Comment trouver la résilience sociale des quartiers pour combattre les injustices environnementales? Communication pour le 14e Colloque de la Relève VRM 1-2 juin, 2017 Québec, Québec Bernardo de Alvarenga Candidat à la maîtrise en Études Urbaines Centre Urbanisation, Culture et Société Institution National de la Recherche Scientifique Co-directeurEs: Philippe Apparicio et Anne-Marie Séguin [email protected] À la base, ma question est simple: comment est-ce que je peux justifier un travail sur les réseaux sociaux des parcs dans un contexte de justice environnementale? Présumons que je puisse regarder le mouvement des gens en ville. Pendant une journée, de quoi comprend-t-il? De quelques traces plus ou moins rectilinéaires sur une carte. Si nous voulons exprimer la persévérance d’une personne dans un point spécifique, nous y ajouterons une troisième dimension, celle du temps, soit en les représentant par hotspots, soit par un graphique en trois dimensions. Si nous trouvons deux hotspots dans le même espace-temps, là, nous avons les contacts humains. Abstrayons par un instant les bases géographiques de ce contact, et prenons-le donc comme le point de départ d’un réseau social. Les liens entre points, imaginons-les fortifiés par la duration d’une interaction entre deux individus. Plusieurs points interreliés forment une nuage de façon plus ou moins dense. Analysons donc cette nuage de points par un jeu: si un réseau social contient des individus privilégiés d’information, une hiérarchie s’attend. Les égaux dans la valeur de leur information se réunissent en congrès pour partager. Ceux qui connaissent moins entourent ceux privilégiés d’information de façon de plus en plus dense selon la valeur de cette information. La perte d’un noeud privilégié créerait donc des orphelins d’information. Dans une hiérarchie assez échelonné, tout un groupe peut s’échapper d’un réseau d’information donnée. Disons que cette information soit un bien ou un mal environnemental. Les orphelins d’information ne seront pas communiqués d’aucune retombée. Là où l’information se consolide et les maux environnementaux se manifestent autour des personnes par dommage, nous témoignons une injustice environnementale. Les déchets chimiques, la pollution sonore et autres nuisances environnementales affectent l’individu et sa place. Le site devient un lieu à éviter. Les gens déménagent, ils se perdent, ils deviennent malade. En sommaire, là où il y a une manque d’information sur les maux environnementaux, les liens sociaux se défont encore plus, la santé des individus se détériore, la valeur de leur immobilier diminue. La question de l’œuf et la poule en équité environnementale se pose : Est-ce que les maux environnementaux s’installent dans un endroit défavorisé ou est-ce que leur arrivée défavorise ces endroits? Deux chercheurs importants en justice environnementale, Paul Mohai et Robin Saha, se sont penchés sur cette question sur deux articles publiés récemment (2015a et 2015b). Ses analyses indiquent que les compagnies polluantes bâtissent là où la résistance contre leurs établissements est présumée la plus faible. L'affaiblissement des réseaux sociaux est une condition nécessaire pour l’injustice environnementale et toute dommage y provoqué, dont ceux à la santé. La justice environnementale veut remédier les dommages à une communauté, et elle le fait par quatre éléments: de la reconnaissance des gens qui subissent les injustices; de l’inclusion de ces gens dans toute procédure qui les concerne; de l’attention à leurs besoins et à leurs capacités; et de la distribution de récompenses aux injustices. Trois de ces aspects se concentrent sur les aspects sociaux d’un environnement. Au lieu de remédier, pourrions-nous prévenir les injustices par des interventions sociales? Manuel Pastor (2001) encourage une vision plus proactive de la protection des ressources naturelles, aboutis sur les mouvements de contestation formés pour la justice environnementale. Les personnes affectées doivent contrer en groupe, à travers alliances, par leurs contacts d’influence, par aide capitale du gouvernement. Le capital social devient une ressource-clé. Mais où devons-nous intervir pour le capital social d’un groupe? Dans quel environnement? Les parcs sont un bien environnemental. Si nous regardons ses bénéfices, la littérature indique qu’ils sont un endroit préféré pour rencontrer d’autres personnes et 1 socialiser (Peters et al., 2010). Ils peuvent servir de carrefour culturel (Low et al., 2005) et leur vivacité sociale encourage encore plus leur utilisation (Cohen et al., 2010). Les parcs peuvent réduire le stress et l’anxiété (van den Berg et al., 2010). Les personnes qu’habitent plus proches d’un parc tendent à l’utiliser plus (Kaczynski et Henderson, 2007). Les utilisateurs de parcs exhibent un plus haut niveau d’activité physique que nonutilisateurs (Giles-Corti et al., 2005). Une étude longitudinale (Wolch et al., 2011) avec enfants entre neuf et dix ans détermine que ceux qui habitaient à 500 mètres d’un parc ont un indice de masse corporelle (IMC) plus bas à l’âge de 18 ans. Si d’un côté les maux environnementaux nuisent à la santé, les biens environnementaux la sont bénéfiques, et cela est sa valeur. Les parcs sont des hotspots d’activité. Nous dêbutames notre analyse par la supposition de pouvoir observer les mouvements des gens dans la ville. Nous observâmes les trajectoires individuelles et, des contacts entre plusieurs, nous formâmes un réseau social. En la retirant de son contexte géographique et en y supposant des déséquilibres d’information, par la théorie des jeu, nous avons arrivé à un réseau hiérarchique où les orphelins d’informations souffraient des dommages. Quand nous regardons les injustices environnementales, nous observons les manifestations de ces abîmes d’information. Les habitants d’une région ne reçoivent pas leur reconnaissance, ils ne font pas partie du processus décisionnel, les choses ne les sont pas expliqués. Les savants quittent cette place, son réseau social s'affaiblit, les maux environnementaux s’y installent. La région perd des valeurs économiques. La santé de ses résidents se détériore. Il y a donc une complémentarité entre les analyses de réseaux sociaux et les enjeux de justice environnementale. Si nous appliquons les principes du premier sur le deuxième, nous pouvons apprendre d’une façon plus approfondie comment une communauté, un réseau social, perd sa capacité de combattre les injustices environnementales. Cependant, les parcs sont associés à tous aspects d’un environnement sain, dont une meilleure santé de ses utilisateurs. Les aspects sociaux le plus liés aux rapports de santé ou à une plus grande longévité sont ceux qui manifestent une cohésion sociale: la 2 réciprocité, la confiance, le sens de communauté. Les réformes des parcs augmentent le sens de sécurité des gens l’entourant et, conséquemment, leur utilisation de cet espace. Nous proposons que la cohésion sociale des parcs est condition suffisante pour qu’il soit actif et que cette même cohésion peut combattre des injustices environnementales. Je veux donc connaître les structures sociales des parcs le plus actifs et inclusifs. Je crois qu’un investissement dans la compréhension des réseaux sociaux constitués et renforcés dans le parc pourrait être la clé pour un travail proactif pour l’environnement. Nous avons plus que 4000 parcs sur la Communauté Métropolitaine de Montréal (CMM). Une approche quantitative pour modéliser ses réseaux sociaux serait un atout. Notre laboratoire a déjà réalisé des analyses d’accessibilité aux parcs et nous constatons quelques iniquités dans la CMM. Nous pourrions faire une analyse longitudinale similaire à ceux de Mohai et Saha, mais, à part des questions de fiabilité des données, je crois que les intervalles de cinq ans entre observations ne sont pas assez fréquents pour bien connaître la dynamique sociale d’un quartier. Par contre, si les méthodes de recensement manquent d’immédiateté, les méthodes de comptage d’activité sur les parcs normalement manquent du contexte. Le chercheur a tout un défi dans la comptabilisation des gens en activité dans chaque endroit qu’il ne sait pas qui interagit avec qui, et dans quelle fréquence. La géographie temporelle, cette compréhension du mouvement des gens dans l’espace-temps, pourrait nous aider à faire une collecte plus fidèle aux rencontres sociales des parcs. Elle ajoute la dimension du temps sur l’analyse géographique pour nous fournir des vecteurs de déplacements de chaque individu dans l’espace-temps. À partir des croisements de ces vecteurs d’activité individuelle, nous pourrions commencer à faire des conclusions sur les liens d’amitié d’un groupe proximal. Le contexte du parc établit une base minimale de cohésion sociale sur laquelle nous pouvons construire le réseau social d’un quartier. Une analyse spatiotemporelle peut donc nous servir pour modéliser et comprendre les réseaux sociaux renforcés par les parcs. Les nouvelles technologies numériques nous permettent de faire ce type d’analyse géographique temporelle avec le bénéfice d’y ajouter, par induction ou questionnaire, les renseignements socio-démographiques des propriétaires de téléphones intelligents qui 3 transitent les parcs. Une application sur leurs téléphones peut faire la collecte de données de façon simultanée sur plusieurs parcs pour une échelle d’analyse désormais impossible. L’explosion computationnelle nous permet aussi de concevoir des modèles puissants basés sur la théorie des graphes pour mieux comprendre les structures sociales facilités par le parc. Cela contraste avec une évaluation pointue et qualitative d’une poignée de parcs qui nous serait possible sans l’ajout de ces technologies. Il y a plusieurs risques et limitations pour l’utilisation de ces nouvelles technologies. La première préoccupation reste sur la protection des géolocalisations privés des individus, mitigée, dans une telle étude, par la délimitation géographique d’analyse sur les parcs. Un deuxième souci provient directement des capacités computationnelles d’une modélisation athéorique facilité par l’intelligence artificielle, dont nous espérons que notre encadrement sert à soulager - même que la modélisation athéorique puisse nous donner d’autres pistes. Finalement, la plus grande préoccupation reste sur l’accessibilité des gens aux technologies mobiles, principalement ceux qui sont défavorisés et donc l’objet ultime de notre étude. Même que deux tiers de la population utilisent les téléphones mobiles (CRTC, 2015), nous attendons une moindre proportion dans les groupes les plus défavorisés. Dans ce cas, il faut allier une collecte de données passive sur les téléphones intelligents sur d’autres, directement sur le terrain. Une recherche générale et numérique nous trouverait les réseaux sociaux affaiblis que nous pourrions ensuite analyser de forme qualitative. La géographie d’hier étudiait les relations humaines dans l’espace-temps par moments pris en images, sous cartes et recensements, comme les photographies. La géographie d’aujourd’hui révèle les relations sociales de façon plus dynamique, comme un film. Moi, je veux voir ce film se produire dans les parcs. C’est ma résolution santé. 4 Bibliographie Cohen, Deborah A., Terry Marsh, Stephanie Williamson, Kathryn Pitkin Derose, Homero Martinez, Claude Setodji, and Thomas L. McKenzie. 2010. "Parks and physical activity: Why are some parks used more than others?" Preventive Medicine. 50: S9-S12. CRTC - Canadian Radio-television and Telecommunications Commission. 2015. Communications Monitoring Report 2015: Telecommunications sector overview. http://www.crtc.gc.ca/eng/publications/reports/policymonitoring/2015/cmr5.htm. Gilbert, Keon L., Sandra C. Quinn, Robert M. Goodman, James Butler, et John Wallace. 2013. "A meta-analysis of social capital and health: a case for needed research". 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