Prise en charge non médicamenteuse dans les démences sévères

Synthèse
Prise en charge non médicamenteuse
dans les démences sévères
MARIE-PIERRE PANCRAZI
PATRICK MÉTAIS
Département
médico-gérontologique
Paris
Résumé. Le soin aux malades Alzheimer, particulièrement au stade de démence sévère,
nécessite une stratégie thérapeutique globale intégrant l’approche pharmacologique aux
dimensions environnementale, psychothérapeutique et de réadaptation. L’objectif est de
maintenir l’autonomie le plus longtemps possible mais aussi d’améliorer la qualité de vie
en réduisant la souffrance psychologique des patients et des familles. Au stade de démence
sévère, des techniques comportementales et d’aménagement du milieu sont possibles à
domicile mais, en fait, la plupart des patients sont institutionnalisés. Le choix s’oriente vers
des structures ayant un projet spécifique de vie, de soin et d’architecture, dans lesquelles
sont pratiquées des activités ludiques et de maintien dans la réalité. L’éducation et le
soutien des aidants et la formation des soignants sont essentiels pour mieux ajuster les
attitudes envers le patient, améliorer la communication et optimiser la qualité de vie. Bien
que le niveau de preuve demeure insuffisant dans l’évaluation de ces stratégies faute
d’indicateurs adaptés et du petit nombre de recherches, des techniques largement répan-
dues sont aptes à donner du sens à cette étape difficile de la vie des patients et de leur
famille.
Mots clés : démence, maladie d’Alzheimer, aidant, réadaptation, stimulation,
psychothérapie, thérapie psychosociale, aménagement de l’environnement
Abstract. Care for patients with Alzheimer’s disease, particularly with severe dementia,
requires a global therapeutic strategy integrating pharmacological approach into the envi-
ronmental dimensions, psychotherapeutics and rehabilitation. The objective is to maintain
autonomy as long as possible but also to improve the quality of life by reducing the
psychological suffering of patients and families. In severe dementia, behavioral techniques
and organization of the environment are possible at home but, actually, most of the patients
are institutionalized. Structures having a specific project of life, of care and specific architec-
tural design should be prefered. Education and support for caregivers as well as training of
the nursing staff are essential to develop better attitudes toward the patient, improve
communication and optimize the quality of life. In spite of the low level of evidence in the
evaluation of these strategies on account of the lack of adapted indicators and rarity of
specific research, widely spread techniques can confer special purport to this difficult stage
for the patients and their family.
Key words:dementia, Alzheimer’s disease, caregiver, rehabilitation, stimulation,
psychotherapy, psychosocial therapy, organization of the environment
La définition de la démence au stade sévère de-
meure encore floue mais son évaluation est en
voie d’être précisée [1]. Au plan clinique, ce
stade se caractérise par trois dimensions : l’importance
de l’altération cognitive, la perte d’autonomie dans les
actes de la vie quotidienne et la prépondérance des
troubles du comportement. De ce fait, la prise en charge
est complexe et lourde, aussi bien pour la famille que
pour les soignants, à domicile comme en institution [2].
Près de 66 % des patients seraient à ce stade institu-
tionnalisés [3] (tableau 1).
L’intérêt pour cette étape de la maladie a été récem-
ment suscité par la survenue d’une nouvelle classe
thérapeutique médicamenteuse orientée vers cette in-
dication [4]. Mais force est de constater qu’à ce stade
les effets d’une monothérapie voire d’une bithérapie,
s’ils sont manifestes, demeurent limités. Pour autant, il
existe depuis longtemps dans l’arsenal de prise en
charge de cette affection des stratégies non pharmaco-
logiques qui visent essentiellement à améliorer la qua-
lité de vie des patients et de leur entourage et qui
s’inscrivent dans une vision globale de la maladie. Elles
demandent toutefois, selon les différentes conférences
de consensus internationales [5-11] et l’évaluation faite
en France par l’Anaes [12], à être mieux validées avec
des critères d’évaluation plus adaptés. Il importe en
effet, dans ce contexte, de dépasser le primat du cogni-
tif pour s’intéresser à des indicateurs de fonctionne-
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ment dans la vie quotidienne, de comportement, de
charge en soin et de qualité de vie.
Bien plus qu’à toute autre étape de l’évolution, une
stratégie thérapeutique globale semble nécessaire, qui
intègre l’approche médicamenteuse à la dimension en-
vironnementale, d’orientation dans la réalité et de réa-
daptation [5-12]. Pour ce faire, la formation des soi-
gnants et l’éducation des aidants constituent un
élément essentiel. Cette stratégie est à ajuster à domi-
cile ou en institution en fonction des ressources du
milieu.
Les objectifs généraux
À ce stade, les cibles sont multiples mais les ambi-
tions limitées pour ne pas mettre le patient en échec et
risquer de renforcer la frustration et la tristesse :
– réduire la souffrance du patient et de l’aidant,
préserver le plus longtemps possible l’autonomie
fonctionnelle,
– favoriser l’orientation dans la réalité,
– maintenir des liens sociaux et affectifs,
prévenir et atténuer les comportements « perturba-
teurs »,
favoriser la vie communautaire si le patient vit en
institution,
– optimiser la relation d’aide,
– améliorer la qualité de vie.
Les moyens consistent, d’une part, en des interven-
tions directes auprès du patient et, d’autre part, en des
interventions indirectes qui passent par l’aménage-
ment de l’environnement, la guidance ainsi que le sou-
tien de la famille et la formation des soignants [5-12].
Les modalités d’intervention sont le plus souvent
combinées. Nous allons tenter de les découper de fa-
çon artificielle, mais il est clair que de nombreux mo-
des d’action sont intriqués pour répondre aux objectifs
cités [12].
L’efficacité réelle de ces actions et leurs indications
demeurent difficiles à évaluer en raison du faible nom-
bre d’études qui leur sont consacrées et de leur qualité
méthodologique moyenne [12].
Les interventions
auprès du patient
Soutien et approches sociothérapeutiques
Au stade de démence sévère, du fait de la pré-
gnance des troubles phasiques et comportementaux
ainsi que de la distractibilité, il est illusoire de préten-
dre réaliser une psychothérapie telle qu’elle est sou-
vent possible aux stades léger à modéré [13, 14]. Néan-
moins, un lien transférentiel établi précocement avec
un patient par un thérapeute ou un soignant, peut per-
durer au-delà de l’usage des mots. Il ne s’agit pas là de
recommander telle ou telle stratégie car, plus que l’outil
psychothérapeutique, c’est l’attention portée au patient
par le thérapeute ou le soignant qui a valeur de soutien.
D’autres types d’actions à visée thérapeutique peu-
vent être mises en œuvre par les soignants en fonction
de leurs aptitudes, mais aussi des désirs des patients :
ce sont des thérapies médiatisées (art thérapie, théâtre,
relaxation, musique) qui s’appuient sur les potentialités
sensorielles, ludiques et émotionnelles des patients
[14-17]. Elles permettent de laisser s’exprimer d’autres
modes de communication lorsque le langage est dé-
faillant [14, 18]. Elles sont réalisables en accueil de jour
ou en institution, voire à domicile dans une approche
individuelle. Elles favorisent, d’une part, la dynamique
relationnelle en permettant de lutter contre les senti-
ments d’étrangeté et d’exclusion, ce qui les rend por-
teuses de réassurance en soi et, d’autre part, elles auto-
risent la créativité et l’expression de la souffrance [14].
Les groupes de conversation sous la conduite d’une
orthophoniste ou d’un soignant [7, 16], des stratégies
de réminiscence (objets personnels, histoire de vie)
peuvent offrir le même intérêt de re-narcissisation et de
préservation du lien social [19-21].
Approches visant à réduire
les comportements perturbateurs
Les troubles du comportement influent de manière
défavorable sur le pronostic de la maladie. Ils consti-
tuent une cause de souffrance pour le patient, mais
aussi de détresse pour l’aidant et d’épuisement pour
les soignants [6, 22]. Si certains sont directement liés
aux dysfonctionnements neurobiologiques en cause
dans la maladie, d’autres, en particulier ceux de carac-
Tableau 1.Répartition des patients déments selon la sévérité
de la démence et le mode d’hébergement selon l’étude Paquid
[3].
Table 1. Distribution of the demented patients according to the
severity of the dementia and the mode of residence according
to the Paquid study [3].
Démence MMS À domicile En institution
Très légère 24-30 90,9 % 9,1 %
Légère 19-23 76,2 % 23,8 %
Modérée 10-18 57,3 % 42,7 %
Sévère 0-9 33,8 % 66,2 %
Total 60,2 % 39,8 %
Prise en charge non médicamenteuse
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tère aigu, sont souvent liés à une cause externe, soma-
tique ou, dans le cas qui nous intéresse ici, environne-
mentale [6, 22]. Des attitudes inadaptées de l’entourage
peuvent en effet générer et entretenir ces troubles en
un véritable cercle vicieux aggravant le fardeau de
l’aidant [6].
Selon les recommandations des conférences de
consensus, il est possible d’apprendre aux aidants et
aux soignants à réaliser des interventions à visée com-
portementale qui peuvent se révéler bénéfiques chez
certains patients, à certaines périodes de leur évolution
[5-12].
Certaines techniques sont directement orientées
vers les comportements. Elles sont destinées à inter-
rompre ou réduire les activités ou situations qui favori-
sent l’apparition de moments d’agitation, d’agressivité
ou d’insomnie, en apprenant à l’aidant à identifier les
situations problématiques et les éventuels facteurs dé-
clenchants. Par exemple faire la toilette au gant au
lavabo ou au lit si l’on observe une phobie de l’eau,
faire manger seul si la promiscuité est source d’an-
goisse, etc. Des techniques de renforcement de type
encourager la réponse adéquate peuvent être utilisées
[23], mais pas le renforcement négatif s’il consiste à
punir !
Il est possible également de recourir à des straté-
gies de distraction afin de détourner le patient de sa
source d’anxiété : le tenir à l’écart des situations ou des
individus susceptibles de provoquer des comporte-
ments perturbateurs [6], l’occuper par des activités ma-
nuelles (plier le linge, faire des collages, etc.), jouer à
des jeux de société adaptés au niveau cognitif, lui faire
la lecture.
Il est recommandé de faire alterner ces techniques
avec des activités de détente physique : marche ou
exercice léger chaque jour, sorties à l’extérieur rédui-
sent l’errance, l’agitation et l’agressivité [6, 7].
Des règles simples de communication adaptées doi-
vent être expliquées (figure 1) [6].
La recherche d’une atmosphère sereine est favori-
sée par l’utilisation d’une musique douce ou choisie en
fonction des préférences du patient pour réduire l’an-
xiété, la tristesse, l’agitation et l’agressivité [17]. De
même, le recours à des cassettes audio où sont enre-
gistrées les voix des proches racontant une histoire ou
un souvenir commun, ou encore le visionnage des
films de famille diminuent les agitations verbales et le
repli sur soi [6, 7]. Le réchauffement de la température
corporelle, en fin d’après-midi ou le soir, a également
des vertus apaisantes et diminue l’agitation, l’agressi-
vité ou les troubles du sommeil. Elle est obtenue par
balnéothérapie (bains chauds) avec ou non aromathé-
rapie [6, 24] ou utilisation de bouillottes dans le lit avec
les précautions d’usage. Les massages, avec ou non
usage d’huiles essentielles, ont un effet apaisant et
calment les algies liées aux rétractions et à la grabatisa-
tion, source d’agitation et de cris, ou encore les angois-
ses d’abandons si fréquentes le soir [6].
D’autres approches ont pour objectif, à l’inverse, de
stimuler le patient et de lutter contre l’apathie. Combat-
tre la carence de stimulation permet en outre de régu-
lariser le rythme circadien [25]. Ces techniques font
appel au principe de stimulation externe sensorielle
[17] comme le recours à l’éclairage vif dans la journée
(lux thérapie) par des sources lumineuses de forte in-
tensité [25], l’utilisation de pièces de stimulation multi-
sensorielle ou méthode Snoezelen dans les institutions
[26], la stimulation motrice à travers des activités de
gymnastique douce qui peuvent être réalisées en posi-
tion assise [27], le tai chi chuan [28, 29], l’écoute de
musique ou de chant, en particulier en cas d’agitation
vespérale [17, 29], ou encore l’adoption d’un animal
familier comme tentative de mobilisation affective [30].
Des ateliers thérapeutiques quotidiens peuvent re-
grouper diverses stimulations : praxique comme les
activités manuelles de groupe ou ergothérapie (petites
pratiques), gnosique (esthétique, loto des odeurs, tra-
vail sur le goût), phasique (groupe de conversation) [6,
29]. Tout en optimisant les capacités résiduelles des
patients, elles entretiennent la dynamique relationnelle
et offrent un dérivatif à l’angoisse, l’ennui et l’agressi-
vité [29].
Des interventions favorisent les émotions positives
et la permanence de l’identité comme l’évocation du
passé ou reminiscence therapy [19-21] avec l’utilisation
de memory box (véritable boîte aux trésors qui contient
des objets signifiants pour le patient), la construction et
la lecture d’un livre de vie qui mobilise aidant et pa-
Hôpital de jour ou
Accueil de jour thérapeutique
Unité de crise Alzheimer
Stade léger à modéré
Accueil de jour thérapeutique
Accueil de jour
Institution temps plein
Unité Vie Alzheimer
Stade modéré à sévère
Stade sévère
Figure 1. Adaptation du projet en fonction de l’évolution de la
maladie.
Figure 1. Adaptation of the care project according to the evolution
of the disease.
M.-P. Pancrazi, P. Métais
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tient, le visionnage d’albums photos ou de films de
famille, ou encore la simulation par cassette audio de la
présence d’un proche [6, 7, 14, 19-21, 31].
Interventions visant la préservation
de l’autonomie fonctionnelle
Il s’agit de moduler les attitudes du sujet ou de son
environnement dans un but de réadaptation.
Stimuler pour optimiser les capacités restantes
et pallier les déficits
Il n’est plus question de parler à ce stade de stimu-
lation cognitive au sens ambitieux du terme, mais on
peut néanmoins continuer à mettre en place des procé-
dures de routines de vie en s’appuyant sur la mémoire
procédurale et ainsi proposer des séquences compor-
tementales stéréotypées pour remédier aux difficultés
qui surviennent dans les actes de la vie quotidienne
[23, 28, 29]. Ces stratégies ne doivent pas être ambi-
tieuses, mais demeurer toujours en lien avec la réalité
quotidienne et ne pas mettre en échec le patient [32].
C’est seulement ainsi qu’elles contribuent à renforcer
la confiance et l’estime de soi.
Dans le cadre de l’aménagement de l’environne-
ment on peut introduire dans celui-ci des indices qui
vont l’aider dans les activités de vie quotidienne : pan-
cartes, signalétique, etc.
Garder une implication dans la vie familiale
ou communautaire
Il faut recommander à l’aidant ou au soignant de ne
pas infantiliser le patient, mais de l’associer, autant que
faire se peut, aux décisions familiales ou de la vie
commune (choix des visites, des activités, décisions de
vie importantes), afin de favoriser un sentiment de maî-
trise de son destin [33]. Il est important également de le
faire participer aux tâches quotidiennes (mettre la ta-
ble, débarrasser, éplucher les légumes, faire le lit, etc.)
ce qui le valorise [29].
Aider la famille à mettre en place des stratégies
comportementales adaptées
dans les moments clés de la vie quotidienne [23]
Les perturbations affectant les habiletés de la vie
quotidienne (toilette, habillage, alimentation) sont gé-
nératrices d’anxiété pour le patient et source de far-
deau pour l’entourage. Des actions spécifiques peu-
vent porter sur l’orientation et le renforcement du
comportement adéquat pour maintenir la fonction le
plus longtemps possible. Il s’agit d’accompagner sans
assister : incitation verbale, suivie de démonstration
physique, mise en pratique et renforcement positif (féli-
citer pour l’effort réalisé).
Il s’agit également de simplifier les actions de la vie
quotidienne par des stratégies de facilitation et d’œu-
vrer à la restauration des praxies par le ré-
apprentissage des gestes en faisant appel aux automa-
tismes (ergothérapie) :
l’alimentation est favorisée par le recours à des sets
de tables antidérapants, des couverts ergonomiques,
des assiettes à bords larges qui compensent les consé-
quences des troubles praxiques [6, 23]. L’accompagne-
ment de l’aidant ou du soignant permet d’initier l’ac-
tion ;
l’habillage est facilité par l’usage de vêtements am-
ples dont la taille est élastique et de chaussures avec
fermeture velcro ;
la toilette doit être accompagnée le plus longtemps
possible en guidant l’action : approcher la brosse à
dent de la bouche, commencer à savonner avec le
gant ;
la rééducation de l’incontinence urinaire doit être ten-
tée car cette dernière met à mal le sentiment de dignité
de la personne et de plus sa gestion épuise les proches.
L’incitation à la miction à des moments précis, en fonc-
tion des rythmes temporels et de la diurèse physiologi-
que, semble la stratégie la plus opérante [6, 23]. Il est
nécessaire également d’aider à repérer les toilettes, à
effectuer le déshabillage nécessaire, à adopter la posi-
tion adéquate.
Maintenir une orientation dans la réalité
Les techniques d’orientation dans la réalité sont ap-
plicables en centre de jour ou en unité de soin Alzhei-
mer, et transposables à domicile en guidant les aidants.
Il s’agit d’aider au repérage spatial (aide-mémoire ex-
ternes : pancartes, plan), temporel (calendrier, lecture
du journal, horloges aisées à lire) et biographique
(groupe de réminiscence) [19-21, 23, 34–36].
Des exercices physiques simples permettent un tra-
vail sur le schéma corporel, la reconnaissance de soi,
les habilités motrices, la prévention des chutes [28].
Les activités en relation avec l’extérieur (sociothéra-
pie) ont pour but de maintenir le patient dans la réalité
(faire une sortie, aller au marché, au restaurant, ren-
contrer de jeunes enfants) [6]. Les cibles doivent être
ludiques : chant, danse, fêtes, stimulation sensorielle et
corporelle. Les groupes de réminiscence déjà évoqués
ont également cette fonction.
À domicile ou en institution, un projet de vie et de
soin qui met en exergue le soin relationnel au même
titre que les autres besoins des patients offre une plus
grande qualité de vie aux patients et prévient la surve-
nue des troubles du comportement.
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Aménagement de l’environnement
et structuration de la vie quotidienne
Plus la maladie évolue, moins le malade peut
s’adapter à son environnement : c’est à ce dernier à
s’adapter en fonction du handicap jusqu’à devenir pro-
thétique (tableau 2). Un milieu inadapté peut contri-
buer à l’apparition de troubles psychologiques et com-
portementaux ou les aggraver. Par contre, un
environnement rassurant peut réduire leur apparition .
Il est donc conseillé d’adapter l’environnement afin de
le rendre plus sûr et plus simple à vivre, à domicile à
travers le recours à un ergothérapeute, en conseillant
les familles ou en institution [6, 34, 36].
Divers éléments qui peuvent être aisément corrigés
sont susceptibles de favoriser la perplexité et l’an-
goisse et d’engendrer ainsi des troubles du comporte-
ment chez ces sujets dont les perceptions et la capacité
à traiter l’information sont défaillantes. Des détermi-
nants anxiogènes sont source de phénomènes halluci-
natoires, d’anxiété et d’agressivité comme la promis-
cuité dans la chambre ou les parties communes, les
bruits intempestifs (laveuse, sonnettes), les espaces de
déambulation trop réduits, la carence de signalétique,
l’éclairage insuffisant, le manque de repères person-
nels et familiers, mais aussi l’absence de formation du
personnel [6, 36-39].
À domicile, on facilite la déambulation en enlevant
tapis et petits meubles, on évite les changements in-
tempestifs (place des objets, intervention de tiers, dé-
ménagement) et on s’efforce de créer un environne-
ment apaisant en utilisant la musique, les couleurs
pastel, la luminosité adaptée.
Mais à ce stade, les patients sont institutionnalisés
dans les deux tiers des cas. Face à la prévalence gran-
dissante de la démence, il paraît pertinent de dévelop-
per des structures possédant un projet Alzheimer. Dans
ces unités, l’aménagement de l’environnement et la
formation spécifique du personnel permettent d’offrir
un soin adapté et gradué à ces patients et de réduire les
dépendances induites par le milieu [34, 36].
Au plan architectural, ces structures se composent
d’un ensemble de petites unités avec un nombre limité
de patients, dans un espace adapté : espace vaste, cir-
culaire, ou structure de type abbaye avec une cour
centrale. Ces dispositifs offrent l’intérêt de favoriser
une déambulation sans risque. Les couloirs en V avec
poste de soin central (vitré si possible) permettent une
meilleure surveillance par les soignants. La déambula-
tion peut être source de stimulation si on trouve sur le
chemin des vitrines décorées, des panneaux interactifs,
des aquariums, ou si le couloir débouche sur un patio
aménagé.
Il est bon de prévoir des systèmes de sécurisation
des accès pour limiter le risque de fugue : serrures
adaptées, digicodes, cartes à puces, etc. Alterner des
zones de lumière et d’obscurité peut aider à canaliser
les déplacements du malade. Ce dernier évitera les
zones sombres qui l’effraient et qui peuvent correspon-
dre aux zones à risque : escaliers, locaux techniques,
etc. [6, 36]. Les modifications à apporter à l’environne-
ment doivent tenir compte du stade d’évolution de la
maladie.
Les patients inversent assez vite le rythme veille-
sommeil, ils souffrent aisément d’illusions ou d’halluci-
nations en fin de journée et la nuit : vision de monstres,
d’animaux ou d’individus dangereux. Un éclairage in-
tense de type lumière du jour, sans trop de variation
lumineuse dans la journée, peut réduire ces troubles ; il
Tableau 2.Les points clés de l’aménagement du milieu.
Table 2. Key points for the organization of the environment.
Objectifs
Maintenir repères et routines de vie
Tout en stimulant
Et en sécurisant le milieu
Moyens
Petites unités
Nombre de patients limité
Espace adapté : circulaire ou structure de type abbaye avec une cour centrale, des zones de regroupement et de déambulation libre.
Espace sécurisé : serrures adaptées pour limiter le risque de fugue, digicodes, peintures des portes des pièces à risque similaires au mur
pour en limiter l’accès, utilisation des zones de lumière et d’obscurité pour canaliser les déplacements du malade, accès à un parc ou
patio clos.
Espace stimulant à certains moments : éclairage intense, peu de variation lumineuse dans la journée, espaces adaptés pour l’animation,
portes de différentes couleurs pour aider au repérage.
Espace apaisant à d’autres moments : musique douce, éviter les bruits intempestifs, éviter les décorations trop chargées.
Espace respectant l’intimité : chambres seules avec salle de bain, petits salons pour rencontrer les proches.
M.-P. Pancrazi, P. Métais
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