Télécharger le n°1 de Civilis.

publicité
Civilis
2012
n°1
Le magazine des sciences humaines du Lycée Vaucanson
03
04
05
07
09
JEUX
DʼARGENT
LONDRES
VILLE MONDIALE
CATASTROPHE
ÉCOLOGIQUE
11
LE PORT DE GÊNES (ITALIE).
De la thalassocratie médiévale (Gênes la “Superbe”) au port le plus actif
de la méditerranée, ouvert sur le
monde, entre la mer et la montagne.
LA DIVISION
DU TRAVAIL
LA FINANCIARISATION
DE LʼÉCONOMIE
06
GLOBALISATION
08 CONSTESTÉE
LES MARGES DE LA
10 GLOBALISATION
RÉGULER
LA GLOBALISATION
LʼÉCONOMIE
SOUTERRAINE
La globalisation en question(s)
Acteurs, enjeux, débats
LYCÉE VAUCANSON l 2
LA GLOBALISATION EN QUESTIONS
Civilis*
2012
n°1
La globalisation
Le magazine des sciences humaines du Lycée Vaucanson
M A G A Z I N E
N U M É R I Q U E
Numéro réalisé par et pour les élèves.
Ont participé à la rédaction de ce numéro : Les élèves de Terminale S (op-
tion Histoire géo) : Maxime Anceau, Mélanie Jugel, Antoine Lefebvre,
Nisrine Marakbi, Thibault Demirdjan, Estelle Vriet, Maxime Lictevout, Julien Daviau, Pierre Navereau, Raphael Lauras, Pierre Crampon, Marie
Porhel, Marie Taillard, Alexandre Heurtaux, Ophélie Chevalier.
Mise en page : D. Rivaud
Lycée
Vaucanson
Tours
Aujourd'hui on utilise le mot de mondialisation pour désigner ce
qu'en anglais on appelle la globalisation. Cela caractérise une organisation du monde dans laquelle les phénomènes économiques sont
inter-dépendants, conditionnent fortement la vie des individus et
mettent en relation l'ensemble des hommes de la planète. A l échelle
de cette dernière, elle se caractérise par un système dynamique qui
organise des acteurs différents, crée des chaîne d acteurs et de production aux formes nouvelles. Personne dans les sociétés contemporaines ne semble pouvoir se soustraire à cette globalisation : elle influence toutes les vies et beaucoup plus qu'on ne le croit. Elle a des
formes visibles (flux commerciaux) et des formes immatérielles (flux
d'argent, flux d'information, internet). Elle organise les territoires, les
rapproche comme les dissocie aussi, voire crée de nouveaux espaces.
Ce dossier qui est d abord un travail d élèves (les élèves de l option
Histoire-Géo de Terminale S) essaie de fournir un certain nombre
d approches sur un des phénomènes les plus complexes du monde
contemporain.
*Civilis (mot latin) :
qui concerne l ensemble des citoyens, l Etat, la vie politique .
CIVILIS l n° 1 l 2012
LYCÉE VAUCANSON l 3
LA GLOBALISATION EN QUESTIONS
La division
internationale du
travail
La globalisation se traduit avant tout par l apparition de
chaines d acteurs économiques à l échelle internationale. La
production ne se réduit plus à une usine qui exécute toutes les
procédures depuis la conception jusqu à la livraison.
La division du travail, au coeur même du processus industriel,
théorisée par Taylor, utilisée par Ford qui a mis en place les
premières formes de travail à la chaine, s exprime aujourd hui à
l échelle mondiale. Elle résulte non seulement de nouvelles
conditions techniques (réduction du temps et du coût de
transport), mais aussi de la recherche de la plus grande
rentabilité.
Elle débouche sur la spécialisation des territoires.
TOYOTA, implantation mondiale
Japon, pays d'origine de la marque Toyota,
reste le plus grand site de production de la
marque. On remarque cependant que les sites
de productions et les sites de recherches et
développement ont essaimé vers les autres
pôles de la Triade, comme aussi vers l’Asie du
Sud-Est.
Cela se traduit par une importante baisse des
ventes au Japon (-22%) et à l'inverse une
augmentation des ventes dans tout les autres
pays ou la marque est présente (Europe, Amérique, Moyen-Orient, pays asiatiques). Il s’agit
d’une véritable stratégie à l’échelle mondiale
pour mieux capter de nouveaux marchés.
La globalisation n est pas un système
d échanges solidaires entre espaces à
égalité. Au contraire, elle profite des
fortes différences sociales et politiques
qui existent à l échelle de la planète.
Pour travailler à une plus grande efficacité économique (obtenir un plus fort
taux de profit, ou maintenir celui-ci), les
acteurs économiques ont deux solutions : trouver de nouveaux marchés ou
réduire les coûts de production. Ces
deux phénomènes conjugués, auxquels
il faut encore ajouter la révolution du
transport maritime (conteneurs), expliquent la délocalisation des productions
vers des pays à faible coût de main
d oeuvre, ou qui présentent de substan-
tiels avantages fiscaux. La globalisation induit donc principalement
de nouvelles logiques de domination et d exploitation.
Aujourd hui cette division internationale du travail met en avant les
pays émergents où se produisent les biens manufacturés de consommation, à l image « Maquiladoras » de la frontière mexicano-américaine
ou des ateliers industriels asiatiques. Ces productions destinées à l exportation sont parfois relativement peu complexes (textile chinois),
mais peuvent aussi l être beaucoup plus (composants électroniques,
ordinateurs). Les pays du Sud commencent même à produire des services (centre d appels téléphoniques au Maroc, logiciels en Inde).
Les pays développés à économie de marché ont tenté de se spécialiser
dans les productions à forte teneur technologique, les services de conception, les services financiers, les biens d équipement (Allemagne).
Globalement les pays de la triade gardent les centres de commandement et de décision.
■ J.D-P.N.-D.R.
CIVILIS l n° 1 l 2012
LYCÉE VAUCANSON l 4
LA GLOBALISATION EN QUESTIONS
La financiarisation de l'économie mondiale est l'augmentation
de la part des richesses créée par
les métiers de la finance. Elle provient d'une forte augmentation des
métiers de la finance et du développement de l'utilisation de protocoles financiers. C'est un phénomène global, qui lie les bourses et
banques de nombreux pays, et qui
est au cœur de la mondialisation. Il
répond aux besoins de financement que peuvent avoir les acteurs
économiques pour assurer leur
développement, voire leur survie.
New York Stock Exchange, à Wall Street.
Comme les échanges de marchandises, les échanges de capitaux sont en augmentation. La globalisation financière est sans doute la forme la plus aboutie de la mondialisation servie, elle aussi, par les formes de dérégulations libérales.
Les banques - La Bourse
Les acteurs de la financiarisation
de l’économie
Deux circuits permettent la mise en relation des prêteurs avec les emprunteurs : les marchés de capitaux, et le système bancaire. Les marchés de capitaux sont la Bourse ou les
marchés financiers. Dans ce circuit, l'emprunteur obtient directement les fonds par le biais
de ses ventes, depuis le prêteur, alors que au sein le système bancaire, les banques servent
d'intermédiaires entre les prêteurs et les emprunteurs, en fournissant des crédits aux emprunteurs grâce aux dépôts des prêteurs. Les banques font également le lien entre les entreprises et États qui ont des besoins de financement. Les Banques centrales sont des banques nationales dont l'autonomie varie d'un pays à l'autre, et sont celles qui émettent de la
monnaie fiduciaire (argent réel) et la monnaie Banque Centrale (qui sert d'échange entre les
banques secondaires), prêtent de l'argent à l État, interviennent sur le marché des changes,
etc... Elles cherchent, avec un succès variable, à réguler l'évolution de la masse monétaire et
des taux d'intérêt. Elle joue aussi le rôle de banquier de dernier recours en cas de crise.
Les bourses sont des lieux d'échanges de produits financiers, surtout des actions ou des
titres de créance. Elles sont à la fois un lieu de financement pour les États, les entreprises et
autres, et un lieu de placement pour les investisseurs. La Bourse est divisée en deux marchés : le marché primaire et le marché secondaire. Le marché primaire consiste en l'échange
de capitaux entre des sociétés qui cherchent à se financer et des détenteurs de capitaux. Le
marché secondaire est l'échange de titres (actions, etc...). C'est ce second marché qui est le
plus important, car il s'échange des milliards d'euros tous les jours.
La bourse joue un rôle primordial dans l'économie contemporaine, les
entreprises y trouvent une partie des capitaux nécessaires à leur expansion tandis que l État y finance ses déficits.
Les FMN : Firmes Multi-Nationales
Ce sont des firmes qui contrôlent ou possèdent des entreprises implantées dans plusieurs pays différents et qui élaborent des stratégies
sur les différences socio-économiques de ces pays. La mondialisation
des marchés constitue un milieu favorable aux FMN avec la mobilité
plus importantes des marchandises des hommes, produits, capitaux,
des technologies et des informations. Elles participent à la financiarisation de l'économie mondiale en créant des échanges de capitaux et
de marchandises entre les différents pays où elles sont installées.
■ R.L - P. C.
CIVILIS l n° 1 l 2012
LA GLOBALISATION EN QUESTIONS
Jeux d’argent
La spéculation est une transaction qui est effectuée dans la perspective d'une variation de
prix à la hausse ou à la baisse dont l'objectif est de réaliser un gain en capital tout en acceptant le risque de tout perdre. Il existe un grand nombre de biens qui peuvent donner lieu à
la spéculation, comme les biens immobiliers, les matières premières, les valeurs boursières
mais aussi les monnaies. L effet de la spéculation sur les prix est contesté. Certains économistes pensent qu elle a des effets stabilisants sur les prix alors que d'autres pensent qu'elle
est déstabilisante sur les prix, voire qu'elle peut engendrer des crises. Si les prix sont fixés
par un organisme stable, il y a peu de variation et la spéculation a un impact faible. En revanche, si les prix varient beaucoup la spéculation peut se révéler très déstabilisante et peut
même engendrer des catastrophes économiques. Cependant la spéculation reste importante pour l'économie car elle apporte des fonds pour financer l'investissement grâce à la
bourse.
Les risques financiers - L'essor des activités financières mondiales a provoqué des exigences plus importantes de la part des actionnaires. Les entreprises ont employé plusieurs
techniques pour faire face à leurs nouvelles exigences comme des stratégies de fusions et
d'acquisitions afin d'augmenter les résultats financiers, ce qui a provoqué notamment des
suppressions d'emplois. Comme la finance mondiale est de plus en plus autonome, cette
autonomie a rendu instable l'économie mondiale. Dans ces conditions l'économie devient
vulnérable à la formation de bulles financières : les cours d'une ou de plusieurs valeurs financières augmentent plus qu'ils ne devraient, les cours montent puisque tout le monde
pense que cette valeur va augmenter, jusqu'à ce que les anticipations se retournent. Les
cours tombent alors brutalement, ce qui a des incidences financières très importantes. Ces
chocs financiers peuvent provoquer des ajustements sévères de la part des entreprises sur
le marché du travail et ainsi déboucher sur des crises sociales qui s'accompagnent le plus
souvent de chômage.
Les délocalisations. - Elles s expliquent par différents facteurs, le plus important étant une
recherche du coût de travail minimal pour l entreprise. Le coût du travail est un facteur déterminant de la délocalisation ce qui implique donc une recherche du cout salarial minimal.
Lorsque les salaires diminuent, cela fait diminuer les prix. L entreprise devient donc concurrentielle et peut utiliser les bénéfices dans la communication par exemple. Ainsi en Asie le
salaire moyen est de 0,32 € de l heure alors qu en France le salaire minimum par heure est
de 8,02€. Les conditions locales et nationales sont également des facteurs à prendre en
compte. En effet, les lois sociales et la fiscalité sont à prendre en considération pour une entreprise s installant à l étranger. La diminution des coûts de transport est aussi déterminante
LYCÉE VAUCANSON l 5
pour le choix du lieu de délocalisation. Entre 1985 et 1992 le coût du
fret maritime a diminué de 40%. Au cours de la même période, le fret
aérien a lui diminué de 30%. Toutes ces diminutions poussent les entreprises à délocaliser. De même que le prix de la communication entre
la France et le Japon a été divisé par deux en huit ans. La volonté d être
présent sur le marché étranger est aussi un facteur qui pousse les entreprises à délocaliser. La délocalisation touche principalement les activités de production. Les activités de recherches et de développement
sont souvent maintenues dans le pays d origine de l entreprise.
La sous-traitance. - La sous-traitance est une organisation de la production. Un contrat unit une entreprise « mutuelle » à une autre entreprise dite « sous-traitante ». La deuxième entreprise a pour rôle de réaliser une partie ou des composants nécessaires à la production effectuée par la première entreprise donneuse d ordres. Le sous-traitant
n est pas un fournisseur, car il fabrique un produit conçu par la mutuelle. Le produit est fabriqué exclusivement pour l entreprise commanditaire. La sous-traitance ne représente pas non plus la même
chose que la délocalisation, car dans ce dernier cas c est l entreprise
elle-même qui s implante dans un pays, or ici, c est une autre entreprise déjà existante qui s occupe de la production. Les commanditaires
choisissent leurs sous-traitants selon des considérations de prix, de
qualité et de délais. La sous-traitance peut avoir quelques limites du
point de vue des sous-traitants. En effet, ces derniers sont souvent
dans une situation de dépendance technique et commerciale par rapport à son commanditaire. Il est également en position de faiblesse car
il subit la concurrence de ses confrères et celle du commanditaire luimême qui peut toujours reprendre la production sous-traitée. De plus,
l'entreprise sous-traitante doit s'adapter en permanence parce que les
commanditaires changent de techniques, s'intègrent ou disparaissent.
Les entreprises américaines confient 60% de leur développement à des
prestataires étrangers, en France ce chiffre ne s élève qu à 5%. Un
exemple de la sous-traitance : l entreprise Dyson : l entreprise Dyson,
crée en 1990, a pris la décision de sous-traiter la fabrication de sa
gamme d aspirateur en Malaisie en licenciant 300 ouvriers. Avant cette
décision, le Royaume-Uni produisait 9 millions d aspirateurs, aujourd hui il ne possède même plus les outils de production de ce produit.
■ R.L - P. C. ; M.P., M. T.
CIVILIS l n° 1 l 2012
LYCÉE VAUCANSON l 6
LA GLOBALISATION EN QUESTIONS
Réguler la globalisation
Les organisations informelles
Le G20 est un groupe de pays dont les ministres, les chefs d'Etats et les chefs de banques
centrales se réunissent régulièrement. Il a été créé en 1999, après la succession de crises
financières dans les années 90. Il vise à favoriser la concertation internationale, en intégrant
le principe d'un dialogue élargi tenant compte du poids économique croissant acquis par
un certain nombre de pays. Actuellement, le G20 se décline sous 3 formes: - regroupement
des chefs d'Etats et de gouvernement ; - financement et gouvernement des banques centrales ; - depuis avril 2010, il existe des G20 sociaux, réunissant les ministres de l'emploi.
Le G8 quant à lui, est un groupe de discussion et de partenariat économique de 8 pays
parmi les plus puissants économiquement : États-Unis, Japon, Allemagne, France,
Royaume-Uni, Italie, Canada et Russie. Ils se réunissent chaque année lors d'un sommet réunissant les chefs d'Etats ou de gouvernement, ainsi que les présidents de la commission et
du conseil européen (ainsi que pour certaines activités, des représentants d'autres pays ou
d'autres unions internationales, invitées à participer).
L Etat contre la globalisation ?
Le rôle principal d un Etat est de fixer le cadre juridique et institutionnel des activités économiques. Par la fiscalité et la protection sociale, il redistribue une partie importante des
richesses produites, régule le niveau d'activité et favorise la croissance via les politiques
monétaires et budgétaires.
Cependant la structure de l'Etat-Nation paraît dépassée car les firmes privées contrôlent de
plus en plus de paramètres dans la mondialisation et poussent les Etats vers les exigences
du modèle mondialo-libéral (libre échange). Certains Etats ne pèsent donc plus très lourd
dans la mondialisation par rapport aux multinationales et à leurs moyens financiers colossaux. Mais malgré cela, l'Etat demeure pourtant un acteur essentiel de la mondialisation, en
effet il peut « protéger » les activités et intérêts économiques via des barrières tarifaires ou
des contraintes pour les importations. Il peut aussi aider les firmes exportatrices, grâce à des
subventions publiques pour favoriser certains secteurs en concurrence avec des entreprises
étrangères.
De plus l Etat constitue un investisseur essentiel dans les économies nationales et aussi dans
l économie monde. Il entretient du personnel (les fonctionnaires) et ainsi injecte, par leurs
salaires, du pouvoir d achat. Par les budgets qu il distribue dans les institutions dont il a la
charge, il s avère un acteur économique important, travaillant aussi à la compétitivité des
entreprises. Enfin, il possède souvent des entreprises qui peuvent être des acteurs majeurs
de l économie mondiale.
Document
L’Etat à l’heure de la Mondialisation
La tension est forte entre les Etats-nations et les agents privés
mondialisés. Comment évoluera cette dynamique ? Les pays
privés de ressources fiscales, obligés d’aider un grand nombre
de pauvres et de chômeurs pourraient être amenés à s’aligner
sur les exigences du modèle mondialo-libéral et accepter une
société plus inégalitaire ainsi que la privatisation de la santé, de
l’éducation, des retraites. Ce triomphe du capitalisme serait
sans doute une victoire à la Pyrrhus. D’une part il se heurterait
rapidement aux barrières écologiques, le marché livré à luimême a peu de chance de parvenir à gérer l’épuisement des
ressources naturelles et la réchauffement climatique. D’autre
part la puissance des marchés financiers serait sources d’instabilité. L’économie oscillerait entre des phases de croissance et
d’exubérance boursière et des phases de dépressions profondes.
Cependant le capitalisme a lui-même besoin d’un Etat fort, de
dépenses publiques, du respect des droits et des normes. En
effet, le niveau des infrastructures publiques, l’efficacité de
l’administration en général et le niveau d’éducation et de santé,
représentent toujours des facteurs de compétitivité. Il est donc
erroné de considérer que la mondialisation favorise à priori les
pays ou les dépenses publiques et les infrastructures sont réduites. De même, le niveau élevé de protection sociale est un
élément de compétitivité : le travailleur français peut ainsi accepter un niveau plus bas de salaire net que le travailleur américain, dans la mesure ou il ne doit pas payer en plus pour sa
santé, sa retraite, et n’a pas à épargner pour financer l’éducation de ses enfants ou se protéger du chômage.
H. Sterdyniak , Alternatives économiques, n° 56 (2003), p. 34-37.
Lʼauteur est chercheur, membre de lʼObservatoire français des conjonctures économiques (OFCE)
■ A.A. - V.M.
CIVILIS l n° 1 l 2012
LYCÉE VAUCANSON l 7
LA GLOBALISATION EN QUESTIONS
Londres et les JO 2012: une ville au coeur du monde médiatique et sportif
Ici le village olympique (vue du nord, vers les quartiers d affaires centraux et la Ta-
Une ville mondiale est un centre
d'impulsion majeur de la mondialisation. Elle concentre des fonctions
décisionnelles économiques et financières (sièges sociaux de firmes
transnationales, places boursières,
activités de recherche-développement). L'importance de la ville vient
aussi de ses fonctions culturelles et
politiques (sièges de grandes institutions internationales, musées, événement sportifs etc.) qui lui permettent d'exercer un rayonnement à
l'échelle mondiale. Carrefour de
communication et ville cosmopolite,
elle polarise des flux de toutes natures. Les paysages de ses quartiers
d'affaires reflètent sa puissance.
Londres ville mondiale au coeur de la globalisation
Londres concilie diverses fonctions urbaines : fonctions
politique, financière et culturelles qui occupent une
grande partie de l'espace londonien. L'activité financière
regroupe trois générations de quartiers d'affaires : La City,
le principal quartier d affaires, est essentiellement composée de la bourse (XIXe siècle), des Docklands (année 1990)
et du London Bridge Quarter (année 2010). Ces quartiers
d'affaires témoignent de la puissance de la ville par leurs
grattes-ciel dominant la partie Est de Londres et leurs réseaux de transports les reliant aux points stratégiques du
reste de la ville voire du monde. La partie Ouest de la capitale concentre principalement les activités commerciales
et de services. Elle produit 19% du Produit interieur Brut
du Royaume-Uni et est devenue l un des centres économiques et financiers les plus importants du monde, elle est
considérée comme la 2e place financière mondiale.
Dans le classement des villes mondiales Londres occupe la
première place au classement général qui regroupe plus de 60 critères concernant l'économie, la culture et la politique. 60% du négoce primaire d'obligations internationales se font sur la place financière britannique. Il y a plus de sociétés cotées à la Bourse de
Londres qu'a celle de New-York ou de Tokyo. Il faut ajouter à cela 5
aéroports internationaux dont un hub mondial. Un hub regroupe
une concentration de divers transports en un même lieux assurant
ainsi de nombreuses correspondances en un temps record.
Londres possède aussi des fonctions culturelles, c est une capitale
intellectuelle : presse, marché de l art et édition. Elle contient de
nombreux musées tels que le musée de cire de Madame Tussauds,
the British Museum et the Science Museum, des théâtres, des galeries d art avec par exemple the National Gallery, the Tate Modern et
the Tate Gallery, des salles de concert et de spectacles, des monuments célèbres comme the Big Ben, the Tower Bridge et la Cathédrale St Paul. ■ E.B. - P.L.
CIVILIS l n° 1 l 2012
LYCÉE VAUCANSON l 8
LA GLOBALISATION EN QUESTIONS
Une globalisation
contestée par la société
civile
Depuis le milieu des années 90, différents mouvements se développent pour
contester l ordre imposé par les différents acteurs de la globalisation. Ils sont
principalement issus de la société civile, ils tentent par des moyens variés de
sensibiliser la population mondiale aux impacts négatifs de la croissance globale,
et posent en particulier les questions de démocratie et de justice économique.
Sous l intitulé altermondialistes, se retrouvent aujourd hui des groupes variés et
hétérogènes qui veulent oeuvrer à une mondialisation maîtrisée et solidaire.
Les « Indignés », un mouvement planétaire
Le mouvement des « Indignés » trouve ses origines
en Espagne, le 15 mai 2011 lors d une manifestation géante de plusieurs centaines de milliers de
personnes. Ils manifestent de façon pacifique par
des cortèges ou des campements de longue durée
en centre ville. Ce mouvement, aujourd hui très
célèbre, a en un an pris une place capitale sur la
scène médiatique internationale et est à l heure
actuelle soutenu par les Anonymous ou l association ATTAC de José Bové. Le but des Indignés est
de dénoncer les conséquences de la crise des SubPrimes de 2008 subies partout dans le monde. Ils
souhaitent dénoncer les mécanismes de cette
crise, la passivité de la classe politique et des électeurs ; ils sont partisans de la désobéissance civile.
Ils critiquent également les systèmes politiques
contemporains.
La principale particularité de ce
mouvement c est qu il n a aucune hiérarchie réelle. Tout
est décidé en assemblées générales de plusieurs milliers
de personnes, comme le 28 mai 2011 à Madrid où une
assemblée générale aurait rassemblé entre 20000 et
30000 personnes. Ce mouvement à l origine espagnol a
été copié, notamment en Europe occidentale ou aux
Etats-Unis avec l occupation très médiatisée
du Zuccotti Park de Manhattan ou de
Wall Street, par le mouvement OCCUPY WS.
ATTAC
En 1998, plusieurs syndicats, associations et personnalités (dont José Bové) fondent l'association pour la taxation des transactions financières et l'action citoyenne. Le but
de cette association est de reconquérir « le pouvoir que
les sphères financières exercent sur les aspects de la vie
politique, économique, sociale et culturelle dans l'ensemble du monde». Cette association trouve son origine dans le projet de taxe Tobin, un projet de taxation
internationale des transactions financières, dans le but
de limiter la volatilité des taux de change. Cette taxe,
surnommée par certains « taxe Robin des bois » fut rejetée par la plupart des pays du monde, qui ne souhaitaient pas taxer les transactions financières.
L'association ATTAC a notamment œuvré à la
Société civile
mise en place du Forum Social Mondial. Elle
travaille, entre autres, sur un contrôle plus
Terme qui sert à déétroit des marchés financiers, une réforme
signer dans les sociétés
de l'Organisation Mondiale du Commerce, la
contemporaines des
défense des droits élémentaires (eau, alimenmouvements de retation,
information...) et l annulation de la
vendication compodette
des
pays en voie de développement.
sés de simples ci-
toyens.
■ M.J-M.A
CIVILIS l n° 1 l 2012
LA GLOBALISATION EN QUESTIONS
LYCÉE VAUCANSON l 9
Globalisation
et
catastrophe
écologique
L’huile de palme
La globalisation touche désormais quasi intégralement l agriculture et l'industrie agroalimentaire. En effet, la recherche de
compétitivité et de profit ont poussé les industriels, via leur
bureau de recherche-développement, à redécouvrir et a utiliser de nouvelles matières premières. L une de ces nouvelles
matières premières est l'huile de palme qui est issue du palmier à huile, plante originaire de l Afrique de l'ouest et dont
l'utilisation traditionnelle restait majoritaire jusque il y a 20
ans. Ses vertus caloriques et son absence de goût prononcé
ainsi que la simplicité de la culture du palmier à huile, et surtout le très faible coût du produit, ont poussé les entreprises
de l agro-alimentaire et les savonniers à l utiliser massivement.
Commencé il y a 20 ans, la production d huile de palme a quasiment triplé dans des
pays comme la Malaisie ou l Indonésie. En effet, la simplicité de la production a permis à des pays du sud d augmenter rapidement leur rendement ( « le palmier est une
usine à huile , qui peut rapporter de 2000 à 3000 $ par hectare et par an »). Le palmier
à huile ne peut être cultivé que dans des pays tropicaux mais il a besoin de grandes
plantations pour être rentable. Depuis 20 ans les investissements de firmes internationales en Malaisie et Indonésie se sont multipliés car la législation locale a permis
une déforestation massive et donc l implantation de plantations très rentables qui
alimentent presque exclusivement les marchés de consommation du Nord.
Depuis quelques années les ONG écologistes mènent une lutte sans merci dans l'ensemble des pays du globe et principalement dans les pays du nord contre la déforestion. On peut le voir, celle-ci affecte profondément la forêt primaire malaisienne.
Nouvelle plantation de palmiers à huile près de
Pundu, Bornéo, Indonésie ©Y-A-B.
L huile de palme est par excellence l exemple de produit mondialisé qui induit de
nouvelles formes de domination économique du Nord sur le Sud. ■ A.L.
CIVILIS l n° 1 l 2012
LA GLOBALISATION EN QUESTIONS
LYCÉE VAUCANSON l 10
Si proche, si loin...
Les marges de la mondialisation
Située sur la côte Est, Rio de Janeiro est la deuxième plus
grande ville du Brésil derrière Sao Paulo. Rio est une des métropoles les plus importantes du continent Américain avec 6,1 millions de « Cariocas » (habitants intra-muros) et 11,5 millions
d'habitants dans l'ère urbaine.
Cette photo est une représentation très claire des inégalités criantes
qui se sont créées aux Brésil. L'OCDE explique ces disparités par des
inégalités croissantes de salaire et de revenus du travail. Les progrès
technologiques et la mondialisation profitent toujours aux travailleurs
très qualifiés, surtout les cadres. Le cas emblématique étant le secteur
de la finance, où les rémunérations et bonus ont fait des bonds substantiels. Ces différences de revenus très élevées entre les classes sociales d'une même ville se retrouvent forcément dans l'habitat.
Plus de 20 % de la population carioca vit dans des bidonvilles, appelés favelas
au Brésil. Les favelas poussent à un rythme soutenu car elles regroupent la population la plus pauvre composée des nouveaux arrivants, de familles sans-travail, de marginaux mais aussi et surtout de travailleurs pauvres. C'est donc le
point de chute de tous ceux qui n'ont pas accès aux logements sociaux.
On voit à travers le document l'opposition déjà signalée entre quartiers de classes moyennes et favorisées, et favela. Celle-ci occupe les espaces délaissés par
les constructions légales : en l'occurrence, c'est sur les pentes escarpées des collines en "pain de sucre" que s'installe la favela, là où il est trop difficile et trop
cher de bâtir des immeubles.
Si les favelas sont si peu aménagées, c'est aussi parce qu'elles bénéficient d'une
image très négative. Le pouvoir est souvent aux mains des gangs ou des narcotrafiquants qui y ont élu domicile. Les favelas sont donc le théâtre de violences
dues aux « guerres des gangs ». De ce fait, la favela effraie celui qui n'y habite
pas. Cela empêche, à terme, un développement profond de ces espaces.
Même si les situations entre favelas sont très inégales, depuis quelques années,
la municipalité effectue un travail important de « viabilisation », en construisant
« en dur », en apportant l'eau, l'électricité et le téléphone. Mais le problème de
fond qu'est l'insécurité persiste. Depuis que le Brésil s'est vu offrir l'organisation
de la coupe du monde de football en 2012 et celui des Jeux Olympiques d été
en 2016 pour la ville de Rio, les pouvoirs publics brésiliens ont décidé d'utiliser
des moyens militaires pour déloger les narcotrafiquants avec un certain succès,
comme notamment à Vila Cruzeiro à Rio en novembre 2010. Néanmoins, les favelas restent sans aucun doute le plus grave problème de Rio en tous cas du
point de vue urbanistique.
La mondialisation ne profite donc pas équitablement à tous les territoires. Au
delà des espaces oubliés de la mondialisation (l Afrique) il existe, à une échelle
plus grande, des contrastes de développement criants qui montrent que l inégalité face à la globalisation est d abord une inégalité sociale.
■ E.V.-M. L.
CIVILIS l n° 1 l 2012
LYCÉE VAUCANSON l 11
LA GLOBALISATION EN QUESTIONS
L’autre
globalisation :
L’économie souterraine
L'économie souterraine est une économie non connue du public qui
échappe aux règles traditionnelles, c'est à dire aux prélèvements obligatoires (fiscal et social). Elle enfreint également les règles morales et les
droits de l homme. Aujourd hui elle s exprime aussi à l échelle du monde,
elle connaît une certaine globalisation. La mondialisation souterraine se
développe partout, et par l'intermédiaire d'organisations reliées entre
elles. Notre société, telle que nous la connaissons, est touchée par ces
différents trafics cachés.
Le trafic de drogue.
Les lieux des plantations de la drogue, et plus précisément de la cocaïne (drogue
la plus cultivée et la plus commercialisée ) se situent principalement en Amérique du sud, dans les régions andines telle que le Chili, la Colombie, le Pérou... La
drogue est acheminée en Guinée-Bissau, un pays indépendant en réalité sous
l'emprise de trafiquants latino-américains. Cette plaque tournante du trafic de drogue est le point de départ
de toutes les exportations
vers
l'Afrique de l'ouest, l'Amérique centrale, les États-Unis, et l'Europe.
AK 47 (Kalachnikov),
l arme la plus produite au
Les exportations d'armement plus
monde
ou moins illégales.
Les chiffres des ventes d'armes sont
difficiles à évaluer précisément. Tout
d'abord parce que les contrats dans ce domaine ne sont pas toujours publics.
Ensuite parce que la vente peut associer du matériel à de l'assistance militaire ou
de la formation. Selon les sources, les estimations peuvent donc diverger fortement.
L'industrie de l'armement se structure aux États-Unis suite à l'effort de guerre
déployé pour produire « l'arsenal des démocraties » des forces alliées pendant la
Seconde Guerre mondiale. Néanmoins, la fabrication d'armes ne sera qu'au plus
haut point lors de la guerre froide et la course à l'armement et à laquelle les Russes échouèrent. D'un État à l'autre, ce sont des armements lourds qui sont exportés, des blindés, des avions des hélicoptères etc. Il s'agit la plupart du temps
d'accords privés entre les pays mais les exportations sont officielles, légales et
surtout contrôlées de très près. Par exemple, la France a vendu des missiles Exocet à l'Argentine qui les réutilisa lors de la guerre des Malouines.
Toutefois l'exportation des armes n'est pas toujours contrôlée. En effet, à la fin
de la guerre froide, des trafiquants d'armes profitèrent des stocks abandonnés
par les pays fabricants, et en particulier par la Russie. Mais les clients ne sont plus
les mêmes. Il s'agit la plupart du temps de guérilla, de terroristes, et même trafiquants de drogue. Les demandes ne sont plus les mêmes tout comme les
moyens. Il faut à ces groupes armés des armes peu chères, fiables et en grande
quantité. Les marchands d'armes ont trouvé la marchandise de choix avec l' AK47, fabriqué à plus de 100 millions d'exemplaires depuis sa création.
On compte à ce jour plus de 1200 milliard de dollars de bénéfices liés à toutes
les transactions d'armement,
Le trafic d organes :
Le trafic d organes est l exercice illégal du commerce d organes c est- a dire le
prélèvement sur des personnes vivantes ou décédées, souvent à leurs insu ou
qui s'y voient contraint pour vivre.
Les prélèvements d organes s effectuent souvent sur des gens pauvres ou des pays très peu
développés , dans certains pays du monde les
meurtres non élucidés ont certainement rapport avec le trafic d organes ,comme au Mexique ou des centaines de femmes n ont jamais
été retrouvées. Aux États-Unis les policiers ont
démantelé un réseau d entrepreneurs de
pompes funèbres qui revendent des organes
humains prélevés sur les corps des morts. Cas
particulier : la Chine. Aujourd hui, certains médecins chinois dénoncent un trafic important..
D après certains témoignages dans les prisons de Chine des hôpitaux se sont
implantés à coté pour prélever des organes après les exécutions des prisonniers. La Chine ne recourt d ailleurs à aucune législation contre ce phénomène.
■ A.H.-O.C.
CIVILIS l n° 1 l 2012
LA GLOBALISATION EN QUESTIONS
LYCÉE VAUCANSON l 12
Bibliographie sélective
Points de vue sur la globalisation
Tous les titres présentés ci-dessous sont au CDI ou vont être achetés.
Antoni (S.), “Faut-il en finir avec la mondialisation ?”, Phosphore, 02/2012,
368, p.42.
Goldsmith (E.), Jerry (M.), Le procès de la mondialisation, Paris, Fayard,
2001.
Artus (P.), Virard (M.-P.), Le capitalisme est en train de s’autodétruire, Paris,
éd. La Découverte, 2005, 135 p.
Guesnerie (R.), “Peut-on domestiquer la mondialisation ?”, Problèmes Èconomiques, 29/02/2012, 3038, p.22-26.
ATTAC, Agir local, penser global, Paris, éd. Mille et une nuits, 2001.
Huart (J.-M.), Croissance et développement, Paris, Bréal, 2003, 125 p. (coll.
Thèmes et débats).
Bagault (C.), “Globalisation versus démocratie ?”, Sciences humaines, 03/2012,
235, p.68.
Cautrés (B.), “Le mouvement des "Indignés"", Les Cahiers %ançais, 01/03/2012,
367, p.80-85.
Houdu (M.), Ravet (H.), La mondialisation, Paris, Ellipses, 2005, 96 p.
Krugman (P.), Sortez-nous de cette crise mondiale, Paris, Flamarion, 288 p.
Maris (B.), Antimanuel d’économie, Paris, Bréal, 2003, 359 p.
Changer le monde. Un guide citoyen du XXIe siècle, s.d. A. Steffen, éd. de la
Martinière, 2007, 596 p.
Matouk (J.), Mondialisation. Altermondialisation, Paris, Milan, 2005, 63 p.
Cohen (D.), Homo economicus : prophète (égaré) des temps nouveaux, Paris :
Albin Michel, 2012. 1 vol. (212 p.).
Michalet (Ch. -A.), Qu’est-ce que la mondialisation. Petit traité à l’usage de
ceux et celles qui ne savent pas encore s’il faut être pour ou contre, Paris, La
Découverte, 2004, 209 p.
Cohen (D.), Trois leçons sur la société post industrielle, Paris, Seuil, 2006, 91
p.
Damon (J.), “Le modèle social est-il soluble dans la mondialisation ?”, Les
Cahiers %ançais, 01/03/2012, 367, p.21-26.
Fourçan (A.), La mondialisation racontée à ma fille, Paris, Seuil, 2001, 217 p.
Giblin (B.), “La mondialisation, facteur de conflits”, La Documentation photographique, 03/2012, 8086, p.34-43.
Giraud (P.N.), La mondialisation. Emergence et fragmentations, Paris, ed.
Sciences Humaines, 2008, 158 p.
Pisani-Ferry (J.) Le réveil des démons. La crise de l’euro et comment nous en
sortir, Paris, Fayard, 2011, 220 p.
Ramaux (Ch.), L’Etat social pour sortir du chaos néolibéral, Paris, Mille et
une nuits, 2012, 470 p.
La régulation attendra, Alternatives Èconomiques, Hors-série, 02/2012, 092,
p.70-82.
Tanuro (D.), L’impossible capitalisme vert, Paris, La découverte, 2012, 239 p.
Veltz (P.), “Les territoires à l'heure de la mondialisation”, Les Cahiers %ançais, 01/03/2012, 367, p.27-32.
CIVILIS l n° 1 l 2012
Téléchargement