Comparaison de l’implantation
d’une démarche d’ergonomie
participative et d’outils
d’analyse du travail destinés
aux tâches variées dans deux
entreprises au contexte différent
Marie St-Vincent
Chantal Tellier
Denise Chicoine
Marie Laberge
RAPPORT
ÉTUDES ET
RECHERCHES
R-306Juillet 2002
Dépôt légal
Bibliothèque nationale du Québec
2002
IRSST - Direction des communications
505, boul. de Maisonneuve Ouest
Montréal (Québec)
H3A 3C2
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©Institut de recherche Robert-Sauvé
en santé et en sécurité du travail,
juillet 2002.
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ÉTUDES ET
RECHERCHES
Cette étude a été financée par l’IRSST. Les conclusions et recommandations sont celles des auteurs.
Comparaison de l’implantation
d’une démarche d’ergonomie
participative et d’outils
d’analyse du travail destinés
aux tâches variées dans deux
entreprises au contexte différent
Marie St-Vincent1, Chantal Tellier2,
Denise Chicoine1,Marie Laberge1
1Programme sécurité-ergonomie, IRSST
2Programme sécurité-ingénierie, IRSST
avec la collaboration de :
Monique Lortie, Département des sciences biologiques, UQAM
Julio Fernandez, Syn’Act RAPPORT
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IRSST Comparaison de l’implantation d’une démarche d’ergonomie participative et d’outils
d’analyse du travail destinés aux tâches variées dans deux entreprises au contexte différent i
SOMMAIRE
L’étude présente les résultats d’implantation d’une démarche participative visant l’analyse de tâches
variées dans deux entreprises au contexte différent : l’une au contexte favorable à cette approche (usine
2), l’autre au contexte peu favorable (usine 1). Dans les deux entreprises, la structure d’intervention était
basée sur un groupe d’ergonomie formé d’opérateurs et de spécialistes techniques; ce comité était encadré
tout au long de l’intervention par des ergonomes et chapeauté par un comité de suivi, constitué de
représentants de la direction et du syndicat.
Le projet a été réalisé en fonction de quatre objectifs :
1- transformer des situations de travail à risque en vue de réduire les risques de troubles
musculo-squelettiques et les risques à la sécurité;
2- valider, en entreprise, une démarche d’analyse de poste conçue pour les tâches variées à cycle long et
destinée aux gens de l’entreprise;
3- analyser tout au long de l’intervention, par des méthodes ergonomiques, les difficultés rencontrées par
les membres des groupes ergo avec la démarche d’analyse de poste, dans le but de mieux comprendre
le processus d’apprentissage de l’ergonomie en milieu de travail;
4- documenter tout au long de l’intervention, par les méthodes de l’andragogie, l’évolution des
représentations des membres des groupes ergo quant à différentes dimensions identifiées lors d’études
antérieures (St-Vincent et al., 1997) comme étant déterminantes dans le processus d’apprentissage.
La démarche d’analyse destinée aux tâches variées, beaucoup plus complexes à analyser que les tâches
répétitives, est brièvement expliquée à la section méthodologie et présentée de façon plus détaillée en
annexe. Pour les tâches répétitives, lors de l’analyse des séquences vidéos de l’activité de travail, la porte
d’entrée était le facteur de risque (St-Vincent et al., 1996,1998). Pour les tâches variées, l’analyse des
vidéos vise cette fois à faire verbaliser plus librement les participants et à identifier plus directement les
déterminants à l’origine des risques et des difficultés rencontrés.
Vu leur contexte très différent, la présentation des résultats est axée sur une comparaison entre les deux
entreprises à l’étude.
Dans les deux entreprises, des transformations significatives ont été apportées aux situations de travail
analysées (quatre à l’usine 1, trois à l’usine 2). Dans les deux cas, ce sont les déterminants techniques du
travail (équipements, outils, aménagements physiques) qui ont donné lieu à la majorité des
transformations. On constate qu’à l’usine 2, les solutions sont plus d’envergure, aussi bien en terme de
complexité qu’en terme économique.
L’analyse des difficultés rencontrées par les participants, mène à des résultats qui diffèrent
radicalement selon l’entreprise concernée. À l’usine 2, des difficultés attendues sont rencontrées. Les
difficultés sont surtout de faible et de moyenne intensité et portent principalement sur les dimensions
méthodologiques de l’ergonomie et sur la transmission de connaissances factuelles. Les difficultés
rencontrées s’estompent au fil du temps. En fin de projet, les participants ont acquis beaucoup
d’autonomie. Ils maîtrisent très bien la démarche d’analyse et assument les rôles proposés par les
ergonomes : animation, secrétariat et travail terrain (entretiens auprès des travailleurs, enregistrement des
séquences vidéos).
À l’usine 1, la situation est tout autre. Dès l’analyse du second poste, des difficultés d’intensité élevée
émergent. Les discussions liées à la dimension méthodologique sont rares car les difficultés sont liées aux
fondements et aux objectifs mêmes de l’ergonomie. Les participants ont tendance à blâmer les travailleurs
ii Comparaison de l’implantation d’une démarche d’ergonomie participative et d’outils d’analyse
du travail destinés aux ches variées dans deux entreprises au contexte différent IRSST
observés sur leur façon de travailler plutôt que de chercher les causes des problèmes rencontrés, comme
les ergonomes le proposent. De plus, les participants ont de la difficulté à poser les spécifications des
solutions et sont très réticents à collaborer avec les ingénieurs de l’entreprise, comme le veut l’approche
participative. En fin de projet, une évolution est observée : les participants des groupes ergo recherchent
davantage les causes des problèmes et acceptent finalement de travailler avec les ingénieurs. De plus, leur
vison de l’ergonomie s’élargit. La prise d’autonomie est cependant faible. Les participants maîtrisent mal
la démarche proposée et n’assument pas les rôles prévus d’animation des réunions et de secrétariat; ils
n’assument pas non plus l’enregistrement vidéo des activités de travail analysées.
L’analyse des représentations des participants fait également ressortir des différences entre les deux
entreprises. À l’usine 2, où il y avait eu récemment une expérience d’analyse participative d’une situation
de travail, dès le départ, les participants ont une vision systémique de la prévention et de l’ergonomie.
Les participants se sentent capables d’analyser le travail et de concevoir des solutions. De plus, ils se
sentent bien supportés par leurs pairs et par la direction, ils ont confiance que les solutions proposées
seront implantées. À l’usine 1, où il n’y avait aucun passé en ergonomie, au début du projet, la vision de
la prévention et des accidents s’articule surtout autour de la responsabilité individuelle. Cette
représentation évolue en cours d’intervention vers une vision plus systémique qui intègre d’autres
dimensions, comme l’organisation et l’aménagement des postes. Les participants se sentent appuyés par
les autres travailleurs mais certains mettent en doute le sérieux de la direction, ce qui entraîne un
sentiment de pessimisme. Les participants des deux entreprises sont à l’aise avec les outils proposés par
les ergonomes et ont une perception très positive des réunions de travail.
Dans la discussion, les chercheurs soulignent que l’approche développée pour l’analyse des tâches variées
n’est pas généralisable à toutes les entreprises et que des efforts devraient être maintenus pour développer
des démarches mieux adaptées aux entreprises au contexte plus difficile. Les chercheurs soulignent la
complémentarité entre les méthodes utilisées par les ergonomes pour analyser les difficultés rencontrées
par les participants et celles utilisées par l’andragogue pour analyser les représentations.
Les chercheurs expliquent les différences observées entre les deux entreprises par des facteurs liés au
contexte et à la culture d’entreprise et soulignent aussi l’influence possible de facteurs individuels.
L’analyse des difficultés rencontrées par les participants mène à des constats généraux sur
l’apprentissage de l’ergonomie en milieu de travail.
Finalement, les chercheurs proposent un bilan de l’intervention dans ces deux entreprises au contexte si
différent.
Le bilan dans l’usine 2 est très positif. Des transformations d’envergure ont été générées et les
participants ont très bien maîtrisé la démarche d’analyse de poste. Toutefois le gain au niveau des
représentations est faible, car celles-ci étaient déjà riches et complexes au début de l’intervention.
Le bilan dans l’usine 1 est plus mitigé. Là aussi des transformations significatives ont été implantées,
cependant des difficultés importantes ont été rencontrées. Malgré une évolution non négligeable, en fin de
projet, des difficultés subsistent et la prise d’autonomie est faible. Cependant, compte tenu de la situation
initiale, le gain au niveau des représentations est beaucoup plus important et des barrières importantes ont
été franchies.
Ainsi, les chercheurs pensent que l’apport de l’intervention a été plus significatif à l’usine 1, celle au
contexte non favorable. Dans une perspective de prévention des TMS, les chercheurs discutent de
l’importance de poursuivre des recherches afin d’adapter les démarches d’intervention aux usines au
contexte difficile, où il y a peu d’études, en raison des risques et des difficultés que cela soulève.
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