Support cours :Globalisation financière et Crise financière. Support

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Support cours :Globalisation financière et Crise financière.
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Cours
:
Finances-Banques- Assurances : Globalisation financière et Crise financière.
A.DAHMANI [email protected]
La globalisation financière (ou mondialisation financière) désigne la constitution d'un marché régional
intégrant des financements extérieurs. Ce volet financier de la globalisation comporte trois dimensions
: géographique (mobilité des capitaux d'un pays à un autre), fonctionnelle (le marché de capitaux était
compartimenté : • marché monétaire, • marché boursier, etc.) et temporelle (Les marchés fonctionnent
aujourd'hui 24/24 H et en temps réel). Les flux financiers forment le secteur le plus bouleversé par
l'interopérabilité mondiale et les technologies de l'information d'où leur rôle important dans les
phénomènes de mondialisation en général.
o Sous l'influence des différents acteurs :
• le FMI • la Banque mondiale (consensus de Washington, 1989),
• Et l’Union Européenne (les « quatre libertés » de l'Acte unique, 1986) Les marchés ont subi à la fin
du XXe siècle une triple évolution (parfois nommée « les 3 D »):
• déréglementation, abolition du contrôle des changes et des restrictions aux mouvements de
capitaux, elle favorise les innovations financières ; • désintermédiation ou accès direct des opérateurs
aux sources de financement sans passer par des intermédiaires ;
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• décloisonnement, c’est-à-dire éclatement des compartiments qui existaient que ce soit du point de
vue géographique, fonctionnel ou temporel.
Aujourd'hui une sphère financière globalisée existe au cœur de l'économie mondiale. Conséquences
Développement des marchés La globalisation financière a favorisé le financement des entreprises et
celui des balances des paiements. En supprimant les obstacles à la circulation des capitaux elle a
donné une impulsion sans précédent aux marchés financiers. Traitées et diffusées à l'échelle
mondiale, les informations financières créent des spéculations et une forte volatilité des capitaux.
Elles apportent une fluidité des investissements en fonction des perspectives économiques, mais
leurs effets sont parfois considérés comme devenus incontrôlables par le système bancaire et le
système financier international. Déconnexion entre finance et production Il s'agit ici du phénomène de
financiarisation qui n'a que des liens indirects avec la mondialisation financière. Les nouveaux acteurs
de la finance en général, et par contrecoup ceux de la finance internationale en particulier,
recherchent la liquidité et la rentabilité financière à court terme, alors que les entreprises ont besoin de
financements durables.
Les investisseurs financiers de portefeuille à but dit spéculatif ont supplanté les investissements
directs à but industriel et commercial dans les mouvements internationaux de capitaux. Certains
voient une relation entre la mondialisation et l'instabilité financière (risque systémique). Certaines des
innovations financières ont pour objectif de protéger les agents économiques contre l'instabilité des
taux d'intérêt et des taux de change. En effet, après la fin du système de Bretton Woods en 1973, on
est passé d'un système de change fixe à celui de change flottant entrainant comme dit précédemment
une instabilité des taux d'intérêt et des taux de change.
Mais ces nouveaux instruments financiers pourraient être eux-mêmes facteurs d'instabilité. Les
marchés à terme atteignent une ampleur et une complexité telles qu'ils apparaissent incontrôlables.
Des excès dans leur utilisation ont joué un rôle dans certaines faillites récentes et crises financières.
Ce constat s'applique surtout aux produits dérivés (contrats à terme, options, swaps) où, pour se
couvrir des risques de fluctuation, les grandes entreprises, les compagnies d'assurance, les caisses
de retraite, etc. échangent des contrats sur les taux d'intérêt et les devises.
Ils constituent un instrument efficace de gestion des risques de change et des taux d'intérêt. Ces
contrats dérivés facilitent toutefois la spéculation financière en raison de leurs effets de levier qui
décuplent le potentiel de prise de risque. Les contrats à terme d'instruments financiers permettent de
prendre des positions en n'immobilisant qu'une faible partie des liquidités sous forme de dépôts de
garantie (3% sur le MATIF).
Il en est de même pour les options pour lesquelles la prime payée est faible par rapport au montant de
l'actif sous-jacent. Ils sont ainsi des instruments favoris des spéculateurs, qui peuvent les utiliser plus
facilement dans les marchés de gré à gré. Ces marchés sont en effet beaucoup moins transparents
que les marchés organisés. Un facteur qui joue en sens inverse est l'essor du capital non coté, qui fait
que le sort des entreprises devient moins lié aux fluctuations boursières et permet une gestion à plus
long terme. Manque de transparence Certains magistrats ont lancé des appels pour dénoncer
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"l'existence de comptes non publiés de clients occultes", dans les chambres de compensation
internationales telles que Clearstream, ce qu'ils ont appelé les « boîtes noires » de la mondialisation
financière. D'où l'enchérissement du ratio McDonought issu du comité de Bâle II qui définit dans l'un
de ses piliers l'exigence de la transparence de l'information des banques à l'agent qui désire savoir
(communication financière...
La libéralisation financière Des années 1980 et 1990 Comment s’est opérée la libéralisation
financière dans les années 1980 et 1990 et quels ont été ses effets sur les économies
nationales ?
Le livre d’Yves Tiberghien propose des réponses originales à ces questions sur la double base d’une
analyse théorique en économie politique et d’une comparaison inédite entre la France, le Japon et la
Corée. La libéralisation financière des années 1980 et 1990 Par Sébastien Lechevalier Recensé :
Yves Tiberghien, Entrepreneurial States : Reforming Corporate Governance in France, Japan, and
Korea, Cornell University Press, Studies in Political Economy, 2007, 255 p., 40 !.
Comment la libéralisation financière a-t-elle pu être conduite dans l’ensemble des pays les
plus développés dans les années 1980 et 1990, alors qu’il n’y avait pas de consensus politique
?
Pourquoi ces réformes n’ont-elles pas conduit à une convergence des économies nationales vers le
modèle anglo-saxon caractérisé par la domination des mécanismes de marché ? Le livre d’Yves
Tiberghien, maître de conférences à l’université de British Columbia (Canada), vise à répondre à ces
questions. Son approche s’oppose à la perspective dominante en économie, qui explique le caractère
quasi-mécanique des transformations en cours par le progrès technique et/ou la mondialisation,
processus eux-mêmes inévitables. Dans son analyse du processus de libéralisation financière,
Tiberghien met au contraire l’accent sur l’intermédiation par les politiques : les transformations
contemporaines des économies nationales – qu’il résume par l’expression « restructuration des
entreprises » (corporate restructuring) – est certes le résultat de pressions extérieures, mais ne peut
se comprendre sans l’intermédiation volontaire (voire volontariste) des politiques qui procèdent aux
réformes structurelles : cela signifie que le renforcement des mécanismes de marché dans des
économies coordonnées ne peut se faire sans l’intervention du politique. La libéralisation financière
est analysée par Tiberghien à l’aide du concept de « golden bargain » : elle n’a rien d’un processus
automatique mais est le résultat d’un accord donnant-donnant entre d’un côté les investisseurs
internationaux qui garantissent l’afflux abondant de capitaux et les gouvernements qui s’engagent à
assurer une rentabilité élevé de ce capital par des mesures de dérégulation de l’économie facilitant la
restructuration des entreprises.
En ce sens, Tiberghien s’inscrit dans l’axe de recherche qui analyse la diversité des
capitalismes (Amable, 2003 ; Streeck & Yamamura, 2003 ; Streeck & Thelen, 2005, etc.) et est de
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fait très proche du courant dit « variétés du capitalisme » (ou VOC) en ce qu’il combine une approche
d’économie politique et une analyse centrée sur la firme (Hall & Soskice, 2001). Disons-le tout de
suite : Le livre de Tiberghien est remarquable et ce pour au moins deux raisons. C’est tout d’abord un
vrai livre d’économie politique, résultat de recherches qui se confrontent à des questions proprement
économiques et qui donnent des réponses originales sur la base d’une méthodologie faisant appel à
des outils de science politique. Ensuite, c’est une entreprise comparative de trois systèmes nationaux.
Si la comparaison France – Japon est relativement classique, surtout en ce qui concerne le mode
d’intervention de l’État dans l’économie (Sautter, 1996), l’introduction de la Corée est tout à fait
originale et réellement pertinente pour la démonstration de Tiberghien. De fait, l’originalité de ce livre
repose sur la confrontation d’un modèle théorique solide à des terrains connus de première main, à
travers une analyse des politiques de réforme et de l’évolution des institutions et sur la base
d’enquêtes de terrains, notamment d’interviews, mises au service d’une analyse de la recomposition
du processus de décision (process tracing analysis). Malgré ces qualités évidentes, ce livre est
méconnu en France, ce qui est d’autant plus dommageable qu’il offre une ouverture originale à nos
débats trop souvent franco-français. Le principal intérêt de ce livre pour nous est en effet de répondre
à la question de la réforme en proposant une étude minutieuse de cas nationaux qui peuvent a priori
nous paraître exotiques, à nous qui ne convoquons « l’international » que par les États-Unis – qui
jouent à la perfection le rôle de repoussoir/attracteur – et qu’à travers un benchmarking systématique
avec l’Allemagne ou le Royaume-Uni. L’idée implicite de Tiberghien est qu’on peut apprendre au
moins autant d’une comparaison avec le Japon et la Corée. Corée, Japon et France : trois modèles de
réforme et de changement institutionnel La démarche comparative de Tiberghien débouche sur un
premier résultat essentiel, la diversité des trajectoires japonaise, française et coréenne. De ce point de
vue, la France et le Japon représentent des cas antithétiques ; dans le premier cas, un discours antimarché s’est accompagné d’une transformation profonde et rapide, notamment sous un
gouvernement socialiste ; dans le second cas, un discours néolibéral a débouché sur des
changements plus modérés.
Quant à la Corée, elle représente le cas d’une coïncidence entre le discours et les actes qui ont
débouché sur une transformation rapide des institutions. Dans le cas de la France, Tiberghien revisite
l’expérience du gouvernement Jospin et montre que c’est manquer l’essentiel que de proposer une
interprétation de la politique menée entre 1997 et 2002 qui insiste sur les lois et mesures
emblématiques que furent les 35 heures et les emplois jeunes ou sur un discours pour le moins
méfiant à l’égard de la mondialisation. De façon paradoxale, c’est pendant ces cinq années que la
France a connu sa phase la plus intense de libéralisation.
Tiberghien obtient ce résultat sur la base d’une analyse systématique des lois votées alors, dont
l’impact est mesuré de façon comparative et sur la base d’interviews avec les acteurs principaux. On y
découvre au passage une bonne dose de cynisme. Ce chapitre est à lire de toute urgence. En ce qui
concerne l’application du modèle au cas japonais, Tiberghien brasse au passage un certain nombre
de questions essentielles du point de vue de l’économie politique du Japon, telles que la répartition du
pouvoir entre bureaucratie et politiques ou les rapports des forces entre ministères, ou l’évaluation de
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l’impact réel de la pression extérieure (gaiatsu) américaine. Il propose également une évaluation
originale des contributions respectives des premiers ministres japonais depuis le milieu des années
1990. En l’occurrence, il modère l’importance que l’on accorde trop souvent à Koizumi Junichiro,
premier ministre d’avril 2001 à septembre 2006. Au sein d’une galerie de portraits d’entrepreneurs
politiques, Tiberghien met également l’accent sur le rôle et la personnalité de Yosano Kaoru, ministre
de l’Économie et de l’Industrie sous le premier ministre Obuchi (juillet 1998 – avril 2000). Une très
bonne maîtrise des questions économiques et industrielles ainsi qu’une base électorale urbaine font
de lui le type même de l’entrepreneur politique.
Selon Tiberghien, c’est la nécessité de conserver le soutien de l’électorat urbain qui a fait de lui le
chantre des réformes. Quant à la Corée, elle présente le cas d’une transformation structurelle sous
l’action caractéristique d’entrepreneurs politiques, notamment du président Kim Dae-Jung, élu en
décembre 1997, au plus fort de la crise financière qui a secoué alors l’Asie en général et la Corée en
particulier. Analyser les processus de décision politique pour comprendre la diversité des modèles de
réforme Pour répondre à la question initiale, il est nécessaire, selon Tiberghien, d’ouvrir la boîte noire
du processus de décision politique : sa démonstration repose sur une certaine représentation de la
sphère politique et notamment sur la mise en avant du rôle de « l’entrepreneur politique ». Ce dernier
peut être défini comme un individu, bénéficiant d’une connaissance particulière des transformations
en cours et d’une situation politique qui peut lui faire espérer un rôle important dans un futur proche. Il
agit en faveur de la libéralisation parce qu’il escompte que, ce faisant, il va améliorer sa propre
position dans le futur. Autrement dit, l’intérêt propre est la principale motivation de l’entrepreneur
politique, même si cette dernière est parfois renforcée par la volonté de moderniser la nation et de
rendre service à la communauté.
Tiberghien est alors en mesure d’expliquer la diversité des trajectoires non pas par la variété des
chocs économiques, les différences de préférences des électeurs ou la dynamique des coalitions
électorales mais par des variables politico-structurelles, l’autonomie stratégique politique (SPA) et la
délégation bureaucratique stratégique (SBD). La SPA caractérise les conditions dans lesquelles
l’entrepreneur politique peut échapper au contrôle des partis et des coalitions. Concrètement, cette
variable comprend notamment l’autonomie au sein du parti ou le degré de contrôle sur l’agenda
législatif. Quant à la SBD, elle mesure ce qui permet à l’entrepreneur politique d’éviter les obstacles et
les critiques. La situation la plus confortable de ce point de vue est d’être entouré d’une bureaucratie
transversale, c’est-à-dire ne défendant pas d’intérêt sectoriel, avec en son cœur une élite unifiée
(formée dans une même école comme l’ENA en France). L’existence d’organisations internationales
sur lesquelles on peut faire porter la nécessité de la réforme conduit également à une SBD plus
élevée. Deux critiques, quelques questions laissées ouvertes et un appel à la recherche Ce livre est
une invitation à la recherche, en ce qu’il ouvre plusieurs pistes et en ce qu’il propose une thèse
provocante et stimulante, donc critiquable.
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D’une part, ce faisant, Tiberghien a tendance à mettre de côté l’influence de groupes (tels les
investisseurs internationaux), et plus encore de forces, tel le progrès technique, qui interviennent en
partie indépendamment des individus et des groupes.
D’autre part, ne peut-on pas voir d’autres motivations dans l’action des dirigeants politiques que celles
associées à l’entreprenariat politique ?
De plus, la contribution de Tiberghien suscite plusieurs questions qui restent sans réponse dans ce
livre. Parmi elles, on peut citer les suivantes : Pourquoi les électeurs votent-ils contre leur intérêt (du
moins à court terme) ?
Tiberghien se focalise en effet sur l’intérêt des dirigeants politiques à réformer, mais il semble de
mettre de côté celui des électeurs, qui n’est certainement pas négligeable dans une démocratie, sauf
à penser que c’est une donnée aisément manipulable par les entrepreneurs politiques. Pourquoi trois
systèmes nationaux qui ont été efficaces par le passé ne le seraient plus aujourd’hui ?
L’explication dominante des économistes est que cela s’explique par le changement d’environnement
économique marqué par l’accélération du progrès technique et la mondialisation. Quant à la réponse
de Tiberghien, elle repose sur le « golden bargain », ce qui implique un certain arbitrage, non pas
entre équité et efficacité mais entre deux formes d’efficacité, d’un côté le processus de destruction
créatrice et une meilleure allocation du capital, de l’autre côté les liens de coordination au cœur de la
définition de l’avantage comparatif. On est en droit de ne pas se satisfaire pleinement de ces deux
types de réponse. Cependant, elles démontrent, selon nous, que ce livre est susceptible de devenir
une référence et d’être discuté comme il se doit.
De plus, il manifeste une réelle urgence, celle de lancer des programmes de recherches comparatifs
dignes de ce nom, impliquant des pays et des régions hors-Europe et hors États-Unis, sur des
questions auxquelles nos réponses s’appuient sur des analyses trop souvent domestiques.
1 - Le développement de la crise et son impact sur l'accumulation La crise actuelle se déclenche au
cœur de la sphère financière : en cela, elle revêt immédiatement un caractère global par les
conséquences qu’elle va produire. Elle a éclaté à Wall Street et dans le système bancaire américain.
Elle s’est répercutée immédiatement en Angleterre, autre centre financier majeur. Elle s’est
rapidement propagée dans le reste du monde. Elle se marque par des pertes considérables de
valeurs. Elle touche les institutions financières les plus anciennes et les mieux assises. Alors qu’on
ignore si elle est terminée, la crise financière s’est vite transmise à l’économie réelle, provoquant un
début de récession mondiale.
L’élément catalysateur : la crise des "subprimes" Les principales étapes de cette crise qui a éclaté
en août 2007 sont connues : à l’origine, des prêts à des ménages américains fragilisés «subprimes»,
puis un retournement du marché immobilier et la hausse des taux d'intérêt aux Etats Unis à la fin de
l'année 2006 (pour une chronologie des événements, voir l’annexe 1). La crise actuelle a alors débuté
avec les difficultés rencontrées par les ménages américains à faible revenu pour rembourser les
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crédits qui leur avaient été consentis pour l’achat de leur logement. Ces crédits étaient destinés à des
emprunteurs qui ne présentaient pas les garanties suffisantes pour bénéficier des taux d’intérêt
préférentiels (en anglais « prime rate », mais seulement à des taux moins préférentiels « subprime»).
L’endettement de ces ménages américains a pu s’appuyer sur les taux d’intérêt extrêmement bas
pratiqués pendant des années par la Banque centrale des Etats-Unis (la « FED »), à partir de 2001,
après la crise boursière sur les valeurs « internet ». En outre, les crédits étaient rechargeables, c’està-dire que régulièrement, on prenait en compte la hausse de la valeur du bien, et on autorisait
l’emprunteur à se ré-endetter du montant de la progression de la valeur de son patrimoine. Les
intermédiaires financiers se sont alors engagés dans une distribution agressive de prêts
hypothécaires immobiliers à taux variable aux ménages américains, quel que soit leur niveau de
revenus. Octroyés sur la valeur estimée des biens et non sur la capacité de remboursement, nombre
de ménages sont ainsi devenus propriétaires sans en avoir vraiment les moyens.
Autre caractéristique, ces crédits ont été souvent accordés avec des taux variables. Plus précisément,
les charges financières de remboursement étaient au démarrage très allégées pour attirer
l’emprunteur. Elles augmentaient au bout de 2 ou 3 ans et le taux d’emprunt était indexé sur le taux
directeur de la FED. Certains des prêts immobiliers qui étaient identifiés comme plus risqués que les
autres «subprimes» se sont alors retrouvés associés, par les opérations de titrisation, à d’autres
créances, dans des véhicules d’investissement essentiellement détenus par les professionnels, mais
également indirectement par des particuliers au travers de fonds communs de placement. S’est ainsi
développé un modèle dans lequel les produits changent de forme en permanence et sont portés par
des investisseurs de nature diverse (banques, investisseurs institutionnels, hedge funds, particuliers,
etc.) soumis à des réglementations différentes.
La croissance des prix de l’immobilier et l’afflux de liquidités sur le marché américain ont contribué au
développement de l’ingénierie financière de la titrisation. La demande de produits structurés échangés
sur les marchés de gré à gré (« over the counter » – OTC), en cash ou sous forme de produits
dérivés, s’est ainsi considérablement accrue hors du contrôle des régulateurs. Entre 2000 et 2007,
porté par une hausse continue des prix de l’immobilier et un laxisme grandissant dans les conditions
d’octroi des prêts, le marché des RMBS a connu un développement spectaculaire, passant de 640 à
plus de 2 000 milliards de dollars. Sur ce total, la part des crédits «subprimes» est elle-même passée
durant la même période de 8% à plus de 20%. L’éclatement de la bulle immobilière aux États-Unis a
déstabilisé l’ensemble du dispositif en ruinant la confiance des marchés et en provoquant une spirale
d’ajustement à la baisse des actifs titrisés. Lorsqu’à partir de fin 2005, la Réserve Fédérale commença
à relever les taux d’intérêt, les ménages américains les plus fragiles ne furent plus en mesure
d’assumer la charge de leur dette. Ce qui s’est passé est finalement assez facile à comprendre. La
banque centrale a progressivement relevé ses taux de 1 % en 2004 à plus de 5 % en 2006 pour tenir
compte de l’évolution de l’inflation et de la croissance américaine. Les charges financières des
emprunts se sont considérablement alourdies. Un nombre croissant de ménages n’a pu faire face.
Phénomène nouveau, un nombre croissant d’entre eux choisirent de se défaire de leur bien
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immobilier, mais de conserver leurs automobiles et leurs cartes de crédit. Le taux de défaut de
paiement sur les prêts hypothécaires des ménages, qui atteignait à peine 4% en 2005 a alors
considérablement augmenté pour atteindre 10% en septembre 2007, puis 20% à la fin de cette même
année. Les actifs détenus par les banques ayant le plus fort effet de levier (les CDO) furent les
premiers affectés, subissant des dégradations rapides de leur notation qui était jusqu’alors de
première qualité, et entraînant de très lourdes pertes pour les banques. L’effondrement de la valeur
des prêts "subprimes" et des titres adossés aux prêts hypothécaires a conduit à la disparition des
marchés de ces produits, depuis lors désertés par les acheteurs et les vendeurs. Cette situation a eu
trois conséquences pour les banques : les banques ont dû honorer leurs engagements vis à vis des
investisseurs financiers en leur accordant des lignes de crédit en urgence ; les banques ont ensuite
rapatrié massivement dans leurs comptes les instruments de titrisation ; cette situation d’illiquidité
s’est propagée au marché interbancaire, à la faveur d’une méfiance grandissante entre contreparties,
justifiant ainsi des interventions massives de la part des banques centrales pour apporter des
financements à court terme au marché
. Les banques centrales et certaines autorités de marché avaient dès le début 2004, mais plus
généralement depuis 2006, alerté sur les risques spécifiques que comportait le modèle de titrisation.
Cependant, ces avertissements sont restés lettres mortes. Les superviseurs, pourtant informés du
développement des activités de hors bilan et de l’augmentation de l’effet de levier, n’ont pas jugé utile
d’intervenir, à supposer qu’ils en aient eu les moyens légaux. Par ailleurs, les établissements
financiers, tout autant que les investisseurs, n’ont pas pris ces avertissements au sérieux et ont
continué de croire à la qualité des produits, à la croissance de leur valeur et à leur rendement, et ce
d’autant que les agences de notation n’avaient pas pris la mesure des risques systémiques associés
au retournement annoncé du marché immobilier américain. Les pertes annoncées par les grandes
banques internationales au titre de l’exercice 2007 (147 milliards d’euros) ont confirmé l’ampleur de
leurs difficultés et nécessité l’intervention des banques centrales pour sauver celles dont la chute
aurait eu des conséquences systémiques. D’autres banques ont dû faire appel à des investisseurs
externes, y compris des fonds souverains, pour restaurer leur situation financière. Même si les pertes
pour l’exercice 2007 n’ont représenté qu’une part relativement limitée du total de leurs actifs, il n’en
demeure pas moins que les banques ont vu leur fonds propres diminuer et n’ont pas tiré encore, à ce
jour, l’ensemble des conséquences de la crise des «subprimes». La rupture de l’été 2007 A l’été 2007
le taux de non remboursement sur les crédits « subprime » dépassait 15 % contre 5 % en moyenne à
la même époque pour l’ensemble des crédits hypothécaires aux Etats-Unis, chiffre lui-même record
depuis 1986. Certes les défauts de paiement ne conduisent pas tous à la faillite de l’emprunteur et à
la vente du bien hypothéqué. Mais on estimait, fin août 2007, que près d’1 million d’emprunteurs
avaient perdu leur logement. Ce pourrait concerner in fine quelque 3 millions de ménages américains.
L'accélération des défauts sur les prêts hypothécaires « subprime », précipitant le repli du marché de
l'immobilier, avec des liquidations massives et en catastrophe, a été à l'origine du premier choc de
liquidité agrégé.
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Lorsque la crise a frappé au mois d'août 2007, les marchés des titres adossés à des crédits
hypothécaires à risque sont devenus illiquides au moment même où des investisseurs très endettés,
comme les fonds spéculatifs, devaient ajuster leurs positions ou se séparer de positions perdantes.
Les fonds spéculatifs se sont ainsi trouvés bloqués sur des positions défavorables au moment où ils
recevaient des appels de marge de leurs courtiers de premier ordre. La situation s'est aggravée du fait
qu'en l'absence de transactions, il n'y avait pas de prix de marché susceptibles de servir de référence.
En conséquence, les fonds spéculatifs ont suspendu leurs transactions et le marché des CDO et les
marchés des dérivés de crédit connexes ont pour ainsi dire cessé d'exister. Les émetteurs de CDO
n'ont pu vendre leurs stocks et ont arrêté de procéder à de Nouvelles émissions. La réaction des
banques centrales et les injections de liquidités Un trait frappe dans le déroulement de la crise : Les
injections de liquidité des banques centrales sur les marchés monétaires n'ont eu aucun effet dans la
résolution de la crise ; Les marchés monétaires à échéance de trois mois ont été très vite bloqués, le
sont demeurés par la suie, et le demeurent encore (voir annexe 8 pour approfondir le fonctionnement
du marché interbancaire et du mécanisme d’injection de liquidités). Les injections de liquidité ont été
indispensables parce qu'elles compensent les difficultés de financement des banques (et de quelques
assureurs). Toutefois la liquidité globale est restée abondante et disponible au niveau
macroéconomique. La forte croissance de la liquidité mondiale est liée à celle de la base monétaire
mondiale, elle-même alimentée par la croissance des réserves de change des banques centrales.
De facto, la quantité d'actifs liquides et monétaires augmente rapidement. Mais, il peut y avoir
simultanément abondance de liquidités monétaires et pénurie de liquidité sur certains marchés,
comme le marché interbancaire. Cette crise de liquidité n'est donc pas une crise de liquidité globale,
mais une crise liée à l'arrêt de la réallocation des liquidités entre des agents économiques, entre ceux
qui ont un excédent de liquidité (en cash) et ceux qui ont un déficit, un besoin, de liquidité. On en
déduit que les injections de liquidités par les Banques Centrales ne peuvent pas venir à bout de la
crise, compte tenu de sa nature. La crise actuelle met à jour le paradoxe dans lequel des niveaux de
liquidités globalement très élevés contrastent avec des situations d’illiquidité sur certains marchés
financiers. Ces situations d’illiquidité apparaissent lorsque les investisseurs se retirent du fait d’une
crise de confiance sur des produits spécifiques pouvant conduire à des crises de solvabilité des
acteurs, notamment des banques les plus fragiles. Le retournement de conjoncture les exposait
directement à des risques de liquidité en cas de retournement du marché. Cette situation a rendu les
établissements financiers extrêmement dépendants du marché interbancaire qui est la principale
source de financement à court terme. Le piège s’est refermé avec l’assèchement des prêts entre
banques et du financement à moyen terme par les fonds monétaires de banques qui étaient toutes
devenues emprunteuses, en raison de leurs différentes expositions. Seules des injections massives
de liquidité des banques centrales ont permis d’éviter un effondrement en masse des plus grands
établissements financiers de la planète. Ainsi, dans un contexte de désintermédiation bancaire qui a
permis le financement du marché immobilier par des produits non régulés, la perte de confiance en
ces produits, qui prenaient insuffisamment en compte les réalités micro - (la situation des débiteurs) et
macro - économiques (la situation du marché immobilier) a mené à une crise financière majeure, qui
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s’est traduite de façon imprévue par une illiquidité ponctuelle, mais progressivement généralisée, sur
les marchés interbancaires. Cette crise a surpris tous les acteurs par son ampleur et sa propagation
rapide qui étaient largement dues au niveau de transformation massif des véhicules de titrisation et,
plus fondamentalement, aux effets de la globalisation des marchés extrêmement sensibles à la
confiance
. Les injections de liquidité sur les marchés interbancaires par les banques centrales permettent
transitoirement d'écarter l'aggravation de la crise à court terme par sa propagation (en prévenant des
cessations de paiements, des ventes d'actifs), mais elles ne peuvent aucunement mettre un terme à la
dynamique déstabilisante induite par l'interaction entre la baisse des prix des actifs, la perte de fonds
propres par les intermédiaires financiers, et les ventes forcées d'actifs. Dans tous les cas, les mesures
successivement annoncées par la Fed et d’autres banques centrales n’ont eu que très peu d’effets.
Les marchés financiers d’aujourd’hui sont dominés par des institutions non bancaires – banques
d’investissement, fonds de placements sur les marchés monétaires, fonds spéculatifs, prêteurs
hypothécaires n’acceptant pas les dépôts, les véhicules de titrisation, voire fonds d’investissement
nationaux ou locaux – qui n’ont aucun accès direct ou indirect aux liquidités fournies par les banques
centrales.
Toutes ces institutions non bancaires présentent aujourd’hui des risques de voir une pénurie de
liquidités. Les législations interdisent aux banques centrales de prêter à des institutions non
bancaires. Le risque est donc permanent de voir une sorte de “course aux guichets” (“Bank run”)
toucher les institutions financières non bancaires, en raison de leurs dettes à court terme et de leurs
actifs non liquides à plus long terme – c’est du moins ce que laissent penser les problèmes de
certaines banques, de certains fonds de placements sur les marchés monétaires, de certains fonds
d’investissements nationaux et de certains fonds spéculatifs. Il y a peu de chances que les banques
re-prêtent à ces institutions non bancaires les fonds qu’elles ont empruntés aux banques centrales,
compte tenu de leurs propres problèmes de liquidités et du peu de confiance qu’elles accordent aux
agents non bancaires. Mais, avec la crise, les Banques centrales ont du s'adapter. Prenons l'exemple
de la FED. Les premières innovations de la Banque centrale américaine en matière d’accès à la
liquidité ont eu lieu le 12 décembre 2007 avec, tout d'abord, le lancement de la Term Auction Credit
Facility (TAF). Il s’agit de fournir des liquidités aux banques commerciales et institutions de dépôts
jugés solvables sous forme de prêts complètement collatéralisés, avec une gamme d’actifs très large
(voir le tableau ci-dessous). L’innovation est dans l’anonymat, le mode de d’adjudication (enchères
fixant le taux d’intérêt), la durée fixe (28 jours) et le montant (30 Md$ par enchère). L’enchère a lieu
toutes les 2 semaines, donc il est prévu d’apporter au marché 60 Md$ de liquidités de façon
permanente. Mais ce montant s'est révélé bien trop faible par rapport à l'ampleur de la crise, comme
le montre l'évolution des chiffres du tableau ci-dessous. Septembre 2008 : le double choc de
Lehmann et de AIG En septembre 2008, on a pu observer une accélération brutale de la crise. Le
gouvernement américain, après avoir sauvé Bear Stearns en mars de la même année et les deux
rehausseurs de crédits hypothécaires Fannie Mae et Freddie Mac, ne fait rien pour empêcher
!
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finalement la faillite de Lehman Brothers, un des membres éminent de l'oligopole bancaire mondial et
évite de justesse la faillite du géant AIG. 1 - Lehman Brothers, la quatrième banque d'affaires
américaine, s'est mise sous la protection du chapitre 11, tandis que Merrill Lynch est simultanément
reprise pour 50 milliards de dollars par Bank of America. L'onde de choc de cette faillite touche alors
tout le secteur bancaire mondial. Cette banque avait traversé la crise de 1929, mais n'aura finalement
pas résisté à la crise des «subprimes».
La banque américaine, qui avait commencé dans le négoce du coton, était plus que centenaire.
Fondée par les frères Lehman en 1850, elle s'était tournée rapidement vers le financement des
chemins de fer et des géants de la distribution. Plus récemment, la banque avait vu son siège détruit
par les attentats du 11 septembre. Reste que Lehman avait jusqu'à maintenant bonne réputation sur
la place new-yorkaise. Il y a un an, le magazine «Fortune» lui avait décerné le prix de la banque
d'investissement la plus admirée des Etats Unis. Le paysage bancaire américain s'en trouve
bouleversé La faillite de Lehman Brothers a quelque peu éclipsé l'autre très gros événement de la
même journée : le rachat de Merill Lynch par Bank of America. Celle-ci met quelque 50 milliards de
dollars pour s'offrir la banque d'affaires américaine et, du même coup, se hisser au premier rang
mondial de son secteur. A la mi-septembre, la finance américaine sort de bouleversements sans
précédent. Les opérations concernant Lehman et Merrill achevées, et plusieurs mois après le rachat
de Bear Stearns par JPMorgan Chase, il ne restera plus que deux banques d'affaires outre-Atlantique
: Goldman Sachs et Morgan Stanley. De leur côté, les rehausseurs de crédit Fannie Mae et Freddie
Mae ont été nationalisés et sont désormais destinés à disparaître. Mais il restait encore une épreuve à
subir. 2 – Le 17 septembre, le gouvernement américain décide en effet de nationaliser l’ex numéro un
mondial de l’assurance, American Insurance Group (AIG). La question que tout le monde se pose
alors est pourquoi AIG méritait d'être sauvée par la puissance publique et pas la banque d'affaires
Lehman Brothers, qui elle aussi avait des filiales profitables à côté de ses actifs "toxiques". La faillite
du numéro un mondial de l'assurance, compte tenu de sa taille, aurait pu entraîner une crise
systémique, ont jugé les autorités. Au risque d'encourager les groupes financiers à devenir trop gros
pour disparaître, et ce au détriment de leurs concurrents plus petits. AIG avait dans ses comptes 440
milliards de dollars de "credit default swaps" (CDS). Ces instruments financiers sont des polices
d'assurance complexes contre le défaut d'obligations. Cette diversification de ses métiers d'assureur
dommage et assureur vie avait été décidée par AIG il y a une vingtaine d'années. Le débouclage
désordonné de ces CDS, outre qu'il est difficile à effectuer, aurait entraîné de nouvelles dépréciations
d’actives et causé de lourdes pertes dans le secteur bancaire, qui n'en a pas besoin à ce moment-là
. Le sous-secrétaire au Trésor pour la stabilité financière a souligné que l'engagement renforcé des
pouvoirs publics était indispensable à "la stabilité du système financier", car une faillite d'AIG aurait
des répercussions en cascade sur l'ensemble de la finance mondiale, par le biais des contrats
d'assurance contre le risque de crédit (CDS) qu'il a souscrits. AIG est un puissant émetteur de dettes
pour financer son activité. Et ses créanciers sont les plus grandes banques de la planète. En
contrepartie du risque d'encourager les institutions financières à grossir, la Fed a demandé des
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conditions drastiques aux actionnaires et créanciers d'AIG. Le prêt de deux ans de 85 milliards
accordé à l'assureur sera rémunéré 8,5 points au-dessus du taux interbancaire classique. L'Etat a des
options qui vont lui permettre de contrôler 80% du capital et de diluer les actionnaires actuels. Il a, en
outre, exigé la démission du PDG.En deux mois, le gouvernement a pratiquement doublé son aide à
l'assureur américain AIG, la portant de 85 milliards de dollars à 150 milliards. En parallèle, il a aussi
adouci les conditions de celle-ci, alors que le groupe vient de publier une perte record de 24,5
milliards au troisième trimestre. C'est un événement unique, ce n'est pas le début d'un nouveau
programme », a insisté Neel Kashkari, responsable du TARP (Troubled Assets Relief Program) lors
de la Securities Industry and Financial Markets Associations conférence à New York. Le
gouvernement a en effet puisé 40 milliards de dollars dans ce fonds de 700 milliards destiné à
secourir les services financiers pour prendre la participation au capital d'AIG. « Cette action était
nécessaire pour maintenir la stabilité de notre système financier », a-t-il affirmé. Sur une première
tranche de 350 milliards de dollars, 290 milliards ont déjà été attribués à des banques et AIG, le seul à
ne pas en être, en a reçu la plus grosse part" Le montant ultime du coût du sauvetage d'AIG pourrait
potentiellement être équivalent à l'ensemble de la richesse produite en un an par des pays comme
l'Ukraine, la Hongrie, le Pakistan ou les Philippines. Ainsi de l’éclatement de la crise des «subprimes»
à la faillite de Lehman Brothers en passant par le sauvetage de AIG, les marchés ont fait preuve,
pendant plus d’un an, de leur incapacité à surmonter seuls la crise. Ni les dépréciations massives
d’actifs, ni les recapitalisations tout aussi importantes, ni les tentatives de mise en place de fonds de
soutien privés ne sont parvenues à faire revenir la confiance dans un système bancaire rendu
exsangue par l’importance et la complexité des produits structurés disséminés au sein du système
financier. Ce dont témoigne la persistance de tensions continues et exceptionnelles sur les taux
interbancaires. On peut y voir la source de la crise économique qui se déploie désormais Le crédit
Crunch et son impact économique En effet, le désordre monétaire et financier contamine dorénavant
l’économie réelle
. La récession touche la plupart des pays occidentaux. C’est assez logique. Il y a d’abord d’énormes
pertes de valeurs. Il y a ensuite la fragilisation du secteur bancaire. Malgré les injections massives de
liquidités opérées par les banques centrales, la méfiance entre les banques privées, leur incertitude à
l’égard de la qualité de leurs actifs, la peur de l’insolvabilité conduisent celles-ci à resserrer fortement
le crédit aux entreprises et aux particuliers, réalisant ce qu’on appelle un « crédit Crunch ». Il y a
encore l’impact de la crise immobilière sur le logement, le bâtiment et la consommation de très
nombreux ménages endettés, tout particulièrement aux Etats-Unis.
Il y a enfin une perte générale de confiance des acteurs économiques, ce qui est toujours néfaste
pour l’activité. Quelle sera l’ampleur de cette crise ? Elle variera sans doute, selon les zones et les
pays. Par zone, on sait que les pays émergents devraient garder des taux de croissance plus élevés
que les économies matures, puisqu’ils sont en phase de décollage. Mais n’oublions pas les fortes
tensions que le développement impose à leurs structures sociales. Avec un taux de croissance du PIB
qui deviendrait inférieur à 7 ou 8 %, la Chine pourrait souffrir de troubles plus grands que la Belgique
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et la France avec un taux zéro. D’après les prévisions du FMI, la croissance mondiale en 2009 ne
devrait pas dépasser 3 %. Celle des pays émergents sera limitée à 6 ou 7 %. Celle des économies
développées sera proche de zéro. Plus précisément, pour les Etats-Unis, le Fonds Monétaire
International a ainsi revu en baisse de 1,9% à 1,6% son estimation de croissance cette année, et de
0,8% à 0,1% sa projection de croissance en 2009. La zone euro voit ses perspectives également
sensiblement révisées en baisse : de 1,7% à 1,3% en 2008, et de 1,2% à 0,2% pour 2009.
Concernant les pays émergents, la projection d’une croissance de 6,9% en 2008 est maintenue, mais
revue de 6,7% à 6,1% pour 2009. La question est par conséquent de savoir si la récession sera
courte ou longue et si elle ne dégénèrera pas en dépression. On y reviendra. Source FMI Autre
élément très important de la crise financière, l'envolée, au cours des neufs premiers mois de l'année
2008, des matières premières agricoles et du pétrole. Cette envolée a rendu particulièrement sensible
le sujet des investissements croissants réalisés par de grands investisseurs institutionnels sur les
marchés de futures (contrats d’achat ou de vente à terme). Or il est indéniable qu’une « vague » de
liquidités s'est portée sur ces marchés : les investisseurs, principalement des fonds, se sont dirigés
très fortement vers le marché des matières premières, d’autant plus que de nombreuses études de
banque vantent les bénéfices, tant en termes de diversification que de protection, contre l’inflation de
ces investissements très peu corrélés aux marchés boursiers. Sur le long terme, l’équilibre des
marchés reflète l’évolution anticipée des prix résultant de l’équilibre de l’offre et de la demande
physique, en tenant compte, en particulier pour le pétrole, de la croissance de la demande adressée
par la Chine et l’Inde. Mais, il est évident qu’une bulle temporaire, favorisée par l’ampleur des capitaux
investis par ce type d’investisseurs (260 Mds$ à fin mars 2008 sur le marché à terme de Chicago
contre 13 Mds$ à fin 2003). Il est clair qu’une part des volumes aujourd’hui échangés sur ces marchés
ne corresponde pas à des activités normales de couverture de besoins physiques
. Ces échanges affectent sur le court terme le prix spot, et donc favorisent le développement d’une
bulle. La volatilité excessive sur ces marchés due aux larges volumes de trading constitue également
une autre problématique importante. Le caractère tout à fait spécifique de ces marchés, qui traitent de
produits vitaux à l’échelle mondiale, appelle de fait une vigilance renforcée et pose la question
d’éventuelles restrictions à apporter aux opérations réalisées par certains de ces investisseurs. Bien
que l’essentiel des bourses correspondantes soient américaines, le London Metal Exchange ainsi que
de nombreux marchés non régulés, traitent également des contrats de ce type ou des dérivés. A tout
le moins, parmi les actions possibles, figure la nécessité d’une transparence accrue à trois niveaux :
transparence des stocks physiques ; transparence dans le fonctionnement des marchés et notamment
des marchés à terme et si possible des marchés OTC avec la création d’une chambre de
compensation unique permettant un dénouement rapide et efficace des transactions ; transparence
dans l’échange d’information entre autorités de régulation de ces marchés, au-delà de celles
directement nécessaires à la supervision des bourses concernées. Chaque pays devra tracer son
chemin face à la crise. Ceux dont les fondamentaux économique sont les plus sains, dont les marges
de manœuvre sont les plus grandes (en matière de comptes publics comme d’endettement) et dont
l’appareil productif est plus performant résisteront mieux que les autres La bombe à retardement des
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CDS Pour terminer, soulignons qu’en cas de nouvelles faillites, un danger très grand guette le
système financier. C'est l'activation des fameux CDS (Crédit Default Swap), qui sont des produits de
couverture contre le risque de défaut d’un établissement ou d’un pays (Pour un approfondissement de
ce produit, voir l'annexe 5). Si leur activation devait avoir lieu à une grande échelle, hypothèse qu’on
ne peut écarter, il faudrait alors procéder à la nationalisation quasi intégrale de toutes les banques des
pays développés, car les chiffres sont ici gigantesques : l’encours de ces produits s’élève en effet à 55
000 milliards de dollars. Actuellement, les vendeurs de ce type de couverture, confrontés aux risques
que représentent les défaillances d’établissements financiers (du type AIG) sont obligés d’élever les
garanties apportées. Les CDS sont des sortes d’assurances contre une défaillance de l’emprunteur :
le vendeur de CDS s’engage à rembourser à sa place en échange d’une prime variant en fonction du
marché et de la qualité de l’emprunteur. Les contrats d'assurance CDS obligent l'assureur
(généralement une banque ou un rehausseur de crédit) à régler une dette lorsqu'un un débiteur
(généralement, une banque ou une institution financière) est en défaut de paiement
. Ces pratiques lient étroitement les banques européennes aux banques américaines qui, ellesmêmes, se tiennent indissociablement garantes les unes des autres. Mais les banques se sont
longtemps crues en sécurité, car elles ont pris de nombreuses assurances auprès des rehausseurs de
crédit. Echangés à grande échelle, remixés et recompilés en une impressionnante pharmacopée de
titres dérivés, les titres RMBS et CDOs et leurs garanties CDS ont été achetés et vendus par les
banques d'investissements telles que Fortis Investments, Deutsche Bank et par toutes les banques
d'investissements européennes. Par exemple, les rehausseurs de crédit (« monolines ») ont été
sévèrement affectés par la crise des «subprimes», notamment à travers l’encours de dérivés de crédit
(CDS de CDO) qu’ils portent, estimé à 125 Mds$ pour un total d’actifs garantis de 2 500 Mds$.
L’enjeu des discussions menées actuellement sous l’égide de la Réserve Fédérale sur le partage des
pertes correspondantes entre banques et monolines ou leur étalement dans la durée, est clé, compte
tenu de la base limitée de leurs capitaux (30 Mds). La réaction des Etats : mesures nationales et
mesures coordonnées Au fur et à mesure que la crise s’est étendue les premiers à être réhabilités ont
été les Etats.
Dans la panique générale, les groupes financiers et parfois les entreprises se sont tournés
vers eux. Pourquoi ? Parce qu’il n’y avait pas d’autre recours que ces pouvoirs légitimes, dotés de
souveraineté, représentatifs des peuples et, à ce titre, capables de lever des ressources. Pour autant,
si les dogmes du néolibéralisme ont été écornés, rien n’indique qu’ils ne pourraient pas renaître, avec
les mêmes conséquences, une fois la grande peur passée. C’est pourquoi, aux yeux de leurs
responsables, à moyen terme, une régulation s’impose. Le sommet du G20 qui s’est tenu à
Washington, le 15 novembre, a représenté un premier pas dans la direction qu’ils souhaitaient.
Certes, il a été préparé hâtivement, mais les travaux couvrant le spectre le plus large émanent au
niveau international du Financial Stability Forum (FSF). Cette instance mandatée à cette fin par les
ministres des finances du G-7 et les gouverneurs des banques centrales, et dont les conclusions ont
été approuvées en avril 2008. Un rapport complet incluant des priorités immédiates a été présenté
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lors de la réunion du G-8 d’Osaka en juin de la même année. Ces mesures prioritaires, dont plusieurs
devaient être mises en œuvre sous cent jours, préconisent une transparence accrue sur les risques et
les véhicules hors bilan, les techniques de valorisation comptable, l’amélioration de la supervision
bancaire et de la gestion du risque de liquidité et l’élaboration d’un code de conduite des agences de
notation. Lors de sa réunion de juillet 2008, le G-8 a souligné l’importance de la mise en œuvre des
recommandations du rapport du FSF et a enjoint les acteurs du secteur privé, les autorités nationales
de supervision ainsi que les organismes internationaux, à faire diligence en la matière. Mais à côté de
cette mobilisation internationale, les premières réponses effectives à la crise ont été d’abord
nationales. La mobilisation financière sans précédent des Etats Le renflouement est en cours dans les
pays occidentaux. La Réserve Fédérale des Etats-Unis, la Banque centrale européenne, la Banque
d’Angleterre et d’autres banques centrales se sont portées au secours des établissements financiers
menacés. Les Etats, américain avec le plan Paulson première et deuxième manière, européens,
nationalement et dans un plan concerté, sont intervenus avec plus de puissance encore. Ils ont donné
leur garantie pour des sommes énormes et apporté des financements directs (sous forme de crédits
ou de participations en capital). Ces interventions massives ont écarté certes le risque d’une
banqueroute généralisée. Mais si le système a été, pour le moment, restabilisé, il n’est pas certain
qu’il soit totalement assaini.
Chaque semaine de nouvelles pertes sont annoncées et des établissements sont fragilisés. L’extrême
complexité des montages et des produits financiers, la fragilité des fonds spéculatifs, l’opacité des
paradis fiscaux rendent malaisée l’appréciation de la situation par les banques, les agences de
notation, les autorités de régulation et, désormais, les gouvernements eux-mêmes. La finance
internationale a ses « trous noirs ». Ainsi, la majeure partie des 11.000 hedge funds recensés sont
localisés dans des paradis fiscaux non contrôlés.
Les plans Paulson 1 et 2 Dès lors, les moyens pour lutter contre la crise ont complètement changé de
nature et de dimension. Le plan Paulson, qui envisageait, dans une première mouture, de racheter les
créances toxiques aux banques pour un montant de 700 milliards de dollars, s’est transformé
partiellement en un plan d’apports de fonds propres aux plus grandes banques. Notons que c'est sur
les conseils des cinq plus grandes banques américaines que ce changement a été proposé.
Pourquoi 700 milliards de dollars ? Le Trésor voulait débarrasser, au départ, les banques de leurs
actifs "toxiques" à l'origine de la crise. En éliminant le "ver dans le fruit", il comptait ainsi restaurer la
confiance dans le système financier. Mais à quel prix seraient rachetés les actifs « subprime » des
banques ? Henry Paulson s'est alors aperçu qu'il était peu efficace de racheter des actifs toxiques
parce qu'il y a des problèmes de fixation du prix d'achat de ces titres. Le plan a donc changé de
nature depuis le 14 octobre. Aussitôt 250 milliards ont été alloués à la recapitalisation bancaire. La
question était de savoir ce qu'il allait faire avec les sommes restant à sa disposition. Il a décidé
d'utiliser cet argent pour favoriser le crédit à la consommation parce que les banques n'en accordent
plus actuellement. Les données que l'on a sur la consommation des ménages aux États-Unis sont
catastrophiques : il faut donc faire en sorte que le consommateur retrouve des marges et puisse
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continuer à emprunter. Le plan initial est donc réorienté vers la consommation. Mais personne ne peut
dire si cela sera suffisant pour la relancer.
D'ailleurs, on ne connaît pas encore le détail de ces nouvelles mesures négociées avec la Réserve
fédérale américaine. Le plan de sauvetage américain est financé par le Trésor, donc par le
contribuable. Les sommes seront octroyées en trois étapes : 250 milliards de dollars ont donc été
immédiatement accordés au Trésor suivis de 100 milliards octroyés, si nécessaire, à la demande du
président, puis 350 milliards sujets à un nouveau vote du Congrès. Deux comités externes
surveilleront la manière dont sont dépensées ces sommes. Quelles sont les institutions financières
susceptibles d'être sauvées ? Les banques américaines, mais aussi des collectivités locales, des
fonds de pension et des petites banques commerciales, pourront profiter de l'offre. Les banques
étrangères qui disposent de filiales aux Etats-Unis seront aussi acceptées. En revanche, les fonds
spéculatifs devraient être exclus du programme. Le 3 octobre, la Chambre des représentants
américains a approuvé, par 263 voix contre 171, le plan de 700 milliards de dollars élaboré par le
secrétaire d'État au Trésor Henry Paulson et baptisé "Loi sur la stabilisation économique d'urgence de
2008". Un plan qui avait été rejeté en première lecture, le 29 septembre, par 228 voix contre 205.
Avec l'approbation par la Chambre, cette loi, qui donne des moyens historiques au Trésor américain
pour intervenir sur le secteur financier, est entérinée par le Congrès. L’objectif du plan est de donner à
l'État les moyens et l'autorité de racheter les actifs dépréciés des institutions financières mises à mal
par la crise des prêts immobiliers à risque, les «subprimes». Plus d'une douzaine de banques ont déjà
fait faillite aux États-Unis. Comment plus précisément les sommes du plan Paulson se répartissentelles pour l'instant ? 250 milliards ont été dépensés pour la recapitalisation bancaire : 125 pour les
grandes banques, 125 pour les banques régionales. 40 milliards de plus ont été dépensés pour
sauver l'assureur AIG. Il reste 60 milliards à allouer sur les 350 milliards de la première enveloppe du
plan. Pour les 350 milliards restants, il faut encore l'accord du Congrès pour les utiliser. Une partie des
sommes encore disponibles seront destinées à recapitaliser des institutions financières non bancaires
(ex : les assureurs) même si on ne peut pas encore dire qui en bénéficiera. Le plan Paulson ne
ressemble donc plus au plan initial qui avait été prouvé par le Congrès après de difficiles
négociations... En réalité du plan initial, il ne reste rien. On s'aperçoit que les critiques de nombreux
économistes qui prédisaient que l'on aurait des difficultés pour fixer un prix de rachat des actifs
toxiques par l'État étaient valables et que l'administration américaine les a sous-estimées. Henry
Paulson a donc été obligé de changer son fusil d'épaule
. Les plans européens Comme les États-Unis, l’Europe est confrontée aujourd’hui à son plus grave
danger depuis la seconde Guerre mondiale. Elle a le pouvoir de sauver ou de détruire l’économie de
27 Etats. C’est pourquoi les européens tentent de bâtir également des plans pour le rachat d'actions
de leurs banques. Dans l'esprit de leurs gouvernements, il est dit explicitement que les prises de
participations ne concerneront que les plus grandes banques et ne seront que temporaires. Les autres
banques sont destinées à être rachetées ou à tomber en faillite.
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Enfin, partout, on met en place des systèmes plus ou moins sophistiqués de garantie d’Etat sur les
crédits interbancaires afin de restaurer la confiance sur les marchés monétaires. Les Pays-Bas ont été
les premiers à avancer l'idée d'un plan de sauvetage européen, à l'image de celui de 700 milliards de
dollars mis sur pied par les Etats-Unis, chaque pays contribuant à hauteur de 3% de son Produit
intérieur brut. Mais le projet, qui a eu les faveurs de la présidence française de l'Union européenne, a
été immédiatement torpillé par l'Allemagne et la Grande-Bretagne, qui privilégient des solutions
nationales. Berlin, en particulier, ne veut pas avoir à payer la facture pour les problèmes bancaires
d'autres pays. 1 - Le plan de sauvetage. A la mi-octobre 2008, et après plusieurs semaines
d'atermoiements, le plan de sauvetage de l'économie européenne concocté par les 15 pays de la
zone euro a été péniblement entériné dans le cadre du Conseil européen, à Bruxelles, par les 27 pays
de l'Union. Ce plan prévoit d'allouer 1700 milliards d'euros afin de garantir le système bancaire
européen. Toutefois, les chefs d'État et de gouvernement européens n'ont pas atteint le consensus
sur l'ensemble du texte présenté pas le président en exercice du Conseil de l'Union européenne, le
Français Nicolas Sarkozy. Outre les 1700 milliards d'euros de garanties, le plan de sauvetage prévoit
la mise en place d'une « cellule de crise financière » qui coordonnera l'action de la présidence
tournante du Conseil de l'UE, de la Banque centrale européenne (BCE) et du président de
l'Eurogroupe. Afin de limiter l'influence de la fluctuation des marchés sur les bilans des banques, les
normes comptables seront par ailleurs revues. L'Union européenne accepte également l'idée d'une
réforme « réelle et complète du système financier international », telle que la France l'avait proposée.
Mais derrière cet affichage, les dirigeants européens ont sous-estimé les répercussions de la crise
financière sur le système bancaire du continent. Ils n’ont pas jugé utile un plan comme celui de
Paulson, préférant agir au cas par cas à travers des actions unilatérales, comme celles de l’Irlande, la
Grèce et l’Allemagne, potentiellement déstabilisantes. Les risques sont particulièrement graves dans
la zone euro : la BCE applique une politique monétaire unique mais elle ne peut pas jouer le rôle de
dernier recours. L’Union monétaire devrait rechercher normalement une harmonisation des politiques
budgétaires et une centralisation du contrôle financier. Ce qui actuellement n’est pas le cas. 2 - Le
plan de relance.
La Commission européenne a présenté, le 26 novembre 2008, un plan de relance économique de 200
milliards !, soit 1,5% du PIB de l'UE, faisant appel aux Etats membres (170 milliards !, soit 1,2% du
PIB), au budget de l'UE (14,4 milliards !) et à la Banque européenne d'investissement (15,6 milliards
!). Ce plan, destiné à coordonner les politiques des Etats membres, s'articule en 2 volets : un
"stimulus budgétaire" et des "investissements intelligents". Du côté du stimulus budgétaire, la
Commission invite les Etats membres à adopter des plans de relance et à appliquer le Pacte de
stabilité et de croissance et les règles en matière d'aides d'Etat avec souplesse, tandis que la
Commission facilitera les paiements relevant des fonds structurels et sociaux. Du côté des
investissements intelligents, elle propose des initiatives européennes en faveur des voitures vertes (5
milliards !), des bâtiments économes en énergie et des "usines de demain".
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La Commission a demandé au Conseil européen d'approuver ce plan les 11 et 12 décembre
prochains. La Commission européenne a surtout répondu à la demande des Etats membres en
annonçant qu'elle serait plus "flexible" face aux déficits nationaux, qui seront inévitables. En effet, le
Pacte de stabilité et de croissance prévoit un déficit annuel ne pouvant dépasser 3 % du PIB.
Cependant, il prévoit qu'en cas de "circonstances exceptionnelles", de déficit peut être plus important.
En reconnaissant le caractère exceptionnel de la crise, la Commission permet donc une application
plus souple de cette règle. Le commissaire en charge des Affaires économiques et monétaires a
cependant rappelé aux Etats membres que la Commission avait des "lignes rouges" à ne pas
dépasser, et qu'ils devaient respecter autant que possible le Pacte, et ce "pour les générations
futures". Au menu des prochaines réunions des ministres européens figurent les propositions de la
Commission européenne sur les fonds propres des banques. La rémunération des dirigeants pourrait
être aussi débattue, en raison des critiques qui se multiplient sur les « parachutes dorés ». Sera
également discuté, a affirmé le Premier Ministre anglais à l’issue du Sommet de Paris, l’octroi par la
Banque Européenne d’Investissement (BEI) d’une enveloppe de 31,5 milliards d'euros à destination
des PME. La réunion du G20 : bilan critique de la conférence Les principales mesures. Le sommet du
15 novembre du G20 s’est conclu par une déclaration faite d’affirmations de principe et de
déclarations d’intention. À cette déclaration est joint un plan d’action plus précis dont la mise en
œuvre est placée sous la responsabilité des ministres des Finances du G20. Un certain nombre
d’actions immédiates doivent en principe être engagées d’ici au 31 mars 2009. Les objectifs en sont
de « renforcer la transparence et la responsabilité, promouvoir une régulation saine, promouvoir
l’intégrité des marchés financiers, renforcer la coopération internationale et réformer les institutions
financières internationales ». Un deuxième sommet doit se tenir au mois d’avril 2009, normalement à
Londres, avec cette fois la participation du nouveau Président américain. C’est à ce moment-là qu’on
verra si un véritable consensus se dessine entre les grands pays et, surtout, si des actions sont
engagées dans le sens d’une véritable régulation du système financier international. Revenons au
contenu de la réunion du G20 à Washington, le 15 novembre 2008. Celle-ci s'est penchée à la fois sur
les causes de la crise financière actuelle, sur les mesures prises et à prendre, sur la situation qui
prévalait à la mi-novembre, sur les actions à entreprendre immédiatement, sur les principes communs
de la réforme des marchés financiers, sur l'engagement en faveur d’une économie mondiale ouverte,
enfin sur le plan d’action pour la mise en œuvre des principes de réforme
. Sur les causes de la crise, la déclaration est très lapidaire. Elle en identifie trois : - les acteurs des
marchés ont cherché à obtenir des rendements plus élevés sans évaluer les risques de façon
adéquate et sans faire preuve de la vigilance requise ; - les établissements financiers n’ont souvent
pas mis en œuvre des pratiques saines en matière de gestion des risques, les produits financiers sont
devenus de plus en plus complexes et opaques, rendant possible des effets de levier excessifs ; enfin, les superviseurs n’ont pas réussi à évaluer les risques qui s’accumulaient sur les marchés
financiers et à y répondre de manière adéquate, à suivre le rythme des innovations financières et à
prendre en compte les ramifications systémiques des mesures de régulation nationales. Après avoir
rappelées les mesures déjà prises, les participants au G20 tombent d’accord sur la nécessité d’une
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réponse politique plus large, d'abord en matière d'actions immédiates. Pour répondre aux défis de la
crise, il faut reconnaître l’importance du soutien que la politique monétaire, utiliser des mesures
budgétaires pour stimuler la demande interne, aider les économies émergentes et en développement
pour qu’elles puissent avoir accès au financement notamment à travers des facilites de liquidités du
FMI ; encourager la Banque mondiale et les autres banques multilatérales de développement d’utiliser
leurs pleines capacités en soutien de l’agenda de développement. Outre les mesures énoncées cidessus, le G20 souhaite mettre en œuvre des reformes destinées à renforcer les marches financiers
et les régimes de régulation afin d’éviter de futures crises. La régulation relève avant tout de la
responsabilité des régulateurs nationaux, qui constitue la première ligne de défense contre les
instabilités des marchés. Toutefois, nos marchés financiers sont d’envergure mondiale.
Il est donc indispensable d’intensifier la coopération internationale entre régulateurs, de renforcer les
normes internationales, où cela est nécessaire, et de veiller a leur application uniforme afin d’assurer
une protection contre les évolutions néfastes transfrontalières, régionales, et mondiales qui affectent
la stabilité financière internationale. Les politiques qu'il s'agit de promouvoir doivent répondre aux cinq
principes communs suivants. Renforcer la transparence en matière de
1- transparence sur les produits financiers complexes
2 - Favoriser une régulation garantissant que tous les marchés, produits et acteurs financiers soient
soumis à une régulation ou à une surveillance selon le cas (avec l'exercice d'une surveillance stricte
sur les agences de notation) Promouvoir l’intégrité des marchés
3 - financiers, notamment en prenant des mesures de protection contre les risques financiers illicites
issus de juridictions non coopératives et en promouvant l’échange d’informations, notamment en ce
qui concerne les juridictions qui ne se conforment pas encore aux normes internationales en matière
de secret bancaire et de transparence.
4 - Renforcer la coopération internationale, notamment sur les flux de capitaux transfrontaliers.
5 -Reformer les institutions financières internationales de matière à ce qu’elles reflètent mieux
l’évolution des poids économiques respectifs dans l’économie mondiale afin d’accroitre leur légitimité
et leur efficacité. Il est demandé par ailleurs aux ministres des finances de formuler des
recommandations supplémentaires dans les domaines suivants : • atténuation de la pro cyclicité dans
les politiques de régulation : • harmonisation des normes comptables, • en particulier pour les titres
complexes, • en période de tensions ; • renforcement des marchés des produits dérivés de crédit et
réduction de leurs risques systémiques, • y compris sur les marchés de gré à gré ; • révision des
pratiques en matière de rémunération en ce qui concerne les incitations à la prise de risques et à
l’innovation ; • et révision du mandat, • de la gouvernance et des besoins en ressources des
institutions financières internationales, • définition du champ d’action des institutions d’importance
systémique • et détermination de leur régulation et surveillance de façon appropriée. La déclaration se
poursuit par un vibrant appel en faveur d’une économie mondiale ouverte, fondée sur les principes du
libre marché, notamment : • l’Etat de droit, • le respect de la propriété privée, • l’ouverture des
échanges et des investissements, la concurrence entre les marchés et des systèmes financiers
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efficaces et régulés de manière adéquate. On ajoute qu'il faut éviter une régulation excessive qui
entraverait la croissance et exacerberait la réduction des flux financiers, y compris vers les pays en
développement. Enfin le G20 énonce le plan d’action pour la mise en œuvre des principes de réforme.
Il faut s'assurer que toutes les institutions financière d’importance systémique sont régulées de
manière appropriée, et que les dispositifs de cessation d’activités permettent une cessation
progressive et ordonnée des activités des grandes institutions financières complexes., que les
structures de rémunérations ne récompensent pas les rendements excessifs à court terme ou la prise
de risque. Les superviseurs doivent collaborer pour créer des collèges de surveillance pour toutes les
grandes sociétés financières transnationales afin de renforcer la surveillance des entreprises
transnationales. Les grandes banques mondiales devront se réunir annuellement avec leur collège de
surveillance afin de discuter de manière approfondie des activités et de l’évaluation des risques que
courent ces entreprises. Impasses et évaluation critique La volonté d’agir des gouvernements ne
pourra être véritablement évaluée que lors des prochaines rencontres internationales. L’argument de
l’impuissance ne pourra plus être en effet invoqué par eux
. Les peuples les ont vus, dans l’urgence, nationaliser des banques ou entrer à leur capital, renflouer
des compagnies d’assurance, imposer de nouvelles réglementations (par exemple, l’interdiction de la
spéculation à la baisse sur les valeurs financières décidée par les Autorités de marché britannique et
américaine). Pour ne rien dire des centaines et des centaines de milliards de dollars, d’euros, de livres
sterling, de francs suisses, de yens et de yuans mobilisés sous forme de garanties, de crédits,
d’apports en capital ou de plans de relance. Les opinions publiques accepteraient sans doute mal de
voir les gouvernements retourner à la passivité, alors qu’il s’agirait, en des temps redevenus plus
ordinaires, de réguler et de réglementer.
En effet, on a vu que des sommes considérables allaient à des secteurs et parfois à des acteurs qui
s’étaient montrés défaillants. Ils conçoivent que c’était inévitable pour écarter une banqueroute et
protéger les épargnants. Mais ils savent bien que les ressources publiques versées seront financées,
au bout du compte, par un accroissement de l’endettement public, lequel pèse sur le contribuable. Ils
ne veulent pas que tout cela ne serve à rien et que puisse se reconstituer une nouvelle bulle
financière. A la lumière des premiers travaux du G20 et de l'analyse qui vient d'être faits dans ce
rapport de la crise et de ses causes, il est possible maintenant de mettre en perspective les
propositions et d'en faire un premier examen critique. - La première observation touche le domaine
monétaire. Le G20 de Londres n'a manifestement pas cherché à aborder la question de la réforme du
système monétaire international, alors que l'une des causes fondamentales des dérèglements
financiers que l'on observe depuis plus de trente ans tient à la double libéralisation des taux de
change et des taux d'intérêt. Cette double libéralisation a été, comme on l'a montré, à l'origine de
bulles financières gigantesques à base de produits dérivés. Il faudrait donc profiter de cette crise pour
négocier et instaurer des rapports plus stables entre les principales zones monétaires, autour du
dollar, de l’euro, du yen et du yuan, par exemple. C’est dans ce sens que pourrait être rebâti un
système monétaire équilibré et stable. On sait que, depuis 1971, les Etats-Unis n’ont plus aucune
!
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obligation en ce qui concerne leur monnaie. Ils l’émettent et elle est forcément acceptée, puisqu’elle
sert de monnaie d’échange et de réserve internationale et qu’eux sont la première puissance
économique du monde. À l’extérieur, les différents pays doivent supporter l’appréciation ou la
dépréciation du dollar (avec des implications commerciales) en fonction d’une politique pour l’essentiel
définie à Washington. À l’intérieur, assurées de voir financés leurs déficits budgétaire et commercial
grâce aux capitaux replacés aux Etats-Unis par les pays pétroliers et la Chine, les autorités
américaines ont favorisé un endettement croissant des ménages américains. Cette politique a été
pratiquée jusqu’à l’absurde par l’administration Bush. Le « nouveau Bretton Woods » ne peut donc se
réduire à renforcer le rôle et les moyens du FMI dans l’architecture financière internationale. L’objectif
devrait être à terme de reconstruire, avec les pays émergents et les pays moins avancés, un nouvel
ordre monétaire mondial fondé sur une certaine stabilité des monnaies. Ainsi pourrait-on par exemple
réduire l’énorme marché des changes d’aujourd’hui. Il faut aussi agir dans le champ des produits
dérivés et sur la politique des taux d’intérêt
. Sans revenir à une politique de taux complètement administrés comme ce fut le cas longtemps,
après guerre, il faudrait pourtant mettre fin à la totale dérégulation d’aujourd’hui, qui livre la forte
instabilité des taux à la spéculation, sous prétexte de couverture. Cela suppose que les Etats et les
autorités de régulation reprennent la main. Des réformes de cette ampleur ne sont envisageables que
dans le cadre d’une réflexion d’ensemble sur l’économie globalisée. Or seconde observation, le débat
engagé au G20 devrait trouver son prolongement dans un cadre plus large encore, qui doit être celui
des Nations Unies.
Cette perspective n'est malheureusement pas encore à l'ordre du jour. En effet, au-delà du
redressement du système monétaire et financier, toutes les nations doivent aussi répondre aux défis
du développement durable et au scandale de la pauvreté et des inégalités dans le monde. Sur un plan
plus technique, troisième observation, il est possible que la crise entraîne un réexamen de la titrisation
et de ses procédés. Mais il n'est pas certain que cet examen soit approfondi et puisse ouvrir le débat
sur les fondements mêmes de ces opérations. Certes, il y a une discussion sur l'efficacité du modèle
de titrisation « originate-and-distribute » (octroi puis cession de crédits). Mais on peut penser que ce
modèle économique a tout simplement planté le décor de la crise financière, en créant notamment la
paralysie sur les marchés interbancaires précisément en raison de la méfiance engendrée par les
produits titrasses. Face à ce type d'observations, certains préconisent d'obliger ceux qui octroient des
prêts à détenir une proportion minimum des titres dans leur propre bilan. D'autres pensent, au
contraire, que ce système ne protégerait pas les banques contre un retournement du marché (par
exemple de l'immobilier résidentiel), ce qui les rendrait plus prudentes dans l'attribution des crédits et
en renchérirait le prix.
Des réformes dans ce sens résoudraient, disent-ils, les problèmes sur les marchés de titres, mais au
prix d'un risque accru pour le système bancaire et d'un surcoût pour les consommateurs. La vraie
difficulté tient en réalité à ce que les couches de dérivés (notamment les dérivés de crédit) s'empilent
les unes sur les autres. Il en résulte que les spécialistes, les investisseurs financiers, et même les
!
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agences de notation n'ont pas pu pleinement mesurer le risque induit par les produits structurés qui
ont été émis sur les marchés et achetés. Le débat sur les agences de notation quatrième observation,
est de ce fait peu soluble. Certes, les agences sont payées par ceux qu’elles notent et ne sont pas
supervisées. De plus, elles n’encourent pas de responsabilité en cas de mauvaise performance. Pour
certains, elles devraient être supervisées et leurs méthodes inspectées par les régulateurs. C'est
probablement ce qu'il faut souhaiter. Mais il faudrait surtout encourager une simplicité et une
transparence dans la conception même des titres financiers, ce qui va à l'encontre des tendances
actuellement à l'œuvre au sein de la finance globalisée. - La récente réunion du G20 à Pittsburg s’est
avérée très décevante. Elle annonce – sans formulation plus précise ou technique la révision des
normes en matière de fonds propres des banques et en matière de rémunération. Une très grande
latitude est ainsi laissée aux Etats pour interpréter cette formule très générale. Il est précisé ensuite
que les marchés de produits dérivés vont être davantage organisés (point 17 du communiqué) ; mais,
peut-on vraiment se satisfaire d’une réforme qui consiste finalement à mieux organiser la spéculation
?
Enfin, il est dit que la gouvernance du FMI va être revue, dans la limite de 5% des droits de vote (point
19) ; là aussi, on peut s’interroger sur les raisons d’une telle limitation, qui ne peut qu’aller à l’encontre
d’une véritable légitimation politique de l’institution. Pour aller plus loin dans ce sens, le débat engagé
au G20 devrait trouver son prolongement dans un cadre plus large encore, qui devrait être celui des
Nations Unies. Cette perspective n'est malheureusement pas encore à l'ordre du jour. En effet, audelà du redressement du système monétaire et financier, toutes les nations devraient pouvoir être
associées dans les réponses à apporter aux défis du développement durable et au scandale de la
pauvreté et des inégalités dans le monde. Sur le fond, deux grands sujets ont été absents de toutes
ces réunions internationales. • Ils sont parfaitement identifiables et sont probablement des clés
majeures pour transformer en profondeur les logiques folles de ce capitalisme financier : • le sujet
monétaire et le sujet de la valeur actionnariale. Pour reprendre une métaphore médicale, • le
traitement du premier relève plutôt d'une intervention chirurgicale car la zone problématique est
parfaitement circonscrite. Le traitement du second foyer, cancérigène, est beaucoup plus complexe,
car il a produit des métastases qui se sont déjà répandues un peu partout. 1. La virulence de la
question monétaire tient au départ à la double libéralisation des marchés monétaires ; libéralisation
des changes au début des années 1970, et libéralisation des taux d'intérêt au début des années 1980.
2. Comme on l’a examiné dans la première partie de cet article, pour protéger l'économie réelle de ces
deux chocs, une industrie financière de couverture des risques s'est développée. A la veille de la crise
des «subprimes», la sphère financière était devenue hypertrophique par le nombre de ces produits de
couverture et par le volume de leurs transactions : près de 40 fois supérieur au volume des
transactions de la sphère réelle.
Or, il n'y a pas de produits de couverture sans contrepartie spéculative. Et la spéculation se nourrit
aussi bien d'une bulle qui se forme, que d'une bulle qui éclate, puis se dégonfle. Voilà le facteur
hautement déstabilisant. La tumeur liée à l'hypertrophie de la finance globale n'aurait pas également
!
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pu se développer sans les effets de levier d'endettement gigantesques rendus souvent possibles par
les banques elles-mêmes, notamment en raison de leurs opérations hors-bilan. Les réunions du G20
laissent inchangées les logiques de formation des produits de couverture et donc de fonds spéculatifs.
Pourtant, quand on voit la composition des produits spéculatifs (pour l'essentiel, des produits de
couverture des taux de change et des taux d'intérêt), il suffirait de revenir sur le double mouvement de
libéralisation des marchés de la monnaie pour dégonfler, d'un seul coup, la sphère financière et
permettre aux acteurs de retrouver des horizons temporels longs pour leurs échanges internationaux
et leurs financements. Concrètement, cela revient à bâtir un nouveau système monétaire international,
en fixant des règles du jeu sur l'évolution des taux de change et des taux d'intérêt, bref à terme,
concevoir la monnaie comme un bien commun de l'humanité. Cela revient aussi à abandonner le
règne de l'étalon dollar, au profit dans un premier temps d’un panier de monnaie. Bref, une véritable
opération chirurgicale.
2. L’autre question qui déstabilise l'économie mondiale, se voit dans les pratiques liées à la valeur
actionnariale. Issue de lois fiscales américaine (loi Erisa, plan 401K), la gestion des fonds de pension
par capitalisation change du tout au tout durant les années 80. Elle devient beaucoup plus agressive
en raison de la concurrence que se livrent entre eux les principaux gestionnaires de fonds pour
récolter l'épargne retraite. De là naît la norme financière des 15% de retour sur investissement comme
gage de l'efficacité de leurs placements. Cette norme implique que les gestionnaires de fonds
deviennent hyper-exigeants, comme actionnaires, lorsqu'ils placent, par exemple, les ressources
qu'on leur a confié dans les firmes cotées en bourse. Derrière les formules de « valeur actionnariale »
ou de « création de valeur pour les actionnaires », il faut naturellement y voir l'emprise croissante des
investisseurs institutionnels sur la gestion de l'entreprise et sa financiarisation. La « nouvelle
gouvernance » des firmes apparaît alors en Grande Bretagne au début des années 90 et dans le
reste de l'Europe ensuite. Les pratiques de la valeur actionnariale ont changé complètement le visage
des firmes, leur gestion et leur organisation. En effet, l'exigence d'une rentabilité financière fixée a
priori implique un transfert de risque massif sur la gestion de l'entreprise qui se voit contrainte
dorénavant à une obligation de résultat. Qui plus est à un niveau tout à fait redoutable. Le résultat sur
la relation de travail est considérable. L'organisation du travail, le marché du travail s'en trouvent
bouleversés. Les pratiques de flexibilisation, d'externalisation, de délocalisation se multiplient. La
pression financière sur le monde du travail devient telle que les dépenses de santé augmentent de
façon nette ; puis sont venues les plans sociaux alors même que les firmes dégagent des profits ou
encore les « licenciements boursiers ». Faire du profit n'est plus suffisant. Il faut maintenant atteindre
la norme exigée par les nouveaux actionnaires. On le comprend, ces nouvelles pratiques sont
intenables ; elles ont été à l'origine de la déformation de la valeur ajoutée au détriment des salaires
durant les années 90. Elles sont à la source des inégalités de revenu criantes que l'on observe
aujourd'hui. Aucune trace de ces questions ne figure dans la déclaration finale du G20. Les pratiques
liées à la valeur actionnariale et à la nouvelle gouvernance des firmes touchent l'ensemble des firmes
qui sont cotées dans les différentes places financières du monde. Mais, les grands investisseurs
!
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s'intéressent de plus en plus aux entreprises non cotées. Mais là, comme le risque apparaît plus
grand, l'exigence de rentabilité passe à un niveau nettement supérieur, de l'ordre de 25%..
. Ne peut-on pas penser que l'extension de cette logique effrayante à un nombre immense
d'entreprises est analogue à une prolifération de type cancérigène ? Quels sont les moyens pour lutter
contre cette prolifération ? La réponse à cette question est redoutable, car ici, il n'y a pas de solutions
miracles. Certes, il faudrait que les Etats-Unis acceptent de revenir sur leurs lois fiscales, mais il très
probable que le lobby des grands investisseurs s'y opposerait de toute ses forces. D'autres pistes
mériteraient d'être explorées. Indiquons-les rapidement. Tout d'abord, la consolidation des secteurs
mutualistes, coopératifs et associatifs en les aidant à retrouver leurs principes fondamentaux de
solidarité. Ensuite, la transformation des sociétés de capitaux actuelles en véritables firmes
alternatives partenariales dont il faudrait élaborer les principes de gouvernance, d'attribution des droits
de propriété et de répartition des résultats. Enfin, proposition en apparence iconoclaste, mais dont on
peut assez facilement justifier le principe : la suppression des bourses actions. Celles-ci en effet ne
sont plus depuis longtemps pourvoyeuses de capitaux nouveaux. Chronologie des principaux
événements Année 2007 14–22 juin Selon des rumeurs, deux fonds alternatifs investis en titres
adossés à des prêts hypothécaires de moindre qualité "subprime", gérés par Bear Stearns, auraient
subi de lourdes pertes et $3,8milliards d’obligations seraient mises en vente pour financer des appels
de marge. Il est confirmé par la suite que l’un des fonds est maintenu grâce à l’injection de capitaux, le
second devant, en revanche, être liquidé. 10–12 juillet S&P met sous surveillance négative
$7,3milliards d’ABS série 2006 garantis par des prêts au logement et met sous surveillance des
opérations de CDO exposées à ce type de sûreté; Moody’s déclasse $5milliards d’obligations
adossées à des hypothèques supprime et place 184tranches de CDO adossés à des hypothèques
sous surveillance en vue d’un possible déclassement. Fitch met sous surveillance négative 33classes
de 19CDO structurés. 30 juillet–1er août En Allemagne, la banque IKB annonce des pertes liées aux
"supprime" et révèle s’être tournée vers son principal actionnaire, Kreditanstalt für Wiederaufbau
(KfW), pour s’acquitter de ses engagements financiers dans le cadre de lignes de crédit liées à une
structure d’émission de papier commercial adossé à des actifs (ABCP) exposée aux "subprime". Un
fonds de secours de !3,5milliards est constitué par KfW et un groupe de banques des secteurs public
et privé. 31 juillet–9 août American Home Mortgage Investment Corp. annonce son incapacité à
financer ses obligations de prêt puis demande, une semaine plus tard, à bénéficier du chapitre11 de la
loi sur les faillites. Union Investment, un gestionnaire de fonds allemand, interrompt les retraits de l’un
de ses fonds
. Trois programmes ABCP, dont un lié à American Home, allongent l’échéance de leurs emprunts, fait
sans précédent. BNP Paribas gèle les rachats sur trois fonds de placement, invoquant une incapacité
à procéder à une évaluation appropriée des actifs en raison du contexte. 9–10 août La BCE injecte
!95milliards de liquidités sur le marché interbancaire, marquant le début d’une série d’interventions
exceptionnelles des banques centrales. La Réserve fédérale procède à trois appels d’offres
exceptionnels de fonds au jour le jour pour un total de $38milliards et publie un communiqué
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#&!
comparable à celui de la BCE. 13–17 septembre Northern Rock, banque britannique spécialisée dans
le crédit immobilier, connaît des problèmes de liquidité qui provoquent une fuite des épargnants et
l’annonce de l’instauration, par le gouvernement britannique, d’une garantie des dépôts. 18
septembre– De grands établissements financiers font état de dépréciations successives et de pertes 4
novembre trimestrielles. Plusieurs dirigeants d’établissement quittent leur poste dans le cadre d’une
réorganisation de la haute direction. 11–23 octobre Moody’s déclasse quelque 2500titres subprime
émis en 2006, suivi par S&P. S&P met en outre sous surveillance négative 590CDO et déclasse
145tranches de CDO représentant un total de $3,7milliards ; la même semaine, Moody’s baisse la
note de 117tranches de CDO, Fitch place quelque $37milliards de CDO sous revue. 24 octobre–
Plusieurs organismes de garantie financière déclarent des pertes au troisième 5 novembre trimestre;
Fitch annonce son intention de revoir à la baisse la note AAA de certains rehausseurs de crédit. 12
décembre Les banques centrales de cinq zones monétaires annoncent une action concertée destinée
à fournir à de nombreux établissements financiers les liquidités nécessaires pour passer le
changement d’année. 19 décembre L’organisme de garantie financière ACA est déclassé de A à CCC
par S&P, ce qui provoque des appels de garantie de la part de ses contreparties, avec lesquelles
plusieurs périodes de report sont négociées au cours des mois suivants. S&P fait passer de «stable»
à «négative» la perspective d’autres rehausseurs de crédit. Suggère que les marchés ont accordé
davantage d’importance aux risques d’une augmentation soudaine des taux de défaut. La stabilité
relative des primes implicites dans les contrats à terme pour les échéances plus lointaines montré,
pour sa part, que ce risque supplémentaire était en grande partie anticipé sur le court terme
(graphique VI.1, cadres du milieu et de droite). Dans le même temps, à leurs sommets de mars 2008,
les primes CDS à haut Année 2008 2–4 janvier La faiblesse de l’indice d’achat PMI et du marché de
l’emploi révèle un ralentissement marqué de l’économie américaine et suscite des craintes quant à la
croissance mondiale. 14–31 janvier La BCE, la Banque nationale suisse et la Réserve fédérale
procèdent à de nouvelles opérations de financement à long terme en dollars
. 15 janvier Citigroup annonce des pertes au quatrième trimestre, du fait, en partie, de nouvelles
dépréciations à hauteur de $18milliards sur des positions liées à des titres hypothécaires. D’autres
établissements financiers communiquent par la suite des informations similaires. 18–31 janvier Fitch
rabaisse de deux crans (de AAA à AA) la note du rehausseur de crédit Ambac, avant de ramener les
rehausseurs SCA et FGIC à respectivement A et AA. Quelque 290000 émissions assorties d’une
garantie financière, essentiellement des obligations de collectivités territoriales, sont alors déclassées.
Plus tard, S&P rabaisse FGIC à AA. Au cours des semaines suivantes, les trois grandes agences de
notation interviennent de nouveau sur la note des rehausseurs de crédit. 21–30 janvier Dans un
contexte de faiblesse généralisée des marchés des actions et de la dette, la Réserve fédérale abaisse
de 75pb son taux directeur hors réunion du comité de politique monétaire. Elle procède à une
réduction supplémentaire de 50pb la semaine suivante. 24 janvier La Société Générale découvre la
fraude d’un trader qui fait perdre 4, milliards d’euros à la banque 17 février Nothern Rock est
nationalisé 28 février– Peloton Partners annonce la liquidation d’un fonds ABS de $2 milliards 7 mars
Le fonds d’obligations hypothécaires de Carlyle Group s'avère incapable de répondre aux appels de
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marge, ce qui entraîne la suspension de sa cotation sous la pression des investisseurs requérant la
vente de certains avoirs. Les tensions se propagent sur les marchés des emprunts d’État européens,
avec une forte différenciation de liquidité entre émetteurs et segments de marché. 7–16 mars La
Réserve fédérale annonce une hausse de $40 milliards des montants alloués à son nouveau dispositif
d’adjudication (Term Auction Facility). Quelques jours plus tard, elle étend son activité de prêt de titres
par une facilité à terme (Term Securities Lending Facility) de $200 milliards grâce à laquelle il est
possible d’emprunter des titres du Trésor contre un large éventail d’actifs éligibles. Plus tard dans la
semaine, elle annonce une nouvelle facilité de crédit aux intermédiaires spécialisés (Primary Dealer
Credit Facility), qui octroie des prêts comparables à l’escompte. Certaines banques centrales
annoncent d’autres initiatives, parmi lesquelles de nouvelles adjudications de crédits en dollars. 14–17
mars Bear Stearns, dans l’incapacité de reconduire des pensions, est à court de liquidités. Elle obtient
un emprunt d’urgence au guichet de l’escompte avant d’être rachetée par JPMorgan. 2 mai La BCE,
la Banque nationale suisse et la Réserve fédérale annoncent une nouvelle extension des opérations
d’apports de liquidité en dollars. Juillet Le cœur du système immobilier américain est atteint avec les
deux mastodontes de la titrisation hypothécaire, Fannie Mae et Freddie Mac qui sont nationalisés
début septembre
. 31 août Allianz vend Dresdner bank à Commerzbank 7 septembre Plan de sauvetage de 200
milliards de dollars pour Fannie Mae et Freddie Mac 15 septembre Faillite de Lehman Brothers et
rachat de Merill Lynch par Bank of America 17 septembre Nationalisation de AIG (premier assureur
mondial) Llyods TSB achète HBOS pour 30 milliards de livre 22 septembre Goldman Sachs et Morgan
Stanley deviennent des banques commerciales 29 septembre Les trois Etats du Bénélux injectent
11,2 milliards d’euros pour prendre 49% de Fortis 30 septembre 6,4 milliards d’euros sont injectés
dans Dexia par la France et la Belgique, mais aussi par trois régions belges ainsi que de grands
actionnaires 5 octobre BNP Paribas annonce la reprise de Fortis hors Pays Bas pour 14,5 milliards
d’euros 8 octobre Nationalisation partielle de RBS, Llyods TSB et HBOS 15 novembre Réunion du
G20 à Washington. 11 décembre Bernard Madoff est arrêté pour avoir monté une fraude estimée à 50
milliards de dollars 12 décembre La justice belge bloque la vente de Fortis à BNP Paribas en suivant
l’action de petits porteurs 16 décembre La Fed baisse son taux directeur à 0,25% Terminologie de la
titrisation L’avantage supposé d’une opération de titrisation est de permettre au détenteur des
créances sous-jacentes de refinancer celles-ci. On va donc trouver des actifs typiquement illiquides,
par exemple des créances sur des particuliers, impossibles à céder directement car chacune est
spécifique et nécessite un traitement administratif. On va chercher aussi des créances de petits
montants, comme des crédits à la consommation, dont chacune individuellement génère de faibles
revenus (à l’échelle d’un investisseur institutionnel en tous cas !) mais qui mises toutes ensemble
constituent un panier global d’une valeur suffisante. Un des premiers usages de la titrisation est donc
de créer un actif négociable, et donc un marché, à partir d’actifs qui ne le sont pas. Au début du
processus de la titrisation, une compagnie (« originateur ») décide de vendre un certain groupe de ces
titres. Ce groupe d'actifs est mis en commun et vendu à une entité légale externe -- véhicule ad hoc
dédié (SPV : Special Purpose Vehicle). Cette entité (SPV) émet des titres qui, après évaluation par
!
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une agence de notation, seront placés auprès d'investisseurs. Mais la terminologie liée aux opérations
de titrisation est multiple. Il se peut d’ailleurs qu’étant donné le tarissement actuel des opérations de
titrisation, certains de ces termes tombent rapidement dans l’oubli. Tout d’abord le terme ABS (AssetBacked Securities) lui-même est porteur d’une certaine ambiguïté : par commodité, il est utilisé pour
désigner l’ensemble des titres issus des titrisations, puisque après tout c’est bien ce que le nom veut
dire. Mais c’est un faux ami
. En fait on devrait utiliser le terme d’ABS pour tout ce qui n’est pas rattaché aux créances
hypothécaires, ce qui donne deux catégories (entre parenthèses la nature des actifs sous-jacents)
pour les titres à moyen-long terme, auxquelles s’ajoute une troisième catégorie, celle des titres à court
terme : 1 - MBS : Mortgage Backed Securities, titrisation de créances hypothécaires, dont : *RMBS :
Residential Mortgage Backed Securities (crédits hypothécaires aux ménages) *CMBS : Commercial
Mortgage Backed Securities (crédits hypothécaires aux entreprises) 2 - ABS : titrisation de tout autre
type d’actifs. * CBO : Collateralized Bond Obligation (obligations) * CLO : Collateralized Loan
Obligation (prêts bancaires) * CDO : Collateralized Debt Obligation (actifs divers, généralement non
hypothécaires) ; la particularité des CDO est d’être structurés en « tranches » de niveau de risques
croissant. 3 - ABCP : Asset-Backed Commercial Paper : titres à court terme garantis par des créances
commerciales L’entité initialement détentrice des créances (l’originateur) commence par vendre
celles-ci à une entité juridique spécialement créée pour protéger les investisseurs finaux du risque
face à l’émetteur des créances, le SPV (Special Purpose Vehicle), aussi appelé « conduit ». Selon les
cas, le SPV revend ensuite le pool de créances à un « trust » qui émet les titres (le trust est en fait
utilisé pour plusieurs opérations de titrisation et chapeaute donc plusieurs SPV), soit émet directement
les titres. Le SPV est plus une enveloppe juridique qu’un élément réellement actif dans l’opération. Le
rôle déterminant est joué par l’arrangeur, généralement une banque, qui va mettre en place
l’opération, évaluer le pool de créances et la façon dont celui-ci sera alimenté, les caractéristiques des
titres à émettre, la structuration éventuelle du fonds. La structuration a pour objectif de modeler les
caractéristiques des titres en fonction des besoins des investisseurs finaux : au lieu de se contenter
de leur reverser les revenus générés par les créances, on va définir à l’avance les règles
d’amortissement du titre. Certains ABS sont dits « rechargeables » c’est-à-dire que le pool de
créances peut être réalimenté en cours de vie du titre. Cela permet de refinancer par des obligations à
long terme des créances (comme les encours de carte de crédit) à court terme. Enfin l’arrangeur joue
un rôle important dans le placement des titres auprès des investisseurs finaux (la distribution). Bien
souvent les titres ne sont pas émis sur un marché négociable mais placés de gré à gré auprès de
quelques investisseurs. L’ensemble : originateur – SPV – arrangeur constitue le modèle « originate to
distribute » (OTD) qui a connu un succès considérable au cours des dernières années
. Il y a une distinction importante à faire entre les montages « classiques » de titrisation, où les
créances sont effectivement cédées au SPV (« true sale »), et les titrisations dites « synthétiques »,
où l’originateur reste propriétaire des créances mais n’en cède que les risques au SPV, via un dérivé
de crédit. Cette opération ne rapporte pas de liquidité au cédant mais lui permet d’externaliser les
!
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risques liés à la détention des actifs titrisés. Tous les ABS sont des titres de nature « obligataire »
donc représentatifs d’une créance, à durée de vie limitée et distribuant des revenus calculés suivant
des règles connues à l’avance (mais pas nécessairement garantis pour autant !). Au-delà de cela,
toutes sortes de profils de calcul des coupons et des remboursements sont possibles. L’unique source
de revenu du SPV, qu’il va pouvoir redistribuer aux investisseurs, réside dans les revenus générés par
les créances sous-jacentes : ceux-ci sont de deux natures, des paiements d’intérêt d’une part, des
remboursements de capital d’autre part. On va donc assez naturellement affecter les collectes en
intérêts au paiement des intérêts sur les titres émis, et les collectes en capital au remboursement des
titres. Historique de la titrisation La titrisation des actifs a débuté aux États-Unis dans les années
1970. Auparavant, les banques prêtaient à des clients et conservaient les portefeuilles de prêts
jusqu'à l'échéance, en les finançant par les dépôts de leurs clients. L'envolée du crédit après la
seconde guerre mondiale contraint les banques à trouver de nouvelles ressources, en particulier avec
des débuts de titrisation, d'abord appliqués aux prêts immobiliers puis de plus en plus élargis à
d'autres produits. En février 1970, le département américain au logement et au développement urbain
effectue la première véritable titrisation sur des prêts immobiliers. Le marché se développa par l'ajout
d'améliorations successives comme l'utilisation de Fonds commun de créance connu sous le nom de
« Special Purpose Vehicle » (SPV) qui sont montés pour assurer une dé corrélation de risque entre
les risques portés par les titres issus de l'opération de titrisation et vendus aux investisseurs et les
risques portés par l'établissement cédant les actifs sous-jacents de l'opération de titrisation. Cela a
permis en 1985 la titrisation pour la première fois d'un actif autre qu'un portefeuille de crédits
immobilières, des crédits pour l'achat de voiture en l'occurrence. L'opération de 1985 était une
titrisation d'un montant de 60 millions de dollars effectuée par le Marine Midland Bank. En 1986, eut
lieu la première titrisation d'un portefeuille de crédits de cartes bancaires, pour un montant de 50
millions de dollars
. En 1987, dans le cad
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