Non classifié ENV/EPOC/GSP(2008)14/FINAL Groupe de

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Non classifié
ENV/EPOC/GSP(2008)14/FINAL
Organisation de Coopération et de Développement Économiques
Organisation for Economic Co-operation and Development
05-Jul-2010
___________________________________________________________________________________________
Français - Or. Anglais
DIRECTION DE L'ENVIRONNEMENT
COMITE DES POLITIQUES D'ENVIRONNEMENT
ENV/EPOC/GSP(2008)14/FINAL
Non classifié
Groupe de travail sur les questions d'environnement mondiales et structurelles
LES LIENS ENTRE POLITIQUE DE L’ENVIRONNEMENT ET COMPÉTITIVITÉ
Français - Or. Anglais
JT03286487
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ENV/EPOC/GSP(2008)14/FINAL
AVANT-PROPOS
L’un des problèmes auxquels les ministères de l’environnement sont confrontés consiste à faire
cohabiter mondialisation et performances environnementales et à assurer leur complémentarité. La
question des répercussions potentielles des politiques d’environnement sur la compétitivité est au
premier plan des enjeux politiques, comme en témoignent les débats auxquels le règlement REACH a
donné lieu en Europe ou les négociations concernant l amise en œuvre d’un mécanisme d’atténuation
du changement climatique après l’expiration du Protocole de Kyoto.
Le programme de travail de l’OCDE sur l’environnement prévoit des activités visant à améliorer
la conception des politiques d’environnement, dans l’optique d’atteindre les objectifs
environnementaux de l’action publique avec efficacité et efficience, tout en limitant au minimum les
retombées potentielles sur la compétitivité, voire en stimulant celle-ci, si possible.
Le présent document a été rédigé à l’occasion de la réunion de 2008 du Comité des politiques
d’environnement de l’OCDE au niveau des ministres. Il a pour but de décrire les avancées théoriques
récentes concernant les liens entre politiques d’environnement et compétitivité, et de passer en revue
les publications qui analysent des observations concrètes. Il reprend un inventaire qui avait été
consacré par l’OCDE à cette thématique en 19971. Les conclusions sur l’action à mener s’adressent
aux pouvoirs publics.
Ce document a été rédigé par Leena Lankoski, du Département d’économie et de gestion de
l’Université de Helsinki. Les projets qui l’ont précédé ont été examinés par le Groupe de travail sur les
questions d’environnement mondiales et structurelles de l’OCDE.
Copyright OCDE, 2009
Toute demande d'autorisation de reproduction ou de traduction totale ou partielle de ce
document doit être adressée au Chef de la Division des publications, OCDE, 2 rue André Pascal,
75775 Paris Cedex 16, France.
1
Adams, J. 1997. Environmental policy and competitiveness in a globalised economy: Conceptual issues and a
review of the empirical evidence. In : Globalisation and environment: Preliminary perspectives. Paris, OCDE.
2
ENV/EPOC/GSP(2008)14/FINAL
TABLE OF CONTENTS
RÉSUMÉ ................................................................................................................................................. 4
Principales conclusions ........................................................................................................................ 4
Leçons tirées ........................................................................................................................................ 6
Conclusions pour les travaux futurs ..................................................................................................... 8
INTRODUCTION ................................................................................................................................... 9
CADRE ANALYTIQUE ......................................................................................................................... 9
Le triangle politique environnementale - performance environnementale – compétitivité au
niveau de l’entreprise ......................................................................................................................... 12
La compétitivité aux niveaux sectoriel et national ............................................................................. 19
Le contexte de la mondialisation........................................................................................................ 21
TOUR D’HORIZON DES ÉTUDES EMPIRIQUES RÉCENTES ...................................................... 23
Les études qui établissent un lien entre performance environnementale et compétitivité ................. 24
Les études qui établissent un lien entre politique environnementale et compétitivité ....................... 26
Prévisions et simulations des impacts des politiques environnementales sur la compétitivité .......... 31
Discussion sur les recherches empiriques récentes ............................................................................ 32
EXAMEN DES AVANTAGES ET DES INCONVÉNIENTS DES MESURES PROPOSÉES
POUR RÉSOUDRE LE PROBLÈME DES IMPACTS DÉFAVORABLES DE LA POLITIQUE
ENVIRONNEMENTALE SUR LA COMPÉTITIVITÉ ...................................................................... 36
Types de mesures ............................................................................................................................... 36
Critères d’évaluation .......................................................................................................................... 38
Examen des avantages et des inconvénients ...................................................................................... 39
LES LEÇONS APPRISES ET LA VOIE À SUIVRE .......................................................................... 44
REFERENCES ...................................................................................................................................... 48
Figures
Figure 1. Cadre d’analyse sur les liens entre politique environnementale et compétitivité
examinés dans cette étude .................................................................................................................. 10
Figure 2. Les mécanismes liant performance environnementale et performance économique au
niveau de l’entreprise. ........................................................................................................................ 12
Figure 3. Les mécanismes directs liant la politique environnementale et la performance
économique au niveau de l’entreprise. ............................................................................................... 16
Figure 4. Les déterminants de la compétitivité au niveau national (voir Porter et al. 2007) ........ 20
3
ENV/EPOC/GSP(2008)14/FINAL
RÉSUMÉ
Principales conclusions
1.
Une politique environnementale peut obliger des entreprises à améliorer leurs performances
environnementales, et donc les obliger effectivement à subir les impacts en termes de compétitivité
associés à ces améliorations. L’amélioration des performances environnementales peut produire des
impacts positifs en termes de compétitivité par le biais (1) d’une meilleure efficience des ressources,
(2) de meilleures relations entre les intéressés, (3) d’une différentiation des produits, (4) d’un meilleur
accès aux marchés, et (5) de la création de nouvelles activités économiques. Elle peut avoir des
impacts négatifs en termes de compétitivité par le biais (1) de hausses des coûts de production, (2)
d’une baisse de productivité, et (3) d’impacts négatifs sur la qualité perçue des produits.
2.
Une politique environnementale peut aussi avoir sur la compétitivité des impacts directs
plutôt que par le biais des améliorations des performances environnementales des entreprises. Une
politique environnementale peut produire de tels impacts positifs sur la compétitivité par le biais (1) de
la création d’une demande pour les outputs des entreprises, (2) d’une hausse des coûts de la
concurrence, et (3) d’une amélioration de la qualité de l’environnement. Elle peut avoir des impacts
négatifs en termes de compétitivité par le biais (1) d’une réduction de la demande pour les produits des
entreprises, (2) d’une hausse des prix des intrants, (3) de coûts de transaction, (4) de nouveaux
éléments de coûts imposés aux entreprises, et (5) d’un effet négatif sur la productivité.
3.
Au niveau sectoriel, la compétitivité des entreprises exerçant leur activité dans un secteur
donné est étudiée dans une perspective globale. Sachant que des entreprises à l’intérieur d’un même
secteur peuvent différer entre elles du point de vue de leurs intrants, de leurs stratégies, de leurs
technologies, de leurs ressources, etc., les impacts d’une politique environnementale sur leur
compétitivité peuvent varier. S’il existe des différences importantes entre ces entreprises, les divers
mécanismes agissant au niveau de l’entreprise qui ont été évoqués précédemment peuvent avoir sur la
compétitivité de certaines entreprises un impact net positif, et sur celle d’autres entreprises un impact
net négatif.
4.
Un instrument de la politique environnementale peut donc affecter la compétitivité par
différentes voies concurrentes. L’impact net résultant de tous ces impacts positifs et négatifs possibles
détermine l’impact global d’une mesure politique relative à l’environnement sur la compétitivité.
L’impact net peut ne pas être le même à court terme et à long terme. Par ailleurs, d’aucuns ont fait
valoir qu’il prenait la forme d’une fonction dynamique spécifique de la performance environnementale
en U inversé.
5.
La mondialisation peut influencer le lien entre environnement et compétitivité de diverses
manières. Elle peut engendrer la diffusion d’une autoréglementation environnementale à travers les
structures des entreprises multinationales et les chaînes globales d’approvisionnement. Elle peut aussi
affecter la capacité des entreprises à améliorer leurs performances environnementales dans la mesure
où les technologies, la connaissance et les bonnes pratiques en matière environnementale sont
dispersées par les flux d’échanges et d’investissements. Dans le contexte d’une concurrence accrue,
des groupes d’intérêt peuvent ressentir un besoin plus impérieux de s’opposer à toute proposition de
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ENV/EPOC/GSP(2008)14/FINAL
mesure entraînant une augmentation de coût, et dans le contexte d’une production mobile, les groupes
de pression ont plus de poids sur les décisions politiques. La mondialisation complique aussi l’analyse
des impacts de la politique environnementale sur la compétitivité, sachant que, dans un contexte de
mobilité croissante du capital et de la main d’œuvre, le lien à double sens entre compétitivité au niveau
de l’entreprise et compétitivité au niveau national est rompu. Enfin, dans une économie mondialisée,
les réglementations environnementales exigeantes sont susceptibles de migrer des pays stricts vers les
pays laxistes, auquel cas les gains de compétitivité offerts par les normes laxistes ne sont que
temporaires.
6.
Un grand nombre d’études empiriques ont été réalisées sur le lien entre environnement et
compétitivité. Il s’agit d’études au niveau de l’entreprise visant à déterminer un lien entre les
performances environnementales et les performances comptables ou boursières, d’études aux niveaux
sectoriel et national pour tenter de trouver un lien entre le degré de rigueur des politiques de
l’environnement et la productivité, l’innovation, les flux d’échanges ou les décisions d’investissement
et d’implantation géographique, et enfin, d’études ex ante pour tenter de prévoir les impacts en termes
de compétitivité d’une politique environnementale donnée.
7.
Au total, le bilan est mitigé. Plusieurs raisons permettent de considérer que jusqu’à présent,
les nombreux travaux empiriques n’ont pas apporté de réponse à cette question: (1) Les résultats ne
sont pas compatibles entre eux. Des études différentes aboutissent à des conclusions contradictoires, et
la communication entre les différents chercheurs pourrait être meilleure. (2) Les résultats ne sont pas
compatibles avec les prédictions théoriques. Le raisonnement théorique selon lequel une politique
environnementale nuirait à la compétitivité n’a pas été confirmé par les études empiriques. Cependant,
ce raisonnement paraissant théoriquement convaincant en économie, les chercheurs continuent
d’essayer de découvrir les impacts prédits. (3) Les résultats ne sont pas compatibles avec la pratique
politique. Même si l’hypothèse des impacts négatifs sur la compétitivité n’a pas pu être corroborée, les
entreprises s’opposent généralement aux propositions de mesures environnementales en invoquant une
perte de compétitivité.
8.
Ceux des chercheurs qui pensent que des conclusions peuvent être tirées de ce bilan mitigé
concernant le lien entre performances environnementales et compétitivité au niveau de l’entreprise ont
tendance à affirmer que ce lien est légèrement positif, ou du moins, qu’il n’est pas négatif. D’un autre
côté, les chercheurs qui pensent qu’il se dégage bien une tendance des études récentes réalisées aux
niveaux sectoriel et national en matière de lien entre politique environnementale et compétitivité
exprimée en termes de flux d’échanges et de décisions d’implantation géographique considèrent le
plus souvent que ce lien est négatif.
9.
Une multitude de données et de problèmes méthodologiques peuvent être identifiés pour
expliquer que les recherches empiriques ne puissent pas déterminer de façon probante un lien entre
politique environnementale et compétitivité. D’autres explications sont aussi envisageables. Une
explication souvent proposée est que les coûts environnementaux représentant une part si petite du
coût total, et le degré de rigueur dans la politique environnementale ayant si peu varié entre les
différents partenaires des échanges, il n’existerait tout simplement pas d’impacts notables sur la
compétitivité. Une autre possibilité est celle de quelque lien sous-jacent entre politique
environnementale et compétitivité, masqué cependant par d’autres facteurs agissant dans le sens
contraire. En particulier, les dotations en capital, en main d’œuvre qualifiée ou en ressources naturelles
pourraient permettre de neutraliser les impacts des mesures de politique environnementale.
10.
L’idée que le lien entre politique environnementale et compétitivité ne serait pas universel
mais contingent est en train de faire son chemin: l’ampleur et même le sens des impacts sur la
compétitivité peuvent différer selon les entreprises et selon les secteurs, selon le type de mesure de
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ENV/EPOC/GSP(2008)14/FINAL
politique publique et selon le type de problème environnemental. C’est pourquoi le lien cesse
rapidement d’être identifiable quand on adopte une vue d’ensemble. Plutôt que de trouver une réponse
standard, il s’agit de comprendre la nature de ces impacts dans des circonstances particulières. Si le
lien prend la forme d’une fonction dynamique en U inversé et propre à chaque cas, il est
problématique d’extrapoler les résultats à des entreprises différentes et à des secteurs différents, à des
problèmes différents, à différents degrés de rigueur dans la politique environnementale ou à des
périodes différentes.
11.
Ainsi, par exemple, des politiques environnementales différentes peuvent ne pas engendrer la
même série d’impacts différenciés sur la compétitivité. C’est en partie du choix des mesures que
dépendent la généralisation des progrès des performances environnementales dans les entreprises et
donc l’étendue des impacts qui en résultent sur leur compétitivité. Par ailleurs, des instruments de
politique publique différents peuvent ne pas avoir les mêmes impacts sur la demande, sur les coûts
pour les entreprises et pour leurs concurrents, ni sur la qualité de l’environnement.
12.
Un autre exemple illustrant la spécificité des impacts sur la compétitivité par rapport à
chaque cas a trait à la structure du secteur. Des entreprises qui vendent un produit homogène sur un
marché de concurrence parfaite ne peuvent pas répercuter une hausse des coûts sur le prix du produit,
elles doivent donc subir une baisse de leurs profits. Au contraire, des entreprises qui bénéficient d’un
relatif pouvoir de marché peuvent répercuter (en partie) la hausse des coûts sur le prix du produit, ce
qui réduit les impacts sur la compétitivité.
13.
L’autre aspect des liens à double sens entre politique environnementale et compétitivité
concerne les impacts que peuvent voir les problèmes de compétitivité sur la politique
environnementale. Diverses mesures ont été proposées pour accompagner les mesures
environnementales, dans le but de neutraliser les impacts négatifs ultimes sur la compétitivité. Ces
mesures peuvent être divisées en trois catégories: (1) les mesures visant à adoucir les impacts sur la
compétitivité dans les pays réglementés, (2) les mesures de promotion d’une politique
environnementale dans les pays non réglementés et (3) les mesures destinées à corriger les impacts des
mesures environnementales aux frontières. Cependant, il arrive aussi que les impacts positifs attendus
en termes de compétitivité puissent conduire les entreprises à faire pression pour obtenir des mesures
environnementales plus strictes ou à prendre des initiatives en la matière, en avance sur les autorités
gouvernementales.
14.
Pour pouvoir étudier utilement les avantages et les inconvénients des diverses mesures
destinées à neutraliser les impacts négatifs sur la compétitivité, il est nécessaire d’adopter plusieurs
points de vue: économiques, écologiques, légaux et politiques. Ce qui ressort notamment d’un débat
sur les avantages et les inconvénients de telles mesures palliatives, c’est qu’il n’existe pas de réponses
définitives. Toute mesure destinée à neutraliser les impacts négatifs sur la compétitivité comporte des
aspects positifs et des aspects négatifs, et le poids relatif des avantages et des inconvénients dépend
des particularités du problème environnemental concerné et de la politique environnementale initiale,
ainsi que des détails de la conception et de la mise en œuvre des mesures en question. Le recours à des
mesures palliatives implique donc une analyse méthodique de la situation, quelle qu’elle soit.
Leçons tirées
15.
Les impacts en termes de compétitivité dépendent du type d’instrument de politique
environnementale adopté et des détails de sa mise en œuvre, des caractéristiques de l’entreprise
concernée et de son secteur, et du domaine concerné en termes d’environnement. Tous ces facteurs
agissent de façon simultanée. Nous pouvons donc distinguer trois niveaux de détail dans l’analyse des
impacts sur la compétitivité. Au niveau le plus général, la question à étudier est le lien entre politique
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ENV/EPOC/GSP(2008)14/FINAL
environnementale et compétitivité. Comme on l’a vu, il n’existe pas de réponse tranchée à cette
question. A un niveau intermédiaire, il s’agit d’examiner les impacts en termes de compétitivité par
mesure de politique publique, par secteur et par type de problème environnemental. L’examen de cette
question devrait permettre de dégager des implications plus claires pour la politique. Au niveau le plus
détaillé, la question est de savoir de quelle manière une mesure particulière visant à résoudre un
problème écologique particulier affecte certaines entreprises ou certains secteurs particuliers. C’est à
ce niveau d’analyse que peuvent être formulées les réponses les plus définitives. Le choix du bon
niveau d’analyse dépend des objectifs de l’étude à réaliser et de considérations pratiques.
16.
Il existe bel et bien des situations dans lesquelles une politique environnementale produit des
impacts positifs en termes de compétitivité (ce que l’on appelle des situations gagnant-gagnant).
Cependant, on ne sait pas bien quelle est la fréquence de ces situations gagnant-gagnant ni quelle peut
être l’importance des impacts positifs en termes de compétitivité. Ce sont les situations gagnantgagnant qui suscitent la formulation de messages clairs. Or, une politique environnementale devrait
être instituée pour des raisons écologiques, et non pas dans le but de parvenir à des situations gagnantgagnant. Toujours est-il qu’il faut s’efforcer de trouver des politiques compatibles avec les situations
gagnant-gagnant, ce qui conduit à favoriser des politiques incitant à l’innovation, qui soient stables et
prédictibles, qui prévoient des périodes de transition adaptées, qui privilégient les fins plutôt que les
moyens et qui exploitent les instruments de la politique économique. Par ailleurs, il convient que les
entreprises identifient et exploitent toutes les possibilités de stratégie gagnant-gagnant existantes. La
politique peut jouer ici un rôle, en sensibilisant davantage les entreprises aux possibilités de stratégie
gagnant-gagnant et en les aidant à mettre en place des solutions gagnant-gagnant, par exemple en
diffusant une information sur les bonnes pratiques ou en promouvant la diffusion de technologies
respectueuses de l’environnement.
17.
Il se peut que prévalent dans certaines situations des préoccupations injustifiées exagérées
concernant les impacts négatifs en termes de compétitivité. C’est le cas, par exemple, quand l’analyse
des impacts sur la compétitivité prend en compte uniquement les hausses de coûts tout en ignorant les
possibilités d’avantages en termes de marché ou d’économies sur les dépenses, ou quand une analyse
statique ne tient pas compte d’effets dynamiques comme l’innovation ou l’évolution des technologies
et aboutit, de ce fait, à surestimer les coûts. D’autre part, une mesure de politique environnementale
peut aussi susciter des attentes exagérément optimistes quant à son potentiel gagnant-gagnant, si par
exemple il n’est pas tenu compte des caractéristiques propres à cette mesure, au secteur concerné ou au
problème d’environnement en question. Dans les deux cas, il est recommandé d’obtenir une meilleure
information sur les impacts réels en termes de compétitivité. Dans l’étude des impacts économiques, il
importe de veiller à tenir compte de tous les différents liens positifs et négatifs entre politique
environnementale et compétitivité, même si ces impacts sont difficiles à mesurer ou à quantifier. Ces
impacts doivent être analysés avec un niveau de détail suffisant pour que les impacts spécifiques à une
situation donnée puissent être évalués.
18.
Il reste des situations dans lesquelles une politique environnementale aura des impacts
négatifs sur la compétitivité, si bien qu’il y aura des compromis à faire entre les objectifs
environnementaux et les objectifs économiques. Là encore, il est difficile de savoir quelles peuvent
être la fréquence de ces situations de dilemme et l’importance des impacts défavorables. Les situations
de dilemme sont les situations les plus problématiques pour l’élaboration des politiques publiques,
mais il existe aussi des messages clairs dans ces situations. Une politique environnementale efficience
aura nécessairement des impacts sur la compétitivité, dans le sens où une production durable deviendra
plus compétitive et une production non durable deviendra moins compétitive. Par ailleurs, c’est
précisément dans ces situations impliquant des compromis qu’une politique environnementale est la
plus nécessaire si l’on veut atteindre des objectifs environnementaux: là où existent des possibilités de
stratégie gagnant-gagnant, on peut privilégier davantage les approches volontaires. En cas de dilemme,
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ENV/EPOC/GSP(2008)14/FINAL
la mise en œuvre d’une politique environnementale implique une comparaison entre les avantages
obtenus du point de vue écologique et les conséquences défavorables du point de vue économique.
Cette comparaison se fait au niveau de la société dans sa globalité. En raison de préférences
différentes, le résultat de cette comparaison peut varier d’une société à une autre ou d’une période à
une autre. La comparaison devient plus compliquée lorsque les bienfaits pour l’environnement et les
conséquences défavorables du point de vue économique ne sont pas répartis de la même manière dans
l’espace et dans le temps.
19.
Même quand la mise en œuvre d’une politique environnementale sert clairement l’intérêt
général de la société, en dépit des impacts négatifs sur la compétitivité, il y a peu de chances que les
coûts et les bénéfices de cette politique soient partagés de façon égale entre les différents acteurs de la
société. Il y a des gagnants, mais certaines entreprises ou certains secteurs peuvent être perdants. Dans
l’élaboration des politiques, il s’agit de veiller à ce que les impacts négatifs sur la compétitivité ne
soient pas plus étendus que ce qui est évitable, par exemple en accordant une attention particulière à la
prédictibilité, aux périodes de transition et aux coûts de transaction. Des mesures spécifiques peuvent
aussi être prises pour aider l’adaptation de ceux qui sont perdants. Dans certains cas, des mesures pour
réduire les impacts négatifs d’une politique environnementale sur la compétitivité s’imposent pour que
cette politique soit acceptée. Les mesures envisagées doivent alors être étudiées minutieusement sous
plusieurs angles, afin d’éviter le risque que, par inadvertance, elles aillent à l’encontre de l’efficacité
de la politique initialement menée.
Conclusions pour les travaux futurs
20.
L’analyse conceptuelle et empirique indique que les effets d’une politique environnementale
sur la compétitivité et le bien-fondé des diverses mesures pouvant être prises pour lutter contre ces
effets sont très variables et dépendent fortement de l’entreprise ou du secteur, du problème
d’environnement concerné et des mesures en question. C’est pourquoi les résultats les plus fiables et
les plus exploitables peuvent être obtenus en étudiant les problèmes non pas au niveau le plus général,
mais plutôt au niveau d’analyse le plus détaillé. Une telle orientation peut être fructueuse pour les
travaux futurs.
21.
Point important mais trop négligé dans les analyses, les caractéristiques des différents
problèmes écologiques peuvent influencer les impacts de la politique environnementale sur la
compétitivité. Il serait nécessaire d’identifier les caractéristiques les plus déterminantes des problèmes
écologiques du point de vue des liens entre politique environnementale et compétitivité. De même,
l’examen de la justification des diverses mesures palliatives peut aussi varier en fonction du problème
écologique concerné.
22.
Une grande partie des études récentes ont trait au changement climatique, or le changement
climatique, en tant que phénomène écologique, économique et politique, diffère à bien des égards d’un
certain nombre d’autres problèmes écologiques. Entreprendre des travaux comparables sur d’autres
mesures de politique environnementale que celles qui concernent le changement climatique serait donc
opportun.
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ENV/EPOC/GSP(2008)14/FINAL
INTRODUCTION
23.
Le lien entre politique environnementale et compétitivité est une question importante en
matière de politique publique, et cette question s’impose d’autant plus à l’actualité que des
négociations sont en cours à propos du changement climatique. L’OCDE a déjà réalisé sur ce sujet une
étude d’inventaire (Adams, 1997), qu’il est nécessaire de remettre à jour. L’objectif de cette étude est
de couvrir les avancées conceptuelles récentes sur les liens entre politique environnementale et
compétitivité et de faire le point des travaux empiriques réalisés depuis 1997. A cette fin, ce document
développe un cadre analytique des liens entre politique environnementale et compétitivité et, sur cette
base, présente un examen des études existantes. Ce document ne vise pas à entreprendre de nouvelles
recherches, et il n’abordera pas les questions qui ne sont pas traitées par les études existantes.
CADRE ANALYTIQUE
24.
Un solide cadre analytique est nécessaire à une étude crédible des liens entre politique
environnementale et compétitivité, d’autant plus que, comme on le verra plus loin, les résultats
empiriques sont fragmentés et peu concluants. L’approche conceptuelle actuelle des liens entre
politique environnementale et compétitivité est discutée dans le cadre d’analyse présenté sur la Figure
1. L’étude traite des liens entre politique environnementale et compétitivité sous deux angles: la façon
dont la politique environnementale affecte la compétitivité (chapitre 3) et la façon dont les
préoccupations relatives à la compétitivité affectent la politique environnementale (chapitre 4). Le
cadre d’analyse tient compte des tendances actuelles de la mondialisation et de leur impact potentiel
sur le débat relatif à la compétitivité.
9
ENV/EPOC/GSP(2008)14/FINAL
Figure 1. Cadre d’analyse sur les liens entre politique environnementale et compétitivité examinés dans
cette étude
25.
Une des caractéristiques essentielles du cadre analytique de cette étude est de faire
explicitement la distinction entre performance environnementale (en termes d’impacts préjudiciables à
l’environnement) et politique environnementale. Pour bien prendre la mesure des impacts de la
politique environnementale sur la compétitivité, il importe de comprendre deux processus différents
par lesquels ces impacts peuvent se produire:
•
Premièrement, assurer un certain niveau de performance environnementale peut avoir pour
une entreprise des implications en termes de compétitivité. Ainsi, par exemple, une réduction
de la consommation d’énergie peut nécessiter un investissement dans un équipement à haut
rendement énergétique, permettre à l’entreprise de réaliser des économies sur les coûts des
intrants et promouvoir une image favorable de l’entreprise. Une politique environnementale
peut obliger l’entreprise à améliorer ses performances environnementales, si bien que celleci subira les impacts en termes de compétitivité liés à une telle amélioration.
•
Deuxièmement, une politique environnementale peut aussi avoir sur la compétitivité des
impacts directs plutôt que par le biais des améliorations des performances environnementales
des entreprises. C’est le cas lorsque le fait que l’entreprise se conforme aux exigences de la
politique environnementale ne change pas son niveau de performance environnementale
physique: par exemple, lorsqu’un système d’échanges de droits d’émission de polluants étant
institué, une entreprise achète suffisamment de droits d’émission pour pouvoir continuer à
émettre les mêmes quantités de polluants qu’auparavant. Ou bien, de tels impacts se
retrouvent également si une entreprise améliore ses performances environnementales mais si
les impacts sur sa compétitivité ne sont pas les mêmes que si elle avait réalisé la même
10
ENV/EPOC/GSP(2008)14/FINAL
amélioration de ses performances environnementales en l’absence de réglementation. Ainsi,
par exemple, il est possible qu’une entreprise puisse atteindre un certain niveau de
performance environnementale de façon plus rentable si elle peut elle-même décider des
moyens d’y parvenir, au lieu de se les voir imposer par une norme en matière de technologie.
26.
Par conséquent, même si l’objet de ce document est d’étudier les impacts de la politique
environnementale sur la compétitivité, il est nécessaire d’étudier aussi les liens entre performance
environnementale et compétitivité. Une mesure politique donnée peut engendrer simultanément les
deux processus d’impact évoqués ci-dessus, et dans ces deux processus, différents impacts positifs et
négatifs en termes de compétitivité peuvent être observés. Une mesure de politique environnementale
peut donc affecter la compétitivité par le biais de plusieurs vecteurs concurrents. L’impact net de
l’ensemble de ces vecteurs détermine l’impact global sur la compétitivité de l’entreprise. Une
distinction entre ces différents vecteurs peut permettre d’obtenir une vision plus claire des mécanismes
qui relient la politique environnementale à la compétitivité.
27.
Un autre aspect essentiel du cadre d’analyse est le fait que celui-ci permette une meilleure
compréhension des liens entre politique environnementale et compétitivité au niveau de l’entreprise,
c’est-à-dire au niveau auquel apparaissent réellement ces impacts, et qu’il permette d’étendre cette
vision aux niveaux sectoriel et national. Les liens en question étant complexes et difficiles à mesurer,
une telle approche ascendante est utile dans la mesure où elle permet d’étudier plus en détail des
situations hétérogènes et laisse apparaître pleinement la richesse de ces liens. D’aucuns ont même
affirmé récemment que dans les débats sur la politique environnementale, il n’avait pas été porté une
attention suffisante aux contingences au niveau de l’entreprise (DeCanio, 2008) et qu’une meilleure
compréhension des déterminants de la compétitivité au niveau de l’entreprise était cruciale (Porter et
al., 2007).
28.
Une approche ascendante est cependant rendue compliquée par le fait que des entreprises
puissent faire partie de plusieurs secteurs et exercer leur activité dans plusieurs pays. Dans une
économie mondialisée, les entreprises multinationales sont des acteurs importants. Par ailleurs,
Krugman (1994) a complètement remis en cause l’utilité du concept de compétitivité nationale.
L’extension aux niveaux sectoriel et national de la vision des impacts au niveau de l’entreprise n’est
donc pas automatique et ne va pas de soi.
29.
En ce qui concerne le terme de compétitivité, quelques précisions s’imposent. Ce terme est
général et vague, et son utilisation dans différents sens est peut-être une des raisons d’une certaine
absence de progrès dans le débat. En particulier, la signification du mot compétitivité au niveau
national et le lien avec la compétitivité au niveau de l’entreprise et du secteur posent des problèmes.
Dans le débat sur la politique environnementale et la compétitivité, la signification implicite de ce mot
à différents niveaux d’analyse a été la suivante (Adams, 1997):
•
La compétitivité au niveau de l’entreprise fait référence à la capacité de l’entreprise de
vendre des biens ou des services sur le marché et de s’y maintenir.
•
La compétitivité au niveau sectoriel fait référence à la compétitivité globale des entreprises
exerçant leur activité dans un secteur donné de l’économie, par comparaison avec la
concurrence internationale.
•
La compétitivité au niveau national fait référence à la capacité d’un pays d’accroître son
niveau de vie.
11
ENV/EPOC/GSP(2008)14/FINAL
30.
Il n’est pas inutile de concevoir la compétitivité comme une capacité. Cette capacité étant
difficile à évaluer, la plupart des définitions que l’on trouve dans les études existantes et les systèmes
de mesure utilisés dans les études empiriques concernent plutôt les déterminants de la compétitivité
(notamment la productivité) ou les conséquences de la compétitivité (comme les mesures de la
performance économique au niveau de l’entreprise, selon des critères comptables ou boursiers, le
volume d’activité, les parts de marché et les flux d’échange au niveau sectoriel, ou les flux d’échanges
et d’investissement et la croissance au niveau national).
31.
Dans cette étude, le mot “compétitivité” est utilisé pour des raisons pratiques de
simplification, sachant que lorsque nous parlons des “impacts sur la compétitivité” d’une politique
environnementale, nous faisons référence à l’impact marginal de la politique environnementale sur la
performance économique des entreprises au niveau microéconomique et aux conséquences cumulées
de cet effet au niveau macroéconomique. Identifier l’ “impact marginal” comme la cible de notre
analyse implique de reconnaître que la politique environnementale n’est qu’un des nombreux facteurs
susceptibles d’exercer une influence sur la compétitivité.
Le triangle politique environnementale - performance environnementale – compétitivité au
niveau de l’entreprise
Les mécanismes liant performance environnementale et performance économique
32.
La Figure 2 illustre les liens positifs et négatifs entre performance environnementale et
performance économique au niveau de l’entreprise (voir p.ex. Jaffe et al., 1995; Ambec & Lanoie,
2008; Lankoski, 2008a).
Figure 2. Les mécanismes liant performance environnementale et performance économique au niveau de
l’entreprise.
12
ENV/EPOC/GSP(2008)14/FINAL
33.
On peut distinguer cinq mécanismes différents par lesquels la performance environnementale
peut avoir des impacts positifs sur la compétitivité:
•
Améliorer les performances environnementales peut aboutir à une plus grande rentabilité des
ressources. En matière d’environnement, responsibilité et rentabilité suivent une logique
similaire: la pollution et les déchets représentent le contraire de l’efficacité et de la rentabilité
(Porter & van der Linde, 1995). Améliorer les performances environnementales peut donc
permettre de réaliser des économies sur les coûts directs, si de moindres quantités de
matières premières, d’énergie et de services sont nécessaires à la production de l’entreprise
ou si des intrants polluants ou nocifs peuvent être remplacés par quelque chose de moins
cher. Ainsi, par exemple, il existe des dizaines et des dizaines d’exemples d’entreprises ayant
réussi à réduire la pollution tout en diminuant en même temps les coûts de leurs ressources,
leurs dépenses d’énergie ou leurs achats de services (voir p.ex. Lanoie & Tanguay, 2000).
Ces exemples concernent des types d’entreprises et des types d’initiatives écologiques très
variés, ce qui permet de penser que les possibilités sont vastes (Ambec & Lanoie, 2008). Pardelà les petits progrès d’efficience possibles avec les technologies existantes, la nécessité
d’améliorer les performances environnementales peut aussi avoir pour conséquences
d’importantes avancées technologiques.
•
Améliorer les performances environnementales peut aussi permettre que se nouent de
meilleures relations entre les parties prenantes, dont peuvent résulter des économies sur les
coûts dans les transactions avec divers groupes d’acteurs. De bonnes performances
environnementales peuvent se traduire par la capacité de concourir pour avoir les meilleurs
salariés, par davantage d’entrain et de motivation parmi le personnel et par une moindre
rotation de la main d’œuvre. La réduction des risques qu’engendre une bonne performance
environnementale peut se traduire par une baisse des prix du capital et de l’assurance. De
bonnes relations avec les populations locales et avec le grand public peuvent faciliter la
continuation et l’expansion des activités des entreprises. De bonnes relations avec les
autorités et le respect d’une réglementation pour la protection de l’environnement peuvent
permettre de réduire les retards et de réaliser des économies sur des coûts induits par la
réglementation comme les taxes, les droits, les coûts des permis et des licences, les
dommages et intérêts, les amendes et les frais de contentieux.
•
Améliorer les performances environnementales peut permettre une différenciation des
produits. Une bonne performance environnementale peut rendre un produit ou un service
plus attractif sur le marché et lui conférer une plus grande valeur aux yeux du
consommateur, ce qui peut aboutir à une hausse des recettes par le biais d’un supplément de
prix ou d’un plus grand volume de ventes. Ainsi, par exemple, les écolabels sont un
instrument pouvant servir à aider à la différenciation environnementale, et les ventes de
produits sous l’écolabel européen sont passées de 51 millions € en 2000 à 644 millions € en
2004 (Ambec & Lanoie, 2008).
•
Améliorer les performances environnementales peut induire une amélioration de l’accès aux
marchés. Une bonne performance environnementale peut accroître les recettes, l’entreprise
pouvant proposer son produit ou son service dans les pays ayant adopté des normes strictes
en matière de performances environnementales ou à une clientèle qui se conforme à des
critères écologiques dans ses décisions d’achat. Ces critères peuvent trouver leur source dans
les systèmes de management environnemental des acheteurs ou dans les exigences du public
en matière d’achats. Ainsi, par exemple, selon Ambec & Lanoie (2008: 48), “il est probable
que tous les producteurs ayant la certification ISO 14001 soient attentifs aux performances
13
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environnementales de leurs fournisseurs, sachant que c’est là un des critères à satisfaire pour
obtenir cette certification (Barla, 2007). Par ailleurs, d’une enquête récente de l’OCDE
concernant plus de 4 000 sites de production dans sept pays, il ressort que 43% de ces sites
évaluent les performances environnementales de leurs fournisseurs (Johnstone et al.,
2007b).”
•
Améliorer les performances environnementales peut contribuer à la création d’entreprises.
Une entreprise peut commencer par vendre à d’autres entreprises le savoir-faire, la
technologie ou les services qu’elle a développés pour améliorer ses performances
environnementales. Convertis en intrants pour d’autres entreprises, les flux de déchets
peuvent laisser place à une nouvelle source de revenu, et la vente de droits d’émission peut
aussi engendrer un nouveau revenu. Cela peut engendrer aussi des innovations débouchant
sur des domaines d’activité entièrement nouveaux. Ainsi, par exemple, on assiste à une
nouvelle tendance, “les entreprises européennes qui sont bien préparées à REACH, p.ex.
Ciba et BASF, apportent de nouvelles opportunités commerciales à travers la création de
‘services experts’, en vendant leur savoir et leur savoir-faire à d’autres entreprises, en Europe
et ailleurs. Faire payer aux autres entreprises l’accès aux données toxicologiques qu’elles
possèdent, par le biais de consortiums d’enregistrement REACH et autres groupes de ce
genre est aussi considéré par certains comme une opportunité de réduire les coûts de
REACH au minimum possible.” (Lorenz et al., 2008: 23).
34.
On peut distinguer trois mécanismes différents par
environnementale peut avoir des impacts négatifs sur la compétitivité:
lesquels
la
performance
•
Améliorer les performances environnementales peut impliquer des hausses des coûts directs
de production. Pour atteindre un niveau de performance environnementale élevé, il peut être
nécessaire d’investir dans des machines, dans des équipements et dans des bâtiments. Par
ailleurs, des coûts opérationnels tels que les coûts des matières premières, de l’énergie et de
la main d’œuvre (temps des dirigeants inclus) risquent d’augmenter si les nouveaux intrants
sont plus chers ou s’ils sont nécessaires en plus grandes quantités (Jaffe et al., 1995).
•
Parallèlement à ces hausses des coûts directs, une amélioration des performances
environnementales peut réduire la productivité de façon plus subtile. Les nouveaux
processus et les nouvelles méthodes de production peuvent être moins rentables, et la période
de transition peut s’accompagner de coûts inhérents aux changements, d’une obsolescence
du capital et de perturbations de la production. Les investissements dans l’environnement
peuvent se faire au détriment d’autres investissements plus productifs, et les ressources rares
(temps, argent, efforts de R-D) qui sont consacrées à la production d’une certaine qualité
environnementale ne peuvent pas servir à produire des biens commercialisables. (Jaffe et al.,
1995)
•
Améliorer les performances environnementales peut affecter défavorablement la qualité
perçue du produit ou du service de l’entreprise, p.ex. son efficience ou son apparence, et cela
peut se traduire par une perte de revenu. Ainsi, par exemple, la clientèle peut avoir tendance
à croire (à tort ou à raison) que des fruits cultivés selon les critères de l’agriculture
biologique se gâteront plus rapidement que les autres, ou qu’un détergent écologique ne sera
pas aussi efficace que les autres produits pour enlever les taches.
14
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Les mécanismes liant politique environnementale et performance environnementale
35.
Les motivations des entreprises qui améliorent leurs performances environnementales et le
rôle joué par la politique environnementale dans ce contexte ont été abordés sous différents angles
(voir aussi Hilliard, 2004). D’une part, il a été affirmé que pour la performance environnementale, les
considérations de marché l’emportaient sur les mesures politiques en faveur de l’environnement.
Ainsi, par exemple, dans une étude à partir des données de l’enquête de l’OCDE portant sur 4 000
sites de production, Henriques et Sadorsky (2007) ont constaté que “le rôle général des autorités
publiques concernant la décision d’améliorer le management environnemental est négligeable, les
salariés, le siège social et les acheteurs exerçant une influence plus déterminante” (Johnstone, 2007,
261), bien qu’il faille remarquer que l’adoption de pratiques de management environnemental, telle
que l’ont étudiée Henriques et Sadorsky, ne se compare peut-être pas aux performances
environnementales en ce qui concerne les impacts négatifs sur l’environnement dont il est question
dans ce document. Selon une telle vision des choses, les approches volontaires de l’amélioration des
performances environnementales dans les entreprises joueraient un rôle important.
36.
D’autre part, d’aucuns ont fait valoir que faute d’une impulsion extérieure provenant des
autorités politiques, même des opportunités rentables d’amélioration des performances
environnementales risquent de rester ignorées des entreprises (Porter & van der Linde, 1995). Diverses
raisons peuvent l’expliquer, comme le manque d’information, d’attention ou d’expérience, une
insuffisance au niveau des capacités d’innovation, des structures organisationnelles ou des systèmes
d’incitation, et l’inertie (voir p.ex. Hilliard, 2004; Porter & van der Linde, 1995). Par ailleurs, toutes
les améliorations des performances environnementales ne sont pas économiquement rentables, du
moins pas dans l’horizon de temps à l’intérieur duquel la plupart des entreprises prennent leurs
décisions. Selon une telle vision des choses, des mesures politiques s’imposent pour que les
entreprises se mettent à améliorer leurs performances environnementales. Dans une autre étude à partir
de la base de données de l’enquête de l’OCDE mentionnée précédemment, Johnstone et al. (2007a) ont
même constaté que la rigueur perçue des mesures politiques exerçait un impact positif significatif sur
la performance environnementale.
37.
L’importance des améliorations des performances environnementales engendrées au niveau
d’une entreprise par des mesures politiques dépend de deux facteurs:
•
La rigueur de ces mesures. Plus les exigences sont strictes, plus les améliorations des
performances environnementales nécessaires pour s’y conformer seront importantes.
•
Le choix de ces mesures. Certains instruments de politique environnementale, comme les
normes en matière de performances, imposent à l’entreprise une certaine amélioration de ses
performances environnementales. Au contraire, d’autres instruments politiques, comme les
écotaxes, permettent à l’entreprise de choisir dans quelle mesure elle souhaite améliorer ses
performances environnementales et dans quelle mesure elle préfère payer l’écotaxe.
Les mécanismes liant politique environnementale et performance économique
38.
La Figure 3 illustre les liens positifs et négatifs entre politique environnementale et
performance économique au niveau de l’entreprise. Cette figure ne comporte que les liens directs, à
l’exclusion des liens qui apparaissent par suite de l’évolution des niveaux de performance
environnementale.
15
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Figure 3. Les mécanismes directs liant la politique environnementale et la performance économique au
niveau de l’entreprise.
39.
On peut distinguer trois mécanismes différents par lesquels une politique environnementale
peut avoir des impacts positifs sur la compétitivité d’une entreprise:
•
La politique environnementale peut créer une demande pour le produit de cette entreprise.
C’est le cas, notamment, pour le secteur des biens et services écologiques, mais aussi pour
d’autres secteurs dont les produits ou les services servent de plus en plus souvent d’intrants à
d’autres entreprises qui ont besoin de se conformer à la politique environnementale.
•
La politique environnementale peut entraîner une hausse des coûts pour la concurrence et
aboutir ainsi à placer l’entreprise dans une meilleure situation relative. Dans certains cas,
cette politique engendrera des coûts pour les concurrents mais pas pour l’entreprise ellemême: par exemple si la politique en question réglemente l’utilisation des combustibles
fossiles alors que l’entreprise produit son électricité à partir d’autres sources d’énergie. Dans
d’autres cas, l’entreprise et ses concurrents devront assumer des coûts de mise en conformité
aux nouvelles mesures, mais en raison d’asymétries dues par exemple à des économies
d’échelle ou à l’accès aux intrants, ces coûts seront plus élevés pour les concurrents
(Reinhardt, 1999).
•
La politique environnementale peut améliorer la qualité de l’environnement. Les entreprises
dont la production est dépendante de la qualité de l’environnement tirent profit des mesures
politiques qui engendrent des améliorations des performances environnementales au niveau
des autres entreprises ou ailleurs au sein de la société. Ces améliorations peuvent permettre
une réduction des coûts (par exemple en cas de plus grande pureté des intrants, lorsqu’un
moindre degré de purification de l’eau devient nécessaire dans le processus de production)
ou une revalorisation du produit ou du service de l’entreprise (par exemple dans le secteur du
tourisme). En d’autres termes, la politique environnementale peut créer des externalités
positives (ou réduire les externalités négatives que subissait l’entreprise) et ainsi, créer de la
valeur économique pour l’entreprise et rendre le contexte plus favorable à l’investissement.
16
ENV/EPOC/GSP(2008)14/FINAL
40.
On peut distinguer cinq mécanismes différents par lesquels une politique environnementale
peut avoir des impacts négatifs sur la compétitivité d’une entreprise:
•
La politique environnementale peut réduire la demande pour les produits de l’entreprise.
C’est évident en cas d’interdiction pure et simple, mais d’autres mesures en aval, au niveau
des consommateurs, peuvent aussi affecter la demande. Ainsi, par exemple, la demande de
chlore a sans doute été affectée à la fois par le Protocole de Montréal, qui a imposé un
calendrier pour l’élimination de la production des CFC dans les pays industrialisés, et par la
Cluster Rule aux Etats-Unis, qui a renforcé les restrictions relatives aux émissions de
substances chlorées dans l’eau et dans l’air provenant des usines de pâte à papier (Snyder et
al., 2003).
•
La politique environnementale peut engendrer une hausse des prix des intrants (par exemple
du prix de l’électricité), même si le niveau de performance environnementale de l’entreprise
(par exemple sa consommation d’électricité) est inchangé.
•
La politique environnementale peut imposer à l’entreprise des coûts de transaction. Que les
transactions nécessaires à la mise en conformité avec cette politique s’effectuent uniquement
avec les autorités de contrôle (comme dans le cas des taxes et des instruments
réglementaires) ou également avec d’autres entreprises (comme dans le cas des systèmes
d’échanges de droits d’émission), ces coûts apparaissent généralement en liaison avec des
activités comme la négociation, le suivi, le mesurage et l’établissement de rapports.
•
La politique environnementale peut imposer directement de nouveaux éléments de coûts à
une entreprise, sous forme de taxes, de droits ou de frais liés aux obligations de permis
d’émission.
•
La politique environnementale peut affecter défavorablement la productivité (en plus des
impacts de la performance environnementale sur la productivité dont il a déjà été question).
Elle peut constituer une barrière à l’entrée sur le marché et être la cause d’un verrouillage du
capital. Par ailleurs, lorsque les entreprises sont dans l’incertitude concernant la
réglementation future, elles ont tendance à retarder leurs investissements ou le
développement de nouveaux produits et de nouvelles technologies (Shadbegian & Gray,
2005).
Impact net de la politique environnementale sur la performance économique au niveau de
l’entreprise
41.
Comme on l’a vu précédemment, il est possible d’identifier tout un ensemble d’impacts
positifs ou négatifs éventuels de la politique environnementale sur la compétitivité. Ces impacts
peuvent se produire soit par le biais de changements induits affectant le niveau des performances
environnementales de l’entreprise (Figure 2), soit directement du fait de la politique environnementale
(Figure 3). Kägi et al. (2005) observent qu’une politique environnementale peut avoir sur la
compétitivité des effets variés, qui se compenseront en partie pour produire un impact net. En
conséquence, l’impact net de tous les impacts positifs (5+3 types identifiés sur les Figures 2 et 3) et
négatifs (3+5 types identifiés sur les Figures 2 et 3) possibles résultants détermine l’impact global en
termes de compétitivité d’une mesure de politique environnementale pour une entreprise. Il est
important de noter que ces différents impacts peuvent se matérialiser dans des laps de temps différents,
si bien que l’impact net peut apparaître différent à court terme et à long terme.
17
ENV/EPOC/GSP(2008)14/FINAL
42.
Le lien entre politique environnementale et compétitivité (c’est-à-dire l’impact net de la
politique environnementale sur la compétitivité) n’affecte pas nécessairement de façon linéaire
différents niveaux de performance environnementale. De façon générale, les coûts marginaux des
progrès successifs augmentent à des niveaux de performance environnementale plus élevés (et ils
peuvent même être négatifs à de très faibles niveaux de performance), tandis que les recettes
marginales tirées des activités de vente diminuent. Un certain nombre d’auteurs (Lankoski, 2000;
Nehrt, 1998; Schaltegger et Figge, 2000; Schaltegger et Synnestvedt, 2002; Stanwick et Stanwick,
2000; Steger, 2006; Wagner et al., 2001, 2002; et aussi, indirectement, McWilliams et Siegel, 2001;
Husted et de Jesus Salazar, 2006) ont même affirmé que le lien entre performance environnementale et
compétitivité des entreprises suivait la forme d’une fonction de la performance environnementale en U
inversé (à ne pas confondre avec la courbe de Kuznets en U inversé, qui représente le revenu par
habitant en fonction de la pollution). D’une certaine façon, l’hypothèse du U inversé englobe les
hypothèses de lien net négatif et positif, avec lesquelles elle peut être compatible: tout dépend de
l’étendue de l’étude des impacts sur la compétitivité.
43.
L’impact net d’une politique environnementale sur la compétitivité n’est pas nécessairement
uniforme d’une situation à une autre. Parmi les impacts positifs ou négatifs éventuels sur la
compétitivité identifiés précédemment, des impacts différents peuvent se matérialiser avec une
intensité différente et dans des circonstances différentes. L’impact net est donc fonction de chaque cas
et peut dépendre des caractéristiques de l’entreprise, du problème d’environnement en question et de
l’instrument de politique environnementale concerné.
44.
Dans le contexte de cette spécificité par rapport à chaque cas, des mesures différentes
peuvent engendrer des séries différentes d’impacts sur la compétitivité de chaque entreprise. Il a déjà
été discuté de la façon dont le choix des mesures politiques déterminait en partie l’importance des
améliorations des performances environnementales chez les entreprises, et donc de l’étendue des
impacts. Par ailleurs, des instruments de politique différents peuvent produire des impacts différents
sur la demande (création de demande et réduction de la demande), des impacts différents en termes de
coûts pour l’entreprise et pour ses concurrents (coûts de transaction, montants des taxes et autres
paiements, variations de la productivité et des prix des intrants, hausse des coûts pour la concurrence)
et des impacts différents en termes de qualité de l’environnement (voir Figure 3). Ainsi, par exemple,
contrairement aux autres instruments de politique environnementale, les écotaxes et les systèmes de
permis négociables “n’obligent pas seulement les entreprises à payer pour les mesures qu’elles
prennent pour réduire leurs émissions, mais assignent aussi un coût aux émissions qui restent” (OCDE,
2008: 38).
45.
Un exemple de l’aspect spécifique des impacts par rapport aux entreprises ou aux secteurs de
l’économie est le fait que les impacts d’une politique environnementale sur la compétitivité puissent
différer en fonction de la structure du secteur auquel appartient l’entreprise concernée. Il en est ainsi
parce que la structure du secteur affecte la capacité des entreprises à assumer les hausses de coûts
résultantes. Comme l’évoque Smith (2003), les entreprises qui vendent un produit homogène sur un
marché de concurrence parfaite n’ont pas d’influence sur les prix: elles subissent une baisse de leurs
profits, faute de pouvoir répercuter les hausses de coûts sur leur clientèle en augmentant leurs prix. Au
contraire, les entreprises qui disposent d’un certain pouvoir sur le marché peuvent répercuter (en
partie) une hausse des coûts sur les prix de leurs produits, d’où un moindre impact sur leur
compétitivité. Les entreprises qui disposent d’un tel pouvoir de marché relatif sont celles qui vendent
un produit homogène sur un marché oligopolistique ou monopolistique et celles qui vendent des
produits différenciés.
18
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46.
Enfin, le lien entre politique environnementale et compétitivité est de nature dynamique, il
dépend des avancées technologiques et de l’évolution des préférences sur le marché. D’un point de
vue politique, cet aspect dynamique implique le besoin pour les décideurs politiques de suivre de près
l’évolution de ce lien, mais il signifie aussi que le lien n’étant pas inaltérable, la politique peut jouer un
rôle dans son évolution.
Les mécanismes liant performance économique et politique environnementale
47.
Que les impacts perçus d’une politique environnementale sur la compétitivité soient réels ou
non, les préoccupations dont ces impacts peuvent faire l’objet sont susceptibles d’affecter la politique
environnementale. Cela peut conduire à l’échec des propositions de mesures de politique
environnementale ou jouer sur le degré de rigueur des mesures et sur le choix de ces mesures, compte
tenu du souci d’éviter des impacts négatifs. Ainsi, par exemple, Woods (2006) constate qu’aux ÉtatsUnis, dans le domaine de l’exploitation minière à ciel ouvert, les Etats ont systématiquement ajusté
leur façon d’appliquer la politique environnementale lorsque leur niveau d’exigence en la matière
dépassait celui d’autres Etats de la région pour des situations techniquement comparables.
48.
Cependant, les impacts positifs attendus en matière de compétitivité peuvent aussi amener
les entreprises à faire pression pour obtenir des mesures de protection de l’environnement plus strictes.
Ce peut être le cas losque les entreprises s’attendent à ce qu’une nouvelle politique environnementale
crée une demande pour leur produit, entraîne une augmentation des coûts pour la concurrence ou
améliore la qualité de l’environnement dans un sens favorable à leur production, comme indiqué sur la
Figure 3. Par exemple, ”il n’est plus à démontrer que dans les années quatre-vingt, la société Dupont a
fait pression pour faire interdire les CFC et autres substances destructrices de la couche d’ozone parce
qu’elle était leader dans la recherche de produits substitutifs” (Reinhardt, 2000; ref. Ambec & Lanoie,
2008: 51). Naturellement, en dehors de cet impact sur la politique environnementale, des impacts
positifs attendus sur la compétitivité (comme ceux dont la liste apparaît sur la Figure 2: rentabilité,
meilleures relations entre les parties prenantes, différenciation, accès au marché et création
d’entreprises) peuvent induire de façon directe des améliorations des performances environnementales
des entreprises, sans intervention des pouvoirs publics. On a souvent vu les entreprises aller au-delà
des mesures de protection de l’environnement ou prendre des initiatives dans ce sens en avance sur les
autorités gouvernementales afin de maintenir ou d’accroître leur compétitivité.
La compétitivité aux niveaux sectoriel et national
49.
Les impacts d’une politique environnementale sur la compétitivité se matérialisent au niveau
de l’entreprise, or les impacts au niveau de l’entreprise attirent considérablement l’attention et influent
sur les processus de décision politique. D’autres niveaux d’analyse sont cependant tout aussi
pertinents. Etendre aux niveaux sectoriel et national la réflexion sur des impacts au niveau de
l’entreprise est nécessaire si l’on veut obtenir une vision complète des impacts d’une politique
environnementale sur la compétitivité.
50.
Au niveau sectoriel, la compétitivité des entreprises exerçant leur activité dans un secteur
donné s’étudie d’un point de vue global. Sachant que des entreprises d’un même secteur peuvent
différer entre elles en termes d’intrants, de stratégies, de technologies, de ressources, etc., les impacts
de la politique environnementale sur la compétitivité peuvent varier d’une entreprise à une autre.
Lorsque les différences entre les entreprises sont importantes, les divers mécanismes à l’échelle de
l’entreprise présentés précédemment peuvent produire pour certaines entreprises un impact net positif
en termes de compétitivité, tandis que pour d’autres entreprises, l’impact net peut être négatif. Dans un
secteur donné, la politique environnementale peut donc faire des gagnants et des perdants. A moins
que’il n’y ait “compensation” réciproque entre gagnants et perdants, la compétitivité globale du
19
ENV/EPOC/GSP(2008)14/FINAL
secteur connaîtra une évolution. Il peut y avoir des conséquences pour l’échelle de l’activité du
secteur, et donc pour la composition de l’économie nationale.
51.
Le passage de la compétitivité au niveau de l’entreprise ou du secteur à la compétitivité au
niveau national est plus compliqué. Pour pouvoir être compétitif, c’est-à-dire pour pouvoir accroître le
niveau de vie de sa population, un pays a besoin d’entreprises qui réussissent. Une condition
nécessaire mais non suffisante à cela est que la situation du pays soit satisfaisante du point de vue
macroéconomique (en termes de contexte macroéconomique, politique, légal et social, de dotations en
ressources naturelles et de localisation géographique) comme du point de vue microéconomique
(qualité de l’environnement économique et avantages apportés par les pôles d’entreprises dans les
secteurs concernés). C’est de ces conditions que dépendent les possibilités de réussite économique. La
façon dont ces possibilités se traduisent par une certaine compétitivité dépend du degré de
développement et des capacités des entreprises (Porter et al., 2007) (voir Figure 4).
Figure 4. Les déterminants de la compétitivité au niveau national (voir Porter et al. 2007)
52.
En d’autres termes, c’est la conjonction des caractéristiques géographiques et des activités
des entreprises qui détermine la compétitivité au niveau de l’entreprise et au niveau du secteur. Ces
facteurs déterminent aussi la compétitivité au niveau national dans la mesure où il est question de la
réussite économique globale de l’ensemble des secteurs de l’économie. De même qu’un changement
intervenant dans la politique environnementale peut être bénéfique à certaines entreprises et
préjudiciable à d’autres au sein d’un secteur, il peut être bénéfique à certains secteurs et préjudiciable à
d’autres au sein de l’économie nationale. On ne peut cependant pas considérer que l’expansion de
certains secteurs et la récession de certains autres s’annulent: il importe de tenir compte également
20
ENV/EPOC/GSP(2008)14/FINAL
dans l’analyse des effets sur l’équilibre général qui se produisent à travers les interactions entre les
secteurs (effets de substitution et effets de complémentarité).
53.
Une confusion possible dans les discussions portant sur la compétitivité au plan national
résulte du fait que les définitions et les études peuvent être élaborées autour de différentes parties de la
Figure 4. Certains s’attachent au niveau de vie en termes économiques (Encadré 4 de la Figure 4),
d’autres à la présence d’entreprises ou de secteurs performants du point de vue économique ou
commercial (Encadré 3), d’autres encore au côté attractif du contexte géographique de l’économie
nationale (Encadré 2). Si tous ces aspects sont interdépendants, il est facile de constater, en observant
la Figure 4, que l’attrait géographique en particulier (Encadré 2) n’est pas directement comparable aux
autres approches de la compétitivité au plan national.
54.
En fait, de vastes changements dans l’économie donnent lieu à des approches différentes de
la compétitivité au plan national. La compétitivité au plan national a d’abord été perçue en fonction de
la performance sur les marchés internationaux. Par suite de la libéralisation des mouvements de
capitaux, la concurrence des lieux d’investissement a gagné en importance. Avec les progrès des
technologies et l’importance de l’information comme facteur de production, la concurrence pour le
capital intellectuel pourrait bien être une question fondamentale pour les analyses futures (Nikinmaa,
2004).
55.
Dans la pratique, il peut être difficile d’établir une cohérence entre le niveau de l’entreprise,
le niveau du secteur et le niveau national. Les raisons à cela peuvent tenir aux différentes significations
conférées au terme de compétitivité selon le niveau d’analyse ainsi qu’au contraste entre des situations
hétérogènes au niveau des entreprises et les hypothèses et généralisations propres aux modèles
sectoriels et nationaux.
Le contexte de la mondialisation
56.
La mondialisation peut influencer de différentes manières l’attitude et la performance des
entreprises en matière d’environnement. C’est là un point important, car comme on l’a vu, la politique
est pour les entreprises un motif parmi bien d’autres d’améliorer leurs performances
environnementales, et l’intensité des autres motivations affecte le besoin de mesures de politique
environnementale. En premier lieu, la mondialisation peut affecter les objectifs que se fixent les
entreprises en matière de performances environnementales. Dans une économie mondialisée, les
entreprises multinationales représentent une grande part de l’activité économique. Par ailleurs, dans les
chaînes d’approvisionnement, la délocalisation à l’échelle mondiale est de plus en plus fréquente.
D’aucuns ont affirmé que des considérations économiques relatives, par exemple, à leur réputation ou
aux économies d’échelle, pouvaient motiver les multinationales et autres sociétés qui délocalisent
leurs activités à rechercher auprès de leurs filiales et de leurs fournisseurs des normes de performance
communes correspondant à celles de leurs pays d’origine, plutôt que de tirer parti des différences de
politique environnementale entre les différentes juridictions. Un des résultats de la mondialisation peut
donc être la diffusion d’une autoréglementation environnementale à travers les structures des
multinationales et les chaînes globales d’approvisionnement. En second lieu, la mondialisation peut
affecter la capacité des entreprises à améliorer leurs performances environnementales dans la mesure
où les technologies, la connaissance et les bonnes pratiques en matière environnementale sont
dispersées par les flux d’échanges et d’investissements.
57.
Des études empiriques ont quelque peu étayé l’argument selon lequel les multinationales
favorisaient la diffusion de normes de performance environnementale plus strictes. D’après Ruud
(2002), le management environnemental transfrontalier des états-majors des multinationales a eu une
influence significative sur la performance environnementale de leurs filiales en Inde. Cette influence
21
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ne s’est cependant pas étendue au-delà des unités filiales, c’est-à-dire aux partenaires, fournisseurs et
acheteurs locaux. D’après Christmann (2004), les sociétés multinationales de l’industrie chimique ont
bel et bien normalisé leurs politiques environnementales au niveau mondial, mais elles ont normalisé
des aspects politiques différents en réponse aux pressions qu’elles percevaient en provenance de
différents acteurs extérieurs. Les pressions gouvernementales ont contribué à l’adoption de normes
internes riguoureuses en termes de performance environnementale globale, les pressions de la clientèle
ont contribué à la normalisation de la communication sur l’environnement, et les pressions sectorielles
à la normalisation des politiques environnementales opérationnelles. Chudnovsky et Lopez (2003), à
partir d’un examen des études portant sur les performances environnementales des filiales de sociétés
multinationales, concluent que même si les normes environnementales, les technologies et les
méthodes de management des filiales de multinationales dans les pays en développement ne valent pas
celles appliquées par les sociétés mères ou par les filiales des multinationales dans les pays
développés, il n’en demeure pas moins qu’elles sont souvent plus avancées que celles adoptées par les
entreprises locales.
58.
Il existe aussi des raisons empiriques pour justifier la diffusion de normes environnementales
à travers les chaînes globales d’approvisionnement. Pour Christmann et Taylor (2001), les liens au
niveau mondial peuvent accroître les pressions sur les entreprises en faveur de leur autoréglementation
dans les pays peu réglementés. Utilisant des données d’enquêtes auprès d’entreprises en Chine, ils ont
constaté que ce n’étaient pas seulement les actionnaires des sociétés multinationales mais aussi leur
clientèle et leurs exportations vers les pays développés qui étaient à l’origine d’une plus grande
autoréglementation des performances environnementales. Prakash et Potoski (2006) ont commencé à
enquêter pour savoir si le commerce international incitait les entreprises à adopter la certification des
systèmes de management environnemental ISO 14001. Utilisant des données de panel relatives à 108
pays sur une période de sept années, ils ont constaté que des taux élevés d’adoption de la certification
ISO 14001 dans les pays importateurs incitaient les entreprises des pays exportateurs à adopter ce
programme environnemental volontaire (il convient toutefois de remarquer qu’il s’agit là d’un aspect
inhérent à la certification ISO 14001).
59.
La mondialisation peut influencer les liens entre politique environnementale et compétitivité.
En particulier, lorsque la réputation de l’entreprise se joue de plus en plus au niveau mondial, celle-ci a
besoin de satisfaire un vaste ensemble d’acteurs au niveau mondial afin d’éviter une réaction négative
du marché. Quand la concurrence est mondiale, la performance environnementale d’une entreprise
comme le prix de son produit ou de son service peuvent s’apprécier en fonction de valeurs de
référence au niveau mondial, et la clientèle dispose d’un accès facile aux biens et aux services produits
par des concurrents non soumis à la réglementation.
60.
Par ailleurs, la mondialisation est un phénomène qui s’étend non seulement à l’activité
économique mais aussi à d’autres domaines comme l’élaboration des politiques environnementales.
Dans le cas de politiques environnementales mondiales ou coordonnées au niveau international, les
impacts sur la compétitivité ne sont pas les mêmes que dans le cas de mesures unilatérales. Ainsi, par
exemple, Cassels et Meister (2001) se sont intéressés à la maîtrise des effluents dans le secteur laitier
en Nouvelle-Zélande et ont constaté que si des mesures unilatérales entraînaient une réduction des
exportations, un scénario dans lequel les autres principaux exportateurs adoptaient des mesures
similaires aboutissait à une compétitivité accrue à l’export pour la Nouvelle-Zélande. D’aucuns
considèrent que dans une économie mondialisée, même en l’absence de coordination internationale
explicite de l’élaboration des politiques, les réglementations environnementales exigeantes ont
tendance à migrer des pays stricts vers les pays laxistes, auquel cas les gains de compétitivité offerts
par les normes laxistes ne sont que temporaires. Cet « effet californien » (effet de cliquet des normes
réglementaires appliquées dans des pays différents) a été mis en évidence, par exemple dans le
contexte des normes automobiles (Vogel, 1995).
22
ENV/EPOC/GSP(2008)14/FINAL
61.
La mondialisation peut aussi influencer les liens entre impacts perçus en termes de
compétitivité et l’élaboration des politiques environnementales. Dans le contexte d’une concurrence
accrue, des groupes d’intérêt peuvent éprouver un besoin plus urgent de s’opposer à toute proposition
politique génératrice d’une hausse des coûts. Par ailleurs, quand la production est davantage mobile
grâce à la libéralisation des échanges et au progrès de l’informatique, des télécommunications et des
transports, les groupes de pression ont davantage d’influence en politique (Adams, 1997).
62.
Enfin, la mondialisation complique l’analyse des impacts de la politique environnementale
sur la compétitivité. Lorsque les institutions économiques changent, lorsque les chaînes de valeur se
reconstituent au-delà des frontières sectorielles (voir Berger, 2000), et lorsque les entreprises ne sont
plus circonscrites à un territoire national, des analyses au niveau sectoriel ou national peuvent devenir
trompeuses. Ainsi, par exemple, la relocalisation des activités d’une société multinationale du pays
d’origine vers un pays hôte peut refléter une perte de compétitivité au niveau national pour le pays
d’origine, mais en même temps, elle peut aussi signifier davantage de compétitivité au niveau d’une
des entreprises du pays d’origine, à savoir cette société multinationale. En d’autres termes, dans un
contexte de mobilité croissante du capital et de la main d’œuvre, le lien à double sens entre
compétitivité au niveau de l’entreprise et compétitivité au niveau national est rompu: en cas de perte
de compétitivité au niveau national, une entreprise peut toujours se relocaliser et bien se porter
(Nikinmaa, 2004).
TOUR D’HORIZON DES ÉTUDES EMPIRIQUES RÉCENTES
63.
Dans ce chapitre, les études empiriques récentes portant sur les impacts des politiques
environnementales sont passées en revue. De nombreux ouvrages ont été réalisés, et plutôt que
d’informer le lecteur des résultats de toutes les études empiriques réalisées depuis 1997, l’objectif est
de proposer une interprétation de cet ensemble de travaux afin de mettre en évidence les derniers
développements et l’état actuel des connaissances. Outre l’examen des principales études ex post, ce
chapitre passe aussi en revue les études ex ante sur les impacts en termes de compétitivité et se termine
par une discussion portant sur les recherches empiriques récentes.
64.
Dans les études empiriques déjà réalisées, certains courants apparaissent, autour desquels
s’organisera l’examen de ces travaux. Tout en suivant le cadre défini au chapitre précédent, cet
examen se divise encore en deux grandes parties: les études portant sur les liens entre performance
environnementale et compétitivité et les études portant sur les liens entre politique environnementale
et compétitivité. Il convient cependant de remarquer que si, dans un cadre analytique, nous pouvons
distinguer clairement les différentes possibilités d’impacts sur la compétitivité, ce n’est pas ce qui a été
fait dans les études empiriques existantes. Cela signifie, en particulier, que les études empiriques
portant sur les liens entre mesures politiques et compétitivité ne se limitent pas aux impacts directs de
la politique environnementale (comme sur la Figure 3) mais reflètent aussi les impacts dus aux
changements induits au niveau des performances environnementales des entreprises. Par ailleurs, les
études empiriques existantes portant sur les mesures politiques sont généralement menées non pas au
niveau de l’entreprise, mais plutôt au niveau sectoriel ou national.
23
ENV/EPOC/GSP(2008)14/FINAL
Les études qui établissent un lien entre performance environnementale et compétitivité
65.
Cette section propose un tour d’horizon des études au niveau de l’entreprise qui visent à
établir un lien entre performance environnementale et compétitivité (généralement exprimée en termes
de performances comptables ou boursières). Les études relevant de la première catégorie sont centrées
sur un lien général: en d’autres termes, elles traitent de l’impact net de tous les facteurs identifiés dans
le cadre d’analyse du chapitre 2. Les études relevant de la seconde catégorie traitent également de
l’impact net, mais de façon plus subtile, dans la mesure où elles prennent en compte de façon explicite,
dans la relation nette, la spécificité par rapport à chaque cas.
Le lien général
66.
Les tentatives de découvrir un lien général systématique entre les performances
environnementales et la performance économique de l’entreprise datent des années soixante-dix et se
sont poursuivies depuis à un rythme croissant. Il existe actuellement plus de 100 études empiriques
consacrées à ce sujet. Les principales approches méthodologiques consistent à établir une corrélation
entre certains indicateurs des performances environnementales et certains indicateurs des
performances comptables ou à mesurer la réaction du marché boursier aux performances
environnementales à travers des études événementielles ou des comparaisons de portefeuilles.
Certaines des études concernées, relatives à la compétitivité au niveau de l’entreprise, couvrent les
performances environnementales dans le cadre du sujet plus général de la performance sociale.
67.
Ces études ont donné des résultats contradictoires. Des études récentes ont mis en évidence
aussi bien un lien positif (p.ex. Konar & Cohen, 2001; Wahba, 2008) qu’un lien négatif (p.ex. Wagner
et al., 2002; López et al., 2007) entre les performances environnementales d’une entreprise et ses
performances économiques. D’autres études ont conclu à un lien neutre ou inexistant (p.ex. Elsayed &
Paton, 2005; McWilliams & Siegel, 2000; Murray et al., 2006).
68.
Il n’est donc pas surprenant que selon les conclusions les plus courantes de ces travaux, la
nature de ce lien ne puisse pas être déterminée avec certitude (p.ex. Roman et al., 1999; Schaltegger &
Figge, 2000; Aragón-Correa & Sharma, 2003; Salzmann et al., 2005; Vogel, 2005; Barnett &
Salomon, 2006; Barnett, 2007; Darnall et al., 2007; Halme & Laurila, 2008).
69.
Cependant, deux importantes études publiées en 2003 sont parvenues à une conclusion
positive concernant le lien entre responsibilité d’entreprise (notamment responsabilité
environnementale) et performance économique. Margolis et Walsh (2003) ont classé 109 études
quantitatives publiées entre 1972 et 2002 et ont constaté que 54 de ces études faisaient état d’un lien
positif, que 7 études faisaient état d’un lien négatif, que 28 études concluaient à un lien non significatif
et que 20 études présentaient des résultats mitigés. Ils ont vu dans ces résultats un signal clair
indiquant qu’il existe ”une corrélation positive, et de façon certaine très peu d’indications d’un lien
négatif ” entre responsibilité et performance économique.
70.
Orlitzky et al. (2003) se sont refusés à départager ces différents résultats en fonction de leurs
fréquences respectives et ont plutôt opté pour une méta-analyse statistique des études existantes. Leur
méta-analyse, qui couvrait 52 études quantitatives publiées entre 1972 et 1997, a montré que ”la vertu
d’entreprise sous forme de responsabilité sociale et, dans une moindre mesure, de responsabilité
environnementale, devrait être payante” (p. 403). Orlitzky et al. rejettent donc la conception
généralement admise selon laquelle les résultats seraient peu concluants, et concluent que l’on peut
”affirmer avec une certaine assurance que le lien entre CSP [performance sociale d’entreprise, notion
englobant la performance environnementale] et CFP [performance financière d’entreprise] observable
un certain laps de temps plus tard, n’est pas négatif” (p. 424).
24
ENV/EPOC/GSP(2008)14/FINAL
Un lien spécifique à chaque cas
71.
Le manque de résultats concluants concernant ce lien a conduit certains chercheurs à
poursuivre leurs tentatives de régler cette question en utilisant des méthodes et des séries de données
améliorées. Cependant, la réaction de certains autres chercheurs a consisté à remettre en question de
façon totale l’existence d’un lien général et à affirmer que les impacts de la performance
environnementale sur la compétitivité n’étaient pas universels mais contingent. Ces chercheurs
s’efforcent donc de définir les conditions dont pourrait dépendre ce lien. Les recherches théoriques et
empiriques partant de ce point de vue ont connu un essor plus particulièrement dans les années deuxmille.
72.
Lankoski (2008a) présente un examen des facteurs spécifiques à l’entreprise et à la question
posée dont il a été constaté de façon empirique qu’ils modéraient le lien au niveau de l’entreprise entre
performance sociale/environnementale et performance économique. Certains de ces facteurs ont trait
aux caractéristiques de l’entreprise et de son environnement extérieur. Une de ces caractéristiques est
le secteur d’appartenance de l’entreprise. Les impacts sur la compétitivité ont été plus positifs dans les
secteurs en forte croissance (Russo & Fouts, 1997) et dans les secteurs caractérisés par une faible
différenciation (Hull & Rothenberg, 2008). Par ailleurs, selon Goll et Rasheed (2004), la
responsabilité sociale discrétionnaire a contribué à la performance des entreprises dans les
environnements dynamiques et propices.
73.
Une autre caractéristique est le type de réputation que vise l’entreprise. Du point de vue des
impacts sur la compétitivité, il est plus important d’éviter une réputation négative que de créer une
réputation positive. En d’autres termes, l’irresponsabilité vis-à-vis de l’environnement nuit à la
compétitivité mais il n’est pas évident que la responsabilité environnementale se traduise par un
progrès de la compétitivité (voir p.ex. Frooman, 1997; Bird et al., 2007; van der Laan et al., 2008).
74.
Certaines des caractéristiques concernées des entreprises ont trait à leurs compétences
internes et à leurs pratiques de management. Des capacités organisationnelles pour l’intégration des
parties prenantes, un apprentissage plus poussé et une innovation continue (Sharma & Vredenburg,
1998), la capacité d’intégrer les questions environnementales dans la planification stratégique (Judge
& Douglas, 1998), des profils de compétence organisationnelle favorables (Karagozoglu & Lindell,
2000) et la capacité de réaliser des innovations au niveau des processus (Christmann, 2000), tous ces
éléments sont apparus comme rendant les entreprises mieux à même de bénéficier d’impacts positifs,
en termes de compétitivité, du progrès des performances environnementales. Par ailleurs, la façon dont
le management environnemental est mis en œuvre compte également: ainsi, par exemple, King et
Lenox (2002) et Wagner (2005) ont constaté que la prévention de la pollution améliorait la
compétitivité, mais que ce n’était pas toujours le cas des autres moyens de lutter contre les émissions
de polluants et contre les déchets.
75.
Les impacts en termes de compétitivité peuvent aussi dépendre des caractéristiques des
problèmes environnementaux. Pour prendre un exemple simple, la réduction des déchets peut souvent
engendrer un progrès de la compétitivité grâce à des économies sur les coûts des intrants, ce qui n’est
pas le cas pour la réduction du bruit. Certaines études dans ce domaine commencent à faire apparaître
les différences d’impacts en termes de compétitivité en fonction des différents problèmes
environnementaux concernés (p.ex. Hillman & Keim, 2001; Lankoski, 2007). Cependant, les études
existantes traitent plutôt des problèmes d’environnement comparés aux autres dimensions de la
responsabilité d’entreprise que des différences entre ces différents problèmes d’environnement. Une
exception à cela est l’étude de Gilley et al. (2000), qui montre que la réaction du marché a été plus
favorable aux initiatives environnementales en rapport avec le produit qu’à celles liées au processus de
production.
25
ENV/EPOC/GSP(2008)14/FINAL
76.
A ces résultats empiriques, il convient d’ajouter qu’un certain nombre de caractéristiques des
entreprises et des problèmes concernés ont été citées comme pouvant, en théorie, affecter les impacts
des améliorations des performances environnementales sur la compétitivité. Ces caractéristiques
peuvent affecter l’importance de l’évolution des coûts par rapport à la concurrence et la capacité de
répercuter sur le consommateur les hausses nettes des coûts. Les caractéristiques propres aux
problèmes environnementaux sont p.ex. la nature des solutions envisageables (comme la possibilité
d’apporter des améliorations au niveau des processus plutôt qu’en bout de chaîne), la visibilité du
problème pour les parties prenantes en fonction de son caractère immédiatement perceptible ou de la
présence de facteurs de visibilité comme les ONG militantes ou les systèmes de labels, et la façon dont
le sujet permet de faire appel aux émotions du consommateur et de l’inciter à payer ou les enjeux pour
le consommateur. Quant aux caractéristiques propres à l’entreprise, ce sont par exemple le choix des
solutions alternatives en fonction de l’intensité du capital et des coûts irrécouvrables dans les
méthodes de production existantes, des cycles d’investissement, des contraintes d’implantation
géographique et de la fréquence des opportunités faciles à saisir, la visibilité de l’entreprise en
fonction de son implantation en termes écologiques ou socioéconomiques, de sa taille et de la nature
du produit, et la propension du consommateur à payer, en fonction du segment de clientèle et de la
nature de la concurrence (Lankoski, 2000).
Les études qui établissent un lien entre politique environnementale et compétitivité
77.
Cette section propose un tour d’horizon des études au niveau sectoriel et au niveau national
en vue de trouver un lien entre le degré de rigueur des politiques environnementales et la
compétitivité. Le premier groupe est constitué d’études centrées sur la productivité, et le second
groupe est constitué d’études centrées sur l’innovation et le développement de nouveaux marchés et de
nouveaux secteurs. Ces deux groupes d’études concernent une sélection d’impacts dans le cadre
présenté au chapitre 2, et non pas l’impact net global. Le troisième groupe est constitué d’études
centrées sur les flux d’échanges, et le quatrième groupe est constitué d’études centrées sur les
décisions d’investissement et d’implantation géographique. Ces deux groupes d’études concernent
l’impact net, sur la compétitivité, des divers facteurs définis dans le cadre analytique.
Les impacts sur la productivité
78.
Il existe un ensemble relativement vaste d’études dans lesquelles on cherche à établir un lien
entre politique environnementale et productivité. Cela n’est pas surprenant si l’on sait que pour un
certain nombre d’auteurs, la productivité est l’élément clé pour définir la compétitivité (p.ex. Porter et
al., 2007). Selon le cadre d’analyse présenté précédemment, la politique environnementale pourrait
influencer la productivité aussi bien de façon directe (une limitation à l’utilisation de certaines
technologies pouvant exercer un impact négatif) que par le biais d’améliorations induites des
performances environnementales (côté négatif, des coûts de production accrus et des processus plus
subtils par lesquels la productivité diminue, et côté positif, une plus grande rentabilité des ressources).
Savoir si ce sont les impacts positifs ou négatifs qui prédominent reste une question d’ordre empirique.
79.
Adams (1997) a résumé comme suit l’état des connaissances en matière de politique
environnementale et de productivité: “Certaines études ont attribué les baisses de productivité au coût
de mise en conformité avec la réglementation relative à l’environnement. Pour les mesures standards
de la productivité, c’est vrai par définition, sachant qu’un surcroît d’intrants est comptabilisé tandis
que l’ “output” produit à partir de ces intrants  moins d’émissions  n’est pas comptabilisé par les
mesures d’output traditionnelles. Lorsque les coûts des dégâts écologiques évités sont comptés dans
l’équation, il émerge une vision plus positive de l’effet de la réglementation environnementale sur la
productivité.” Par ailleurs, “d’autres études, au niveau de l’unité de production, ont généralement mis
26
ENV/EPOC/GSP(2008)14/FINAL
en évidence une relation positive entre rigueur des mesures environnementales et compétitivité, celleci étant mesurée par la productivité ou par la rentabilité” (Adams, 1997).
80.
Depuis 1997, un certain nombre d’études empiriques portant sur la politique
environnementale et la productivité ont été publiées. Les résultats sont cependant mitigés: les
chercheurs ont mis en évidence tantôt un lien positif (par exemple, Berman & Bui, 2001; Alpay et al.,
2002, pour le cas du Mexique), tantôt un lien négatif (par exemple Gray & Shadbegian, 2003; Dufour
et al. 1998), tantôt pas de lien (par exemple, Alpay et al., 2002, pour le cas des Etats-Unis).
81.
Comme on l’a noté, un facteur intervenant dans l’évaluation des impacts de la politique
environnementale sur la productivité est le fait que l’on utilise un indicateur traditionnel de la
productivité ou un indicateur qui tienne compte des avantages obtenus au plan environnemental
(Repetto et al., 1997). Telle & Larsson (2007), par exemple, ont construit à la fois un indice de
productivité traditionnel de Malmquist et un indice de productivité environnementale de Malmquist
tenant compte des émissions de polluants, et ils ont constaté que l’indice traditionnel donnait des
résultats plus pessimistes. Il est cependant peu probable que cette méthode permette de conclure le
débat sur la politique environnementale et la compétitivité, sachant qu’elle mélange coûts et avantages
privés et sociaux de la politique environnementale et que le débat concerne essentiellement les
dilemmes éventuels entre coûts et avantages privés et coûts et avantages sociaux.
82.
Lanoie et al. (2008) ont remarqué que seuls avaient été étudiés les impacts immédiats de la
politique environnementale sur la productivité, les effets dynamiques de cette politique ne pouvant
donc pas entrer en jeu. Pour corriger cette lacune, ils ont introduit dans leur variable réglementaire un
décalage dans le temps. Les impacts sur les résultats ont été importants: alors que l’impact immédiat
de la réglementation environnementale sur la productivité était négatif, ce décalage dans le temps
intégré à la variable de réglementation a fait apparaître le contraire.
83.
En résumé, les études antérieures faisaient état d’un impact négatif de la réglementation
environnementale sur la productivité, mais des études plus récentes ont mis en évidence des résultats
positifs (Lanoie et al., 2008).
Les impacts sur l’innovation et sur le développement de nouveaux marchés ou de nouveaux
secteurs
84.
Le développement de nouveaux marchés ou de nouveaux secteurs, ou plus généralement
l’innovation, est une autre voie par laquelle la politique environnementale entretient avec la
compétitivité un lien faisant l’objet de recherches empiriques. L’idée inspirant ces études est que des
mesures politiques peuvent susciter dans le monde de l’entreprise une innovation qui permettra non
seulement des gains d’efficience mais peut-être aussi une différenciation des produits, l’accès à de
nouveaux marchés ou la création de nouvelles entreprises, et que les entreprises qui franchiront le pas
les premières dans ces domaines obtiendront des avantages particuliers (p.ex. Porter & van der Linde,
1995).
85.
Concernant l’innovation, Adams (1997) est arrivé à la conclusion que "Nombreux sont les
exemples d’entreprises qui se sont lancées dans des innovations entraînant des réductions des coûts
parce qu’elles devaient s’adapter à une nouvelle mesure environnementale (...) Il n’est pas surprenant
que des progrès en qualité ou des réductions de coût de production puissent résulter d’une attention
accrue à l’efficience des ressources et aux technologies de “production propre”." Si cette conclusion
concerne les progrès d’efficience, elle est positive du point de vue du potentiel d’innovation en
général.
27
ENV/EPOC/GSP(2008)14/FINAL
86.
Là encore, plusieurs nouvelles études empiriques établissant un lien entre politique
environnementale et innovation ont été réalisées depuis 1997. Ces études portent généralement sur des
mesures relatives aux intrants, notamment aux dépenses de R-D ou aux outputs comme l’obtention de
brevets. D’après Lanoie et al. (2008), des études ont mis en évidence un lien positif entre politique
environnementale et dépenses de R-D (p.ex. Jaffe & Palmer, 1997; Arimura et al., 2007) et entre
politique environnementale et obtention de brevets (p.ex. Brunnermeier & Cohen, 2003; Popp, 2006).
D’autres études, cependant, n’ont pas mis en évidence le moindre impact (p.ex. Jaffe & Palmer, 1997
sur le nombre de brevets). Ainsi, par exemple, Gagelmann et Frondel (2005) ont constaté que les effets
en termes d’innovation des systèmes américains d’échanges de droits d’émission de polluants (l’Acid
Rain Program, le Regional Clean Air Incentives Market et le Lead Phasedown Program pour les
carburants automobiles) étaient limités dès le départ, en raison d’objectifs trop peu ambitieux ou
même non contraignants.
87.
Roediger-Schluga (2003) présente des éléments au niveau microéconomique montrant les
conséquences qu’ont pu avoir sur la R-D, les gammes de produits et l’innovation dans le secteur des
peintures, revêtements, encres à imprimer et adhésifs les normes autrichiennes relatives aux émissions
de composés organiques volatils (COV), qui étaient les plus contraignantes du monde dans ce
domaine. Il observe que ces mesures “ont engendré des changements considérables dans les gammes
de produits des entreprises et semblent avoir accéléré la fréquence de l’innovation au niveau des
produits dans le secteur réglementé” (p. 359). Il a cependant pu être observé également que par suite
des dépenses de R-D pour la mise en conformité avec cette réglementation, les projets de R-D
existants avaient effectivement été retardés ou ajournés, mais sans qu’il soit possible d’affirmer avec
certitude que certains de ces projets auraient été plus productifs que les projets de développement de
produits conformes aux nouvelles normes. Par ailleurs, ces efforts de mise en conformité ont bien
donné lieu à des bénéfices subsidiaires sous forme de nouvelles connaissances et de nouvelles
compétences, mais là encore, on n’a pas pu déterminer de façon certaine dans quelle mesure cela
représentait des innovations réelles et dans quelle mesure il s’agissait simplement d’entreprises
rattrapant leur retard technologique. Cela indique que même en cas de développements cohérents avec
l’hypothèse selon laquelle une réglementation environnementale stimule l’innovation et le
développement de nouveaux produits, une étude plus poussée est nécessaire pour pouvoir s’assurer
que ces développements représentent vraiment des résultats gagnant-gagnant.
Les impacts sur les flux d’échanges commerciaux
88.
Il existe une importante somme de travaux empiriques sur la politique environnementale et la
compétitivité, faite d’études qui établissent un lien entre le degré de rigueur des politiques
environnementales et les flux d’échanges commerciaux. L’idée qui préside à ces études est que les
impacts nets globaux de la politique environnementale en termes de compétitivité au niveau de
l’entreprise se reflètent dans les flux d’échanges commerciaux au niveau sectoriel et au niveau
national.
89.
En 1997, l’état des connaissances empiriques sur la politique environnementale et les
échanges commerciaux pouvait se résumer ainsi: "La plupart des études indiquent des liens non
significatifs entre réglementation environnementale contraignante et compétitivité, selon les divers
indicateurs qui ont été mesurés. Certaines études parmi les plus récentes et les plus spécifiques ont mis
en évidence l’effet négatif prédit sur les flux d’échanges à un niveau désagrégé, mais cet effet est
limité, il varie selon le secteur en fonction de la structure du marché international et il varie dans le
temps” (Adams, 1997).
90.
Cependant, d’après l’étude de Copeland et Taylor (2004), le consensus antérieur à 1997
selon lequel des différences en termes de degré de rigueur entre les différentes politiques
28
ENV/EPOC/GSP(2008)14/FINAL
environnementales ont peu ou pas d’effet sur les flux d’échanges commerciaux et d’investissement
était prématuré, la seconde série d’études empiriques ayant abouti à des conclusions contraires aux
conclusions antérieures. D’après Levinson et Taylor (2008), les études portant sur le lien entre
politique environnementale et flux d’échanges commerciaux souffrent de la prise en compte
inadéquate d’une hétérogénéité qui n’a pas été observée dans les caractéristiques des pays et des
secteurs, ainsi que du caractère endogène des mesures du coût de la lutte contre la pollution et “ce sont
ces problèmes – et non pas les coûts relativement faibles de la lutte contre la pollution ni l’hypothèse
de Porter – qui expliquent les résultats mitigés obtenus jusqu’à présent” (p. 224). Compte tenu de ces
problèmes économétriques et de données (avec des données de panel et des instruments pour tenir
compte du caractère endogène du degré de rigueur de la réglementation), Levinson et Taylor
constatent que la politique environnementale a effectivement eu un impact sur les flux d’échanges, de
façon cohérente avec l’hypothèse du « refuge » pour pollueurs, et que cet impact a été significatif non
seulement du point de vue statistique mais aussi du point de vue économique. Ederington et Minier
(2003), également, mettent en évidence un effet négatif de la politique environnementale sur les flux
d’échanges lorsque le niveau de réglementation environnementale est traité comme un facteur
endogène.
91.
Brunnermeier et Levinson (2004), dans leur examen des études existantes, concluent que “le
consensus antérieur selon lequel les différences de réglementation ne compteraient pas commence à
changer” (p. 7) et que par suite de progrès dans les méthodologies, des études ont mis en évidence
“des effets de « refuge » pour pollueurs statistiquement significatifs, d’une ampleur raisonnable” (p. 6)
aux niveaux à la fois sectoriel et national. Il faut cependant souligner que l’observation des faits
“milite en faveur de l’existence d’un effet « refuge » pour pollueurs seulement. L’observation des faits
indique que lorsque l’on tient compte des autres facteurs affectant les flux d’échanges et
d’investissement, une politique environnementale plus contraignante décourage la production de biens
polluants. Aucun de ces travaux n’apporte la preuve que cet effet dissuasif serait assez fort pour être le
principal déterminant du sens des flux d’échanges ou d’investissement.” (Copeland & Taylor, 2004).
Les impacts sur l’investissement et sur les décisions d’implantation géographique
92.
Un autre ensemble d’études empiriques consacrées à la politique environnementale et à la
compétitivité est constitué de travaux dans lesquels on a tenté d’établir un lien entre d’une part le
degré de rigueur de la politique environnementale et d’autre part, l’évolution de l’investissement direct
étranger et les décisions d’implantation d’unités de production à l’intérieur du territoire national. La
logique qui sous-tend ces études est que si une politique environnementale a des impacts nets
défavorables en termes de compétitivité, les entreprises chercheront à éviter ces impacts en orientant
leurs investissements vers des régions ou pays dans lesquels une telle politique environnementale n’est
pas appliquée, ou en choisissant de s’y implanter.
93.
D’après Adams (1997), "ni les données sur l’investissement ni l’étude des décisions
d’implantation géographique n’indiquent clairement une migration des industries ni l’apparition de
refuges pour pollueurs en réponse à des différentiels de normes environnementales."
94.
Cette question n’a pas cessé de faire l’objet de travaux empiriques considérables depuis
1997. Certaines études ont fait état d’une relation négative. List et Co (2000) ont étudié la
réglementation environnementale des Etats et les décisions d’implantation de nouvelles unités de
production des entreprises multinationales étrangères, et ils ont obtenu ds éléments tendant à prouver
un lien inverse entre rigueur de la politique environnementale et intérêt présenté par un lieu
d’implantation. Keller et Levinson (2002) ont constaté “de solides preuves que les coûts de lutte contre
la pollution avaient exercé des effets modérément dissuasifs sur l’investissement étranger ”. D’après
Xing et Kolstad (2002), le laxisme en matière de réglementation environnementale dans un pays hôte
29
ENV/EPOC/GSP(2008)14/FINAL
est un déterminant notable de l’IDE en provenance des Etats-Unis pour les industries très polluantes,
mais pas pour les industries les moins polluantes. List et al. (2003) ont observé que les usines très
polluantes répondaient aux réglementations environnementales, et Becker et Henderson (2000) ont
constaté que le non-respect des normes relatives à la qualité de l’air, lesquelles impliquaient des
exigences spécifiques en matière d’équipements, faisait diminuer la création d’usines dans le cas des
industries polluantes. Cependant, contrairement à ce que l’on aurait pu penser, les travaux de Cole et
Ensign (2005) ont montré que l’IDE américain au Mexique avait tendance à se concentrer sur les
industries les moins polluantes. Enfin, Javorcik et Wei (2004) n’ont pas trouvé d’éléments qui
étayeraient l’hypothèse selon laquelle des normes environnementales sévères inciteraient les
entreprises à se délocaliser dans des « refuges » pour pollueurs.
95.
Dans leur méta-analyse des décisions d’implantation de nouvelles unités de production,
Jeppesen et al. (2002) ont constaté que la méthodologie de l’étude était un facteur explicatif essentiel
de l’absence de résultats probants. En fait, la conclusion de Brunnermeier et Levinson (2004) selon
laquelle des progrès dans les méthodologies auraient permis de rendre visibles les effets de « refuge »
pour pollueurs s’applique non seulement à l’évolution du commerce international mais aussi à
l’implantation géographique des usines et aux décisions d’investissement.
96.
Faisant écho à l’approche contingente adoptée dans les études au niveau des entreprises, de
récentes observations soulignent l’hétérogénéité des impacts de la politique environnementale sur
l’implantation des industries, aussi bien au plan géographique qu’au plan sectoriel (Mulatu, 2008).
D’après Co et al. (2004), l’effet de la politique environnementale sur les flux de capitaux est
hétérogène entre les secteurs. Millimet et List (2004), à leur tour, constatent que les impacts de la
politique environnementale sur la localisation des industries dépendent fondamentalement d’aspects
observables propres à la localisation, comme le taux de chômage, les externalités d’agglomération et
l’offre de main d’œuvre qualifiée. Ils “soupçon[nent] qu’une fois tenu compte de toute l’hétérogénéité,
les résultats empiriques commenceront à correspondre aux attentes” (p. 261).
97.
Selon Ederington et al. (2005), l’effet « refuge pour pollueurs » a été difficile à détecter car
les secteurs les plus polluants sont souvent aussi les moins mobiles géographiquement. Cette
immobilité géographique peut être due aux coûts de transport, aux coûts fixes des unités de production
ou aux économies d’agglomération, et elle fait que ces secteurs ne sont pas sensibles aux différences
de sévérité de la réglementation. Même si des impacts existent sur les secteurs les plus propices à la
mobilité, l’agrégation des résultats sur un ensemble de secteurs, dans les études empiriques, a eu pour
effet d’occulter ces impacts.
98.
D’après Taylor (2004, ref. Mulatu, 2008), les chercheurs ont fait une confusion entre l’effet
« refuge pour pollueurs » (effet de la politique environnementale sur les flux d’échanges commerciaux
et sur l’implantation des industries au niveau marginal) et l’hypothèse du « refuge » pour pollueurs
(selon laquelle la politique environnementale permettrait de prédire des tendances en matière
d’échanges et d’investissement). Pour que l’hypothèse du « refuge » pour pollueurs soit vraie, il faut
non seulement qu’existe l’effet « refuge pour pollueurs » mais aussi que cet effet soit important par
rapport aux autres déterminants de l’implantation géographique des industries. A partir de cette notion,
Mulatu (2008) a analysé de façon empirique l’importance relative de la politique environnementale par
rapport aux autres déterminants de l’implantation géographique des industries en Europe. Mulatu a
trouvé des éléments indiquant un effet « refuge pour pollueurs » mais n’a pas trouvé d’éléments à
l’appui de l’hypothèse du « refuge » pour pollueurs. Sa conclusion est que “si les variations de la
sévérité de la politique environnementale et de l’intensité de la pollution exercent une influence
notable sur les décisions d’implantation géographique, les autres facteurs traditionnels de HeckscherOlin exercent également une forte influence de façon séparée, et de façon conjointe ils devraient
l’emporter sur l’influence du facteur environnemental.”
30
ENV/EPOC/GSP(2008)14/FINAL
99.
En résumé, les résultats des études portant sur la politique environnementale et sur les
décisions concernant l’investissement et l’implantation géographique ne sont pas concluants. D’après
Mulatu (2008), il ressort des études empiriques que les observations sont mitigées et que les
corrélations sont faibles. Des progrès dans les méthodologies ont permis aux chercheurs de découvrir
un effet « refuge pour pollueurs », mais cet effet est hétérogène, et il est sans doute éclipsé par les
autres déterminants de l’implantation géographique des industries.
Prévisions et simulations des impacts des politiques environnementales sur la compétitivité
100.
Outre les divers types d’études ex post dont il a été question précédemment et qui mesurent
les impacts réels de la politique environnementale sur la compétitivité, ce lien a aussi été examiné par
le biais d’études ex ante visant à prévoir les impacts sur la compétitivité d’une politique
environnementale particulière. Ces études incluent des enquêtes auprès de l’industrie, concernant les
coûts de mise en conformité, ainsi que divers modèles de simulation. De façon générale, ces études ne
couvrent qu’un sous-ensemble restreint parmi les pistes définies dans le cadre d’analyse du chapitre 2,
l’accent étant mis sur les éléments les plus facilement quantifiables, comme par exemple les coûts
directs de production.
101.
Un domaine d’application des études ex ante dans lequel d’importants travaux ont eu lieu
récemment est l’évaluation des impacts potentiels, sur la compétitivité, des mesures contre le
changement climatique. Ont été plus particulièrement étudiés les impacts potentiels sur la
compétitivité du Système européen d’échange de quotas d’émissions de gaz à effet de serre (ETS).
Oberndorfer et Rennings (2007) ont examiné dix de ces études menées entre 2000 et 2006 à l’aide de
modèles d’équilibre général informatisés, de modèles partiels et de modèles macroéconomiques. Selon
Oberndorfer et Rennings, “les craintes de la majorité des secteurs concernés quant à de forts impacts
négatifs de l’ETS de l’Union européenne sur la compétitivité ne sont pas justifiées”. Telle est leur
conclusion, malgré le fait qu’aucune des études qu’ils ont passées en revue ne tienne compte des effets
potentiels de l’innovation. Oberndorfer et Rennings remarquent aussi que le niveau de référence choisi
est fondamental pour les résultats. Les modèles fondés sur la comparaison avec une situation
inchangée ont tendance à faire apparaître des impacts négatifs modestes sur la compétitivité; le secteur
de l’aluminium fait cependant exception, avec sa perte significative de compétitivité. Les modèles
fondés sur la comparaison avec un scénario alternatif de conformité aux obligations du Protocole de
Kyoto sans échanges de quotas d’émissions ont tendance à faire apparaître des impacts positifs sur la
compétitivité.
102.
Dans une veine similaire, Graichen et al. (2008) font valoir qu’en Allemagne, seul un petit
nombre de secteurs (première transformation du fer et de l’acier, produits azotés et engrais, papier et
carton, aluminium et produits de l’aluminium, et fabrication de certains produits chimiques
inorganiques) risque d’être exposé à des distortions de compétitivité à cause du système européen
d’échanges de quotas d’émissions. La raison à cela est que, pour que les impacts sur la compétitivité
se matérialisent, il faut à la fois que le secteur concerné connaisse d’importantes hausses des coûts
engendrées par les mesures environnementales et qu’il soit exposé aux échanges commerciaux
internationaux.
103.
L’OCDE (2008) a étudié à l’aide de simulations l’ampleur des “fuites de carbone” dans les
hypothèses de politique climatique internationale après 2012. Les “fuites de carbone” peuvent se
produire en fonction de la compétitivité et du prix des combustibles fossiles. Selon les conclusions de
cette étude, “une analyse préliminaire donne à penser que la crainte de fuites de carbone – c’est-à-dire
la crainte de voir les réductions réalisées dans un nombre limité de pays participants en partie annulées
par une hausse des émissions dans d’autres pays – est peut-être exagérée. A moins que seuls quelques
pays prennent des mesures de lutte contre le changement climatique, par exemple en cas d’action
31
ENV/EPOC/GSP(2008)14/FINAL
uniquement au niveau de l’Union européenne, il apparaît que ces fuites seraient presque négligeables,
inférieures à 2 % dans le cas d’un abaissement de 50 % des émissions par les pays de l’annexe I à
l’horizon 2050.” (p. 5)
104.
Autre exemple récent d’application concernant une évaluation ex ante des impacts des
mesures environnementales sur la compétitivité, la mise en œuvre en 2007 de la réglementation
européenne REACH (enRegistrement, Evaluation et Autorisation des produits CHimiques). D’après
Ackerman et al. (2008), les secteurs concernés par REACH ”ont exprimé par avance de graves
préoccupations, indiquant que les coûts risquaient d’être faramineux. Cependant, après des années de
recherches et de débats, il n’existe pas d’estimations crédibles publiées de coûts de mise en conformité
avec REACH assez élevées pour justifier de telles préoccupations” (p. 26). Ackerman et al. font
remarquer que les faibles coûts de la mise en conformité avec REACH sont cohérents avec les
résultats de recherches réalisées à propos d’autres réglementations.
105.
Les études ex ante reposent sur des estimations des coûts de mise en conformité, mais
l’incertitude demeure quant à la fiabilité de ces estimations. D’après Sherrington et Moran (2007),
“l’examen d’un certain nombre de réglementations environnementales et industrielles a montré que les
coûts ex ante avaient tendance à dépasser les coûts ex post (ou coûts finaux)”. C’est ce qu’ont conclu
par exemple Harrington et al. (2000), qui ont comparé les coûts ex ante et ex post de 25
réglementations distinctes aux Etats-Unis. Haq et al. (2001) ont comparé les coûts prédits et les
stratégies présentées par l’industrie durant la phase de négociation avec les coûts réels et les stratégies
adoptées lors de la phase de mise en œuvre, pour cinq réglementations environnementales (parmi
lesquelles, p.ex. la Directive européenne relative aux normes d’émissions des véhicules et le Clean Air
Act aux Etats-Unis). Selon leurs conclusions, ”à partir de l’analyse et des études de cas examinées, on
peut inférer que les coûts réels de l’industrie, dans le cadre de la mise en œuvre de la réglementation
environnementale, ont été moindres que les prévisions de ces coûts durant les négociations.” D’un
autre côté, selon Morgenstern et al. (2001), “des études récentes corroborent l’idée que les dépenses
comptabilisées sous-estiment probablement la charge réelle”. Cependant, en étudiant un vaste
ensemble de données au niveau des unités de production, ces auteurs n’observent pas de déviation
significative dans un sens ou dans l’autre dans trois secteurs de l’industrie, et ils constatent une
surestimation des coûts statistiquement significative dans un secteur.
Discussion sur les recherches empiriques récentes
Résumé des résultats empiriques
106.
Au total, la conclusion antérieure a été: “il n’existe pas de preuve montrant clairement que
des normes environnementales strictes, ou même relativement strictes, exerceraient un impact négatif
systématique sur la compétitivité au niveau macroéconomique ou microéconomique.” (Adams, 1997).
Depuis cette conclusion, un important ensemble de nouvelles recherches ont été menées, et un certain
nombre d’études ont permis chacune de découvrir des impacts positifs, négatifs ou neutres de la
politique environnementale sur la compétitivité. Les résultats globaux ne permettent toujours pas de
conclure.
107.
Plusieurs raisons permettent de considérer qu’à ce jour, les nombreuses études empiriques
réalisées n’ont pas permis de régler cette question:
•
Les résultats ne sont pas compatibles entre eux. Des études différentes donnent des résultats
contradictoires, et la communication entre les différentes spécialités pourrait être meilleure.
32
ENV/EPOC/GSP(2008)14/FINAL
•
Les résultats ne sont pas compatibles avec les prédictions théoriques. Le raisonnement
théorique selon lequel la politique environnementale nuirait à la compétitivité n’a pas été
confirmé par les études empiriques. Cependant, ce raisonnement paraissant théoriquement
convaincant en économie, les chercheurs continuent d’essayer de découvrir les impacts
prédits.
•
Les résultats ne sont pas compatibles avec la pratique politique. Même si l’hypothèse des
impacts négatifs sur la compétitivité n’a pas pu être corroborée, cela n’a rien changé aux
théories économiques concernant les politiques environnementales: l’hypothèse du
« refuge » pour pollueurs est largement admise (Levinson & Taylor, 2008), et les entreprises
s’opposent généralement aux propositions de politique environnementale en invoquant une
perte de compétitivité.
108.
Ceux des chercheurs qui pensent que des conclusions peuvent être tirées de ce bilan mitigé
concernant le lien entre performances environnementales et compétitivité au niveau de l’entreprise ont
tendance à affirmer que ce lien est légèrement positif, ou du moins, qu’il n’est pas négatif. D’un autre
côté, les chercheurs qui pensent qu’il se dégage bien une tendance des études récentes réalisées aux
niveaux sectoriel et national en matière de lien entre politique environnementale et compétitivité
exprimée en termes de flux d’échanges et de décisions d’implantation géographique considèrent le
plus souvent que ce lien est négatif. Si ces conclusions sont correctes, deux explications à la fois
peuvent être proposées pour ces résultats:
•
Une explication est que les mesures de politique environnementale ont des impacts
défavorables en termes de compétitivité (p.ex. parce qu’elles sont inefficaces ou trop rigides
ou parce qu’elles impliquent des coûts de transaction élevés) que les entreprises peuvent
éviter en améliorant de façon volontaire leurs performances environnementales. Dans ce cas,
il importerait de mieux concevoir les mesures environnementales.
•
Une autre explication est que les entreprises prennent des initiatives qui sont dans leur intérêt
du point de vue commercial, tandis qu’une politique environnementale cible des questions
d’environnement et des mesures dont les avantages ne concernent pas fondamentalement les
entreprises, si bien que ces questions ne seraient pas résolues sans cette politique (Johnstone,
2007). Darnall et al. (2007) observent même que “s’il y a du “gagnant-gagnant”, ce n’est pas
du fait de la rigueur de la réglementation” (Johnstone, 2007, 264).
Les données et les explications méthodologiques de l’absence de résultats concluants
109.
Si les méthodologies, de façon générale, se sont perfectionnées, un grand nombre de données
et de problèmes méthodologiques peuvent encore être identifiés pour expliquer l’incapacité de la
recherche empirique à déterminer de façon concluante le lien entre politique environnementale et
compétitivité. Pour Brunnermeier et Levinson (2004), la mesure de la variable dépendante, la mesure
de la sévérité de la réglementation, le choix des variables de contrôle, l’unité géographique retenue
pour l’analyse, le niveau d’aggrégation sectorielle, l’utilisation de statistiques comparatives entre
secteurs ou de données de panel et la correction de l’endogénéité font que les résultats ne sont pas
comparables. En tout, les études consacrées aux travaux portant sur le lien entre responsabilité
d’entreprise (y compris responsabilité environnementale) et compétitivité au niveau de l’entreprise ont
permis d’identifier près de 50 problèmes de méthodologie ou de mesure (Vogel, 2005).
110.
La définition et la mesure de variables essentielles comme la forme de la politique
environnementale, la sévérité des mesures ou la compétitivité aux différents niveaux, peut être
problématique. Ainsi, par exemple, si la politique environnementale est mesurée de façon empirique
33
ENV/EPOC/GSP(2008)14/FINAL
par le biais des coûts de la réduction de la pollution, comme c’est souvent le cas, cela suppose déjà par
nature que le degré de rigueur de la politique en question et les coûts d’abattement soient des
transformations monotones l’un de l’autre. Or, bien que l’on sache que ce n’est pas seulement la
sévérité des politiques publiques mais aussi leur élaboration et les détails relatifs à leur mise en œuvre
qui influencent les impacts de la politique environnementale sur la compétitivité, cela est rarement
reflété dans les études.
111.
Pour un certain nombre de raisons, les données empiriques couramment accessibles, quels
que soient les efforts pour les recueillir, peuvent ne pas permettre de répondre à la question
fondamentale du lien entre politique environnementale et compétitivité. Premièrement, les politiques
pour lesquelles on dispose de données empiriques n’ont pas nécessairement été “bien conçues” au sens
de Porter, elles risquent donc de ne pas pouvoir servir à tester l’hypothèse de Porter selon laquelle des
politiques environnementales bien conçues peuvent favoriser la compétitivité. Deuxièmement, sachant
que de façon générale, les coûts environnementaux n’ont pas été pleinement pris en compte, on ne
peut pas disposer de données empiriques concernant l’effet possible sur la compétitivité (Lankoski,
2008b). Troisièmement, dans une politique environnementale, un “effet paralysant” s’exerce: lorsqu’il
faut s’attendre à des impacts défavorables significatifs, ces impacts ne peuvent souvent pas se
matérialiser pleinement car des exceptions et des mécanismes de compensation sont prévus pour les
neutraliser (voir aussi la discussion du chapitre 4). De ce fait, les impacts défavorables en termes de
compétitivité ne transparaissent finalement pas dans les données empiriques. (Esty, 1996).
112.
Les modèles de simulation utilisés pour évaluer les impacts sur la compétitivité souffrent
d’un problème de variable manquante. Nous avons vu qu’un grand nombre de facteurs pouvaient
contribuer au lien entre politique environnementale et compétitivité, mais les modèles ne peuvent
prendre en compte que les impacts qui ont été spécifiés par leur concepteur. Ainsi, par exemple, les
modèles ne prennent généralement pas en compte les compensations par l’innovation.
113.
L’évaluation des coûts d’abattement est difficile également, et il se peut que les coûts soient
sous-estimés ou surestimés. Les parties prenantes peuvent trouver un intérêt stratégique à grossir ou au
contraire à réduire les estimations de coûts. Par ailleurs, il peut y avoir des coûts non compatibilisés:
par exemple, Joshi et al. (2001) ont examiné le cas de 55 aciéries et ont constaté qu’à une
augmentation de 1 $ du coût visible de la réglementation environnementale correspondait une hausse
de 9 ou 10 $ des coûts cachés. Il peut y avoir aussi d’autres économies résultant des compensations par
l’innovation, d’une évolution non prévue des technologies, d’une réaction imprévue du marché ou de
complémentarités non mesurées entre les activités environnementales et la production nonenvironnementale (Bailey et al., 2002; Morgenstern et al., 2001; Sherrington & Moran, 2007). Enfin,
les premières estimations des coûts d’abattement peuvent être des surestimations simplement parce
qu’au cours du processus de négociation de la réglementation, les exigences demandées sont souvent
modifiées pour limiter les problèmes de compétitivité (Ackerman et al., 2008).
D’importantes explications de l’absence de résultats probants
114.
Aux explications relatives aux données et aux méthodologies s’ajoutent des explications
statistiques éventuelles de l’incapacité de la recherche empirique à détecter un lien systématique et
cohérent entre politique environnementale et compétitivité. Une explication couramment proposée est
que les coûts environnementaux constitueraient une part si réduite des coûts totaux et que les
différences de sévérité des mesures entre les partenaires commerciaux auraient été si petites qu’il
n’existerait tout simplement pas d’impact important sur la compétitivité (voir p.ex. Adams, 1997).
115.
Par ailleurs, les entreprises peuvent réagir aux pressions concurrentielles d’une autre manière
que ce qui était prévu lors de la collecte des données. Ainsi, par exemple, les entreprises peuvent sous34
ENV/EPOC/GSP(2008)14/FINAL
traiter certaines phases de la production plutôt que de délocaliser l’ensemble de leur activité. Jenkins et
al. (2002, ref. Pieters, 2008) ont trouvé des éléments confirmant la délocalisation des parties les plus
ingrates de la chaîne de valeur, et Jeppesen et Folmer (2001) ont constaté que la fermeture d’usines
était une réponse plus probable que la relocalisation. Les entreprises peuvent aussi ne pas réagir
immédiatement, mais seulement au moment où se présente une opportunité souhaitable dans leur cycle
d’investissement.
116.
Une autre possibilité est qu’il y ait un certain lien sous-jacent entre politique
environnementale et compétitivité, mais que ce lien soit masqué par d’autres facteurs agissant en sens
inverse. En particulier, les dotations en capital, en main d’œuvre ou en ressources naturelles
(l’hypothèse de la dotation en facteurs) peuvent servir à neutraliser les impacts des politiques
environnementales (l’hypothèse du « refuge » pour pollueurs) (Pieters, 2008). Par conséquent, dans le
contexte réel de la concurrence, les impacts sur la compétitivité ne se matérialiseraient pas.
117.
L’idée que ce lien ne serait pas universel mais contingent commence à s’imposer:
l’importance et même le sens des impacts sur la compétitivité peuvent différer d’une entreprise à une
autre ou d’un secteur à un autre ou selon le type de politique, ou selon le problème d’environnement,
p.ex. selon la structure du marché, la nature de la concurrence et la capacité résultante des entreprises à
répercuter les hausses de coût. Par, conséquent, le lien a vite fait de disparaître avec l’agrégation des
données. Il s’agit non pas de trouver une réponse standard, mais plutôt de comprendre la nature des
impacts dans des circonstances particulières.
118.
Du point de vue de l’action des pouvoirs publics, les différentes implications en matière de
compétitivité des différents types de mesures politiques revêtent une importance fondamentale. Ainsi,
par exemple, d’après Frondel et al. (2007), une réglementation directe comme les normes techniques a
encouragé les réductions de pollution en bout de chaîne, mais les taxes sur les intrants ont favorisé des
changements dans les processus de production, qui devraient être moins préjudiciables à la
compétitivité. Par ailleurs, ce n’est pas seulement la politique environnementale mais aussi le
processus politique par lequel les mesures ont pu être appliquées qui pourrait jouer un rôle, ce
processus pouvant constituer une opportunité de bâtir la confiance, de susciter des partenariats et de
partager l’information.
119.
Pour finir, il convient de noter que, quel que soit le degré de fiabilité avec lequel nous
pouvons évaluer la relation entre politique environnementale et compétitivité dans une certaine
situation, la possibilité d’appliquer les résultats à une autre situation dans l’avenir est limitée. Si cette
relation suit une fonction dynamique en U renversé spécifique à chaque cas, comme nous l’avons
affirmé, extrapoler les résultats à des entreprises différentes, à des problèmes différents, à des degrés
de rigueur différents ou à des périodes différentes est problématique. (Lankoski, 2008a)
35
ENV/EPOC/GSP(2008)14/FINAL
EXAMEN DES AVANTAGES ET DES INCONVÉNIENTS DES MESURES PROPOSÉES
POUR RÉSOUDRE LE PROBLÈME DES IMPACTS DÉFAVORABLES DE LA POLITIQUE
ENVIRONNEMENTALE SUR LA COMPÉTITIVITÉ
120.
Ensuite, nous nous intéressons à l’autre aspect des liens à double sens entre politique
environnementale et compétitivité: les impacts que peuvent avoir les questions de compétitivité sur les
décisions en matière de politique environnementale. Une question fait l’objet de notre étude. En raison
de préooccupations relatives à la compétitivité, diverses mesures ont été proposées pour accompagner
les mesures environnementales, avec pour objectif de contrer les impacts négatifs sur la compétitivité.
Dans notre discussion sur les travaux empiriques existants, nous avons noté que ces mesures étaient
une raison expliquant le fait que les principaux impacts des politiques environnementales sur la
compétitivité aient été difficiles à démontrer de façon empirique. Ce chapitre traitera des types de
mesures généralement envisageables pour résoudre le problème des impacts négatifs sur la
compétitivité, des considérations devant être prises en compte lorsque de telles mesures sont proposées
et de ce que l’on peut trouver dans les études déjà réalisées concernant les avantages et les
inconvénients de ces mesures. Alors que ce chapitre concerne les impacts sur la compétitivité par
rapport à la concurrence internationale, il convient de garder à l’esprit que les impacts de la politique
environnementale sur la compétitivité peuvent aussi se manifester par rapport à ceux des concurrents
sur le marché intérieur (par exemple, substituts de différents secteurs) qui ne sont pas soumis à la
réglementation ou qui en subissent les impacts de façon différente.
Types de mesures
121.
D’après Reinaud (2008), les mesures envisageables pour remédier au problème des impacts
négatifs d’une politique environnementale sur la compétitivité peuvent être classées selon trois
catégories: les mesures pour atténuer les impacts sur la compétitivité dans les pays réglementés, les
mesures pour promouvoir une politique environnementale dans les pays non réglementés, et les
mesures pour corriger les impacts des politiques environnementales aux frontières. A l’intérieur de
chaque catégorie, on peut définir plusieurs mesures. Il convient de noter que les mesures envisageables
dans chaque situation dépendent de l’instrument de politique environnementale initial. Ainsi, par
exemple, un système d’allocation initiale gratuite des quotas ne peut être utilisé qu’en liaison avec un
système de permis négociables d’émission de polluants, et le recyclage des recettes ne peut être utilisé
qu’en liaison avec des instruments de politique générateurs de recettes comme les taxes
environnementales ou les permis alloués par voie d’enchères.
Les mesures pour atténuer les impacts des politiques environnementales dans les pays réglementés
122.
Cette catégorie de mesures vise à empêcher directement les augmentations de coûts pouvant
être observées dans le pays réglementé par suite d’une politique environnementale. Quand le choc
engendré par le coût de la politique environnementale est réduit au début, les impacts sur la
compétitivité vis-à-vis de la concurrence internationale non réglementée sont minimisés. Un certain
nombre de mesures ont été proposées ou appliquées dans ce contexte:
•
Modifier les obligations en matière environnementale: objectifs moins contraignants,
exemptions partielles
36
ENV/EPOC/GSP(2008)14/FINAL
•
Modifier le mode d’allocation des autorisations: allocation initiale des quotas d’émissions
totalement ou partiellement gratuite
•
Introduire de la flexibilité dans les systèmes de réglementation: accès aux compensations,
crédits, banques, emprunts
•
Recycler les recettes de la politique environnementale en faveur des secteurs affectés:
compensation financière directe, réduction des coûts indirects
•
Aide directe au moyen de subventions ciblées
Les mesures pour promouvoir une politique environnementale dans les pays non réglementés
123.
Cette catégorie de mesures vise à inciter les concurrents situés dans les pays non réglementés
à prendre des mesures en faveur de l’environnement similaires à celles prescrites par la politique
environnementale en question. Ainsi, même si cette politique environnementale entraîne des hausses
de coûts dans le pays réglementé, la situation relative de chacun en termes de compétitivité ne
changera pas, la concurrence internationale étant confrontée aux mêmes coûts. Il s’agit des mesures
suivantes (voir p.ex. van Asselt & Biermann, 2007):
•
Elargissement de la couverture géographique de la réglementation
•
Accords sectoriels internationaux
•
Accords bilatéraux ou accords à composition restreinte avec certains pays
•
Ajustement du Système de préférences généralisées (SPG) de l’Union européenne
Mesures pour ajuster les impacts des politiques environnementales aux frontières
124.
Cette catégorie de mesures ne vise pas à éviter l’apparition de différentiels de coûts entre
concurrents soumis et non soumis à une réglementation, elle concerne plutôt les impacts de leurs
échanges commerciaux aux frontières. Quand les exportations sont récompensées, compte tenu du
supplément de coût, quand les importations sont restreintes, l’équilibre des forces concurrentielles
reste inchangé dans les pays réglementés comme dans les pays non réglementés, même si le niveau de
performance environnementale est plus élevé dans les pays réglementés. Les mesures pour
récompenser les exportations sont les ajustements de coûts aux frontières. Les mesures qui seraient
théoriquement envisageables pour restreindre les importations sont les suivantes (voir p.ex. van Asselt
& Biermann, 2007):
•
Ajustements de coûts aux frontières pour les importations
•
Quotas d’importation
•
Réglementation et normes techniques stipulant des exigences en matière de performance
environnementale et s’appliquant aussi aux produits importés
•
Contre-mesures par rapport à l’OMC
•
Tarifs douaniers, taxes ou exigences de permis dissuasives
37
ENV/EPOC/GSP(2008)14/FINAL
•
Restriction des échanges avec les parties étrangères à un accord environnemental multilatéral
•
Mesures pour influencer le comportement du consommateur, p.ex. par l’étiquetage
Critères d’évaluation
125.
Plusieurs angles de vue – économique, écologique, légal et politique – doivent être adoptés
pour qu’il soit possible d’étudier comme il se doit les avantages et les inconvénients des différentes
mesures destinées à pallier les impacts négatifs des politiques environnementales sur la compétitivité.
Déterminer un ensemble de critères définitifs d’évaluation n’est pas simple, mais certaines
considérations éventuellement pertinentes peuvent être précisées.
126.
D’un point de vue économique, une mesure bien conçue devrait permettre de résoudre les
problèmes de compétitivité sans créer de fardeau économique supplémentaire ailleurs. Les points à
examiner peuvent être les suivants:
•
La capacité à régler les problèmes de compétitivité
•
L’impact sur la croissance économique globale (dans le pays qui applique cette mesure et
dans les autres pays)
•
La faisabilité administrative et les coûts de transaction
•
La capacité de promouvoir l’innovation
127.
D’un point de vue écologique, une mesure bien conçue devrait permettre de résoudre les
problèmes de compétitivité sans porter préjudice aux objectifs environnementaux. Les points à
examiner peuvent être les suivants:
•
La capacité de poursuivre les objectifs environnementaux définis dans le cadre de la
politique initiale
•
La capacité de conserver le signal de prix dans l’économie du pays réglementé (p.ex. pour le
carbone dans le cas des mesures relatives au changement climatique)
•
Dans le cas des mesures relatives au dioxyde de carbone, la capacité d’éviter les fuites de
carbone
128.
D’un point de vue légal, une mesure bien conçue devrait être compatible avec la législation
existante. Les points à examiner peuvent être les suivants:
•
La compatibilité avec les règles de l’OMC (p.ex. non-discrimination entre produits
similaires, principe de coopération internationale)
•
La compatibilité avec la législation intérieure ou avec toute autre législation applicable (p.ex.
législation de l’UE)
•
La compatibilité avec les engagements internationaux concernant l’environnement
129.
D’un point de vue politique, une mesure bien conçue devrait être faisable et acceptable. Les
points à examiner peuvent être les suivants (voir p.ex. van Asselt & Biermann, 2007):
38
ENV/EPOC/GSP(2008)14/FINAL
•
La compatibilité avec les objectifs politiques généraux du pays qui applique les mesures
•
Eviter de porter préjudice aux relations avec les autres Etats
•
La capacité de prendre en compte les questions d’équité et de loyauté (p.ex. responsabilités
communes mais différenciées vis-à-vis des problèmes écologiques)
Examen des avantages et des inconvénients
130.
Ce chapitre reprend des réflexions tirées des travaux récents de l’OCDE et de l’AIE sur les
mesures pour contrer les impacts négatifs de la politique environnementale sur la compétitivité. Après
un examen de quelques études générales, ce chapitre présente des études sur les mesures contre le
changement climatique à titre d’exemple, car c’est un domaine dans lequel les problèmes de
compétitivité ont eu un fort impact sur les discussions politiques. Les questions relatives aux mesures
pour lutter contre les impacts négatifs sur la compétitivité sont également évoquées, dans le contexte
des autres problèmes de politique environnementale, si bien que ce chapitre comprend aussi des
résultats de travaux consacrés à d’autres mesures de politique environnementale.
Les études générales
131.
L’OCDE (2008) discute de façon générale des avantages et des inconvénients des diverses
mesures pour résoudre le problème des impacts des mesures environnementales sur la compétitivité.
Pour toutes ces mesures, un principe essentiel est de conserver une incitation à lutter contre la
pollution. D’autre part, il est recommandé d’annoncer des réformes de politique environnementale à
l’avance et de les réaliser progressivement, afin que les pollueurs concernés disposent d’un temps
suffisant pour pouvoir s’adapter à la nouvelle situation. Les considérations propres à des mesures
particulières sont les suivantes:
•
Le recyclage (partiel) des recettes des taxes environnementales vers les pollueurs les plus
affectés peut servir à limiter les impacts sur la compétitivité. Toutefois, on renonce alors à la
possibilité d’utiliser les recettes des écotaxes pour réduire d’autres taxes sources de
distorsions, ce qui tend à limiter les avantages environnementaux de la taxe.
•
Les ajustements fiscaux aux frontières sont parfois envisageables, mais leurs implications
écologiques et économiques globales doivent être étudiées avec soin avant leur adoption. En
particulier, les coûts administratifs et la compatibilité avec les activités d’échanges à
l’international nécessitent l’attention.
•
L’application de taux de taxation réduits pour les entreprises ou les secteurs les plus affectés
permet de maintenir une certaine incitation à réduire les émissions de polluants, même si
cette incitation diminue, si bien que cette option est tout de même préférable à une
exemption totale d’écotaxe.
•
Avec un système d’échanges de permis, l’allocation initiale gratuite des quotas d’émissions
ou le recyclage des recettes de l’allocation des quotas par voie d’enchères permettent de
maintenir l’incitation à réduire les émissions de polluants.
•
En cherchant à impliquer d’autres pays dans la réforme politique envisagée, on peut aussi
limiter les impacts sur la compétitivité. Cependant, si l’externalité environnementale en
question est de nature essentiellement interne, des réponses politiques souples peuvent être
plus appropriées qu’une politique harmonisée.
39
ENV/EPOC/GSP(2008)14/FINAL
132.
Smith (2003) s’est intéressé aux écotaxes. En ce qui concerne les mesures possibles pour
résoudre le problème de leurs impacts sur la compétitivité, il est arrivé aux conclusions suivantes:
•
Le recyclage des recettes peut réduire substantiellement les impacts d’une écotaxe sur la
compétitivité, encore que les changements intervenant dans le schéma de taxation puissent
engendrer des effets asymétriques pour certaines entreprises dans un secteur donné.
Cependant, cette mesure peut aussi faire diminuer la réduction de pollution obtenue, surtout
lorsque le principal moyen de réduire la pollution consiste à réduire la production. Elle peut
aussi engendrer des incitations sources de distorsions, les entreprises se comportant dès lors
de manière à maximiser leurs droits à toucher ces recettes recyclées.
•
Les ajustements fiscaux aux frontières, surtout ceux qui s’appliquent aux processus et aux
méthodes de production, peuvent impliquer des obstacles légaux significatifs. Par ailleurs, il
existe un certain nombre d’importants problèmes économiques en jeu. Premièrement, les
ajustements fiscaux aux frontières compromettent les incitations à réduire la pollution,
surtout pour les entreprises qui sont les plus actives sur les marchés d’export.
Deuxièmement, si ces ajustements se limitent aux échanges avec des pays qui ne mènent pas
une politique environnementale équivalente, des difficultés considérables surgiront lorsqu’il
s’agira de juger quelle politique environnementale peut être considérée comme
“équivalente”. Troisièmement, il sera difficile de définir le taux d’ajustement fiscal
approprié, sauf si l’écotaxe représente un pourcentage déterminé de la valeur du produit
échangé.
Les études sur les politiques de lutte contre le changement climatique
133.
Reinaud (2008) a étudié en fonction d’une sélection de critères économiques et écologiques
les mesures qui ont été proposées ou discutées dans la législation actuelle pour neutraliser les impacts
des systèmes d’échanges de droits d’émissions de CO2 sur la compétitivité. Concernant les avantages
et les inconvénients de ces mesures, les résultats ont été les suivants:
•
L’allocation initiale gratuite des quotas d’émissions sous un plafond absolu peut réduire la
perte de compétitivité (et compenser la marginalisation des actifs), selon le plafond. Il est
cependant difficile d’identifier les secteurs vulnérables, et si l’allocation est trop généreuse et
si les entreprises peuvent assumer ce coût, cette mesure risque d’assurer à certaines
entreprises des gains exceptionnels. Par ailleurs, les autorités gouvernementales rateraient
l’opportunité d’attribuer les autorisations aux enchères et de lever des recettes pouvant
permettre de réduire d’autres coûts pour le pays.
•
Une allocation gratuite des quotas d’émissions en fonction de la production peut également
réduire les impacts sur la compétitivité, en fonction du niveau de référence. Les problèmes
sont la difficulté d’identifier les secteurs vulnérables et le niveau d’efforts requis, et le
contrôle des intrants de la production. Par ailleurs, cette mesure impliquerait des prix du CO2
plus élevés pour les mêmes réductions, or le coût des réductions des émissions est supporté
par d’autres secteurs de l’économie. Cette mesure limite aussi le signal de prix du CO2 dans
les prix des produits, ce qui compromet l’efficacité économique du système d’échange de
droits d’émission comme outil pour internaliser les coûts liés au changement climatique et
limite la substitution des produits en faveur de produits moins intensifs en production de
CO2.
•
La compensation financière des pertes de compétitivité atténue les impacts sur la
compétitivité des coûts de la lutte contre le changement climatique, mais elle représente un
40
ENV/EPOC/GSP(2008)14/FINAL
coût fixe pour le reste de l’économie et peut être considérée dans les pays de l’Union
européenne comme une aide de l’Etat.
•
Les ajustements de coût aux frontières contribuent à égaliser le terrain en ce qui concerne les
réductions d’émissions de CO2 et, lorsqu’ils s’accompagnent de mises aux enchères des
autorisations, ils peuvent permettre que le signal de prix du CO2 règle les prix des produits
du pays. La compatibilité d’une telle mesure avec les règles de l’OMC est cependant
incertaine. Par ailleurs, si les importations impliquent l’achat de droits d’émissions sur le
marché du carbone, les prix du CO2 augmenteront au détriment de la compétitivité des
exportations et cela entraînera des coûts indirects plus élevés. Les autres problèmes liés à une
telle mesure sont la difficulté de mesurer et de contrôler le carbone contenu dans certains
produits, la complexité de la mise au point de procédures administratives pour l’attribution
de droits d’émissions à des produits particuliers, et la possibilité pour les entreprises de
contourner le système d’ajustement par des stratégies de jeux.
•
Les accords sectoriels assortis d’un système de crédit peuvent représenter une opportunité
pour un pays en développement de se lancer dans la lutte contre les émissions de gaz à effet
de serre, avec la perspective de recevoir des crédits de gaz à effet de serre en échange de
réductions réussies des émissions, et élargir l’intégrité environnementale du cadre
international. Si un accord sectoriel prend la forme d’objectifs sectoriels nationaux
contraignants dans les plus grands pays, cela peut éventuellement permettre de résoudre le
problème des fuites. Dans le cas du Clean Development Mechanism (CDM) sectoriel, une
référence rigoureuse pour le crédit limiterait l’effet de subvention pour la concurrence.
Cependant, établir un instrument de mesure correct pour évaluer les véritables efforts de
réduction des émissions à l’échelle du secteur peut être techniquement difficile. Enfin,
lorsqu’elles sont permanentes, les recettes financières des crédits et autres formes d’aide
peuvent renforcer la position concurrentielle des participants et entraîner ainsi d’autres
distorsions dans le jeu économique.
134.
Reinaud (2008) constate que chacune de ces mesures a ses mérites et ses faiblesses et que la
façon dont ces mérites ou ces faiblesses se matérialisent dépend de la conception détaillée de ces
mesures et de la façon dont elles sont appliquées (p.ex., selon que l’allocation initiale gratuite des
quotas d’émissions concerne seulement les installations existantes ou également les nouvelles, que
l’ajustement des coûts aux frontières concerne seulement les importations ou également les
exportations) ainsi que des caractéristiques propres aux secteurs auxquels la mesure est appliquée
(p.ex., selon que ce secteur soit intensif en consommation électrique ou en émissions en cours de
processus de production, ou selon que ce secteur soit capable ou non de répercuter les coûts sur le
consommateur). On peut recourir à des mesures différentes dans des situations différentes. Des
considérations générales interviennent également concernant la mise au point de ces mesures: elles
doivent être fondées sur la mise au point d’un scénario fictif pour justifier leur nécessité, elles doivent
être flexibles et transitoires, pour permettre une transition en douceur vers une économie à faible
consommation de carbone ou en évitant une dépendance prolongée vis-à-vis des mesures d’aide et
elles doivent être propres à ne pas compromettre un accord international plus élargi dans l’avenir
concernant le climat et à inciter à participer à la lutte contre les gaz à effet de serre au niveau mondial.
135.
Burniaux et al. (2008) examinent diverses mesures ayant été débattues dans le contexte de la
résolution des problèmes de compétitivité liés aux mesures de lutte contre le changement climatique à
partir de l’année 2012. Une de ces mesures est l’exemption partielle des industries, des gaz à effet de
serre ou des pays vis-à-vis des exigences de réduction des émissions. Les simulations indiquent que
toutes ces mesures augmentent de façon significative les coûts qu’implique la réalisation des objectifs
de réduction des émissions. Ainsi, par exemple, si l’objectif est d’atteindre une concentration de 550
41
ENV/EPOC/GSP(2008)14/FINAL
ppm d’équivalent CO2 en 2050, une exemption des industries intensives en énergie augmenterait les
coûts de plus de moitié, une exemption des gaz à effet de serre autres que le CO2 doublerait presque
les coûts, et une exemption des pays qui ne font pas partie de l’Annexe I rendrait l’objectif (plus
exactement, tout objectif au-dessous de 750 ppm) pratiquement hors d’atteinte.
136.
Une autre mesure analysée par l’étude est celle des ajustements des coûts aux frontières ou
droits compensateurs. L’analyse montre que cette mesure peut permettre de réduire une partie des
effets sur la compétitivité et sur la fuite de carbone. Cependant, un certain nombre de problèmes ont
trait aux ajustements de coûts aux frontières:
•
Ils ne constituent une option viable que si la coalition des pays actifs est très réduite, bien
plus petite que la liste de l’Annexe I. Ainsi, par exemple, avec des droits compensateurs, le
taux de fuite passerait de 20% à 6% en supposant que l’Union européenne réduise ses
émissions de 50% d’ici 2050, mais le taux de fuite passerait seulement de 9% à 5% si tous
les pays de l’Annexe I devaient appliquer des mesures similaires.
•
Ils risquent de ne pas réduire les pertes de compétitivité et de production subies par les
industries intensives en énergie dans les pays participants. En effet, ils accroissent le coût des
intrants importés utilisés par les industries intensives en énergie, et les intrants non
énergétiques de ces industries seraient soumis à une tarification du carbone mais les droits
compensateurs ont peu de chances de s’appliquer aux intrants non énergétiques utilisés par
les concurrents étrangers.
•
Ils impliquent des coûts pour les pays participants comme pour les pays non participants.
Ainsi, par exemple, si les pays de l’Annexe I réduisaient unilatéralement leurs émissions de
50% d’ici 2050, un droit compensateur engendrerait une réduction supplémentaire des
émissions dans le monde de moins de 1% des prévisions d’émissions pour 2050 et un coût
supplémentaire d’environ 1% du PIB mondial.
•
Ils peuvent engendrer des coûts administratifs potentiellement élevés, avec le risque de subir
des mesures de rétorsion.
137.
Des accords sectoriels rigoureux au niveau international, p.ex. les systèmes sectoriels de
plafonnement et d’échange dans les secteurs intensifs en énergie (aluminium, ciment ou acier) et dans
des secteurs transnationaux comme les transports maritimes et aériens internationaux, sont considérés
comme un choix plus prometteur. De tels accords permettraient de parvenir à des réductions plus
importantes des émissions moyennant un moindre coût global, mais ils peuvent avoir de forts impacts
sur la distribution des coûts entre les différents pays. Ces impacts dépendent des détails des systèmes
d’échange au niveau du secteur et du pays et de l’intégration de ces systèmes.
Les études relatives aux autres mesures
138.
L’OCDE (2006) a analysé des études de cas empiriques par pays relatives à la mise en œuvre
de politiques environnementales susceptibles d’avoir des impacts négatifs sur la compétitivité. Ces
études de cas incluaient la proposition de taxe sur la consommation d’énergie dans l’industrie en
France, la Climate Change Levy au Royaume-Uni, la taxe norvégienne sur le carburant des avions, le
système de comptabilité minérale MINAS aux Pays-Bas, la taxe autoroutière des poids lourds en
Suisse et la taxe sur les sacs plastiques en Irlande. Si les trois premiers cas concernent toujours les
mesures contre le changement climatique, le troisième élargit le champ aux autres mesures
environnementales. Les messages tirés de ces études de cas sont les suivants:
42
ENV/EPOC/GSP(2008)14/FINAL
•
Différentes mesures de lutte contre la pollution, ayant des effets différents sur
l’environnement comme sur la compétitivité, sont envisageables.
•
Il y a souvent un compromis à faire entre les coûts de transaction et l’acceptation politique, si
bien que les mécanismes mis en place pour résoudre les problèmes de compétitivité
engendrent une hausse des coûts administratifs. Cela a été le cas par exemple avec le
système MINAS aux Pays-Bas.
•
Pour que les dirigeants des entreprises ne soient pas lésés, des mécanismes de compensation
relativement modestes peuvent souvent suffire, selon que le marché intérieur est plus ou
moins isolé de la concurrence internationale. Le risque de surcompensation est même sérieux
et doit être pris en compte.
139.
L’étude de l’OCDE (2006) a aussi passé en revue quelques leçons tirées de l’expérience
américaine des ajustements fiscaux aux frontières liés à la législation Superfund et de l’élimination des
substances chimiques destructrices de la couche d’ozone. Une de ces leçons concerne le montant de la
taxe compensatoire. D’une part, les ajustements fiscaux aux frontières doivent être évités lorsque la
taxe ne représente qu’une proportion très faible du prix du produit, faute de quoi il y aurait un risque
de créer un fardeau administratif substantiel pour un avantage écologique très faible. D’autre part, si la
taxe atteint une proportion significative du prix du produit, cela peut aggraver les problèmes d’évasion
fiscale et notamment de commerce illicite. Une autre leçon est que si les fabricants sont obligés de
fournir une information sensible du point de vue commercial sur les matériaux et processus
intervenant dans la fabrication d’un produit, pour les besoins du système d’ajustement fiscal aux
frontières, ce seul fait peut être source de problèmes de compétitivité.
Discussion sur l’étude des avantages et des inconvénients
140.
Un message qui ressort dans la discussion sur les avantages et les inconvénients des mesures
pour contrer les impacts négatifs sur la compétitivité, telle qu’elle apparaît dans les travaux existants,
est qu’il n’y a pas de réponse catégorique. Toutes ces mesures comportent des aspects positifs et des
aspects négatifs, et la balance entre avantages et inconvénients dépend des spécificités du problème
environnemental concerné et de la politique environnementale initiale, ainsi que de la conception
détaillée et de la mise en œuvre de la mesure en question. Autrement dit, l’application des mesures
pour contrer les impacts négatifs sur la compétitivité implique une analyse circonspecte dans chaque
situation.
141.
De ce qui précède, il découle aussi que les résultats de la discussion lancée dans le contexte
des mesures de lutte contre le changement climatique peuvent ne pas être directement transposables
aux autres mesures environnementales. Si une grande partie des travaux récents consacrés aux mesures
en question concerne les mesures contre le changement climatique (et donc des mesures originales
comme les systèmes d’échanges de quotas d’émissions et les taxes sur le CO2), le besoin de résoudre
le problème des impacts négatifs sur la compétitivité se fait aussi sentir avec les autres mesures
environnementales. La discussion pourrait donc être élargie pour couvrir les autres problèmes
d’environnement et les autres types de mesures environnementales initiales.
43
ENV/EPOC/GSP(2008)14/FINAL
LES LEÇONS APPRISES ET LA VOIE À SUIVRE
142.
Depuis une dizaine d’années, le débat sur la politique environnementale et la compétitivité a
évolué peu à peu vers une compréhension et une analyse plus fines de cette relation hétérogène. Un
message important qui se dégage est que, pour comprendre le lien entre politique environnementale et
compétitivité, il est nécessaire d’admettre pleinement un angle de vue international ou mondial sur ces
problèmes, parallèlement au point de vue national.
143.
Un autre message important qui a été appris est que les impacts peuvent être très spécifiques
à chaque cas. Premièrement, les impacts sur la compétitivité dépendent du type de mesure de politique
environnementale adoptée et des détails de sa mise en œuvre. Il n’est donc pas possible de déterminer
avec certitude le lien entre “la politique environnementale en général” et la compétitivité. Ce qui est
nécessaire pour pouvoir apporter une aide efficace à la décision en matière de politique publique, c’est
une approche plus centrée et plus segmentée des politiques environnementales.
144.
Deuxièmement, les impacts sur la compétitivité dépendent des caractéristiques de
l’entreprise et du secteur. Une des caractéristiques essentielles dans ce contexte est la structure de
l’industrie en question. Cependant, outre la structure de l’industrie, plusieurs autres caractéristiques
doivent être considérées, concernant par exemple la nature des produits, les techniques de production
ou les segments de la consommation. On peut donc s’attendre à ce que les impacts d’une politique
environnementale sur la compétitivité diffèrent selon les acteurs économiques.
145.
Troisièmement, les impacts sur la compétitivité peuvent dépendre du domaine
environnemental. C’est là une idée émergente sur laquelle il existe encore peu d’études empiriques. Il
est admis depuis longtemps que la problématique de l’élaboration des politiques n’est pas la même
selon le problème environnemental en question (selon, par exemple, que ce problème se pose au plan
local, régional ou mondial, ou selon que la pollution provienne de sources ponctuelles ou non), mais
l’idée que les impacts sur la compétitivité puissent aussi varier est plus récente.
146.
Les impacts exacts de la politique environnementale sur la compétitivité sont déterminés par
tous ces types de contingences à la fois. On peut donc distinguer trois niveaux de détail dans l’analyse
des impacts sur la compétitivité. Au niveau le plus général, la question à examiner est la relation entre
politique environnementale et compétitivité. Comme on l’a vu, il n’existe pas de réponse définitive à
cette question. A un niveau de détail intermédiaire, on étudie les impacts sur la compétitivité par
mesure, par secteur ou par problème environnemental. On peut s’attendre à ce que l’examen de cette
question permette d’obtenir des indications plus claires en matière de politique. Au niveau le plus
détaillé, la question est de savoir de quelle manière une mesure particulière relative à un problème
environnemental particulier affecte certaines entreprises ou certains secteurs en particulier. C’est à ce
niveau d’analyse que peuvent être trouvées les réponses les plus catégoriques. Le choix du niveau
d’analyse approprié dépend des objectifs de l’étude à mener ainsi que de considérations pratiques.
Les implications politiques dans différentes situations
147.
Les impacts de la politique environnementale sur la compétitivité, spécifiques à chaque cas,
peuvent engendrer trois types de situations différents, dont découlent un certain nombre d’implications
politiques. Les implications politiques présentées ici sont toutes compatibles avec celles présentées par
Adams (1997) dans le rapport de bilan précédent.
44
ENV/EPOC/GSP(2008)14/FINAL
148.
Il existe bel et bien des situations dans lesquelles une politique environnementale produit des
impacts positifs sur la compétitivité (ce que l’on appelle des situations gagnant-gagnant). Cependant,
la fréquence de ces situations gagnant-gagnant n’est pas bien connue, pas plus que l’importance
possible de ces impacts positifs sur la compétitivité. Dans tous les cas, toutes les situations ne sont pas
des situations gagnant-gagnant. Des messages clairs se dégagent concernant les situations gagnantgagnant:
•
Une politique environnementale doit être instituée pour des raisons écologiques et non pas
pour parvenir à des situations gagnant-gagnant.
•
Néanmoins, tous les efforts doivent être faits pour que cette politique soit compatible avec
des situations gagnant-gagnant. Ceci milite pour des politiques incitant à l’innovation, qui
soient stables et prédictibles, qui prévoient des périodes de transition adaptées, qui
privilégient les fins plutôt que les moyens et qui exploitent les instruments de la politique
économique (Porter & van der Linde, 1995).
•
Les entreprises doivent identifier et exploiter toute opportunité existante de créer une
situation gagnant-gagnant; la politique peut jouer un rôle en aidant les entreprises à
déterminer ces possibilités et en soutenant leur capacité de mettre en œuvre des solutions
gagnant-gagnant.
149.
Il peut exister aussi des situations dans lesquelles prévalent des préoccupations injustifiées
ou exagérées concernant les impacts négatifs sur la compétitivité (de faux dilemmes). C’est le cas, par
exemple, quand l’analyse des impacts sur la compétitivité ne s’intéresse qu’aux augmentations de coût
et ignore les possibilités d’avantages marchands et d’économies de coût, ou quand une analyse
statique ne tient pas compte des effets dynamiques comme l’innovation ou le progrès des technologies
et aboutit ainsi à une surestimation des coûts. D’autre part, il peut aussi y avoir des prévisions trop
optimistes concernant les possibilités de situations gagnant-gagnant associées à une mesure
environnementale (fausses situations gagnant-gagnant), par exemple s’il n’est pas tenu compte des
caractéristiques propres à cette mesure, au secteur ou au problème environnemental en question. La
recommandation, dans les deux cas, est d’obtenir une meilleure information relative aux impacts réels
sur la compétitivité:
•
Quand on considère les impacts économiques, il convient de veiller à tenir compte de tous
les facteurs positifs et négatifs différents pouvant lier la politique environnementale à la
compétitivité, même lorsque les impacts sont difficiles à mesurer ou à quantifier.
•
Les impacts doivent être analysés avec un niveau suffisant de détail pour qu’il soit possible
d’évaluer les impacts spécifiques à une situation.
150.
Enfin, il reste des situations dans lesquelles une politique environnementale entraînera des
impacts négatifs sur la compétitivité, si bien qu’existera un dilemme entre les objectifs écologiques et
les objectifs économiques. Là encore, il est difficile de savoir quelles peuvent être la fréquence de ces
dilemmes et l’importance des impacts défavorables. Les situations de dilemme sont les situations les
plus problématiques pour l’élaboration des politiques publiques, mais il existe aussi des messages
clairs dans ces situations:
•
Pour qu’une politique environnementale soit efficace, il est nécessaire qu’elle ait des impacts
sur la compétitivité dans le sens où un mode de production durable deviendra plus compétitif
et un mode de production non durable deviendra moins compétitif.
45
ENV/EPOC/GSP(2008)14/FINAL
•
C’est précisément dans les situations de dilemme qu’une politique environnementale est la
plus nécessaire, afin d’atteidre les objectifs environnementaux; là où existent des
opportunités de parvenir à une situation gagnant-gagnant, les approches volontaires peuvent
être davantage mises en avant dans l’industrie.
•
Dans les situations de dilemme, la mise au point d’une politique environnementale implique
une comparaison entre les avantages écologiques obtenus et les conséquences économiques
défavorables. Cette comparaison se fait à l’échelle de la société tout entière. En raison de
préférences différentes, cette comparaison peut donner des résultats différents dans des
sociétés différentes ou à des moments différents. La comparaison devient plus compliquée
lorsque la dispersion des avantages écologiques et la dispersion des conséquences
économiques défavorables, dans l’espace ou dans le temps, diffèrent l’une de l’autre.
•
Même lorsque la mise en œuvre d’une politique environnementale se fait clairement dans
l’intérêt général, malgré les impacts négatifs sur la compétitivité, les coûts et les avantages
de cette politique ont peu de chance d’être partagés de façon comparable entre les différents
acteurs de la société. Certains sont gagnants, mais certaines entreprises ou certains secteurs
peuvent se retrouver perdants. Dans l’élaboration des politiques, on doit veiller à ce que les
impacts sur la compétitivité ne soient pas inutilement importants, par exemple en portant son
attention à la prédictibilité, aux périodes de transition et aux coûts de transaction. Des
mesures spécifiques pour aider les perdants à réussir leur ajustement peuvent aussi être
prises.
•
Parfois, des mesures pour réduire les impacts négatifs d’une politique environnementale sur
la compétitivité, comme celles discutées au chapitre 4, sont nécessaires à l’obtention d’un
soutien politique. Dans ces cas de figure, les mesures prévues doivent être soigneusement
analysées sous différents angles afin de vérifier qu’elles ne compromettront pas par
inadvertance l’efficience et l’efficacité de la politique initialement menée.
Conclusions pour les travaux futurs
151.
L’analyse conceptuelle et empirique indique que les effets des politiques environnementales
sur la compétitivité et le bien-fondé de diverses mesures visant à résoudre le problème de ces effets
dépendent fortement de chaque cas ainsi que de l’entreprise ou du secteur, du problème
environnemental et de la mesure en question. Ce point de vue s’est affirmé depuis quelques années.
Ainsi donc, des résultats solides et utiles peuvent être obtenus non pas à partir de l’étude de problèmes
généraux et très globaux, mais plutôt à partir d’une étude plus affinée des problèmes à plus petite
échelle. C’est dans cette direction que les travaux futurs pourraient être orientés avec profit.
152.
Dans l’identification des effets des politiques environnementales sur la compétitivité, il
importe de tenir compte des caractéristiques propres aux entreprises et aux secteurs affectés. En même
temps, cependant, il importe que le développement des politiques s’appuie sur une perspective
sociétale globale plutôt que sur le sort de telle ou telle entreprise ou de tel ou tel secteur, ce qui signifie
qu’une aggrégation est aussi nécessaire. Associer et équilibrer des analyses désagrégées et agrégées
représentent donc un défi.
153.
Dans ce contexte, il serait utile que la somme de travaux existants sur le lien entre politique
environnementale et compétitivité, “vaste mais compartimentée” (Pieters, 2008), soit mieux intégrée.
En particulier, il existe deux grands ensembles d’études (examinés dans les chapitres 3.1 et 3.2)
traitant essentiellement de la même problématique à différents niveaux d’analyse, mais entre lesquels
il n’y a pas d’échanges.
46
ENV/EPOC/GSP(2008)14/FINAL
154.
Un point important mais négligé par l’analyse est que les caractéristiques des différents
problèmes écologiques peuvent avoir un lien avec les différents impacts des politiques
environnementales. Il serait nécessaire d’identifier les caractéristiques les plus déterminantes des
problèmes écologiques du point de vue du lien entre politique environnementale et compétitivité. De
façon similaire, la prise en compte de la justification des diverses mesures pour résoudre les problèmes
de compétitivité peut aussi varier d’un problème écologique à un autre. Ainsi, par exemple, pour un
problème écologique à l’échelle mondiale avec des risques d’opportunisme et de fuite, de telles
mesures peuvent être justifiées davantage que pour des problèmes écologiques qui se posent au niveau
local.
155.
Une grande partie des études récentes ont trait au changement climatique, or le changement
climatique, en tant que phénomène écologique, économique et politique, diffère à bien des égards d’un
certain nombre d’autres problèmes écologiques. Entreprendre des travaux comparables sur d’autres
mesures de politique environnementale que celles qui concernent le changement climatique serait donc
opportun.
47
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