Le projet d`une Europe politique depuis le congrès de La Haye (1948)

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Le projet d’une Europe politique depuis le
congrès de La Haye (1948)
L’ « idée européenne » est très ancienne mais les tentatives historiques ont été
éphémères en tant que construction politique : Les empires romain, carolingien,
napoléonien et hitlérien au-delà de leurs différences bien sûr. La seconde guerre
mondiale fut le révélateur d’un « besoin d’Europe » auprès des peuples par l’ampleur
des destructions, conséquences en quelque sorte de la fragmentation du continent.
65 ans après, l’UE est une réalité. Mais, si le projet initial de promouvoir la paix en
Europe reste un but globalement atteint (exception faite de la guerre en ex-Yougoslavie
de 1993, mais espace hors-union), d’autres objectifs, notamment d’unir politiquement
des peuples longtemps concurrents voire ennemis, lui ont été assignés depuis sa
fondation. Cela n’est pas sans susciter des conflits à toutes les échelles.
Problématique : Dans quelle mesure le projet d’une Europe politique initiée après
la 2GM est-il une réalité aujourd’hui ?
I. Du projet à la réalité (1945-1957)
1) Le contexte favorable de l’après-guerre
Post 1GM : Proposition d’Aristide Briand durant l’entre deux guerres, qui échoue
du fait de l’illusion d’une Europe encore puissante et surtout de la montée en
puissance des fascismes et du nationalisme. Surtout, ce projet s’inscrivait dans
une perspective fédérale, cad que l’Union devait être un bloc uni et pas
simplement une somme des parties.
1945 : Europe affaiblie largement dominée par les deux Grands donc risque
d’effacement. Les mvts de résistance sont favorables à une union pour garantir
une paix durable en Europe.
"Si les pays européens parvenaient à s'unir, leurs 300 à 400 millions
d'habitants connaîtraient, par le fruit d'un commun héritage, une prospérité,
une gloire, un bonheur qu'aucune borne, qu'aucune frontière ne limiterait. Il
nous faut ériger quelque chose comme les Etats-Unis d'Europe. Le premier
pas à accomplir est la constitution d'un Conseil européen".
Extrait du discours prononcé par Winston Churchill, le 19 septembre 1946
à Zurich.
En mai 1948 : Des personnalités, des élus, des industriels des associations
favorables à une unification européenne se rassemblent à la Haye (Pays Bas).
Malgré les divisions, cette première réunion relance l’idée européenne.
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En mai 1949, le Conseil de l’Europe est fondé par 10 Etats dont la France, l’Italie,
le RU mais pas l’Allemagne qui n’adhère qu’en 1950 (La RFA est née après la
fondation du conseil). C’est la première organisation politique européenne.
Cet organisme est un forum de coopération pour rapprocher les peuples
européens. Les pays membres élaborent en 1950 une convention européenne
des droits de l’homme.
Parmi les européistes qui se réunissent à La Haye, le courant démocrate-
chrétien domine est un des mouvements essentiels de l’après guerre dont le
socle de valeur repose sur l’idée du respect de la personne humaine dans le cadre
de l’état de droit :
en Allemagne (Konrad Adenauer et la CDU)
en Italie (Alcide De Gasperi et la DC)
en France (Robert Schuman et le MRP), joue un rôle de premier plan
La social-démocratie (SPD, SFIO) cad les socialistes modérés sont aussi des
partisans de l’Europe unie.
Inversement, certains courants sont hostiles au projet européen pour
diverses raisons : les gaullistes (/indépendance nationale), les communistes
(/influence américaine), ou encore les nationalistes. Le Ru reste en marge
privilégiant le Commonwealth et l’atlantisme.
2) La naissance de l’Europe unifiée en pleine Guerre froide
L’Europe de l’Ouest est aidée par les EU et à ce titre ces derniers sont en partie à
l’origine de la construction européenne.
L’OECE (Organisation européenne de coopération économique), qui intégre les
zones occidentales de l’Allemagne puis la RFA, est créée en 1948. Elle est chargée
de gérer l’aide Marshall dont le but sous jacent est d’endiguer la propagation du
communisme en Europe.
Mais la première structure de coopération réellement supranationale est la
CECA (communauté européenne du charbon et de l’acier) qui réunit autour de
ces secteurs stratégiques pour la reconstruction, l’Allemagne, la France, l’Italie et
le Benelux dès 1951. Elle s’inscrit à la suite du célèbre discours de R. Schuman le
9 mai 1950 (doc1 p 329: la « déclaration Schuman » ; le 9 mai deviendra dans
les années 1980 la journée de l’Europe).
Mais la naissance d’une structure militaire est un échec : la CED
(communauté européenne de défense) créée en 1952 est rejetée par les Français
en 1954 qui se méfient d’un réarmement allemand. L’Europe intègre donc l’OTAN
puis l’UEO est créée (Union de l’Europe occidentale) mais reste dépendante de
l’OTAN sous commandement américain.
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3) Quelle Europe unifiée?
Les Européens sont divisés sur la question de la forme institutionnelle de la
Future Europe unifiée. La principale querelle oppose les fédéralistes (surtout en
RFA et au BENELUX) qui sont partisans d’une Europe forte qui aurait de larges
compétences aux confédéralistes (les gaullistes en France par ex) qui souhaitent
plutôt une Europe des nations dont la souveraineté est préservée.
Ces oppositions se retrouvent en 1957 lors de la signature des Traités de Rome.
Après l’échec de la CED (communauté européenne de défense donc création
d’une armée européenne), les dirigeants européens vont malgré tout
poursuivre leur action avec la volonté de relancer le processus de la construction
européenne.
Les deux traités de Rome vont être signés le 25 Mars 1957 pour une entrée
en vigueur le 01 Janvier 1958 par six pays, les fondateurs : France, Italie, RFA,
BENELUX :
L’un crée la CEE, communauté économique européenne dont l’objectif est
de créer un marché commun sans barrières douanières à l’horizon 1970.
On veut aller au delà d’une zone de libre échange en promouvant la libre
circulation des hommes, des marchandises et des capitaux mais aussi en
élaborant des lois communes.
L’autre crée EURATOM organisme qui doit favoriser le développement du
nucléaire civil pour accompagner la croissance des trente glorieuses et se
substituer aux énergies fossiles importées.
Les institutions communautaires sont un compromis entre les deux tendances
dominantes, confédérale et fédérale mais à l’avantage de la première : Les
pouvoirs du parlement restent longtemps consultatifs. Les décisions sont
prises par le conseil des ministres (ministres spécialisés donc représentants
des états) et la commission (Plus fédérale bien que nommée par les états). Enfin,
la souveraineté des Etats est garantie par le fait que les décisions touchant à
l’ensemble de la communauté doivent être prise à l’unanimité. Dans certains cas,
la règle de la majori qualifiée s’applique : le nombre de voix est
proportionnel au nombre d’habitants du pays. En 1965, De gaulle refuse
l’extension de cette modalité de prise de décision en pratiquant la « chaise vide »
(cad ne plus participer aux réunions européennes) ce qui bloque l’évolution de
l’Europe unifiée qui reste une Europe des Etats.
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II Une construction lente et difficile (1957-1992)
1) Les élargissements
Aucun élargissement n’est réalisé avant 1973. Les états sont jaloux de leur
souveraineté et la règle de l’unanimité provoque des blocages institutionnels. À
l’instigation du RU, les pays d’Europe de l’Ouest qui restent en dehors de la CEE
fondent l’AELE (Association européenne de libre-échange). Elle rassemble le
RU, Danemark, Suède, Norvège, Suisse, Portugal, Autriche. Le retrait de De Gaulle
en 1969 permet une première ouverture :
En 1973, le RU, l’Eire et le Danemark rejoignent finalement la CEE. Ces états ne
bouleversent pas l’architecture de la CEE qui reste dominée par des pays riches.
L’élargissement suivant rompt cet équilibre.
En 1981 et 1986, trois nouvelles démocraties entrent dans la CEE : la Grèce
(depuis al fin de la dictature des colonels en 1974), l’Espagne (depuis la mort de
Franco et la mise en place de la monarchie parlementaire de Juan Carlos en 1975)
et le Portugal (depuis la révolution des oeillets en 1974).
En 1990, la RDA est absorbée par la RFA suite à la chute du Mur de Berlin : C’est
la réunification de l’Allemagne.
Ainsi, 12 Pays composent la CEE au début des années 1990
2) Réussites et faiblesses : les politiques communes
La Politique Agricole Commune est la principale politique commune et le
premier poste de dépense.
Créée en 1962, la PAC garantit un salaire suffisant aux agriculteurs de l’Union
tout en maintenant des prix bas pour les consommateurs et permet donc
l’autosuffisance. Elle offre également des subventions aux exportations, une
protection vis-à-vis des importations (la préférence communautaire : acheter en
priorité aux pays de l’Union) et une aide à la modernisation des structures
agraires. Les excédents sont exportés.
En 1975, le FEDER (fonds européen de développement régional) est créé afin de
développer les régions en crise économique (surtout les industries lourdes
concurrencées par les pays en développement). Le serpent monétaire (1972-
1978) puis le système monétaire européen (dès 1979) encadrent enfin les
monnaies afin que celles-ci ne varient pas trop les unes par rapport aux autres.
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La crise des années 1970 en revanche contribue au développement de
l’euroscepticisme qui critique les initiatives notamment budgétaires de la CEE.
Les Britanniques derrière Margaret Thatcher sont les principaux représentants
de cette tendance : « Miss Maggy » veut recevoir autant qu’elle donne (Or,
l’agriculture britannique est devenue résiduelle et c’est la France qui emporte le
gros de la mise). Surtout, la CEE n’est pas en mesure de peser dans les relations
internationales face aux Etats Unis et ne parvient même pas à parler d’une seule
voix. Les sièges au conseil de sécurité restent nationaux. (C’est un géant
économique mais « un nain politique »)
3) Vers l’Union européenne
Malgré les réticences britanniques, l’Europe unifiée avance tout de même : Des
réformes institutionnelles sont mises en œuvre:
A partir de 1979, les parlementaires européens sont élus au suffrage
universel direct. Ils représentent désormais les peuples européens.
L’Acte unique signé de 17 Février 1986 complète le traité de Rome en
élargissant la sphère de compétence des institutions communautaires à la
politique étrangère, à l’environnement et à la recherche technologique
et fixe à 1992 l’achèvement intégral du marché intérieur.
De plus, les symboles de l’Europe sont une préfiguration d’une future Europe
politique dans laquelle les citoyens pourraient s’identifier comme en France avec
Marianne.
En 1985, le drapeau (bleu avec 12 étoiles dorées) a été adopté par tous
les chefs d'État et de gouvernement de l'UE drapeau officiel de l'Union.
En 1985 également, le Conseil européen fait du 9 mai la Journée de
l'Europe.
En 1986, c’est l'Ode à la joie, dernier mouvement de la Neuvième
symphonie de Beethoven qui devient l’hymne officiel de la CEE.
La devise, « Unie dans la diversité » vient plus tard (2000).
SURTOUT : la CEE devient l’UE après la mise en place du Traité de Maastricht
préparé par Jacques Delors président de la Commission des Communautés
européennes (qui deviendra la Commission européenne) qui est signé en 1992. Il
est ratifié parfois avec difficulté mais finalement adopté (très courte majorité au
référendum français (51%)) et entre en vigueur en 1993.
Ce traité crée l’UE qui repose sur trois piliers :
La communauté européenne, qui remplace la CEE, représente à l’échelle
mondiale l’UE (regroupant CE, CECA et EURATOM) : elle crée l’Union
économique et monétaire qui comprend la monnaie unique (1999 En
2002, l'Euro arrive dans nos porte-monnaie.) pilotée par la banque
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