de
Venise pour son rôle de femme jalouse dans L’Autre
de Pierre Trividic et Patrick Mario Bernard. Pour le
théâtre, elle obtient deux Molières avec Maison de poupée d’Henrik Ibsen dans la mise en scène de Deborah
Warner (1998) et La Douleur mis en scène par Patrice
Chéreau (2010). En 2011, elle reçoit le prix Plaisir du
théâtre pour l’ensemble d’un parcours pour lequel
elle a abordé, avec une même exigence, des rôles et
des registres très différents, faisant d’elle une actrice
entière et populaire.
Il a d’abord fait des études de photographie au Centre
Doret à Vevey, puis étudie l’art dramatique à Genève,
puis au Conservatoire national supérieur d’art dramatique et à l’école des Amandiers de Nanterre.
Il débute au cinéma en 1985 dans le Gardien de la
nuit. Puis il joue ensuite dans Cyrano de Bergerac de
Jean-Paul Rappeneau (1991), pour lequel il est cité au
César du meilleur espoir masculin; Indochine de Régis
Wargnier (1991) ; La Reine Margot de Patrice Chéreau
(1993) ; Fanfan d’Alexandre jardin (1992) ; Le Bossu de
Philippe de Broca (1998) pour lequel il est cité au César
du meilleur acteur dans un second rôle; Ceux qui m’aiment prendront le train de Patrice Chéreau (1998) pour
lequel il est cité au César du meilleur acteur dans un second rôle, Je reste! de Diane Kurys (2003); Frankenstein
de Marcus Nispel (2004); Monsieur Papa de Kad Merad
(2011) ; Ce que le jour doit à la nuit d’Alexandre Arcady
(2012); Les Lignes de Wellington de Raoul Ruiz (2012);
Un prince (presque) charmant de Philippe Lellouche
(2013); The Price of Desire de Mary McGuckian (2014).
Il joue aussi à la télévision dans Paris enquêtes criminelles.
Pour le théâtre Vincent Pérez a joué sous la direction
de Pierre Romans, Penthésilée de Heinrich von Kleist,
Catherine de Heilbronn de Heinrich von Kleist, Chroniques d’une fin d’après-midi, spectacle composé de
fragments d’œuvres d’Anton Tchekhov; Patrice Chéreau
dans Platonov d’Anton Tchekhov, Hamlet de William
Shakespeare ; Lucian Pintilie, Il faut passer par les nuages de François Billetdoux. Il joue et met en scène
Le temps qui passe de Karine Silla-Pérez.
En 1992, il fait ses débuts de réalisateur avec le court
-métrage L’Échange, nommé au Prix du jury du courtmétrage à Cannes. Il est revenu derrière la caméra
en 1999 pour réaliser Rien dire également cité à Cannes. En 2002, il réalise son premier long-métrage Peau
d’Ange dont il est coscénariste, puis réalise, en 2007,
Si j’étais toi.
Par ailleurs, Vincent Pérez est l’auteur du scénario de
la bande dessinée La Forêt, en collaboration avec Ti
burce Oger.
© Thierry Depagne
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https ://fr.wikipedia.org/wiki/Les_Liaisons_dangereuses
PISTES PÉDAGOGIQUES
DU ROMAN ÉPISTOLAIRE À LA PIÈCE DE THÉÂTRE
Considérant la pièce davantage comme une adaptation
que comme une réécriture, Christine Letailleur s’est
efforcée de respecter le texte originel et de s’adapter
à la vision de Laclos.
Son texte suit donc le mouvement de la fable dans un
souci de clarté et reprend fidèlement certains passages
et expressions du roman. Reste ensuite à confronter
l’adaptation à l’épreuve du jeu : certaines formules sont
ainsi modifiées, allégées pour apporter plus de fluidité et de naturel à l’interprétation. « J’aime ciseler le
texte au plateau », explique Christine Letailleur pour
évoquer cette perpétuelle remise en question du texte.
tation des Liaisons dangereuses conserve, peut ainsi
être apparenté au valet de comédie, personnage pittoresque par son parler populaire et sa spontanéité,
il est le confident de Valmont et l’aide dans ses entreprises. Il apparaît comme le Sganarelle de Dom Juan
qui aurait perdu ses scrupules et aurait cessé de voir
dans son maître « un vrai Sardanapale ».
• Les lettres du roman de Laclos fonctionnent parfois
comme des didascalies, donnant à voir le contexte
d’écriture. Par exemple, la célèbre lettre où Valmont
décrit à la présidente la situation où il est en lui écrivant, et où le lecteur sait grâce à la lettre précédente
qu’elle est écrite « du lit et presque d’entre les bras d’une
fille ». La lettre, dans la mise en scène, n’est d’ailleurs
pas évacuée : objet scénique, lue, déchirée, évoquée
elle apparaît comme le témoin du texte originel.
UN ROMAN FORTEMENT INFLUENCÉ PAR LE THÉÂTRE
OBSERVATION
• Laclos a lui-même adapté pour la scène un autre
roman épistolaire (adaptation sans succès du roman
de madame Riccoboni (1713-1792), Ernestine (1765) en
opéra comique), et il est l’auteur d’un texte de critique
littéraire sur le roman théâtral. Il est donc amateur
de théâtre et la dynamique du récit des liaisons dangereuses en garde la trace.
• La structure du roman rappelle celle du drame : le récit des agissements de ces deux libertins dont le but
est de causer la perte des personnes qui les entourent
fournit une structure particulièrement dramatique.
De nombreuses anecdotes et rebondissements émaillent l’intrigue.
Par ailleurs, la dernière partie du roman condense les
mécanismes du piège tragique comme une tragédie
resserre la crise au moment où, toutes les forces étant
posées, le dénouement n’a plus qu’à s’accomplir seul.
Ces forces sont ici celles de l’orgueil. Elles opposent
Valmont et Mme de Merteuil dans une lutte implacable pour affirmer la liberté de celle-ci.
• Les deux protagonistes Valmont et Merteuil, par leur
duplicité et leur habileté dans l’art de la comédie sont
souvent plus proches d’acteurs que de personnages
romanesques. Les masques qu’ils revêtent, l’art de la
manipulation dans lequel ils excellent, les rapprochent
tantôt de l’acteur, tantôt du metteur en scène : ils sont
l’illustration d’un monde où, comme au théâtre, les
faux-semblants sont légion.
• Certains personnages peuvent être rapprochés de
figures classiques du théâtre. Le chasseur que l’adap-
On pourra proposer aux élèves de confronter certaines
lettres du texte de Laclos à l’adaptation du texte de
Letailleur. On leur fera remarquer comment les récits
interposés deviennent dialogues, s’interroger sur le
choix ou de conserver ou d’abandonner tel fait ou
telle réplique.
LE RESPECT DU TEXTE DE LACLOS
ACTION !
Les élèves pourront penser et mettre en scène leur propre
adaptation de scènes clefs des Liaisons Dangereuses,
en transcrivant au préalable répliques et didascalies.
LES FEMMES DANS LES LIAISONS DANGEREUSES
« Je suis sûre que si j’avais le bon esprit de le quitter à
présent, il en serait au désespoir ; et rien ne m’amuse
comme un désespoir amoureux. Il m’appellerait perfide,
et ce mot de perfide m’a toujours fait plaisir ; c’est, après
celui de cruelle, le plus doux à l’oreille d’une femme. »
Choderlos de Laclos, Les Liaisons dangereuses
L’observation de la liste des personnages permet de
constater le nombre dominant de personnages féminins
(7 pour seulement 4 rôles masculins). C’est le point de
vue de la femme qui est privilégié par Christine Letailleur.
L’adaptation des Liaisons dangereuses permet de poursuivre le traitement des passions et désirs féminins
déjà amorcé dans Phèdre ou dans La Philosophie dans
le boudoir.
10
comme la représentation symbolique de la chute progressive du couple libertin incarné par Valmont et Merteuil.
Dans la mise en scène, le passage du temps est rendu sensible par les changements de tenues des personnages. Tous sont en costumes d’époque. Les coupes,
les matières et les couleurs illustrent également les caractères des personnages : Les couleurs pastel des tenues de la présidente contrastent ainsi avec les robes
plus flamboyantes de La marquise de Merteuil.
La critique de la condition féminine est déjà présente
dans l’œuvre de Laclos. De la jeune Cécile de Volanges à Madame de Rosemonde, les différents âges de
la femme sont incarnés et leurs difficultés sont pointées. Est critiquée en particulier l’éducation que reçoivent les femmes de l’aristocratie au couvent et qui
ne les prépare en rien à affronter le monde et ses hypocrisies. L’ingénue Cécile et la présidente Tourvel
sont les victimes désignées de cet enseignement qui
entretient les femmes dans l’ignorance du monde et
la négation de leur sensualité.
Laclos, un an après l’écriture des Liaison dangereuses,
rédige le Traité sur l’éducation des femmes dans lequel
il enjoint les femmes de s’insurger contre le statut
d’esclave que la société leur attribue. La marquise de
Merteuil est la figure centrale de la pièce, personnage « fascinant » selon Christine Letailleur. Baudelaire
voyait également en elle le personnage fort du roman
« Tartuffe femelle, tartuffe de mœurs, Tartuffe du XVIIIe
siècle. Toujours supérieure à Valmont, et elle le prouve ».
Ayant su se forger elle-même une éducation à la dissimulation, elle maîtrise les codes de la société et les
utilise à son profit.
LA MODE VESTIMENTAIRE DU XVIIIe SIÈCLE
À la fin du XVIIIe siècle, les hommes avaient les cheveux
relevés devant, en toupet, frisés sur le côté, longs derrière, serrés en catogan. Ils portaient une chemise,
un gilet à manches longues, un habit à la française
échancré sur le devant et souvent par-dessus, une
sorte de cape-manteau. Ils s’habillaient aussi d’une
culotte dite « à la bavaroise » arrêtée au genou.
Culotte et bas étaient serrés par des jarretières à boucles ; sous la culotte, ils portaient un caleçon de toile.
Ainsi, dans la scène du Verrou, l’homme est en chemise et en caleçon. Il a ôté culotte, souliers, et bas.
Les femmes portaient des nœuds bouffants autour du
cou et des rubans dans les cheveux. La robe, fendue
jusqu’à la taille, s’écartait pour laisser voir la jupe,
parfois de couleur différente.
Les pans de la robe pouvaient être repoussés, et grâce
à des fentes ménagées dans la jupe, enfoncés dans des
poches. Manches et jupons étaient fixés à un corps à
baleines (corset) très serré et lacé dans le dos. Sous
ce corps à baleines, les femmes portaient une longue
chemise, mais aucun sous-vêtement (C’est le sens d’un
tableau de Fragonard Les Hasards heureux de l’escarpolette, un amoureux découvre émerveillé ce qui se
cache sous les jupons de sa mie, perchée sur une balançoire). Des bas étaient maintenus au-dessus du
genou par une jarretière.
Dans Le Verrou, la femme a perdu ses rubans, elle est
décoiffée, les plis de sa robe sont sortis de leur poche
mais elle a encore tous ses vêtements sur elle 1.
OBSERVATION
On pourrait, pour évoquer la condition de la femme
dans la pièce et son évolution dans la littérature, proposer une comparaison entre le personnage de Cécile
et celui de Camille dans On ne badine pas avec l’amour
d’Alfred de Musset. Toutes deux sorties du couvent
en vue d’un mariage imminent, elles sont confrontées à leur ignorance et découvrent à leur dépens la
duplicité et les codes amoureux qu’elles ne comprennent pas. Si Cécile apparaît ingénue et idéaliste, Camille semble déjà désabusée. Victimes des tourments
de l’amour et des jeux de séduction, elles sont amenées
à manipuler à leur tour. Déçues ou trompées, elles retrouvent toutes deux le chemin du couvent à la fin de
la pièce.
ACTION !
ACTION !
On peut proposer aux élèves de créer un dialogue
théâtral mettant en scène la rencontre de Cécile et de
Camille et la confrontation de leurs points de vue sur
l’amour et le monde. La scène pourra ensuite être
jouée.
Les élèves pourront, en se référant aux tableaux de
Watteau ou de Fragonard, choisir les tenues qui, selon
eux, conviendraient le mieux aux rôles principaux,
en argumentant sur leurs choix. Les rôles féminins
(la naïve et sensuelle Cécile, la pure Tourvel, La Merteuil)
pourront faire l’objet d’une présentation particulière,
mettant en avant l’adéquation de leur tenue et de leur
caractère ou attitude.
UNE PIÈCE, 3 MOUVEMENTS, 3 TENUES
L’adaptation de Christine Letailleur est divisée en trois
parties : Été, automne, hiver.
Le changement des saisons correspond à l’avancée temporelle de l’intrigue mais peut également être analysé
Point exécuté à partir d'une transcription de l'émission
Palettes réalisée par Alain Jaubert et consacrée à l'analyse
du Verrou de Fragonard.
1
11
RESSOURCES PÉDAGOGIQUES
HISTOIRE DES ARTS : LE CINÉMA
et l’apparence. La question de la représentation se pose
dès le premier plan où le visage de Mme de Merteuil
de dos se reflète et nous apparaît dans le miroir où
elle se contemple. Entre cette représentation faussée
du personnage et l’épure du plan final où, face caméra
et plein cadre, Mme de Merteuil se montre sans fard,
c’est la quête de vérité du film qui apparait. Le film passe
ainsi du masque – emblème du mensonge et de la
dissimulation qui obsède l’œuvre – au visage enfin
révélé de cette femme irrémédiablement bannie du
monde de faux-semblants dont elle fut souveraine.
Rapprochement avec l’adaptation filmique
Les Liaisons dangereuses de Stephen Frears (1988),
avec John Malkovitch dans le rôle de Valmont
et Glenn Close dans le rôle de la Marquise de Merteuil.
LES LIAISONS DANGEREUSES OU LE THÉÂTRE DES APPARENCES
La séquence d’ouverture
La mise en scène de la séquence d’ouverture repose sur
une grande théâtralité. L’intention d’une telle mise en
scène est tout d’abord de rejoindre l’esthétique théâtrale du roman de Choderlos de Laclos qui utilise le
théâtre comme référence et métaphore récurrentes.
La mise en scène théâtrale qui orchestre la toilette et
l’habillage de Mme de Merteuil ainsi que le lever et
la préparation de Valmont, dresse le portrait des deux
personnages principaux. La séquence les fait passer
de leur sphère intime où régnaient précédemment la
passion et le libertinage, à l’espace social qui ne doit
être que mesure et dissimulation. Le ballet parfait des
servantes et des valets qui évoluent autour d’eux vient
pondérer les excès de la nuit tandis que la partition
baroque qui rythme les plans leur confère une tonalité pleine de mesure. La passivité, l’air supérieur et
le faste qui entourent Mme de Merteuil et Valmont révèlent leur rang élevé mais leur immobilité rappelle
aussi celle des grands prédateurs dont l’économie de
mouvement va de pair avec une excessive violence.
Quand, à la fin de la séquence, Mme de Merteuil et
Valmont, tels deux comédiens prêts à entrer en scène,
s’avancent au devant du plan pour prendre la pose,
leur gestuelle traduit alors parfaitement leur duplicité et annonce leurs manigances. Ils incarnent les
deux faces d’un même prédateur : l’une se dresse, immobile, prête à bondir à la face du monde qui, injustement, l’a faite femme tandis que l’autre opère une
sortie de champ selon un mouvement latéral glissant
qui révèle son caractère nuisible. Cette puissance destructrice qu’ils retiennent encore atteint son point d’orgue dans le regard-caméra dont ils gratifient tous deux
le spectateur. Cette remise en question du pacte de la
fiction et de la représentation exprime le pouvoir sans
limite qu’ils useront sur les autres.
ACTION !
On pourra faire lire aux élèves la scène finale du revers
public de La Merteuil dans la version de Christine
Letailleur.
On leur montrera ensuite deux scènes de l’adaptation
filmique de Stephen Frears : la scène d’ouverture (qui
montre Valmont et Merteuil préparant leur entrée dans
le monde et dans le film) et la scène conclusive (qui
montre Merteuil à l’opéra jusqu’à la fin). On leur demandera de montrer d’une part la théâtralité de
l’adaptation filmique. D’autre part d’étudier le jeu de
masques proposé par Stephen Frears.
HISTOIRE DES ARTS : UN MOUVEMENT LITTÉRAIRE, LE LIBERTINAGE
« Intus ut libet, foris moris est » (« À l’intérieur, comme
il te plaît, à l’extérieur, selon la coutume »).
Étymologiquement, le libertus ou le libertinus est à
Rome un affranchi, un ancien esclave qui a reçu sa
liberté.
Le libertinage apparaît aux XVIe et XVIIe siècles et revêt
un sens négatif : « libertin » se met à désigner, dans
le contexte des guerres de religion, ceux qui s’éloignent
de la vraie religion et adoptent une attitude générale
de distance par rapport au dogme. La stratégie de
l’église romaine pour mieux confondre les libertins
consiste alors à confondre l’hétérodoxie philosophique et la licence sexuelle.
Les dictionnaires de l’âge classique assimilent donc
le mot « libertin » à l’impie et au débauché, même s’ils
concèdent un emploi anodin et mondain du mot :
« un honnête libertin » est celui qui s’accorde plaisirs
et divertissements. Mme de Sévigné elle-même peut
se dire libertine quand elle improvise ses lettres et
La séquence finale
Le glissement de la séquence d’ouverture à la séquence
de clôture engage par ailleurs une réflexion sur l’image
12
préfère la spontanéité à toute forme de règle.
Au XVIIe Théophile de Viau, le chef de file des libertins parisiens est condamné à « être brûlé vif comme
aussi ses livres brûlés ». Les libertins sont alors poursuivis comme sorciers et condamnés au feu.
À cette époque, on distingue le libertinage de mœurs
qui concerne surtout de grands aristocrates, que leur
statut social met au-dessus des lois et qui blasphèment, ne respectent pas le carême, affectionnent les
parties de débauche. Le Dom Juan de Molière symbolise ce libertinage de mœurs.
Existe aussi un libertinage érudit qui constitue, lui,
un mouvement de pensée et une attitude fondée sur
la sociabilité intellectuelle et l’émancipation des dogmes. Ce libertinage montre la place de la superstition
et l’influence du milieu dans les croyances de tous
les hommes ; il condamne donc toute forme d’intolérance et de fanatisme et prône la nécessité de l’esprit critique.
Le libertinage érudit s’achève dans la naissance de la
philosophie des Lumières au XVIIIe siècle, qui œuvre
au grand jour pour la diffusion de l’instruction, de l’esprit critique et fait le pari de l’éducation et du progrès.
Le libertinage de mœurs connaît en revanche un véritable essor mais le terme désigne désormais l’obsession de la séduction ou l’esthétisation de l’amour.
Le libertinage de mœurs évolue vers plus de subtilité
qu’au siècle précédent : les réalités de la sexualité sont
à la fois omniprésentes et suggérées à travers la gaze
d’un style allusif. Cette esthétique de l’amour culmine
dans Les Liaisons dangereuses.
OBSERVATION
On proposera aux élèves de retracer l’évolution du
libertinage par la lecture de quelques textes significatifs : un sonnet de Nicolas Vauquelin (1606), un
extrait de l’acte 1 scène 2 de Dom Juan de Molière,
et un extrait de La Philosophie dans le boudoir de Sade.
HISTOIRE DES ARTS : UN PEINTRE, FRAGONARD (1732-1806)
Les Hasards heureux de l’escarpolette, 1767.
Les Curieuses, vers 1775-1780.
Le Verrou, 1776.
me juchée sur une balançoire offre à son amant une
vue imprenable. Le commanditaire, baron de Saint
Julien, aurait demandé que sa maîtresse soit ainsi
représentée, poussée par un évêque, ce qui accentue
le caractère particulièrement leste de la scène.
FRAGONARD, LE REFLET D’UN SIÈCLE
Jean-Honoré Nicolas Fragonard (né le 5 avril 1732 à
Grasse et mort le 22 août 1806 à Paris) est un des
principaux peintres français du XVIIIe siècle. Il fut
peintre d’histoires, de genre et de paysages.
Les tableaux de Fragonard sont rarement situés dans
un contexte historique précis. Ils font cependant écho
aux mœurs plutôt libres du siècle. Le peintre, contemporain de Buffon ou des encyclopédistes, raconte
l’histoire naturelle de l’amour ou fait pénétrer le spectateur au sein des alcôves (Le Feu aux poudres, La
Chemise enlevée, Le Verre d’eau, Les Petites curieuses).
Les tableaux de Fragonard illustrent les mœurs des
élégants de son temps, parfois de manière provocante.
Dans Les heureux hasards de l’escarpolette, la jeune fem-
OBSERVATION
On rapprochera Le Verrou de la scène du viol de Cécile
par Valmont. Dans Le Verrou, la scène oscille entre badinage amoureux et scène de viol. Le tableau est riche
en symboles : la pomme posée sur la table, la cruche
à terre et les fleurs éparses sont autant de symboles
de la vertu mise à mal. Le titre oriente également le
spectateur puisque l’expression « faire sauter le verrou » est une expression imagée désignant le viol.
13
EXTRAIT DE L’ADAPTATION DES LIAISONS
DANGEREUSES PAR CHRISTINE LETAILLEUR
Cette séquence correspond
aux lettres 2, 4, 5 et 6
de la première partie du texte de Laclos.
bien du plaisir, une fois que vous aurez formé la
petite, à ce qu’il devienne la fable et la risée du tout
Paris ! Au reste, l’héroïne de ce nouveau roman mérite tous vos soins : Mademoiselle de Volanges est vraiment jolie ; cela n’a que quinze ans ; un vrai bouton de
rose ! À la vérité, gauche, comme cela n’est pas permis et nullement maniérée mais, vous autres hommes, ne craignez point cela ! J’ajoute qu’un certain
regard langoureux promet déjà beaucoup. Bref, je vous
la recommande, vous n’avez plus qu’à me remercier
et m’obéir !
VALMONT : Marquise, vos ordres sont charmants, votre
façon de les donner est plus aimable encore : vous
feriez chérir le despotisme et ce n’est pas la première
fois que je regrette de ne plus être votre esclave ! Hélas,
je me vois forcé de vous désobéir ! Car enfin, que me
proposez-vous ? De séduire une fille qui n’a rien vu,
qui ne connaît rien ; et qui, pour ainsi dire, me sera
livrée sans défense : quelle platitude ! Vingt autres
comme moi peuvent y réussir ! Et, en toute franchise,
de plus grands projets m’appellent ! Vous connaissez
la Présidente de Tourvel ; sa dévotion, son amour conjugal, ses principes austères. Voilà, ce que j’attaque !
Voilà, un ennemi digne de moi ! « Et si de l’obtenir, je
n’emporte le prix, J’aurai du moins l’honneur de l’avoir
entrepris ! » On peut citer de mauvais vers quand ils
sont d’un grand poète comme Jean de la Fontaine !
MERTEUIL : Savez-vous, Vicomte, que vous êtes d’une
insolence rare et que je pourrais me fâcher, vraiment,
mais je crois que vous avez tout à fait perdu la tête.
Car enfin, qu’est-ce donc que cette femme ? Que lui
trouvez-vous à cette Madame de Tourvel ? Des traits
réguliers, si vous voulez, mais rien de plus ! Elle n’a
aucun attrait, nulle expression : passablement faite,
sans grâces et toujours mise à faire rire avec des paquets de fichus sur la gorge et le corset qui lui
remonte jusqu’au menton ! Souvenez-vous du jour
où la prude faisait la quête pour les indigents sur le
parvis de l’église St-Roch, comme nous nous amusions de ce spectacle ridicule et affligeant. Tenez, je
la vois encore, donnant la main à son grand échalas
de mari, prête à tomber à chaque pas, avec son énorme
panier sur la tête et rougissant à chaque révérence.
Allons, Vicomte, reprenez vos esprits, je vous en conjure, je vous promets le secret. Sérieusement, vous
m’inquiétez.
VALMONT : Rassurez-vous, Marquise, je n’ai point perdu la tête ! Je veux cette femme ! Il me la faut et je
l’aurai !
SÉQUENCE 3
VALMONT, arrive
d’un pas alerte chez la Marquise, puis
s’agenouille : Eh bien, Marquise, me voilà ! Tel un esclave, tel le grand Hannibal, aux genoux de sa maîtresse ! Me voilà à vos pieds, j’attends vos ordres.
MERTEUIL : Mon cher Vicomte, vous abusez de mes
bontés même depuis que vous n’en n’usez plus !
VALMONT : Il ne tient qu’à vous, très chère…
MERTEUIL : Relevez-vous, je vous en prie, vous jouerez
les preux chevaliers une autrefois, le temps presse !
J’ai une affaire des plus urgentes à régler et je veux
que vous soyez le héros de cette aventure ! Madame
de Volanges marie sa fille qui vient tout juste de sortir
du couvent. C’est encore un secret, elle me l’a confié
hier soir. Et savez-vous quel gendre elle a choisi ?
VALMONT : Ma foi, je…
MERTEUIL : Le Comte de Gercourt ! Qui m’aurait dit que
je deviendrais, un jour, la cousine de cet imbécile de
Gercourt ! Je suis dans une fureur ! Eh bien ! Ne devinez-vous donc pas encore !
VALMONT : Ma foi, je…
MERTEUIL : Oh, esprit lourd ! Monstre que vous êtes ! Lui
avez-vous pardonné l’affront qu’il nous fit, à vous et à
moi ! Moi, je n’ai pas oublié qu’il m’a quittée pour cette
espèce de femme insipide, qui d’ailleurs à l’époque,
permettez-moi de vous le rappeler, était votre maîtresse et que cette femme vous laissa choir pour cet
imbécile de Gercourt !
VALMONT : Disons que c’est de l’histoire ancienne ! Et
puis, ce Gercourt m’a rendu un immense service en me
débarrassant de cette femme. C’est d’ailleurs grâce à
cela, Marquise, que nous nous sommes rencontrés et
tant aimés !
MERTEUIL : Fi, Valmont ! Cessez de plaisanter et écoutez-moi ! Il me faut une vengeance ! Vous connaissez
Gercourt : ses ridicules préventions pour les éducations cloîtrées et son préjugé plus ridicule encore, en
la faveur de la retenue des blondes ! Je parierais, et ce
malgré les soixante mille livres de rente de Mademoiselle de Volanges, qu’il n’aurait jamais fait ce mariage,
si la petite eût été brune et si elle n’eût pas été au couvent ! Prouvons-lui qu’il n’est qu’un sot ! Gercourt est
un orgueilleux ! Il se vantera et nous, nous prendrons
14
MERTEUIL : Mais quel rival avez-vous à combattre ? Pas
VALMONT : Oserai-je vous le dire ? Je croyais mon cœur
même un amant, tout juste un mari ! Ne vous sentezvous donc pas humilié à ce seul mot ? Quelle honte
si vous échouez et combien peu de gloire dans le succès ! Si vous aviez connu cette femme un peu plus tôt,
sans doute, en auriez-vous pu faire quelque chose ;
mais voilà, cela a déjà vingt-deux ans et il y en a près
de deux qu’elle est mariée ! Croyez-moi, mon cher
Vicomte, quand une femme s’est encroûtée à ce point,
il faut l’abandonner à son sort; ce ne sera jamais qu’une
espèce de…
VALMONT : Au nom de l’amitié que j’ai pour vous, Marquise, attendez que j’aie eu cette femme pour en médire. De quels traits osez-vous peindre Madame de
Tourvel ! Madame de Tourvel n’a guère besoin d’apparat et d’illusion : pour être adorable, il lui suffit d’être
elle-même. Vous lui reprochez de se mettre mal, je le
crois bien, toute parure lui nuit ; tout ce qui la cache,
la dépare et c’est dans l’abandon du négligé qu’elle est
vraiment ravissante. Sa figure, dites-vous, n’a nulle
expression. Et que voulez-vous qu’elle exprime quand
rien ne parle à son cœur? En vérité, elle n’a point comme
nos femmes coquettes, ce regard menteur qui séduit
et trompe toujours. Elle ne sait pas couvrir le vide
d’une phrase par un sourire étudié et, quoiqu’elle ait
les plus belles dents du monde, elle ne rit que de ce
qui l’amuse !
MERTEUIL : Les plus belles dents du monde ! Allonsbon ! Vicomte !
VALMONT : Certes, elle est prude et dévote, et alors !
C’est pour cela que vous la jugez froide et inanimée ?
Détrompez-vous, Madame de Tourvel est d’une grande
sensibilité, en voici une preuve éclatante. L’autre jour,
j’ai dirigé notre promenade, j’avais tout prévu, tout
étudié pour que nous ayons un large fossé à franchir
car, comme vous le savez, les prudes craignent de sauter les fossés. Lorsque nous sommes arrivés à l’obstacle, j’ai, tout d’abord, porté ma vieille tante, ce qui
fit beaucoup rire Madame de Tourvel. Ensuite, j’ai
proposé mes bras à ma dévote qui n’eut d’autre choix
que de les accepter. Dès que je me fus emparé d’elle,
je fis semblant de trébucher pour l’effrayer, elle s’accrocha à mon cou. Je profitai alors du moment pour
la serrer plus fortement, je la pressai contre ma poitrine, je pressai son sein contre le mien, je sentis son
cœur battre, et vis une aimable rougeur colorer son
visage. Ce modeste embarras m’apprit que son cœur
avait palpité non pas de crainte mais d’amour !
MERTEUIL : Et moi, je crois plutôt que son cœur a palpité non pas d’amour mais de crainte, de la crainte
de dieu ou du diable ou de je ne sais quelle chimère !
flétri, je me plaignais d’une vieillesse prématurée.
Madame de Tourvel m’a rendu les charmantes illusions de la jeunesse. Auprès d’elle, je n’ai pas besoin
de jouir pour être heureux. Et pour que je sois vraiment heureux, il faut qu’elle se donne !
MERTEUIL : Eh bien, elle se donnera comme toutes les
autres avec cette différence que ce sera de mauvaise
grâce ! Et je vous en dis plus : n’en espérez aucun plaisir, les prudes ne vous offrent que des demi-jouissances!
Cet abandon de soi-même, ce délire de la volupté,
tous ces biens et ces excès de l’amour ne sont pas
connus de ce genre de femme. Votre prude est dévote
et de cette dévotion de bonne femme qui la condamne à une éternelle enfance !
VALMONT : Voyez-vous, ma chère Marquise, au moment
où je vous parle, je me sens porté par un excès de reconnaissance pour les femmes faciles, ce qui m’amène,
tout naturellement, à vos pieds : je m’y prosterne pour
obtenir votre pardon de ne point pouvoir satisfaire
votre vengeance. Adieu donc. Il emprunte les escaliers pour sortir.
MERTEUIL, lui crie : Je crains que cette femme ne vous
fasse perdre ce qu’il y a de plus précieux en ce monde :
votre réputation, Vicomte, votre réputation !
VALMONT, même jeu : Notre métier, Marquise, n’est-il
pas de conquérir le monde !
MERTEUIL, même jeu : Conquérir le monde, oui ! S’enticher d’une prude, non !
VALMONT, au balcon, avant de sortir : Croyez-moi, j’aurai cette femme ; je l’enlèverai au mari qui la profane : j’oserai la ravir au dieu même qu’elle adore !
Qu’elle me dise : « Je t’adore » et je serai vraiment le
dieu qu’elle aura préféré !
Il disparaît. Une sonnerie retentit plusieurs fois. Merteuil
reconnaît qu’il s’agit là du Chevalier Belleroche.
MERTEUIL : Ah ! Le Chevalier Belleroche, il ne manquait plus que lui, à cette heure !
La sonnerie retentit à nouveau avec insistance.
VALMONT, apparaissant alors à l’une des fenêtres : Ce
rouquin qui est à votre porte a l’air bien pressé ! Seraitce un de vos amants transis ?
MERTEUIL : Je suis dans une telle humeur que je crois
que je vais, sur-le-champ, rompre avec cet idiot de
Belleroche !
VALMONT, toujours à la fenêtre : À la bonne heure ! Vous
me ferez le récit de cette rupture, vous savez que je
raffole de vos histoires d’amants désespérés !
Valmont disparaît. La sonnerie retentit à nouveau.
15
CORPUS DE TEXTES SUR LE LIBERTINAGE
ne puis refuser mon cœur à tout ce que je vois d’aimable ; et dès qu’un beau visage me le demande, si j’en
avais dix mille, je les donnerais tous. Les inclinations
naissantes, après tout, ont des charmes inexplicables,
et tout le plaisir de l’amour est dans le changement.
On goûte une douceur extrême à réduire, par cent
hommages, le cœur d’une jeune beauté, à voir de jour
en jour les petits progrès qu’on y fait, à combattre par
des transports, par des larmes et des soupirs, l’innocente pudeur d’une âme qui a peine à rendre les armes,
à forcer pied à pied toutes les petites résistances qu’elle
nous oppose, à vaincre les scrupules dont elle se fait un
honneur et la mener doucement où nous avons envie
de la faire venir. Mais lorsqu’on en est maître une
fois, il n’y a plus rien à dire ni rien à souhaiter ; tout
le beau de la passion est fini, et nous nous endormons dans la tranquilité d’un tel amour, si quelque
objet nouveau ne vient réveiller nos désirs, et présenter à notre cœur les charmes attrayants d’une conquête
à faire. Enfin il n’est rien de si doux que de triompher
de la résistance d’une belle personne, et j’ai sur ce
sujet l’ambition des conquérants, qui volent perpétuellement de victoire en victoire, et ne peuvent se
résoudre à borner leurs souhaits. Il n’est rien qui puisse
arrêter l’impétuosité de mes désirs : je me sens un
cœur à aimer toute la terre ; et comme Alexandre, je
souhaiterais qu’il y eût d’autres mondes, pour y pouvoir étendre mes conquêtes amoureuses.
NICOLAS VAUQUELIN DES YVETEAUX (1567-1649)
AVOIR PEU DE PARENTS, MOINS DE TRAIN QUE DE RENTE
Nicolas Vauquelin des Yvetaux fut un proche du roi
Henri IV. Disgracié sous la régence, il se retira pour
vivre en libertin une vie pleine de fantaisie et de plaisirs,
affranchi des préoccupations sociales et religieuses.
Avoir peu de parents, moins de train que de rente,
Et chercher en tout temps l’honnête volupté,
Contenter ses désirs, maintenir sa santé,
Et l’âme de procès et de vices exempte ;
À rien d’ambitieux ne mettre son attente,
Voir ceux de sa maison en quelque autorité,
Mais sans besoin d’appui garder sa liberté,
De peur de s’engager à rien qui mécontente ;
Les jardins, les tableaux, la musique, les vers,
Une table fort libre et de peu de couverts,
Avoir bien plus d’amour pour soi que pour sa dame,
Être estimé du Prince, et le voir rarement,
Beaucoup d’honneur sans peine et peu d’enfants
sans femme,
Font attendre à Paris la mort fort doucement.
MOLIÈRE, DOM JUAN, I, 2 (1682)
Dom Juan, « grand seigneur méchant homme » devise
avec son valet Sganarelle sur le bien fondé de sa position libertine.
SADE, LA PHILOSOPHIE DANS LE BOUDOIR,
TROISIÈME DIALOGUE (1795)
Quoi ? tu veux qu’on se lie à demeurer au
premier objet qui nous prend, qu’on renonce au monde
pour lui, et qu’on n’ait plus d’yeux pour personne ?
La belle chose de vouloir se piquer d’un faux honneur
d’être fidèle, de s’ensevelir pour toujours dans une
passion, et d’être mort dès sa jeunesse à toutes les
autres beautés qui nous peuvent frapper les yeux !
Non, non : la constance n’est bonne que pour des
ridicules ; toutes les belles ont droit de nous charmer, et l’avantage d’être rencontrée la première ne
doit point dérober aux autres les justes prétentions
qu’elles ont toutes sur nos cœurs. Pour moi, la
beauté me ravit partout où je la trouve, et je cède
facilement à cette douce violence dont elle nous
entraîne. J’ai beau être engagé, l’amour que j’ai pour
une belle n’engage point mon âme à faire injustice
aux autres ; je conserve des yeux pour voir le mérite
de toutes, et rends à chacune les hommages et les
tributs où la nature nous oblige. Quoi qu’il en soit, je
DOM JUAN :
Ce texte se rattache à une double tradition : celle des
conversations de courtisanes et celle du dialogue
philosophique. Sade y raconte l’éducation de la jeune
Eugénie par une amie, le frère de celle-ci et Dolmancé, libertin endurci dans ses vices.
À quel titre ménagerions-nous donc un individu qui
ne nous touche en rien ? À quel titre lui éviterionsnous une douleur qui ne nous coûtera jamais une
larme, quand il est certain que de cette douleur va
naître un très grand plaisir pour nous ? Avons-nous
jamais éprouvé une seule impulsion de la nature qui
nous conseille de préférer les autres à nous, et chacun n’est-il pas pour soi dans le monde ?
Vous nous parlez d’une voix chimérique de cette
nature, qui nous dit de ne pas faire aux autres ce que
nous ne voudrions pas qu’il nous fût fait ; mais cet
16
© Thierry Depagne
absurde conseil ne nous est jamais venu que des hommes, et d’homme faibles. L’homme puissant ne s’avisera jamais de parler un tel langage. Ce furent les
premiers chrétiens qui, journellement persécutés pour
leur imbécile système, criaient à qui voulait l’entendre : « Ne nous brûlez pas, ne nous écorchez pas ! La
nature dit qu’il ne faut pas faire aux autres ce que nous
ne voudrions pas qu’il nous fût fait. »
Imbéciles ! Comment la nature, qui nous conseille
toujours de nous délecter, qui n’imprime jamais en
nous d’autres mouvements, d’autres aspirations, pourrait-elle, le moment d’après, par une inconséquence
sans exemple, nous assurer qu’il ne faut pourtant pas
nous aviser de nous délecter si cela peut faire de la
peine aux autres ?
Ah ! Croyons-le, le croyons-le, Eugénie, la nature, notre
mère à tous, ne nous parle jamais que de nous : rien
n’est égoïste comme sa voix, et ce que nous y reconnaissons de plus clair est l’immuable et saint conseil
qu’elle nous donne de nous délecter, n’importe aux
dépens de qui. Mais les autres, vous dit-on à cela,
peuvent se venger… À la bonne heure, le plus fort
seul aura raison.
Eh bien, voilà l’état primitif de guerre et de destruction perpétuelle pour lequel sa main nous créa, et dans
lequel seul il lui est avantageux que nous soyons.
dégradées de plus en plus par votre longue habitude
de l’esclavage, vous en avez préféré les vices avilissants, mais commodes, aux vertus plus pénibles d’un
être libre et respectable. Si ce tableau fidèlement tracé
vous laisse de sang-froid, si vous pouvez le considérer
sans émotion, retournez à vos occupations futiles. Le
mal est sans remède, les vices se sont changés en
mœurs.
Mais si au récit de vos malheurs et de vos pertes, vous
rougissez de honte et de colère, si des larmes d’indignation s’échappent de vos yeux, si vous brûlez du
noble désir de ressaisir vos avantages, de rentrer dans
la plénitude de votre être, ne vous laissez plus abuser par de trompeuses promesses, n’attendez point les
secours des hommes auteurs de vos maux : ils n’ont
ni la volonté, ni la puissance de les finir, et comment
pourraient-ils vouloir former des femmes devant lesquelles ils seraient forcés de rougir ? Apprenez qu’on
ne sort de l’esclavage que par une grande révolution.
Cette révolution est-elle possible ? C’est à vous seules
à le dire puisqu’elle dépend de votre courage. Est-elle
vraisemblable ? Je me tais sur cette question ; mais
jusqu’à ce qu’elle soit arrivée, et tant que les hommes
régleront votre sort, je serai autorisé à dire, et il me
sera facile de prouver qu’il n’est aucun moyen de perfectionner l’éducation des femmes. Partout où il y a
esclavage, il ne peut y avoir éducation ; dans toute
société, les femmes sont esclaves ; donc la femme
sociale n’est pas susceptible d’éducation. Si les principes de ce syllogisme sont prouvés, on ne pourra
nier la conséquence. Or, que partout où il y a esclavage il ne puisse y avoir éducation, c’est une suite
naturelle de la définition de ce mot ; c’est le propre
de l’éducation de développer les facultés, le propre
de l’esclavage est de les étouffer ; c’est le propre de
l’éducation de diriger les facultés développées vers
l’utilité sociale, le propre de l’esclavage est de rendre
l’esclave ennemi de la société.
PIERRE-AMBROISE-FRANÇOIS CHODERLOS DE LACLOS,
TRAITÉ SUR L’ÉDUCATION DES FEMMES (1783)
Ô femmes, approchez et venez m’entendre ! Que votre
curiosité dirigée une fois sur des objets utiles, contemple les avantages que vous avait donnés la nature
et que la société vous a ravis.
Venez apprendre comment, nées compagnes de l’homme,
vous êtes devenues son esclave ; comment, tombées
dans cet état abject, vous êtes parvenues à vous y plaire,
à la regarder comme votre état naturel; comment enfin,
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ÉVOLUTION DU PERSONNAGE
DE CÉCILE DE VOLANGES
EXTRAITS DE L’ADAPTATION DES LIAISONS DANGEREUSES
PAR CHRISTINE LETAILLEUR
Scène d’ouverture
Partie 1
Séquence 1
sacrément cruchonne ! » Crois-moi, quand je serai
mariée, je ne me servirai plus de cette cuisinière-là ni
de ce cordonnier-là ! (Une sonnerie retentit.) Ah, mon
Dieu ! Il est près de six heures, il faut que l’on m’habille ! (En sortant, elle appelle sa femme de chambre.)
Joséphine ! Allez donc remettre cette lettre au couvent pour Sophie Carnay ! Joséphine ! Joséphine !
Tôt le matin.
CÉCILE, en chemise de nuit, une lettre à la main : Saistu, ma chère Sophie, que depuis ma sortie du couvent, maman me traite comme une vraie demoiselle !
J’ai un cabinet, un très joli secrétaire dont on m’a
remis la clef et, enfin, j’ai une femme de chambre, à
moi toute seule ! Chaque jour, je me dois de rejoindre maman pour les repas ; le reste du temps, je fais
de la harpe, quelques vocalises et je lis comme au
couvent, si ce n’est qu’ici, il n’y a pas d’horrible soeur
supérieure pour me gronder ! Enfin, je suis en paix !
Figure-toi, que l’autre jour, un carrosse s’est arrêté
devant la maison. Un Monsieur, tout de noir vêtu, en
sortit et vînt toquer à la porte. J’ai, alors, demandé à
ma femme de chambre qui était ce Monsieur, elle me
répondit, que ce Monsieur était Monsieur le C. !
Monsieur le C., ai-je dit. Oui, Monsieur le C., Cécile,
Monsieur le C., insista-telle, tout en prenant un de
ces airs qui me fit rougir jusqu’aux oreilles ! Ah !
Mon Dieu, ai-je pensé, voici celui à qui je suis promise ! Le cœur battant, je me suis précipitée dans le
salon pour aller saluer ce Monsieur le C., et lui de
dire à maman : « C’est que la Demoiselle a l’air bien
effarouchée ! », et de me dire à moi : « Mademoiselle,
s’il vous plaît, donnez-moi votre pied ! » À ces mots,
j’ai cru m’évanouir ; je me suis jetée dans le fauteuil
tant j’avais honte. À peine, étais-je assise, qu’il se mit
à genoux et me redemanda mon pied ! J’étais si affolée que j’ai crié de toutes mes forces, comme un tonnerre, ameutant ainsi toute la maison ! C’est alors que
maman me dit : « Allons, mon enfant, donnez donc
votre pied à Monsieur ! » Oh, ma Sophie, j’ai honte car
sais-tu qui était ce Monsieur le C. ? Ce Monsieur le
C. n’était point celui que je croyais qu’il devait être :
ce Monsieur le C. était tout bonnement Monsieur le
cordonnier ! Au souper, j’ai entendu la cuisinière dire
à la femme de chambre, « Dame, c’est que la petite est
Partie 3
Séquence 4
Une nuit. Cécile en chemise de nuit. Valmont débraillé.
CÉCILE, tenant un chandelier dans une main et, de l’autre, tirant Valmont qui traîne les pieds : Allons,
Monsieur, allons ! Venez !
VALMONT : Ah, Mademoiselle, je suis, comme dirait
mon chasseur, sur les rotules !
CÉCILE : Allons à l’étage ! Je veux me dévergonder ! Je
veux me dévergonder !
VALMONT : J’étais loin de m’imaginer que la demoiselle avait un tel tempérament ! Bientôt l’élève dépassera le maître !
CÉCILE, l’entraînant toujours : Je veux connaître tous les
dévergondages de votre catéchisme afin de les montrer, le jour de mes noces, à Monsieur de Gercourt !
Je lui dirai, comme selon vos mots : « Mon époux,
regardez, je ne suis pus celle que vous croyez ! Je suis
libertine, débauchée et corrompue à tous les vices ! »
VALMONT : Ah sacre dieu, de tels propos me revigorent !
Ce n’est pas à l’étage mais c’est au grenier qu’il faut
aller !
18
UN « TÉMOIGNAGE » DE LA VIE AU COUVENT
ALFRED DE MUSSET,
On ne badine pas avec l’amour,
acte II scène V (1834)
Camille a donné rendez-vous à Perdican devant la
petite fontaine où ils ont passé leur enfance et veut
lui prouver qu’elle fait bien d’aller au couvent.
© Brigitte Enguerand
CAMILLE : Savez-vous ce que c’est que les cloîtres,
Perdican ? Vous êtes-vous jamais assis un jour entier
sur le banc d’un monastère de femmes ?
PERDICAN : Oui ; je m’y suis assis.
CAMILLE : J’ai pour amie une sœur qui n’a que trente
ans, et qui a eu cinq cent mille livres de revenu à
l’âge de quinze ans. C’est la plus belle et la plus noble
créature qui ait marché sur terre. Elle était pairesse
du parlement, et avait pour mari un des hommes les
plus distingués de France. Aucune des nobles facultés humaines n’était restée sans culture en elle ; et,
comme un arbrisseau d’une sève choisie, tous ses bourgeons avaient donné des ramures. Jamais l’amour et
le bonheur ne poseront leur couronne fleurie sur un
front plus beau ; son mari l’a trompée ; elle a aimé un
autre homme et elle se meurt de désespoir.
PERDICAN : Cela est possible.
CAMILLE : Nous habitons la même cellule, et j’ai passé
des nuits entières à parler de ses malheurs ; ils sont
presque devenus les miens ; cela est singulier, n’est-ce
pas ? Je ne sais trop comment cela se fait. Quand elle
me parlait de son mariage, quand elle me peignait
d’abord l’ivresse des premiers jours, puis la tranquillité des autres, et comme enfin tout s’était envolé ;
comme elle était assise le soir au coin du feu, et lui auprès de la fenêtre, sans se dire un seul mot ; comme
leur amour avait langui, et comme tous les efforts pour
se rapprocher n’aboutissaient qu’à des querelles ; comme une figure étrangère est venue peu à peu se placer
entre eux et se glisser dans leurs souffrances, c’était
moi que je voyais agir tandis qu’elle parlait. Quand
elle disait : « Là, j’ai été heureuse », mon cœur bondissait ; et quand elle ajoutait : « Là, j’ai pleuré », mes
larmes coulaient. Mais figurez-vous quelque chose
de plus singulier encore ; j’avais fini par me créer une
vie imaginaire ; cela a duré quatre ans ; il est inutile
de vous dire par combien de réflexions, de retours
sur moi-même, tout cela est venu. Ce que je voulais
vous raconter comme une curiosité, c’est que tous les
récits de Louise, toutes les fictions de mes rêves portaient votre ressemblance.
19
RENCONTRE
DIMANCHE 6 MARS I THÉÂTRE DE LA VILLE
à l’issue de la représentation.
« UN DIMANCHE POUR UNE RENCONTRE »
En présence de l’équipe artistique.
TOURNÉE 2016
© Brigitte Enguerand
DU 6 AU 16 JANVIER
Théâtre national de Strasbourg
DU 20 AU 22 JANVIER
Théâtre de Sète
DU 27 AU 29 JANVIER
les Quinconces, Le Mans
DU 11 AU 13 FÉVRIER
Théâtre de Saint-Quentin-en-Yvelines
17 AU 19 FÉVRIER
l’Apostrophe, Cergy-Pontoise
LES 24 ET 25 FÉVRIER
Emilia Romagna Teatro Fondazione, Modène (Italie)
DU 23 AU 25 MARS
Théâtre national de Nice
DU 29 AU 31 MARS
Quimper, Théâtre de Cornouaille
PRESSE
http://t-n-b.fr/upload_tnb/MES/RDPLIAISONS.pdf
À LIRE
• Les Liaisons dangereuses, Choderlos de Laclos, adaptation de Christine Letailleur (Solitaires intempestifs)
• Les Liaisons dangereuses ou la vertu des libertins, Roger Vailland (Grasset)
• Laclos ou le paradoxe, René Pomeau (Fayard)
• Du boudoir à la révolution : Laclos et les liaisons dangereuses dans leur siècle, Biancamaria Fontana (Agone éditeur)
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