Femme de théâtre en prise directe avec son temps, je défends un théâtre de
la langue – un théâtre poétique – et mes choix de créations naissent avant
tout de la rencontre avec une « écriture ».
Après avoir travaillé sur bien des écritures contemporaines - ayant dans mon
parcours connu les grandes « aventures théâtrales » comme celles de Vitez,
mais aussi Chéreau et sa rencontre avec Koltès, ou encore Olivier Py - je
n’ai cependant jamais vu ni croisé le théâtre de Didier Georges Gabily de son
vivant.
Aussi, cette rencontre – solitaire, uniquement par le livre - avec l’univers et
l’écriture de Gabily, fut-elle de l’ordre de la déagration, et tout particulièrement
cette œuvre inclassable qu’est son triptyque Gibiers du Temps.
Tout de suite, j’ai eu envie « d’éprouver » cette matière, d’en faire l’expérience,
de la mettre en corps et en voix, de la convoquer « au plateau ».
Après avoir travaillé sur Chimères au cours d’un atelier avec des étudiants de
conservatoire, je me suis attelée à ce Gibiers du temps avec mon équipe sur
un chantier de création Gibiers (matériaux/fragments) du Temps.
Plus nous travaillions et cherchions, plus l’ampleur, la complexité et la richesse
de l’œuvre m’apparaissaient « Inouïes »… Il était incontournable d’éclairer,
de sertir et fouiller de toutes parts, dans tous les écrits de natures diverses
de Gabily.
J’ai donc lu : son théâtre, bien sûr - mais aussi ses articles, notes de travail,
romans, poèmes…
C’est donc à ce moment-là qu’est né le désir de faire entendre aussi
ces textes-là - à priori voués à l’écrit - faire entendre cette parole et
cet homme – ce visionnaire à la langue incandescente, à la pensée
aiguisée, éclairante, adressée au monde, aux « acteurs », à nous tous.
Puis, il y a les belles rencontres qui aident et soutiennent… Ces textes
naviguant de « l’intime au publique », nommant quelques compagnons de
route, j’ai rencontré Bruno Tackels, dramaturge de Gabily, « l’oreille amie »,
et Frédérique Duchène, la compagne aimée, « l’actrice prophétique »…
Tous deux m’ont encouragée, ont aussi nourri notre travail par leurs regard
attentionné.
Enn, l’invitation de Jean-François Matignon - autre compagnon de route de
Gabily - à venir « faire ce que je veux » dans « la petite maison de sa
Compagnie», place des Carmes à Avignon, pour le festival 2011.
«Textes inouïs, lieu improbable »….
Tout était là pour faire partager ces pépites d’humanité qui aident à vivre, à
rester debout au cœur du monde…
La genèse d’À tout va...
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