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LE KERATOCONE
Qu’est ce que le kératocône ?
Une déformation évolutive de la cornée responsable d’une myopie
et d’un astigmatisme irrégulier
Le kératocône est une maladie déformante de la cornée qui perd
progressivement sa forme normalement sphérique (en ballon de football) pour
prendre localement la forme d’un cône de plus en plus cambré («pointe » du ballon
de rugby).
Cette déformation progressive, non inflammatoire, entraîne une myopie et un
astigmatisme. L’évolution peut se faire vers l’apparition d’un astigmatisme irrégulier
pouvant s’accompagner d’une baisse de la fonction visuelle sur 20 ou 30 ans.
Tant que l’astigmatisme est régulier, ceci nécessite une simple correction
optique par verres de lunettes.
Lorsque l’astigmatisme devient irrégulier, parfois au bout de plusieurs années,
et en cas de correction insuffisante par lunettes, des lentilles de contact peuvent
devenir nécessaires. Il s’agit alors de lentilles spécifiquement adaptées par un
spécialiste. Plutôt que les lentilles souples hydrophiles, qui ne peuvent corriger la
déformation de cornée, on peut utiliser des lentilles rigides, composites (souple et
dures type « Janus ») ou superposées (une lentille rigide sur une lentille souple) en
adaptation « piggy back ».
Beaucoup plus rarement, l’intolérance progressive aux lentilles de contact du
fait d’une déformation extrême, requiert la réalisation d’une chirurgie de la cornée,
laser excimer thérapeutique, anneau intra-cornéen, photopolymérisation à la
riboflavine / UVA ou plus tardivement, greffe de la cornée, lamellaire profonde
prédescemetique ou perforante.
Une affection très fréquente,
La prévalence (nombre de cas dans la population) varie de selon les étude 50
à 230/100 000 habitants. Cependant, des chiffres extrêmes ont été publiés, allant de
4/100 000 voire à 600/100 000.1-9
Le chiffre le plus fréquemment retenu est de 1/2 000 (0.05%) en France avec
une prévalence allant jusqu'à 11 % chez les myopes candidats à la chirurgie
réfractive.
Environ 50% des apparentés au premier degré des sujets porteurs d’un
kératocône présentent des anomalies de la topographie cornéenne.
Ces discordances peuvent être expliquées par
- La variation de l'incidence selon les pays (fréquent au Japon)
- Par la différence des critères diagnostiques du kératocône selon les auteurs.
- Par la différence de sensibilité des tests de dépistage
Nous avons étudié par topographie cornéenne de courbure
(vidéokératoscopie) la prévalence du kératocône chez les appelés du contingent
âgés de 18 à 22 ans. Nous avons retrouvé selon des critères classique (index de
Maeda-Klyce) une prévalence de 1.19% sur un groupe de 690 sujets (Assouline,
Santiago et coll).
Cette affection peut être latente de nombreuses années. La majorité des cas
sont détectés chez l’adulte jeune (82% avant l’âge de 40 ans).
Une des principales causes de greffe de la cornée
Le kératocône est une affection fréquente, bénigne dans la grande majorité
des cas, mais qui représente l’une des premières causes de greffe de la cornée en
France, en Europe et aux Etats-Unis (entre 20 et 40% des greffes de cornée).
La probabilité d’avoir à subir une greffe de cornée en cas de kératocône peu
évolué diagnostiqué à l’âge adulte est cependant extrêmement faible.
Le kératocône : une maladie rarement invalidante et
exceptionnellement responsable de cécité
Une étude de l’impact du kératocône détecté après incorporation sur la
carrière des aviateurs de l’armée américaine a montré que cette affection avait une
faible probabilité d’induire un handicap visuel significatif, de nature à affecter le
déroulement des activités professionnelles de ces sujets.
L’évolution rapide et invalidante du kératocône est plus fréquente si
- le début est précoce (avec la fin de la puberté)
- il existe une forte asymétrie entre les deux yeux
- l’évolution est initialement rapide
- il existe un facteur allergique
- il existe un facteur microtraumatique
Le kératocône ne peut, en principe, aboutir spontanément à la perforation de
la cornée et n’est pas considéré comme une affection comportant un risque
classique de cécité.
Cependant, les complications potentielles de son évolution peuvent aboutir
dans des circonstances exceptionnelles à une perte significative de la vision. On
peut en particulier citer parmi ces complications graves :
- l’infection sévère de la cornée sous lentille de contact
- le décollement de rétine (comme chez tous les myopes),
- les complications opératoires sévères lors de la greffe de cornée
- le rejet définitif de la greffe de cornée
- les conséquences d’une contusion oculaire sévère sur greffe de cornée
La prise en charge du kératocône doit de ce fait être confiée à des praticiens
très spécialisés et compétents.
La cause du kératocône demeure inconnue
Cette affection est probablement d’origine génétique, mais la nature assez
complexe de son mécanisme n’a pas été élucidée.
Il n’est pas actuellement établi si le kératocône est une «dystrophie »
(synthèse de matériel anormal par le tissu cornéen) ou une «dégénérescence »
(vieillissement anormal du tissu cornéen)
Cinq facteurs sont couramment cités et étudiés par de nombreuses équipes de
recherche:
- le caractère génétique (hérédité, anomalies chromosomiques),
- l’allergie générale ou oculaire (maladie atopique, kérato-conjonctivite printanière)
- les microtraumatismes mécaniques
- les anomalies du tissu cornéen
- l’amincissement cornéen (chirurgie de la myopie par Lasik)
Aspects génétiques
Le rôle de l'hérédité a été suggéré par l'observation de nombreux cas
familiaux, représentant 6 % à 50% des cas selon la méthode de diagnostic utilisée.
7, 8, 24-63
Néanmoins, il est difficile devant une atteinte familiale de faire la part entre
l'hérédité et l'action de facteurs de risques communs sur les membres d'une même
famille.
Certaines anomalies chromosomiques comme la trisomie 21 (mongolisme)
sont associée plus fréquemment au kératocône. Environ 5 à 15 % des sujets
trisomiques 21 présentent un kératocône.
Le mode de transmission autosomique dominant à pénétrance variable parait
actuellement le plus probable. La pénétrance serait de 20 % selon HAMMERSTEIN,
d'après une étude portant sur 56 familles soit 236 patients.
En s'appuyant sur ces données on évalue le risque d'atteinte pour la
descendance à moins de 10 % lorsque l'un des deux parents est porteur d'un
kératocône.
Les études récentes d’analyse de liaison génétique ont suggéré l’implication
des chromosomes 21, 16, 17 et 18.
Aucun gène responsable n’a pu être identifié pour l’instant. Plusieurs gènes
différents pourraient être impliqués dans l’apparition du kératocône dans des familles
différentes.
Rôle de l’allergie
L'allergie (maladie atopique) est observée dans 7 % des cas de kératocône,
une incidence bien supérieure à celle retrouvée dans la population générale.
Facteurs mécaniques
Il repose sur la fréquence qui semble accrue de façon significative du
kératocône dans les cas où la cornée subirait des agressions mécaniques.
Frottement oculaire
Les antécédents de frottement oculaire sont fréquemment signalés dans la littérature
avec une prévalence évaluée entre 66 et 73 %.
Une étude montre que la déformation de la cornée est plus accentuée du côté de la
main dominante...
Floppy eyelid syndrome
Ce syndrome d'éversion palpébrale se voit chez les patients obèses dormant
sur le ventre. Il s'agit d'une hyperlaxité tarsale de la paupière supérieure qui est
éversée et recouverte de papilles conjonctivales. Le kératocône peut se développer
chez ces patients.
Mesure de la pression intraoculaire
Dans le kératocône, la résistance mécanique de la cornée est moindre, ce qui
peut fausser la mesure de la pression intraoculaire et le dépistage du glaucome. En
particulier, la mesure de la pression par tonometrie à air pulsé est plus basse que la
mesure par applanation Goldman si la cornée est plus fine. 139
Anomalies du tissu cornéen
Histopathologie
Les modifications de la structure de la cornée observées à l’échelon
microscopique ou ultrastructural sont bien identifiées. 10-23 Le principal problème
posé par l’histopathologie du kératocône est qu’il est actuellement impossible de
déterminer si les modifications observées à un stade tardif (plicatures en « z » ou
rupture de la couche de Bowman, notamment sont primitives (à l’origine de la
maladie) ou secondaires à la déformation de la cornée
Biochimie
De même que pour l’histopathologie, il est actuellement impossible de
déterminer si les modifications biochimique observées à un stade tardif dans les
cornées de kératocônes avancés prélevées à l’occasion de la greffe sont primitives
(à l’origine de la maladie) ou secondaires à la déformation de la cornée, à la
cicatrisation ou à l’inflammation oculaire d’origine allergique.
Le kératocône serait plus fréquemment rencontré au cours de certaines
maladies du tissu conjonctif. Une anomalie du métabolisme tissu cornéen
(collagène ou protéoglycanes) est peut-être en cause.
Associations pathologiques
-
Plus de 70 affections ont été liée au kératocône, parmi lesquelles :
l’allergie
l’amaurose congénitale de Leber
la maladie de Marfan
le prolapsus de la valve mitrale
le syndrome d’Ehlers-Danlos
Comment faire le diagnostic du kératocône ?
Le diagnostic est facile à un stade avancé
Circonstances habituelles de découverte
L’astigmatisme irrégulier évolutif est la principale circonstance de découverte
du kératocône. L'astigmatisme myopique irrégulier peut être détecté par
l’ophtalmologiste au moyen de différentes méthodes.
En particulier, l’apparition, la modification, ou l’asymétrie de la myopie ou de
l’astigmatisme après l’âge normal de stabilisation (fin de la croissance du globe
oculaire soit 18 à 35 ans selon le sexe et le degré de myopie) en l’absence de
modification significative de la longueur axiale de l’oeil mesurée sur l’échographie
sont très évocatrices.
Critères cliniques
Les méthodes classiques, moins performantes, suffisent pour les cas
avancés.
La rétinoscopie consiste à observer le reflet de la lumière projetée sur le fond
d’œil au travers de la pupille. On remarque dans le kératocône une distorsion du
reflet rouge du fond d'œil, pouvant donner naissance à un effet de ciseau : le reflet
lumineux, au lieu d'être distribué de façon régulière, a un centre sombre qui le divise
en deux branches.
La kératométrie manuelle à l’ophtalmomètre de Javal-Helmoltz est de moins
en moins pratiquée. À un stade avancé, les mires sont inégales, elles ne sont pas
situées dans le même plan de la cornée, elles sont considérablement déformées et il
est pratiquement impossible de mettre leurs axes dans le prolongement l'un de
l'autre.
L'examen opthalmologique détecte des signes caractéristiques
L’examen à l’œil nu de la cornée montre 2 signes typiques dans les cas très évolués
signe de Munson : dans le regard vers le bas le cône déforme la marge de la
paupière inférieure
signe de Rizzutti : lorsque l’on éclaire latéralement la cornée, la focalisation de
la lumière se projette sur la surface de la cornée et non pas au delà du limbe sclérocornéen comme dans une cornée normale.
L’examen de la cornée au biomicroscope (lampe à fente) permet d’observer les
signes typiques des formes évoluées :
- Les stries cornéennes de Vogt sont profondément situées dans le stroma cornéen
postérieur, juste en avant de la membrane de Descemet. Ce sont des lignes de
contrainte, verticales, obliques, fines, qui disparaissent lorsque l'on exerce une
pression externe sur le globe. Elles sont généralement alignées le long du méridien
de plus grande courbure.
- Les lignes cicatricielles superficielles intéressent le stroma antérieur au sommet du
cône. Elles ont souvent un aspect réticulaire au début. Elles résultent d’une
métaplasie fibreuse (migration de cellules kératocytaires fibroblastiques au travers
des ruptures de la couche de Bomwan)
- Dans les cas les plus avancés, des opacités plus profondes peuvent être vues au
sommet du cône : elles résultent de la cicatrisation des ruptures de la membrane de
Descemet.
- Une ligne annulaire de dépôts de fer (ferritine) dans les couches basales de
l’épithélium peut aussi s'observer autour de la base du cône. Celle-ci résulte de la
stagnation du film lacrymal à ce niveau et de l’imprégnation progressive des couches
superficielles de la cornée par la ferritine contenue dans les larmes.
- La visibilité anormale des nerfs cornéens est un signe inconstant et non spécifique.
Le dépistage des formes débutantes, essentiel avant chirurgie de la
myopie au Lasik reste très complexe
Il n’existe pas de critère permettant d’exclure un kératocône débutant
Le dépistage précoce du kératocône se heurte en pratique à l’absence de
critère unique, génétique, morphologique ou biochimique, permettant d’en affirmer le
diagnostic.
Le diagnostic précoce se base sur l’analyse de la forme de la cornée par la
topographie cornéenne. On observe notamment une déformation évolutive de la
cornée qui devient plus bombée et plus mince que la normale. Le bombement de la
face postérieure de la cornée, détecté par la topographie Orbscan est plus précoce.
Il est certainement illusoire d’exclure un kératocône latent sur la base d’un
examen de topographie de courbure unique, tant les formes de passage entre
cornée normale et pathologique paraissent constituer un continuum morphologique
(Assouline & Lebuisson 1999), (Assouline 2001).
La topographie de courbure cornéenne est l’examen le plus fréquent
L’examen le plus couramment pratiqué est la topographie cornéenne fondée
sur la technique de Placido. Cette méthode permet d’obtenir une cartographie de la
courbure cornéenne en fonction de la distance mesurée entre des mires lumineuses
circulaires concentriques projetées sur le film lacrymal.
L’étude morphologique de cette carte de courbure de la face antérieure de la
cornée révèle des anomalies assez caractéristiques en cas de kératocône
modérément avancé et notamment :
- kératométrie élevée (> 47 D)
- asymétrie et déformation des semi méridiens définissant un astigmatisme irrégulier
- asymétrie verticale de la cornée (cornée inférieure plus cambrée)
- asymétrie de courbure ou de forme entre les deux yeux
- gradient de courbure plus marqué que la moyenne entre le centre et la périphérie
ou présence d’une zone cornéenne hyperprolate (cambrure focale excessive)
- déplacement du point le plus cambré en temporal inférieur (inconstant)
- pseudo aplatissement para central en cas de forme très périphérique
(dégénérescence marginale pellucide).
De nombreux indices ou algorithmes plus ou moins sophistiqués ont été
développés au cours des 15 dernières années pour tenter de discriminer
objectivement les topographies de courbure cornéenne de type kératocôniques des
formes normales.
Cette méthode n’est pas très performante pour le diagnostic des formes très
précoces.
La topographie d’élévation cornéenne est la méthode la plus
performante
Une nouvelle méthode d’examen de la topographie cornéenne d’élévation
(Orbscan) tend actuellement à s’imposer comme la référence clinique.
La topographie d’élévation mesure la forme exacte des faces « avant »
(antérieure) et « arrière » (postérieure) de la cornée en micron par rapport à une
sphère de référence.
Ceci est particulièrement utile car la déformation de la face postérieure de la
cornée (non analysée par la topographie de courbure) apparaît probablement avant
celle de la face antérieure. La topographie Orbscan permettrait donc un diagnostic
du kératocône à un stade plus précoce.
De nouveaux critères de détection du kératocône infraclinique (forme « fruste
» ou kératocône latent ou stade « 0 ») basés sur cette topographie ont été proposés:
- critère de Roush : différence d’élévation maximale supérieure à 100 µm dans la
zone des 7 mm centraux
- élévation antérieure supérieure à 40 µm dans la zone des 7 mm centraux par
rapport à la sphère de référence
- élévation postérieure supérieure à 50 µm dans la zone des 7 mm centraux par
rapport à la sphère de référence
- sphère de référence postérieure > 55 D
- critère d’Efkarpides : rapport des sphères de référence antérieure / postérieure en
mm supérieur à 1.25 ou 1.27
- différence morphologique entre face antérieure et postérieure (warpage)
- convergence des points remarquables (plus cambré, plus mince, plus élevé
antérieur, plus élevé postérieur)
- déplacement inféro-temporal des points remarquables
- analyse statistique par codage couleur (Normal Band Scale). Les valeurs
d’élévation, de courbure ou de pachymétrie situées à moins de 2 déviations standard
de la moyenne sont représentées en vert. Les autres valeurs sont représentées
selon leurs couleurs originales, permettant une détection visuelle rapide des cornées
atypiques ou anormales.
Pour optimiser ce dépistage, il faudrait disposer d’examens sériés dans le
temps sur les deux yeux, après 7 jours d’ablation des lentilles souples ou 30 jours
d’ablation de la lentille rigide. Il faudrait également étudier les sujets apparentés,
comme le suggère l’étude génétique de jumeaux monozygotiques « discordants »
(McMahon, Shin et al. 1999).
Il est donc actuellement impossible de déterminer scientifiquement la valeur
réelle des tests de dépistage (sensibilité et spécificité) du kératocône.
L’hystérèse cornéenne : une nouvelle méthode d’analyse mécanique de
la cornée
L’hystérèse cornéenne est l’étude de la réponse mécanique de la cornée sous
l’effet d’une déformation induite par un jet d’air pulsé (système ORA Ocular
Response Analyzer).
Cette analyse mécanique permet éventuellement de détecter le kératocône
avant l’apparition d’une déformation décelable sur la topographie cornéenne de
courbure ou d’élévation.
Des études sont actuellement en cours pour déterminer la validité de ce type
de mesure pour le dépistage du kératocône avant chirurgie réfractive par Lasik. Des
valeurs de CH (Hystérèse) et CRF (facteur de résistance cornéenne) inférieures à 8,
ainsi qu’une réduction de l’amplitude des pics ou de leur régularité seraient en faveur
du diagnostic.
Il existe des formes plus inhabituelles de kératocône
Le kératocône aigu
Le kératocône aigu est une complication du kératocône très évolué
probablement déclenchée par des microtraumatismes (frottement oculaire).
Il s'agit d'une rupture brutale de la couche postérieure de la cornée (la couche
de Descemet), entraînant la constitution immédiate d'un oedème localisé majeur de
la cornée.
Cette complication entraîne des douleurs intenses, un larmoiement, une gêne à la
lumière majeure et une grande difficulté à ouvrir les yeux (blépharospasme).
Dans l'ensemble des statistiques, la fréquence des kératocônes aigus est de
2,6 %. Cet évènement est plus fréquent chez les sujets porteurs d'une trisomie 21
ou chez les patients allergiques.
La cicatrisation de la couche de Descemet prend quelques semaines et
aboutit à la formation d'une cicatrice souvent paracentral applatissant le sommet du
kératocône.
Parfois la vision la vision du patient peut s'en trouver améliorée par rapport à l'état
antérieur au kératocône aigu !
Il est souhaitable de mettre en route un traitement pour faire baisser la
pression intraoculaire, et réduire l'inflammation et la douleur.
Des études récentes suggèrent que l'injection d'une bulle de gaz non expansif
ou d'air dans la chambre antérieure de l'oeil permet d'accélérer la cicatrisation et de
réduire partiellement les douleurs.
Le kératocône aigu n'est pas une indication de greffe de cornée en urgence.
Le kératocône dans la trisomie 21 (mongolisme)
Le kératocône est beaucoup fréquent chez les sujet porteur d’une trisomie 21
(environ 0.5 à 15% des cas soit 10 à 300 fois la prévalence de la population
générale).
L'évolution est caractérisée par la fréquence accrue des complications,
notamment la survenue d'un kératocône aigu, probablement favorisée par les
traumatismes cornéens, fréquents chez ces patients.
La greffe de cornée perforante n’est pas d’un bon pronostic sur ce terrain et il
est préférable de recourir si nécessaire à la greffe lamellaire ou aux anneaux
intracornéens.
La dégénérescence marginale pellucide (ou kératocône marginal)
La dégénerescence marginale pellucide est vraisemblablement une forme
périphérique de kératocône. 12, 64-77
On observe en effet des cas dans lesquels d’un des yeux est porteur d’une
dégénérescence marginale pellucide et l’autre d’un kératocône typique.
La dégénerescence marginale pellucide se caractérise par une ectasie
décentrée et un pseudo aplatissement central de la cornée.
Il s'agit d'une affection bilatérale qui se traduit par un amincissement de la
cornée périphérique dans le secteur inférieur, habituellement entre 4h et 8h. Ceci
entraîne un aplatissement de l'axe vertical de la cornée avec un astigmatisme
important et souvent irrégulier. L'amincissement intéresse une bande étroite de 1 à 2
mm de large, elle-même séparée du limbe par une zone de cornée normale de 1 à 2
mm de large. La cornée centrale est d'épaisseur normale et fait saillie au-dessus de
la zone d'amincissement.
Cette zone d'amincissement cornéen est claire, toujours épithélialisée,
avasculaire, sans dépôt lipidique, ce qui la distingue d'affections tel que l'ulcère de
MOOREN ou la dégénérescence marginale de TERRIEN.
Elle peut se compliquer de poussées aiguës, aboutissant à une cicatrice
cornéenne parfois vascularisée.
Cette affection est habituellement rencontrée entre la deuxième et la
cinquième décade de la vie. Elle est rare dans les régions occidentales.
Le kératoglobe (forme extrême de kératocône)
Cette affection est une ectasie cornéenne majeure, rare, bilatérale,
caractérisée par la protrusion globuleuse de la cornée.
L’amincissement est souvent extrême et diffus. L'amincissement cornéen
peut atteindre 20 % de l'épaisseur cornéenne normale. Il est moindre près du limbe.
On ne note pas d'anneau métallique ni de cicatrice cornéenne.
Bien qu'elle s'accompagne de myopie forte et d'astigmatisme de haut degré,
l'acuité visuelle peut parfois être relativement conservée.
L'évolution du kérato-globe est avant tout marquée par les risques de
perforations cornéennes et de ruptures spontanée. 15, 78-91
L’ectasie post-Lasik
La survenue d’un kératocône après chirurgie de la myopie au Lasik est un
évènement assez rare (1 cas sur 2000 environ).
Il n’est pas encore clairement déterminé si l’ectasie révèle un kératocône
préexistant au Lasik et non détecté par les examens préopératoires ou si l’ectasie
peut être réellement déclenché par un Lasik pratiqué sur une cornée antérieurement
normale. (Holland, Srivannaboon et al. 2000)
Pour être en mesure de retenir la réalité d’une ectasie véritablement induite
par le Lasik, il faudrait, en effet, réunir les arguments suivants :
- Absence de kératocône ou de dégénérescence marginale pellucide préopératoire
latent selon les critères définis ci-dessus.
- Réalisation du Lasik avec respect effectif d’un mur postérieur de 250 µm et
absence de traumatisme ou de photoablation secondaire du volet
- Constatation d’une déformation progressive et irréversible de type ectasique
(association d’une augmentation de l’élévation postérieure puis antérieure associée à
un amincissement focal) sur la topographie d’élévation, par rapport à une sphère de
référence centrée constante.
A ce jour, nous n’avons pas eu connaissance d’un seul cas publié (Seiler and
Quurke 1998; Speicher and Gottinger 1998; Amoils, Deist et al. 2000; Joo and Kim
2000; McLeod, Kisla et al. 2000; Muravchik 2000; Ozdamar, Aras et al. 2000;
Schmitt-Bernard, Lesage et al. 2000; Dantas 2001; Horn 2001; Mack 2001; Stratas
2001; Vinciguerra and Camesasca 2001), répondant à ces critères précis.
Selon les études épidémiologiques, la fréquence du kératocône serait de 0.05
à 0.75 % dans la population générale et de 5 à 11% dans la population des
candidats à la chirurgie réfractive. Compte tenue de la sensibilité du dépistage
(environ 98% actuellement), on aurait du observer au minimum entre 20000 et 44000
nouveaux cas de kératocône parmi les 20 millions de cas de Lasik opérés depuis
1992 dans le monde, ou encore 300 à 660 nouveaux cas en France (sur la base de
300000 cas). Cette « épidémie » s’ajouterait à celle des kératocônes induits depuis
30 à 40 ans par des kératochirurgies plus agressives telles que le kératomileusis
avec ou sans congélation et la kératotomie radiaire, ainsi que par la PKR. Les 20
références publiées ne rapportent en tout que quelques dizaines de cas, en relation
avec des ablations supérieure à 150µ, ou ne permettant pas d’affirmer la réalité de
l’ectasie ou l’absence de kératocône préopératoire (Seiler and Quurke 1998;
Speicher and Gottinger 1998; Amoils, Deist et al. 2000; Joo and Kim 2000; McLeod,
Kisla et al. 2000; Muravchik 2000; Ozdamar, Aras et al. 2000; Schmitt-Bernard,
Lesage et al. 2000; Dantas 2001; Horn 2001; Mack 2001; Stratas 2001; Vinciguerra
and Camesasca 2001).
Il est cependant admis que les lamelles stromales subissent une redistribution
mécanique dynamique induite par le Lasik. Ce remaniement s’accompagne d’un
déplacement antérieur de la surface postérieure de 40 µ en moyenne (Baek, Lee et
al. 2001), favorisé par une faible clinique préopératoire, par une pression
intraoculaire élevée et par une ablation importante. Il ne semble pas s’accompagner
de réduction progressive du volume cornéen total ou d’ectasie (Chayet, Assil et al.
1998).
La prévention du risque d’ectasie repose actuellement sur le postulat de
Barraquer, repris par Seiler, d’un lit stromal résiduel de 250 µm. Ce postulat a été
étayé par une étude montrant que le déplacement antérieure de la surface
postérieure était significativement plus important (40 µ contre 17 µ) en cas de lit
résiduel inférieur à 250 µ (Wang, Chen et al. 1999). Une étude portant sur la
puissance cornéenne postérieure retrouve du résultat comparables (Seitz, Torres et
al. 2001). Au moins deux observations ont cependant documenté la survenue d’un
kératocône après Lasik laissant un stroma postérieur résiduel de 310 et 298 µm
respectivement, mais dans les deux cas l’absence de kératocône préopératoire n’a
pu être affirmée (Lipshitz and Dotan 2000), (Geggel and Talley 1999).
En définitive, Il semble prudent de respecter les critères de détection du
kératocône infraclinique fondés sur la topographie cornéenne d’élévation.
Il ne faut pour autant pas négliger les critères classiques, et notamment
interroger le sujet sur d’éventuels antécédents personnels d’évolution de
l’astigmatisme (l’astigmatisme congénital est stable) ou de changement d’œil
directeur. La notion de microtraumatismes oculaires significatifs (frottement oculaire,
appui oculo-digital pendant le sommeil) est également un facteur de risque à
éliminer. Il convient enfin de rechercher des antécédents familiaux de kératocône
ou de kératoplastie. En cas de doute, il est recommandé de temporiser la chirurgie
de 6 à 12 mois afin de contrôler la stabilité cornéenne.
La récurrence du kératocône après greffe de cornée ancienne
La greffe de cornée perforante permet une correction souvent satisfaisante de
la déformation de la cornée.
Cependant, un astigmatisme irrégulier peut de nouveau apparaître au cours de
l’évolution et progresser parfois de façon importante, ce qui a fait évoquer la notion
d’une « récurrence », d’une « récidive » ou d’une « transmission » du kératocône sur
92-101
le greffon cornéen..
Ce problème survient en général tardivement, 10 à 35 ans après la greffe de
cornée.
Il doit être distingué de
- l’astigmatisme survenant après l’ablation des fils de suture de la greffe 1 à 2
ans après l’intervention
- l’astigmatisme lié à une ectasie importante résiduelle de la berge réceptrice en
cas de greffon centré (pour réduire le risque de rejet) sur un kératocône très
excentré
La récurrence du kératocône sur greffe correspond le plus probablement à une
déformation évolutive de la périphérie cornéenne (berge réceptrice) dont l’effet
mécanique induit une modification progressive de la forme du greffon et un
astigmatisme irrégulier progressif.
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