préface - Bruylant

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PRÉFACE
Au moment où les signes d’une sortie de crise se confirment au
niveau international, chacun veut prendre sa part de la croissance qui
revient ; la tentation peut être forte de le faire dans un contexte non
coopératif, qui serait pourtant des plus dangereux. La toile de fond de
cette réflexion est celle d’un monde multipolaire dans lequel la compétition s’est accrue. Les grands pays émergents, qui ont le plus bénéficié de cette mondialisation, y jouent un rôle désormais crucial, en
tant que moteurs de croissance. Dans ce nouveau contexte, leur posture apparaît parfois ambigüe, oscillant entre préoccupations de pays
industrialisés et solidarité à géométrie variable avec les pays moins
avancés.
La crise économique a mis en lumière le retour d’un certain « nationalisme économique ». Nous n’avons heureusement pas assisté à une
vague protectionniste, mais de réelles discriminations sont observées, que l’on peut qualifier de « protectionnisme de basse intensité ».
Les plans de relance de certains pays, dont les marchés publics sont
réservés aux entreprises nationales, en sont un exemple. Le nationalisme économique gagne également de nouveaux terrains (ceux de
l’exploitation des matières premières, de l’accès aux technologies ou
des localisations industrielles par exemple) et prend des formes plus
indirectes, comme l’utilisation des taux de change.
Que faire dans ce contexte ? D’abord, partir d’une analyse lucide de
la réalité. La mondialisation est irréversible, il faut l’intégrer, tenter de
la façonner selon nos intérêts et nos convictions et continuer à y adapter notre économie, sans crainte, mais sans naïveté non plus. Face à
ces nouveaux défis, la France au sein de l’Europe entend mener une
action dans le sens d’une coopération internationale et d’une réforme
du système actuel de régulation mondiale.
Elle œuvre à un système international qui remette au cœur des différentes enceintes de régulation mondiale comme le G 20 ou l’OMC les
différentes dimensions de la mondialisation. Avoir invité le Directeur
général du Bureau International du Travail à participer aux travaux
du G20 de Pittsburgh est révélateur des progrès accomplis en ce sens.
Pour que l’OMC contribue à la mise en place d’un cadre loyal aux
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échanges, il est indispensable qu’elle intègre, elle aussi, les dimensions
sociales et environnementales dans ses règles et sa jurisprudence.
De même, les règles issues des cycles de négociation de l’OMC doivent mieux intégrer les problématiques environnementales. La France
souhaite la création d’une Organisation Internationale de l’Environnement. Elle plaide pour la mise en place d’un mécanisme d’ajustement
aux frontières en ce qui concerne les émissions de carbone, afin d’éviter un trop grand décalage entre l’Europe à hauts standards environnementaux et les pays qui ne se sont pas engagés aussi loin que nous
dans la lutte pour la protection de l’environnement. C’est la traduction
de notre engagement en faveur d’une concurrence loyale et contre
une forme de « dumping environnemental ». Ensuite, elle œuvre au
niveau européen pour mettre en place une véritable politique industrielle et de l’innovation. Plus que jamais, la stratégie de Lisbonne, que
nous avons définie ensemble en 2000 et que nous améliorons actuellement, est au plan des principes pertinente ; mais elle s’est avérée
bien décevante dans sa mise en œuvre. Il est temps que l’Europe organise et développe, à l’instar de ce qu’est en train de faire la Chine,
une économie de la connaissance et de l’innovation. C’est ce qui sera,
encore davantage qu’aujourd’hui, le moteur de la croissance, de la différenciation des industries et, donc, des avantages compétitifs. Or, par
exemple, il n’existe pas de coordination entre la France et l’Allemagne
sur la question des transferts de technologies vers les pays tiers. De
nouveaux partenaires industriels sont à construire, entre Européens,
mais aussi avec certains des pays émergents, sans naïveté. Elle va
œuvrer enfin au niveau national dans la continuité de l’action européenne pour faire de la France une place industrielle dynamique et
attractive. Ainsi, le Crédit Impôt Recherche (CIR) français, considéré
comme le plus efficace au sein de l’OCDE, favorise-t-il autant la compétitivité des entreprises françaises qui se tournent vers l’étranger,
que l’attractivité du territoire français pour les investissements étrangers. Ce type d’actions, horizontales, ou trans-sectorielles, doit être
complété par des politiques sectorielles en filières. Parmi ces filières,
les plus intéressantes pour développer dynamiques économiques et
industrielles, dans un continuum d’actions franco-européennes, sont
bien connues : le transport, l’économie verte, la pharmacie, l’aéronautique, l’agroalimentaire, les nanotechnologies, les biotechnologies et
l’énergie, dont le nucléaire. Au-delà de la définition de secteurs stratégiques, arrêtés dans le décret de 2005, le monde tel qu’il se déploie
et se réorganise amène à penser toute politique industrielle, particulièrement la nôtre, à la lumière du marqueur de la compétitivité. C’est
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fort de cette conviction que le gouvernement français a choisi d’utiliser l’Emprunt national 2010 pour agir sur ces deux axes, horizontal
et vertical, en soutenant, par exemple, la recherche universitaire et en
promouvant le secteur de l’économie verte.
En conclusion, le choix de la France doit être celui d’une France
ouverte. Ne pas céder aux sirènes trompeuses du protectionnisme.
Au contraire, décider de porter davantage nos entreprises vers l’international (commerce et investissements) tout en restant particulièrement accueillant pour les investissements directs étrangers (IDE).
Ainsi, nous tirerons parti d’une croissance qui sera plus forte dans le
reste du monde qu’en Europe. Il est, en effet, particulièrement important pour la France d’être, à la fois, le sixième exportateur mondial de
biens et services, le deuxième investisseur international à l’étranger et
le troisième pays d’accueil des IDE. Il nous faut garder ces éléments
en tête et nous rappeler que la mondialisation ne remet pas en cause,
loin s’en faut, les nations. Elle territorialise les ambitions, mais doit le
faire dans une approche collaborative et multilatérale, qui prenne en
compte les manières de penser et de se positionner des autres continents que l’Europe, et particulièrement, des continents émergents.
Anne-Marie IDRAC,
Secrétaire d’État au commerce extérieur,
janvier 2010
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