Oui, sur le modèle qu'on reproduit. Parce qu'on voit bien que la plus âgée, Ruth, va reproduire le parcours de
sa mère. Elle est dans les mêmes rails, même si c'est elle qui se rebelle le plus, qui a le plus envie d'échapper
à tout ça. La plus jeune, pourquoi est-elle résiliente ? C'est parce qu'elle a une passion. C'est quelque chose
qui me parle beaucoup aussi. Quand j'étais adolescente j'ai eu des périodes très difficiles et c'est vraiment en
allant au cinéma, en découvrant des films qui m'électrisaient, qui permettaient de m'échapper, qui me
montraient un autre monde, c'est grâce à cette passion du cinéma que j'ai l'impression de m'être trouvée ou
retrouvée, d'avoir pu sortir de cette grosse crise d'adolescence et de me sentir bien dans ma peau à nouveau.
Le personnage de la plus jeune est décalé par rapport à son milieu, aux années 70. Elle se fait l'apôtre
de l'atome ?!
J'aime bien quand j'entends à la fin de la pièce, une espèce de sourire dans la salle quand elle parle de la
beauté de l'énergie atomique et en même temps c'est vrai que les rayons permettent de soigner les cancers, il
y a les deux faces de la médailles, c'est toute l'histoire de l'humanité (rires) !
Revenons à cet atelier d'écriture que vous avez suivi et à votre première mise en scène ?
Cet atelier, c'était par curiosité, juste pour moi, c'est une démarche personnelle. Mais le théâtre m'a rattrapé
encore une fois. J'en étais heureuse parce que j'ai toujours réussi à équilibrer le théâtre et le cinéma, mais là
depuis quelques temps le cinéma était plus présent. En fait ça fait quatre ans que je n'avais pas été sur les
planches, depuis "Pensées secrètes" au théâtre Montparnasse et ça me manquait beaucoup. Et puis cette
découverte de faire une première mise en scène, ça vraiment c'est une grande expérience pour moi et j'ai
adoré cette façon de raconter une histoire.
Cette pièce là j'avais envie de la vivre de l'intérieur, comme d'habitude, mais aussi à l'extérieur. Décider
quelles lumières il y aurait, l'univers, comment serait la maison, quelles musiques… J'avais envie de
raconter tous les aspects de l'histoire, de m'en emparer. C'est pour ça que j'ai eu envie de m'exercer à la mise
en scène pour cette pièce là. Du coup j'ai attrapé le virus, j'ai très envie de continuer, mais la prochaine fois
sans être dedans, être metteur en scène à 100%, ne pas être partagée comme j'ai pu l'être, même si ça c'est
bien passé finalement.
Le théâtre de l'Atelier nous offrait cette place un peu particulière de jouer à Noël et au jour de l'An à 19h
(éclat de rire). Je me suis dit que c'était une petite planque et que ce serait très bien pour moi, pour essayer
des choses. J'ai beaucoup de reconnaissance à l'Atelier de m'avoir permis ça, parce que c'était vraiment
comme un laboratoire. Je les ai vraiment prévenus au dernier moment, au mois de juillet, après la fin de cet
atelier d'écriture. En générale il n'y a pas de place au théâtre, il faut attendre longtemps, moi j'avais envie de
me lancer tout de suite la dedans, j'avais une urgence on peut dire ! Et ils ont accepté ce pari, c'était vraiment
un beau cadeau.
Comment s'est fait le choix des comédiennes ?
Alice Isaaz, je l'avais vu jouer dans "La crème de la crème" (de Kim Chapiron) et j'avais adoré son regard,
cette façon d'observer le monde, cette ambivalence. Dans la pièce elle aime tellement sa mère et en même
temps elle a tellement besoin de s'en extraire. On n'a pas fait d'essai, c'était la première fois qu'elle jouait au
théâtre. C'était un vrai pari et on a l'impression que ça fait des années qu'elle travaille sur un plateau de
théâtre, c'est assez bluffant.
Lily Taïeb je l'avait vue dans le film de Desplechin (Trois souvenirs de ma jeunesse) où elle avait un tout
petit rôle, mais elle m'avait beaucoup touchée. Là aussi je n'ai pas fait d'essai, le travail a été un peu plus
long parce qu'elle n'a que 15 ans, donc elle ne pouvait pas travailler tous les jours. C'est pour ça qu'elle est
en alternance avec Armande Boulanger. Armande, je ne l'avais vue que dans "La pièce manquante" (de
Nicolas Birkenstock), elle non plus n'avait jamais joué au théâtre. On a travaillé tous les jours même le
dimanche à partir du mois de septembre. On a fait un gros gros travail toutes ensemble.