Théorie évolutionniste et assurance A. Bendiabdellah Professeur en

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A. Bendiabdellah
Professeur en sciences économiques
A. Kerzabi
Maître de conférences en sciences économiques
Faculté des sciences économiques et de gestion
Université de Tlemcen
Introduction
En note de présentation du colloque, les organisateurs soutiennent que « la
pérennité des affaires et le développement de la profession (assureur), sont la résultante des
enseignement du marché que l’on obtient soit en laissant faire la main invisible soit en tirant
partie du savoir capitalisé »
1
. En effet, l’incertitude conséquence d’une vision limitée de
l’individu fait que les anciens schémas liés aux mécanismes du marché basés sur une
connaissance parfaite de l’avenir, ne sont plus de mise. C’est dans ce milieu d’incertitude que
baigne de secteur de l’assurance. La même note relève aussi que l’apprentissage du savoir
professionnel capitalisé est considéré comme une voie qu’il s’agira de privilégier. Ce choix
étant fait, il s’agit pour nous, économistes d’explorer cette option en mobilisant les nouvelles
théories économiques qui se sont inscrites dans la perspective de remise en question du
marché autorégulateur (main invisible). En d’autres termes, nous pensons montrer que la
science économique n’est pas restée en marge des mutations que nous vivons. Pour ce faire,
nous proposons une démarche en trois temps :
I/ Les insuffisances du marché
II/ La théorie évolutionniste
III/ Comment développer les compétences ?
I/ Les insuffisances du marché
Sans doute, la théorie néoclassique a beaucoup apporté à l’analyse des marchés, elle met
l’accent sur l’optimisation, l’efficience, traduit la recherche de l’intérêt individuel, permet de
construire des modèles théoriques. Par contre, elle suppose un décideur omniscient, une
1
Note de présentation du colloque
circulation parfaite et sans coût de l’information entre les détenteurs d’input, l’entreprise et les
clients. En raison de cette information imparfaite, les agents économiques auront tendance à la
manipuler. Sur le marché des assurances, l’assuré a plus d’informations que son assureur du
risque qu’il s’agit de couvrir. Dans ce cas, l’assuré aura tendance à manipuler l’information de
telle sorte qu’il obtienne un contrat qui lui maximise ses gains. De ce fait, le paradigme du
marché qui repose sur l’information parfaite ne répond pas suffisamment au marché de
l’assurance. De plus, le marché comme forme de gulation part du principe de certitude. Ce
principe issu des sciences de la nature ne cadre pas avec les sciences sociales les
comportements humains sont imprévisibles
La remise en cause de la théorie traditionnelle s’ouvre sur deux voies différentes : une
première voie considère l’échange dans sa perspective contractuelle, une deuxième voie
s’intéressant essentiellement aux problèmes de production. Cette seconde voie objet de notre
travail, appréhende l’entreprise en référence à ses connaissances
2
.
II/ La théorie évolutionniste
L’entreprise doit s’adapter à son environnement ou tenter de le modifier à son profit
par l’élaboration de stratégies propre à lui fournir des avantages compétitifs
3
. Cette exigence
signifie qu’à une époque de bouleversements majeurs de toutes sortes, l’entreprise doit
mettre en valeur ses capacités d’adaptation et de gestion du changement sa condition clé de
survie
4
. Ainsi, la recherche d’une réduction des coûts pour améliorer les marges et gagner des
parts du marché sur ses concurrents l’entreprise doit tenir compte autant des variables du
marché que celle de son propre organisation. La théorie évolutionniste permet de répondre à
ces contraintes en identifiant l’environnement de l’entreprise comme étant un mécanisme de
2
Z. Karray-Driss, « Coopération technologique des firmes et compétences pour innover »,
Thèse de doctorat en sciences économiques, Université des sciences sociales de Toulouse 1,
France, 2001
3
Alain Alcouffe et Souhaila Kammoun, « Une approche économique des compétences de la
firme : Vers une synthèse des théories néo-institutionnelles et évolutionnistes », Les notes du
LIHRE, N° 307 (Laboratoire Interdisciplinaire de recherche sur les Ressources Humaines et
l’Emploi), Université des Sciences Sociales de Toulouse, Février 2000
4
Alain Descreumaux, « Théories de l’évolution de l’entreprise : Bilan et perspectives »,
Les Cahiers de la Recherche du CLAREE (Centre Lillois d'Analyse et de Recherche sur
l'Evolution des Entreprises), n° 94/4, 1994
sélection auquel celle-ci fait face par un ensemble de compétences. De ce fait, cette théorie
place les compétences comme catégorie analytique centrale
5
.
Les hypothèses de la théorie évolutionniste :
S’opposant aux hypothèses de la théorie néoclassique standard, la théorie
évolutionniste retient la rationalité limitée (1), l’incertitude (2), les irréversibilités (3), la
sélection (4) et la dépendance de sentier (5).
1/ La rationalité limitée : En raison du niveau des connaissances et des techniques, les
acteurs ne sont pas en mesure de stocker et traiter toutes les informations de manière fiable.
Aussi, « les individus et les organisations ont tout à apprendre, particulièrement dans le
monde de la complexité, de l’incertitude et de l’économie du savoir ».
6
Par conséquent, ils
retiennent les solutions les plus satisfaisantes. Nous rappelons que l’approche néoclassique
considère que les individus sont capables d’étudier toutes les options offertes et en
choisissent la plus optimale. En abandonnant l’optimisation, la théorie évolutionniste décrit la
décision comme un processus où une action est retenue si elle satisfait l’organisation.
2/ L’incertitude : Devant un environnement en perpétuelle mutation, l’entreprise se
trouve incapable de maîtriser l’ensemble des paramètres. Les décisions qui engagent
l’entreprise dans l’avenir relèvent de l’incertain. Dans une telle situation, l’entreprise met en
place des règles organisationnelles pour mieux gérer et contrôler les conséquences liées à
cette incertitude.
3/ L’irréversibilité : La création de nouvelles connaissances et l’apprentissage sont
indélébiles et donc ne se détruisent dans l’usage. Cette situation appliquée à des
investissements spécifiques (savoir faire, réputation, confiance…) rend presque impossible
leur redéploiement sans coûts.
4/ La sélection : Cette hypothèse est propre à la théorie évolutionniste puisqu’elle
s’inspire du modèle biologique. La sélection fait que la firme affronte la sanction de
l’environnement. Les différents acteurs ont intérêt à intégrer les leçons des étapes des
sélections passées. Dans ce sens, « les variétés de firmes, de technologies, d’industries ou
5
Alain Alcouffe et Souhaila Kammoun, Op. Cit
6
El-Filali El-Youssefi M., « Comparaison des théories économiques et sociologiques de
l’entreprise dans le cadre des nouveaux modèles de production » in Cahiers du CRISES N°7,
Avril 2000
d’institutions obtenant les meilleurs résultats économiques vont être sélectionnées, au sens
leur « population » va croître au détriment des variétés les moins viables
7
.
5/ La dépendance de sentier : Le répertoire de routines
8
que possède une firme est le
produit du répertoire antérieur
9
.C’est dans ce sens qu’« un pas effectué conditionne le pas
suivant, et certains pas particuliers conditionnent l’ensemble du développement futur ; ces
derniers sont désignés comme irréversibles »
10
.
De ces hypothèses la firme se structure autour des éléments suivants
11
:
La constitution interne de la firme repose sur la capacité collective à produire, gérer et
innover. Une place importante est accordée aux processus d’apprentissage et d’accumulation
des connaissances et compétences individuelles et collectives.
La dynamique de la firme dévoile en quoi l’introduction de nouvelles technologies
dans la sphère organisationnelle influe sur les processus d’apprentissage, de connaissance et
d’information.
Enfin, la firme dans la vision évolutionniste accumule des compétences par les
relations qu’elle met en place avec ses fournisseurs, clients… et lors de sa confrontation avec
la concurrence sur le marché. Ce processus d’apprentissage qui s’accumule au sein de la firme
et qui donne lieu à des compétences technologiques et organisationnelles fonde son identité.
La firme devient un comme un bloc de compétences, une équipe compétente « competent
team» ayant ses propres connaissances tacites, et exerçant un effet de levier sur la productivité
de tous les facteurs à partir de la sélection et de la répartition des moyens de production »
12
.
Prenant ses distances par rapport à la théorie traditionnelle, la théorie évolutionniste de
la firme privilégie les compétences et les substitue aux contrats passés sur le marché.
7
Patrick Eparvier, « L’évolutionnisme face à un carrefour méthodologique : Du travail
empirique à la formalisation mathématique », Université Lumière Lyon 2, Avril 2003
8
Les routines sont des schémas de comportements réguliers, stables, des règles de décision
spécifiques à la firme.
9
Christian Bessy, « L'hypothèse de connaissance tacite dans la théorie évolutionniste de la
firme », Centre d'Analyse Théorique des Organisations et des Marchés (ATOM), Université
Paris I, Working Paper 99-01
10
Rodolphe Durand et Bertrand Quélin, « Comment envisager l’évolution économique sans
concevoir une firme évolutionniste : Contributions de la théorie des ressources à une théorie
évolutionniste de la firme », Groupe HEC, Juillet 1998
11
Abdelatif Kerzabi, « Surplus économique et entreprise », Thèse de doctorat d’Etat en
sciences économiques, Université de Tlemcen, 2005
12
Alain Alcouffe et Souhaila Kammoun, Op. Cit
Considérées comme facteur d’innovation, les compétences permettent à la firme d’être plus
compétitive. Nous ne sommes plus dans une compétition par les prix mais dans une
compétition les coûts sont moins liés aux produits qu’aux activités. Par conséquent, à la
coordination par le marché, la théorie évolutionniste se avance la coordination par les
compétences. Au niveau interne (firme), la gestion s’attellera à évaluer, enrichir, valoriser et
développer les compétences.
III/ Comment développer les compétences ?
L’entreprise pour survivre doit, s’adapter et réagir à son environnement d’où la
nécessité de développer des compétences et des capacités d’apprentissage. Plus l’entreprise se
qualifie et se différencie des autres et plus sa vulnérabilité diminue. La question qui se pose
alors, est comment l’entreprise arrive t-elle à maîtriser des compétences ?
Les évolutionnistes considèrent la firme comme un lieu où se transmettent des routines
par l’accumulation des connaissances. Celles-ci sont finies comme des capacités à exécuter
des taches qui deviennent par la suite des routines.
Les principales compétences requises par les entreprises dans le futur sont :
13
− Apprendre à apprendre
− Traitement et gestion de l'information
− Capacités de déduction et d'analyse
− Capacités de prise de décision
− Capacités de communication, connaissances des langues
− Travail en équipe, apprentissage et enseignement basés sur les équipes
− Pensée créative et capacités de résolution de problèmes
− Gestion et direction, raisonnement stratégique
− Auto-direction et auto-développement
− Flexibilité
A l’instar de la formation qui a fait l’objet de nombreuses expériences, nous proposons
dans cette contribution un ensemble de techniques à même de développer les compétences.
13
Observatoire des PME européennes, « Le développement des compétences dans les
PME », Rapport N° 1, 2003
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