L’ACCENT MSL Volume 1 No 2 JUIN 2015 Collège Mont-Saint-Louis 1700, boulevard Henri-Bourassa Est Montréal Textes : Dominyk Grenier Amélie Mathieu Lalalisons Pierre Foglia, chroniqueur bien connu, dénonçait avec un brin d’ironie la « lalalisation » du français. Ça l’a bien été! Ça l’a l’air que c’est facile! Ça l’a commencé la semaine passée. Ça l’a été une erreur! Toutes ces formulations trop souvent entendues sont le résultat d’un « l » euphonique qui a été ajouté à la phrase sans fondement grammatical. Ceci est certainement une erreur en langue française. Par contre, y a-t-il des cas où ça l’a serait accepté ? En fait, pour y répondre, il faudrait regarder une phrase comme celle-ci : Ça l’a fait rire. Dans ce cas, le « l’ » est le résultat de la pronominalisation du complément direct qui est ensuite déplacé avant le verbe. Ainsi, la phrase d’origine Ça a fait rire Gaston devient Ça l’a fait rire, car le « l’ » reprend Gaston. Dans ce cas, on ne parle pas d’un « l » euphonique erroné, mais simplement d’un complément direct déplacé avant le verbe. D. G. Le souci de la langue en tout temps Il est difficile de transférer ses connaissances d’un domaine à un autre. Souvent, les élèves cloisonnent leurs compétences à une même matière. Ils se retrouvent donc à faire attention à la qualité de leur français que dans leur cours de français. Pourtant, il est nécessaire d’utiliser un français correct en tout temps et dans tous les travaux. Pour souligner l’importance que le Collège apporte à cette dimension, les enseignants de toutes les matières peuvent intégrer ce critère dans leur correction sous certaines conditions. Par exemple, l’élève doit avoir eu suffisamment de temps pour se corriger et avoir accès à ses outils grammaticaux. Jusqu’à 10 % de la note peut être déduit du résultat final. De cette manière, le Collège souligne l’importance que tous les acteurs du milieu accordent à la langue. Une langue soignée en tout temps est un outil primordial pour atteindre les buts que chacun se fixe. A. M. Extraits de textes Comme enseignants, nous avons souvent la chance de tomber sur des perles écrites par les élèves. Malheureusement, nous sommes les seuls à les recueillir. Pour remédier à la situation, voici quelques extraits pour votre plaisir. Voyez leur créativité et la beauté de leurs mots. Chère musique de Anaïs Malacket-Hamel (3B) Antoinette, ma guitare de Louis-Martin Gignac (3F) Les rêves par Qi Shan Bonmariage (4H) Ma vision du monde par Pascale Roy (3D) «Lorsque mes doigts se promènent tout de long de ta nuque De longs frissons de joie rendent ma tristesse caduque Ta voix mélodieuse, ton souffle et tes dires si doux M’émeuvent à tel point que des larmes perlent sur mes joues.» «Pour moi, les rêves représentent à la fois des objectifs, des idéaux inatteignables et notre inconscient. Ils s’opposent à l’ennui puisqu’ils nous défient. Pour les réaliser, il faut s’activer, il faut travailler et persévérer. Ils orientent nos choix et nos décisions.» «Mes conquêtes précédentes n’avaient été que froideur et distance. Vous vîntes, tel un vent de fraicheur, m’envelopper de votre caresse presque imperceptible. Un rideau fut alors levé, mon vrai visage enfin dévoilé. Vous me partageâtes votre vision du monde si bien que nous ne formâmes plus qu’un tout.» «Puisque chacune de tes notes me rapproche peu à peu des étoiles. C’est comme une révélation, un sentiment d’amour, une chaleur au fond de soi. Ta voix venue du ciel, ta voix qui semble m’appeler vers l’éternel, C’est à elle seule qu’appartient le pouvoir de m’extirper de la torpeur.» Échange épistolaire par Isabel Corona-Charbonneau (4D) «J’ai eu l’audace de tomber amoureux de vos yeux. J’étais conscient que je pouvais leur offrir ce qu’ils désiraient; mon aspect n’avait en effet rien pour vous déplaire. Mais hélas, je n’étais pas doté de l’éloquence qui, seule, aurait pu subjuguer votre esprit et conquérir votre cœur…» Merci aux enseignants qui ont partagé ces extraits. D. G. La collection de bandes dessinées du Collège Pour certains, lire des bandes dessinées n’est pas aussi sérieux ou formateur que de lire un roman. Pourtant, plusieurs études montrent que la lecture assidue de bandes dessinées augmente les compétences en littératie chez les enfants comme chez les adultes. Il faut donc arrêter de dédaigner ce genre littéraire et y exposer les élèves. Dans cette optique, la bibliothèque de l’école offre une très belle collection d’albums qui couvre une multitude d’univers. Que vous aimiez les sports, l’histoire, la science-fiction, les récits introspectifs ou plutôt rire, les rayons regorgent de livres qui vous permettront d’assouvir votre curiosité. Et même si historiquement les thèmes développés dans les albums semblaient plus s’adresser aux garçons, depuis plusieurs années le genre s’est renouvelé et offre plusieurs séries qui touchent plus particulièrement les filles. Sensible à cette problématique, la bibliothécaire du Collège a assemblé une jolie sélection qui s’adresse plus spécifiquement à elles. À l’heure du diner, souvent, tous les divans sont empruntés et les élèves sont plongés dans un album. Le développement de cette collection aide certainement à donner le goût de la lecture. Quelques suggestions de bandes dessinées à lire que vous pouvez trouver au Collège : N’embrassez pas qui vous voulez de Sowa et Revel Polina de Bastien Vivès Glorieux printemps de Sophie Bédard Le sommet des dieux de Jiro Taniguchi Murena de Delaby et Dufaux A.M. Critique de roman par Dominyk Grenier, Enseignante de français de 3e secondaire Le quatrième mur par Sorj Chalandon Une page couverture assez sobre, un titre intriguant et la mention «Prix des libraires du Québec : roman hors Québec 2014», voilà ce qui m’a d’abord attirée vers le roman Le quatrième mur de Sorj Chalandon, un journaliste et écrivain français dont la plume a été récompensée à quelques reprises pour ses différentes œuvres dont Une promesse et Retour à Killybegs. L’histoire de Georges, ce protagoniste français désireux de réaliser le rêve fou d’un ami mourant, soit celui de mettre en scène la pièce culte Antigone de Jean Anouilh en plein cœur de Bérouth avec des acteurs provenant de camps ennemis, nous transporte dans une dure réalité qu’est la guerre civile au Liban. Cela a certainement été une lecture déroutante au départ, car les lieux, les personnages et le contexte sociohistorique sont assez loin de notre vie nord-américaine. Or, prise au piège par la qualité de l’écriture de Chalandon, dure et réaliste, par l’évolution psychologique du personnage principal brillamment construite et par l’intrigue habilement ficelée, je me suis laissée emporter par cette tragédie. L’espoir, la terreur, la rage, l’amour et l’injustice… tout y était! À un certain moment, on a même l’impression de vivre l’histoire à travers Georges, ce qui démontre tout le talent de l’auteur. Ainsi, une fois imprégnée de cet univers, il a été difficile de me détacher de ces pages. Il va sans dire que je recommande cette lecture qui m’a permis de réfléchir à la dure réalité vécue dans certains pays. C’est malaisant d’entendre malaisant Vous avez certainement entendu ce mot autour de vous dernièrement : malaisant. Il se glisse si facilement dans une conversation : J’ai vécu une situation si malaisante que j’ai voulu pleurer. Pourtant, cet adjectif a sans doute causé un malaise à vos oreilles. Vous avez été mal à l’aise pour celui qui l’utilisait parce que vous saviez qu’il s’éloignait du bon usage. Même s’il n’est pas considéré comme correct pour l’instant dans la langue française, il semble tout de même remplir un vide lexical puisqu’aucun autre adjectif n’existe pour le remplacer efficacement. Nous sommes devant un cas intéressant du français; comme il est utile et qu’il comble un manque réel peut-être qu’à force d’usage ce mot deviendra acceptable, surtout qu’il n’est pas un anglicisme. L’introduction officielle de ce nouveau terme pourrait se faire si son utilisation devient très répandue. Du coup, il ne serait plus malaisant de dire malaisant. Si le sujet vous intéresse, vous pouvez lire l’article détaillé de Ludmila Bovet «Malaisant» : intrus ou revenant dans la revue Québec Français # 172. A. M.