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PrÉface
Années et maturité aidant, des matériaux d’abord inconnus vien-
draient nous conforter dans nos intuitions et nous inciteraient à
reprendre, compléter et améliorer autant que possible notre sujet
pour donner le livre que voici.
Notre méthode, d’une part, recourt à ce que nous appellerons avec
les tenants de la Philosophia perennis l’« esprit traditionnel » (à ne pas
confondre avec traditionaliste), en partant de la constatation que le
Présocratisme procède justement de cet esprit ; elle se veut, d’autre
part, « comparative » en considérant que les enseignements qui y
gurent sont indissociables de ceux qui leur sont ailleurs contempo-
rains, en particulier les enseignements orientaux, et peuvent même
par ces derniers se trouver éclaircis, voire éclairés.
« Traditionnelle », cette méthode ne saurait tenir pour négligeable la dis-
tinction inhérente à toute sagesse supra-rationnelle et supra-humaine
entre ce que l’on peut appeler sans aucune idée restrictive ou péjora-
tive, mais dans le sens premier de ces termes, – ta exoterika et ta esoterika,
principalement appliqués ici aux enseignements de Pythagore et d’Em-
pédocle – : d’une part, l’exotérisme : l’« écorce », l’aspect extérieur d’une
doctrine, interprétée selon un esprit subjectif et dans un sens littéral, à
l’intention de tous les hommes : ainsi, de la religion populaire chez les
Grecs ; – d’autre part, l’ésotérisme : le « noyau », l’aspect secret ou discret
de la doctrine, révélée dans ses acceptions symboliques et réservée aux
postulants spirituellement les plus qualiés ; ainsi, des Mystères et de
l’enseignement des maîtres de sagesse. Ce second aspect, qui a été soit
nié, soit négligé par les attitudes que nous dénoncions plus haut, sera
bien entendu pour nous le plus digne d’intérêt, et c’est sur lui tout spé-
cialement que nous porterons notre attention.
« Comparative », cette méthode considère également l’ensemble des
doctrines initiatiques, d’une richesse et, en l’occurrence, d’une utilité
insoupçonnées, dérivées ensemble d’un Orient dont l’étude, assure
Guénon, « si on voulait l’entreprendre d’une façon vraiment directe,
serait susceptible d’aider dans une large mesure à comprendre l’anti-
quité », et particulièrement, « l’antiquité grecque, pour laquelle nous