infection naturelle. L’efficacité de ces vaccins s’est révélée
inconstante en termes de niveau de protection [19, 20].
Elle était variable vis-à-vis des autres sérotypes non inclus
dans le vaccin [21]. L’efficacité dépendait aussi de la
localisation géographique où les essais cliniques avaient
été menés [22-25] et de l’âge des sujets vaccinés [26].
Pour toutes ces raisons, le développement de ces vaccins
n’a pas été poursuivi.
Dès lors, l’approche jennérienne « classique » a été
« modifiée ». La nouvelle approche a profité du caractère
segmenté du génome du rotavirus et des propriétés natu-
relles de réassortiment génétique du virus lors de co-
infections. Cette approche jennérienne « modifiée » uti-
lise des virus réassortants animal × humain et consiste à
inclure dans le vaccin les spécificités de VP7 des rotavirus
humains couplées au phénotype atténué de la souche
animale. Ainsi, les vaccins à base de virus réassortants
combinent le faible niveau pathogène pour l’homme de
certaines souches animales et les spécificités des sérotypes
les plus fréquents des souches humaines.
Ces vaccins réassortants développés à partir de deux
souches animales WC3 (bovine) et RRV (simienne) ont
d’abord contenu des virus réassortants individuels puis ont
inclus secondairement des mélanges de plusieurs virus
réassortants pour procurer une protection plus étendue
contre les sérotypes humains les plus fréquents.
Le premier vaccin réassortant ainsi produit comprenait
la souche simienne RRV (pour Rhesus RotaVirus) et 3 virus
réassortants simien x humain où le gène 9 du rotavirus
simien codant pour VP7 (type G3) a été remplacé par le
gène 9 d’un rotavirus humain de type G1, G2 ou G4. Ce
vaccin tétravalent a fait preuve d’une efficacité de 50 à
70 % pour la prévention de toutes les formes de diarrhée à
rotavirus et d’une efficacité de 65 à 90 % pour la préven-
tion des formes sévères. Les essais cliniques ont aussi
montré que ce vaccin pouvait protéger contre plusieurs
sérotypes de rotavirus et que son efficacité pouvait persis-
ter pendant trois saisons de rotavirus. Le vaccin était
cependant souvent responsable de fièvre (15 à 20 % des
sujets vaccinés selon les études) et de diarrhée après la
première administration. Ce vaccin vivant atténué, admi-
nistré par voie orale, a été mis sur le marché aux États-Unis
en août 1998 sous le nom de Rotashield
®
(RRV-TV, Wyeth
Lederle Vaccines) et recommandé pour la vaccination
universelle des nourrissons nés à terme, avec le schéma
d’une administration à 2, 4 et 6 mois. Cependant, entre
septembre 1998 et juillet 1999, alors que plus d’un million
de doses avaient été distribuées, quinze cas d’invagination
intestinale aiguë, dont deux décès, sont survenus chez des
jeunes nourrissons ayant reçu ce vaccin. Les études ulté-
rieures ont tenté d’établir un lien entre invagination intes-
tinale et vaccination. Elles ont mis en évidence d’une part
une forte relation temporelle entre la survenue de l’inva-
gination et la date d’administration du vaccin : parmi les
15 cas déclarés, 11 étaient survenus dans la première
semaine suivant la première administration du vaccin.
D’autre part, ces études ont mis en évidence un risque
anormalement élevé d’invagination chez les sujets vacci-
nés (entre 1 pour 4 670 et 1 pour 11 000 selon les études)
[27, 28]. Sur ces données, le vaccin a été retiré du marché
en novembre 1999 [29] bien que le lien entre invagination
intestinale aiguë et vaccination reste controversé [30].
Cette complication rare n’a pas d’explication physiopa-
thologique pour le moment et l’hypothèse d’un caractère
pathogène propre au virus simien reste à démontrer. De-
puis cette expérience malheureuse, la tolérance des vac-
cins vivants en cours de développement, en particulier en
termes d’invagination intestinale aiguë, doit désormais
être testée au cours d’essais cliniques de grande envergure
avant leur autorisation de mise sur le marché.
De nombreux vaccins rotavirus sont en cours de com-
mercialisation ou de développement (tableau 2). Ce sont
tous des vaccins vivants atténués, administrés par voie
orale. Un vaccin monovalent ovin (LLR) est produit loca-
lement et commercialisé en Chine. Plusieurs essais clini-
ques en Inde et en Australie évaluent l’efficacité vaccinale
de différentes souches d’origine néonatale. Un vaccin
hexavalent réassortant bovin × humain (UK-reassortant)
qui inclut les 5 types G les plus fréquents (G1-G4 et G9) et
le type G[8] est en cours de développement. Enfin, deux
vaccins (Rotateq
®
et Rotarix
®
) sont en voie de commercia-
lisation aux Etats-Unis et en Europe. Ils ont été développés
selon deux approches différentes.
Rotateq
®
Le développement du vaccin Rotateq
®
(Merck, USA)
repose sur la même approche de réassortiment génétique
que le premier vaccin réassortant RRV-TV (Rotashield
®
),
mais en utilisant comme fond génétique la souche de
rotavirus bovin WC3 (G6, P7[5]) dont on pense qu’elle est
moins pathogène pour l’homme que la souche simienne
[42]. Les réassortants qui entrent dans la composition du
vaccin incluent les sérotypes humains les plus courants :
G1, G2, G3 et G4 de VP7 ainsi que le génotype P[8] de
VP4 (correspondant au sérotype P1A) (figure 4). Le géno-
type P[8] a été inclus dans le vaccin car il est souvent
associé au sérotype G9. Le vaccin est conditionné sous
forme liquide, prêt à être administré par voie orale. Le
schéma d’administration comprend 3 doses espacées d’au
moins 1 mois. La première dose doit être administrée entre
6 et 12 semaines de vie. Rotateq
®
fait preuve d’une bonne
tolérance en termes de fièvre, de diarrhée et d’invagina-
tion intestinale aiguë [36]. Il protège le nourrisson contre
toutes les formes de gastroentérite à rotavirus dans 74 %
des cas et contre les formes sévères de gastroentérite à
rotavirus dans plus de 98 % des cas. Cette efficacité est
respectivement de 63 % et de 88 % pendant la deuxième
année qui suit la vaccination. Le vaccin permet de dimi-
mt pédiatrie, vol. 9, Numéro spécial, septembre 2006 43
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