Place de la remédiation cognitive dans le traitement de l`anorexie

publicité
http://portaildoc.univ-lyon1.fr
Creative commons : Paternité - Pas d’Utilisation Commerciale Pas de Modification 2.0 France (CC BY-NC-ND 2.0)
http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/2.0/fr
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
ANNEE 2016 N°
PLACE DE LA REMÉDIATION COGNITIVE
DANS LE TRAITEMENT DE L'ANOREXIE MENTALE :
FONDEMENTS THÉORIQUES, PROPOSITION D'IMPLÉMENTATION ET LIMITES
THESE D’EXERCICE EN MEDECINE
Présentée à l’Université Claude Bernard Lyon 1
Et soutenue publiquement le 3 Octobre 2016
En vue d’obtenir le titre de Docteur en Médecine
par
Diane MEYSSAT MORFIN
née le 28 Juillet 1987 à Roanne
Sous la direction de Monsieur le Docteur Sylvain ICETA
1
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
2
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
3
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
4
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
5
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
6
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
7
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
8
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
Le Serment d'Hippocrate
Je promets et je jure d'être fidèle aux lois de l’honneur et de la probité dans l'exercice de la
Médecine.
Je respecterai toutes les personnes, leur autonomie et leur volonté, sans discrimination.
J'interviendrai pour les protéger si elles sont vulnérables ou menacées dans leur intégrité ou
leur dignité. Même sous la contrainte, je ne ferai pas usage de mes connaissances contre les
lois de l'humanité.
J'informerai les patients des décisions envisagées, de leurs raisons et de leurs conséquences.
Je ne tromperai jamais leur confiance.
Je donnerai mes soins à l'indigent et je n'exigerai pas un salaire au-dessus de mon travail.
Admis dans l'intimité des personnes, je tairai les secrets qui me seront confiés et ma conduite
ne servira pas à corrompre les mœurs.
Je ferai tout pour soulager les souffrances. Je ne prolongerai pas abusivement la vie ni ne
provoquerai délibérément la mort.
Je préserverai l'indépendance nécessaire et je n'entreprendrai rien qui dépasse mes
compétences.
Je perfectionnerai mes connaissances pour assurer au mieux ma mission.
Que les hommes m'accordent leur estime si je suis fidèle à mes promesses. Que je sois
couvert d'opprobre et méprisé si j'y manque.
9
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
Remerciements
A mes maîtres et juges :
A Monsieur le Professeur Pierre Fourneret
Professeur de pédopsychiatrie ; addictologie.
Vous me faites l'honneur de présider la soutenance de cette thèse et de m'accorder votre confiance pour la
suite de mon parcours. Veuillez trouver le témoignage de ma gratitude et de mon respect sincère.
A Monsieur le Professeur Nicolas Franck,
Professeur de psychiatrie de l'adulte.
C'est un grand honneur de vous compter parmi les membres de ce jury pour évaluer mon travail sur le sujet
de la remédiation cognitive. Soyez assuré de mon profond respect et de ma gratitude pour l'intérêt que
vous avez porté à ma thèse.
A Monsieur le Professeur Mohamed Saoud,
Professeur de psychiatrie de l'adulte.
Vous m'avez accueillie dans votre service et encouragée dans l'initiation de cette thèse. Je vous remercie de
me faire l'honneur de juger mon travail et vous adresse un profond respect.
A Monsieur le Docteur Edouard Carrier
Médecin psychiatre, responsable de l'unité des Troubles Graves du Comportement Alimentaire
et directeur de la Clinique Saint Vincent de Paul.
Vous m'avez initiée à l'approche des troubles alimentaires et accordé votre confiance pour la suite de mon
parcours. Si j'ai d'abord été bousculée par votre approche, j'en garde le substratum de ce qui me semble
toujours efficace dans le soin, votre bienveillance à l'égard des patientes (Je pense que vous avez compris
l'hypothèse du dodo avant nous). Votre modèle de soin viscéral reste un enseignement précieux que je
m'efforce d'appliquer. Je garde comme exemple votre manière de travailler avec ce que l'on est, de ne pas
se cacher derrière la technique et de s'impliquer quand cela est nécessaire. Je vous adresse mes respects et
mes pensées amicales et espère que notre collaboration se poursuivra.
10
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
A mes maîtres
A Monsieur le Docteur Sylvain Iceta, directeur de cette thèse. Merci Sylvain d'avoir encouragé l'éclosion de
ce questionnement autour de la remédiation cognitive et d'avoir su en percevoir les enjeux cliniques. Merci
aussi pour tes relectures nombreuses et constructives mais aussi la liberté que tu m’as laissée dans ce
travail. Mes remerciements vont bien sur au-delà de ce travail de thèse et je tiens à saluer ton soutien dans
la construction, aussi, de ma carrière professionnelle. Je suis ravie que notre collaboration se poursuive au
centre de référence et j'espère que cette expérience se nourrira d'une complémentarité déjà naissante. Je
te remercie pour la confiance que tu m'accordes.
A Monsieur le Docteur Benoit Hoestlandt qui a encadré mon premier semestre d'interne avec la plus
grande bienveillance. J'ai été profondément marquée par la dynamique encourageante que vous avez
donné à mon cursus et vous doit l'enthousiasme et l'assurance qui ont grandi pendant mon internat. Vos
encouragements m'ont permis de traverser un premier stage difficile avec confiance, ainsi que ceux qui ont
suivi. Je garde de votre enseignement la rigueur, la modestie et le juste positionnement dans son travail. Je
vous adresse toute ma reconnaissance, un grand respect et des pensées amicales.
A Madame le Docteur Colette Combe qui a prêté attention à mes questionnements naissants autour des
troubles alimentaires et les a encouragés. Vous avez contribué à donner une forme à mon enthousiasme
autour de cette clinique et à l'inscrire dans la durée. Votre enseignement et votre regard psychanalytique
sur l'anorexie restent présents dans mes réflexions. Je conserve de votre approche l'attention originale et
bien particulière des liens entre la mécanique du corps et les méandres de la pensée. J'espère que vous
trouverez dans ce travail de nouveaux éléments de réflexion qui, s'ils n'apportent pas de réponses
soulèvent de nouvelles questions autour des liens inextricables entre les mondes psychique et somatique.
A Monsieur le Docteur Thierry Rochet qui a encadré mon stage dans son service pour adolescents.
En plus de vos enseignements théoriques et cliniques précieux, je n'oublierai pas la manière dont vous
m'avez préservée lors des événements douloureux survenus pendant mon semestre. Votre soutien solide
m'a permis de tenir pendant cette épreuve professionnelle. Vous m'avez accordé votre confiance à un
moment critique et m'avez permis de traverser ce dur moment. Je garde le souvenir de la considération que
vous portez à chacun de vos collaborateurs et espère être à la hauteur de vos enseignements dans ma
pratique future.
A Monsieur le Docteur Mohamed Tatou qui m'a encadré lors de mon stage en unité d'adolescent et a dirigé
mon mémoire de DES. J'ai appris la rigueur nécessaire à la prise en charge des adolescents et tâché de
l'appliquer dans la suite de mon cursus. J'ai compris à tes côtés, Mohamed, le caractère soignant d'un cadre
11
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
solide. Je te remercie pour tes conseils et corrections de mon mémoire, tu m'as permis de concilier la
créativité et les exigences universitaires et ceci est un enseignement qui m'a été précieux dans la suite de
mon cursus, notamment pour ce travail de thèse. Je t'adresse tout mon respect et mes pensées amicales.
A Monsieur le Docteur Olivier Revol qui a encadré mon dernier semestre d'interne. J'ai été
particulièrement sensible à votre attitude positive et valorisante à l'égard de chacun des membres de votre
équipe. Si ce semestre passé à l'unité 502 a un peu entravé l'avancée de mon travail de thèse (de même
qu'ensuite, la co-rédaction d'un article pendant les 8 derniers jours avant l'impression de ma thèse!), il m'en
reste néanmoins une expérience clinique précieuse dans la suite de mon parcours en psychiatrie auprès
d'enfants. Je vous adresse de sincères remerciements pour vos enseignements et indéfectibles
encouragements.
Aux équipes
Aux infirmiers qui m'ont témoigné leur confiance pendant mon internat mais aussi aux secrétaires qui ont
souvent été des oreilles bienveillantes durant mes stages : Myriam à N2, Joëlle à Alphée, Aurélie et Christine
à la liaison de l'hôpital neurologique, Nadjet au 502.
A l'équipe du centre de référence TCA qui a déjà commencé à m'accueillir avec bienveillance en
enthousiasme.
A Amandine pour son incroyable réactivité autour de mon projet de thèse et son aide précieuse dans le
déroulement de la thérapie.
12
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
A mes proches
A Jérôme, mon époux, qui a traversé avec moi ces études si longues, cet internat et enfin la préparation de
cette thèse. J'admire profondément la façon que tu as eu de m'épauler sans (trop) montrer que cela puisse
t'être pénible, de savoir être là quand il faut et de garder les pieds sur terre, d'avoir toujours mis mon travail
parmi tes priorités et de t'arranger avec mon emploi du temps. Ce sont les mots que je trouve pour donner
une forme à mes remerciements, mais ma plus grande gratitude est pour ce que je ne peux décrire de tes
regards et gestes d'affection qui me font sourire chaque jour.
A mon père, de faire son possible pour être là pour assister à « ma dernière réunion parents-professeurs »
au détriment de ses autres élèves. Merci pour ton soutien et ta curiosité à l'endroit de mon travail.
A ma mère, qui a montré son intérêt pour cet « exposé » par son investissement dans les à-côtés. Merci de
m'avoir décentrée de cette thèse pour me tourner vers d'autres horizons (concerts, voyage…).
A Christophe pour le pot de thèse et toutes les autres gourmandises qui en ont ponctué la préparation.
A mes grands-parents : à Yvette pour son immense soutien (affectif, nutritionnel, financier…) pendant mes
études et pour sa relecture attentive et intégrale de ma thèse du haut de ses 88 ans et demi, à Marie qui
s'est « soucié » de ma thèse et de mon avenir et à Michel qui a toujours une tarte aux pommes quand il y a
quelque chose à fêter.
A ma belle-famille, Elizabeth, Guy, Agnès, qui m'ont accueillie étudiante, souvent absente des réunions de
famille. J'espère que le futur nous permettra de resserrer ces liens et d'en tisser de nouveaux. A mes beauxfrères, Jérémie, Stéphen. Jérémie je compte sur toi pour être le prochain doctorant de cette famille.
A Claire qui m'a offert Alice au Pays des merveilles dans notre bibliothèque de mariage, dont je m'inspire ici.
Un clin d'œil avec ce fil rouge dans les grands événements, pour une multitude de clins d'œil (« clin d'yeux »
Claire?) au quotidien.
Aux amies rencontrées pendant l'internat : Nina, Marie-Noémie, Mathilde, Marie, Maud, Adeline et Chloé.
Merci pour ce soutien psychologique, ces conseils quand mon tour est venu de faire face à l'épreuve de la
thèse. Mais merci surtout de m'avoir parlé d'autres choses (vos exploits sportifs, aventures de voyage, vos
DIY, vos bouquins, vos mariages, vos enfants...). Merci à vos maris et conjoints : mon bon Pierrot, Julien,
encore Julien, Antoine, Paul et Florian d'avoir été à nos côtés et de vous être occupé de Jérôme quand
j'étais trop occupée par ma thèse.
13
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
A Margaux F., mention spéciale pour avoir fixé la date de ton mariage à la veille de ma thèse, et demandé
d'être ton témoin. Merci de m'avoir « lancé ce défi », qui aura certainement bien stimulé mes capacités de
planification.
A Jean-Guillaume, pour cette amitié superficielle entre personnes profondes.
Aux autres, les non-initiés qui se sont fait avec moi une montagne de cette thèse. Coline, Florian, Aurore,
Pauline, Edouard, merci d'avoir essayé de vous intéresser et de m'avoir soutenue, par des bouffées
d'oxygène dans le rush final, chez Mme Sarfati ou à Saint Pierre de Chandieu. Je suis prête à vous rendre la
pareille pour vos futures thèses sur la mode éthique, les lasagnes en plat individuel, la photographie
d'enfants, le mojito et les bonnes manières (respectivement).
A mes « amis de longue date » Waisse, Marc, qui avec le temps commencent à le devenir vraiment. C'est un
peu avec vous que l'internat a commencé à se profiler, il se clôt avec une pensée pour vous. Merci aussi
Waisse et Julie de m'avoir accueillie chez vous aussi souvent que la psychanalyse le réclamait pendant ces
deux dernières années.
14
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
"Everybody has won and all must have prizes."
« Tout le monde a gagné et tous doivent recevoir un prix.»
Alice au pays des merveilles
(La course cocasse)
Lewis Carroll
15
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
Glossaire
AM : Anorexie mentale
APA : American Psychiatric Association (Association Américaine de Psychiatrie)
CRH : Cortisol Releasing Hormone
CRT : Cognitive Remediation Therapy
DSM : Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders (Manuel diagnostique et statistique
des troubles mentaux)
EDEQ : Eating Disorder Examination Questionnaire, échelle de comportement alimentaire
EDQoL : Eating Disorder Quality of Life, échelle de qualité de vie alimentaire
ECR : Essai clinique randomisé
IMC : Indice de Masse Corporelle
IRM : Imagerie par Résonnance Magnétique
QI : Quotient Intellectuel
RC : Remédiation Cognitive
SPECT : Single Photon Emission Computerized Tomography
TCA : Trouble du Comportement Alimentaire
TED : Trouble Envahissant du Développement
TEP : Tomographie par Emission de Positon
TSA : Trouble du Spectre Autistique
16
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
Table des matières
Introduction ......................................................................................................................................................18
Première partie : Evolution des modèles théoriques .......................................................................................20
1. Les repères historiques. ................................................................................................................................21
2. L'abord psychanalytique de l'anorexie mentale ...........................................................................................24
2.1. Les travaux fondateurs..............................................................................................................................24
2.2. La pensée psychanalytique actuelle. ........................................................................................................26
3. Les premières conceptualisations revues à la lumière des connaissances actuelles. ..................................27
3.1. Interactions familiales et anorexie aujourd'hui ........................................................................................27
3.2. Influence de l'environnement à l'échelle de la société sur l'anorexie mentale........................................28
3.3. Anorexie et dépression aujourd'hui .........................................................................................................29
3.4. Du DSM IV au DSM V ................................................................................................................................30
4. Modèle bio-psycho-social en trois temps .....................................................................................................32
5. L'approche cognitivo-comportementale. .....................................................................................................35
6. L'apport de la génétique. ..............................................................................................................................36
7. Modèles biologiques ....................................................................................................................................37
8. La notion d'endophénotype. ........................................................................................................................42
9. L'apport de la neuro-imagerie dans la compréhension de l'anorexie mentale. ...........................................44
9.1. Neuro-imagerie structurale. .....................................................................................................................44
9.2. Neuro-imagerie fonctionnelle. .................................................................................................................44
Deuxième partie : La remédiation cognitive dans le traitement de l'anorexie mentale ..................................49
1. Le fonctionnement cognitif dans l'anorexie mentale et ses implications cliniques. ....................................50
1.1. L'intelligence .............................................................................................................................................52
1.2. L'attention.................................................................................................................................................53
1.3. La mémoire ...............................................................................................................................................53
1.4. La cohérence centrale...............................................................................................................................54
1.5. Les fonctions exécutives. ..........................................................................................................................55
2. L'anorexie mentale : un trouble neuro-développemental ? .........................................................................57
3. La plasticité cérébrale. ..................................................................................................................................58
4. L'apparition de la remédiation cognitive dans l'anorexie mentale ..............................................................59
4.1. De la compensation d'un déficit lésionnel à la « gymnastique cérébrale » .............................................59
4.2. Particularités de la remédiation cognitive dans l'anorexie mentale. .......................................................60
5. Evaluation de la remédiation cognitive dans l'anorexie mentale. ................................................................62
5.1. Evaluation de la remédiation cognitive dans le traitement de l'anorexie mentale chez l'adulte. ............62
5.2. La remédiation cognitive chez l'enfant et l'adolescent. ...........................................................................64
Troisième partie : Discussion autour d'un cas clinique.....................................................................................67
1. Présentation du Manuel de Remédiation B..................................................................................................68
1.1. Le programme de remédiation cognitive. ................................................................................................68
1.2. La mise en pratique. .................................................................................................................................71
2. Situation clinique ..........................................................................................................................................72
3. Discussion .....................................................................................................................................................83
3.1. Evaluation des psychothérapies : repères contextuels .............................................................................83
3.2. Evaluation des psychothérapies : exigences, enjeux, limites et propositions. .........................................84
3.3. Intégration de données issues de champs divers .....................................................................................92
Conclusions .......................................................................................................................................................95
17
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
18
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
Introduction
L'anorexie mentale est une maladie qui soulève de nombreuses questions. Par son pronostic
sombre et son tropisme pour les sujets jeunes, elle représente un domaine prioritaire dans la
recherche en psychiatrie. A l'échelle mondiale, les derniers travaux épidémiologiques retrouvent une
prévalence de l'anorexie mentale entre 0.9 en 2.2 % de la population féminine 1,2 et 0.2 et 0.3 % de
la population masculine 3.
En France, la prévalence de l'anorexie mentale étudiée chez les adolescents de 17 ans 4 retrouve une
atteinte de 0.5 % pour les formes complètes (réunissant les critères diagnostic du DSM – IV TR) et
entre 1.2 et 3.3 % pour les formes subsyndromiques, en nette augmentation.
L'évolution du trouble est marquée par un taux de mortalité important, six fois plus élevé que celui
des sujets sains à l'échelle mondiale 5, faisant de l'anorexie mentale la maladie psychiatrique la plus
létale 6,7.
Mes interrogations autour de l'anorexie mentale ont pris forme lors de mon semestre d'internat à la
Clinique Saint Vincent de Paul à Lyon, dans le service pour troubles graves du comportement
alimentaire réunissant 60 patientes hospitalisées à temps plein pour un trouble du comportement
alimentaire (TCA). J'ai alors rencontré un large panel de patientes présentant des profils variés, tant
au plan psychopathologique que cognitif. Ces nombreuses rencontres ont soulevé la question du
substrat de la maladie anorexique. En effet, la diversité des présentations cliniques ne me semblait
pouvoir se résumer aux critères de la nosographie internationale. Nous verrons ainsi que l'intrication
somatique et psychique dans les TCA rend complexe l'identification des facteurs entrant dans la
pathogenèse du trouble parmi toutes les manifestations secondaires. La gravité de leur état et
l'inquiétude qu'elles pouvaient susciter ont motivé une volonté d'approfondir mes connaissances au
plan théorique et d'enrichir mes propositions thérapeutiques par de nouvelles approches.
J'ai été rapidement confrontée, dans le traitement de l'anorexie mentale, aux limites cognitives
induites par la maladie, rendant nécessaire une approche thérapeutique prenant en compte ces
difficultés. Le traitement de ces patientes était également complexe de par leur difficulté d'alliance
thérapeutique malgré la mise en jeu du pronostic vital et en dehors de tout délire patent. Le
contraste entre de très bonnes capacités intellectuelles souvent rapportées avant l'installation des
troubles et la difficulté d'accès à la réflexion et à la rationalité pendant la maladie soulève un
paradoxe.
19
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
Par un détour historique à travers les différents courants de psychothérapie dans l'anorexie mentale,
nous verrons que les traitements proposés ont suivi l'évolution des croyances puis des savoirs
scientifiques sur la maladie. Nous placerons la remédiation cognitive, technique psychothérapique
étudiée dans ce travail, en bout de chaîne de cette évolution car elle nous semble prendre en compte
les principales données scientifiques solides existant dans l'anorexie mentale.
De plus cette thèse de médecine aborde la question de la psychothérapie, un traitement auquel le
psychiatre fait appel quotidiennement et qui est à présent soumis aux mêmes exigences d'évaluation
que tout autre traitement. Or nous partons du constat qu'à ce jour, les recommandations médicales
dans le traitement de l'anorexie mentale sont très restreintes. Les dernières recommandations de la
Haute Autorité de Santé
8
ne pouvaient recommander de traitement que sur la base d'accords
d'experts (soit des recommandations au niveau de preuve de grade C), à l'exception de la thérapie
familiale dans le cas de l'anorexie mentale chez l'adolescent (grade B). En effet, en l'absence d'un
traitement médicamenteux ayant fait ses preuves dans l'anorexie mentale, seuls les traitements du
champ psychothérapique trouvent une place majeure dans les recommandations. Ce manque de
recommandation basée sur des preuves met en lumière la difficulté de montrer la supériorité d'une
thérapie dans cette indication.
Ainsi, ce travail de thèse s'attachera à déterminer la place de la remédiation cognitive dans le
traitement de l'anorexie mentale.
Nous retracerons dans une première partie le cheminement théorique de la modélisation de
l'anorexie mentale. Nous aborderons les différentes propositions thérapeutiques associées à chaque
modèle.
Dans une deuxième partie, nous nous arrêterons sur les derniers apports scientifiques ayant
débouchés sur l'intégration de la remédiation cognitive aux soins de l'anorexie mentale.
Une troisième partie présentera une proposition d'implémentation d'un programme de remédiation
cognitive en clinique. Cet exemple nous conduira à discuter l'intérêt et les limites de l'application de
la médecine basée sur des preuves à la psychothérapie, à partir de l'exemple de la remédiation
cognitive dans l'anorexie mentale.
20
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
Première partie
Evolution des modèles théoriques
21
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
L'anorexie mentale tient une place particulière dans le champ de la maladie psychique. Par
son atteinte de sujets jeunes en bonne santé antérieure apparente et par la gravité de l'état physique
qu'elle induit souvent, l'anorexie mentale a souvent éveillé la curiosité des théoriciens et
scientifiques au cours de l'Histoire.
Dans cette première partie, nous étudierons les modèles théoriques ayant éclairé l'anorexie mentale
ainsi que les différents types de thérapie qui y étaient associés. Des modèles de familles
«anorexigènes» aux approches ciblés sur des endophénotypes, nous verrons que la perception de
l'anorexie mentale a évolué avec l'avancée des connaissances médicales mais que la pathogenèse du
trouble reste encore assez méconnue. Plusieurs hypothèses correspondant aux différents courants de
la psychiatrie ont été appliquées à l'anorexie mais la recherche est encore active faute d'un modèle
unissant toutes les connaissances actuelles et permettant de proposer un traitement étiologique de
certitude. Nous verrons que l'évolution des modèles se fait dans le sens de l'abstrait vers le concret,
des hypothèses religieuses aux modèles biologiques et neuro-développementaux.
1. Les repères historiques.
La symptomatologie anorexique qu'est l'amaigrissement avec refus d'une prise alimentaire
est suffisamment caractéristique pour être identifiée dans les récits historiques. Les premières
descriptions de cas de jeûne n'étaient pas médicales, la privation alimentaire était une pratique
rapportée à des considérations religieuses 9. On en retrouve les premières traces dès l'époque de
l'Egypte ancienne. Des pratiques de jeûne signaient des démarches de repentance, de prière ou de
purification adressées aux Dieux. On retrouve encore ces représentations de privation, de punition
associées aujourd'hui à la perception commune de la démarche anorexique.
Dans les religions orientales telles que l'hindouisme, le jeûne relevait d'une recherche d'absolu divin.
En s'affranchissant des impératifs corporels, cette ascèse pouvait conduire ses pratiquants à la mort.
Cette note d'extrémisme dans la privation aux dépens de la survie est encore présente dans les
représentations actuelles autour de l'anorexie.
Au XVème siècle encore, on retrouve des cas de jeunes filles présentant une restriction alimentaire.
Elles étaient alors soupçonnées de possession diabolique et le « traitement » qui leur était fait était
du registre de l'exorcisme 9.
Au plan médical, les premières descriptions cliniques pouvant se rapporter à l'anorexie mentale sont
retrouvées chez Avicenne. Le médecin et philosophe perse porte un regard nouveau sur un tableau
de restriction alimentaire qu'il met en lien avec une forme de dépression et non pas avec une quête
22
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
religieuse 10.
A partir de la Renaissance, des cas d'expériences anorexiques sont décrits en Angleterre sous un
jour médical. Ces descriptions restent, jusqu'au XVIIIème siècle encore empreintes de mystique.
Des cas d'« anorexia mirabilis » ou d' « inedia prodigiosa » (soit le prodige de vivre plusieurs
années sans ingérer aucune nourriture) sont rapportés. Il s'agissait de jeunes filles qui se targuaient
de pouvoir se passer de nourriture pour vivre. Si l'hypothèse d'une intervention divine ou diabolique
n'est alors plus privilégiée, les scientifiques évoquent encore différents mécanismes pour expliquer
ce tableau : maladie de l'intestin, capacité à se nourrir de l'air ou pure imposture. L'explication
religieuse a rapidement été écartée et ces deux cas ont été rangés sous la bannière de l'imposture.
Déjà alors, une observation médicale en isolement strict aurait été réalisée pour ces patientes, afin
de débusquer une supposée imposture.
Les premières descriptions cliniques de l'anorexie mentale ont fait l'objet de débat entre la France
et l'Angleterre. On admet habituellement que Richard Morton en 1869 a, le premier, décrit
l'anorexie sous le nom de « phtisie nerveuse »
11
. La première hypothèse physiopathologique se
rapportant clairement à ce tableau identifié était une restriction alimentaire causée par la tristesse et
l'anxiété, et accompagnée d'une hyperactivité intellectuelle et physique. Morton décrit d'emblée ce
tableau chez une jeune femme mais aussi chez un homme alors que les tableaux précédemment
décrits différenciaient clairement les formes masculines et féminines.
Le médecin londonien aurait rapidement été suivi en France par Charles Lasègue en 1873, dont les
travaux ont été plus largement diffusés. Dans son article « De l'anorexie hystérique » 12, il décrit une
série de cas présentant une maladie « constante dans ses symptômes » avec un substratum digestif
expliquant l'amaigrissement («absence de digestion»).
William Gull en Angleterre donnera parallèlement sa description de l' «apepsie hystérique» puis
«anorexia nervosa» en retenant également une étiologie digestive (« irritation de l'estomac »).
Lasègue et Gull, ces deux médecins pionniers dans la description de l'anorexie mentale en Europe,
rapportent cette pathologie à une affection psychiatrique mais en retiennent tous deux un substratum
somatique. On notera que l'intentionnalité de l'amaigrissement n'est pas retenue dans ces premières
descriptions. Lasègue décrit initialement « un malaise à la suite de l'alimentation » que la malade
tentera de contrer par l'arrêt de la prise alimentaire, endossant « la conviction que l’alimentation
sera nuisible ».
Lasègue rattache l'anorexie à l'hystérie et ajoute que toute intervention est nuisible et renforce la
symptomatologie. En effet,
déjà attentif aux réactions de l'entourage des malades face à
l'amaigrissement, Lasègue souligne l'inefficacité des moyens thérapeutiques développés par la
famille (sollicitude, puis supplication, puis exigence) comme par le médecin (médicaments, conseils,
23
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
intimidation) et leur contre-productivité sur ce terrain d'hystérie. Lasègue suspecte déjà l'importance
d'une collaboration dans les soins, « le médecin, s’il avait promis un amendement rapide ou s’il a
soupçonné le mauvais vouloir de la malade, a perdu depuis longtemps son autorité morale ».
Au plan thérapeutique William Gull se positionnera clairement en faveur d'un retrait de la patiente
de son environnement familial, préconisant un « un entourage de personnes exerçant une pression
morale sur elles ».
Jean Martin Charcot, neurologue et professeur d'anatomie, intègre, lui aussi, l'anorexie dans le
spectre de l'hystérie. Dans son travail sur « l'anorexie hystérique », il propose également l'isolement
de la patiente vis à vis de sa famille, non plus à but d'observation, mais de traitement : « les parents
sont écartés jusqu’à ce qu’une notable amélioration se manifeste, puis comme récompense, le
patient est autorisé à les voir ». L'isolement était répandu dans le traitement des affections mentales
et répondait à des objectifs de protection, de punition, d'éloignement, de maintien de l'ordre ou de
lutte contre une supposée contagion. On soulignera la volonté de Charcot d'intervenir sur le mode
de la récompense.
Ainsi, les premières descriptions cliniques de l'anorexie mentale font mention d'un tableau tout à
fait comparable à celui qu'il nous est encore donné à voir aujourd'hui. Il est intéressant de souligner
que ce premier regard sur les patientes anorexiques faisait mention d'une chute involontaire dans la
maladie (à une époque où on ne parle pas de régime amincissant), avec des manifestations associées
telles que l'hyperactivité physique. Nous verrons plus bas que l'on assiste actuellement à un retour
vers cette dimension involontaire des manifestations dans la nosographie actuelle de l'anorexie.
L'origine psychique de l'anorexie est supposée, et les liens avec un environnement familial
pathologiques esquissés. L'axe thérapeutique est orienté par la logique médicale de l'époque sans
validation scientifique possible. La parole d'expert faisant foi, elle conduit à un isolement
thérapeutique qui aura court jusque bien plus tard.
2. L'abord psychanalytique de l'anorexie mentale.
2.1. Les travaux fondateurs.
Dans la continuité des travaux de Charcot, son élève Freud abordera à son tour l'anorexie
sous l'angle de la névrose. D'abord rapportée à la dépression et à la mélancolie dans ses premiers
travaux en 1895
13
, Freud interprète l'anorexie au sens littéral comme une perte de la faim et
24
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
l'attribuait à une perte de la libido. Plus tard, il intègre l'anorexie dans les rangs de l'hystérie, avec le
refus alimentaire comme symptôme de conversion induit par le refoulement de l'érotisme oral. C'est
ainsi qu'il décale la problématique anorexique de l'alimentation et englobe toute la dimension du
corps, prenant en compte les multiples effets de la maladie sur la féminité et l'accès à la génitalité.
A la suite de Freud, Lacan articulera sa réflexion sur l'anorexie mentale autour de la triade besoindemande-désir dans les interactions précoces mère-enfant. Pour Lacan, le bébé exprime un besoin
qui vise un objet réel (le lait maternel), mais aussi un désir qui vise quelque chose que la mère n'a
pas (car aucun objet réel ne peut satisfaire le désir), un « rien » que l'on peut assimiler à une
demande d'amour. L'enfant peut d'ailleurs répéter sa demande, sans attendre d'objet réel,
uniquement dans cette quête du rien qui lui permet de renouveler sa demande d'amour. Ainsi, un
écart entre le besoin et la demande est nécessaire pour que le désir persiste. Dans l'anorexie mentale,
on peut voir une réaction à cette demande comblée par un objet réel, alors que « rien » n’est attendu.
Lacan fait exister ce « rien » sur le plan symbolique et insiste sur la valence active de la négation de
l'anorexie : « L'anorexie mentale n'est pas un ne pas manger, mais un ne rien manger ? J'insiste –
cela veut dire manger rien. Rien c'est justement quelque chose qui existe sur le plan symbolique » 14.
Ainsi, Lacan retient l'idée d'une démarche active dans la conduite anorectique qu'il met sur le
compte d'une inadéquation entre besoins de l'enfant, demande entendue par les parents et désir.
Parallèlement, dans un des premiers manuels de psychothérapie pour l'anorexie mentale paru en
1985
15
, Hilde Bruch décrit des familles propices à l'éclosion d'un trouble alimentaire. Ces parents
étaient caractérisés par « le peu d'attention portée à l'expression des besoins de l'enfant, à ses
volontés et ses sentiments », « l'absence de réponse habituelle et systématique aux besoins de
l'enfant, en particulier son besoin de nourriture, privant l'enfant en développement d'un travail de
fond sur son identité corporelle ». Pour Bruch, c'est le peu de considération maternelle pour les
besoins propres de l'enfant qui est à l'origine des perturbations interoceptives à l'œuvre dans
l'anorexie mentale.
Au plan thérapeutique, les conséquences de ces théories ont été des prises en charge axées sur la
séparation du milieu familial.
Les différentes approches psychanalytiques de cette époque ont ainsi abordé l'anorexie sous l'angle
d'une relation à la mère pathologique. Le père étant décrit comme effacé, sa place dans la
psychothérapie était, elle aussi, bien limitée. Certains auteurs préconisaient alors de mener
parallèlement des psychothérapies individuelles chez la fille malade afin de faire éclore un moi
propre, et chez la mère pour traiter une éventuelle névrose.
L'hypothèse d'une étiopathogénie de la maladie dans les liens précoces reprise par Jeammet et
25
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
Brusset amenait, selon la logique psychanalytique, à aborder en cure, dans le transfert, ces liens
particuliers reconnus comme à l'origine de la maladie. Dès lors, des difficultés pour la mère à
communiquer à son enfant les clés pour faire face à ses perceptions étaient suspectées. Une
psychothérapie maternelle constituait une réponse adaptée à l'intuition psychanalytique selon
laquelle la mère était prise en défaut dans son rôle maternant par certaines difficultés qui lui étaient
propres et venaient se jouer dans les liens précoces avec sa fille. Parallèlement il était retrouvé
expérimentalement l'importance d'un mauvais fonctionnement familial dans le pronostic de la
maladie anorexique 16.
Par la suite, dans les années 1970, l'imputabilité du fonctionnement familial sur l'apparition de
l'anorexie mentale a été retenue par plusieurs auteurs. Minuchin parlera de « familles
psychosomatiques »
17,18
, caractérisées par l'enchevêtrement relationnel de leurs membres, par une
rigidité et une surprotection, et une attitude d'évitement des conflits.
Mara Selvini-Palazzoli ira aussi dans le sens d'une problématique à l'échelle familiale avec des
alliances malvenues entre les différents membres, elle parle de « mariage à trois » pour évoquer
l'incestuel perçu dans ces familles 19.
Ainsi, les théoriciens des années 1980 ont recherché de facteurs étiologiques dans la personnalité
des parents ou leur style éducatif. Cette étape de la reconnaissance par Minuchin et SelviniPalazzoli d'une influence du milieu familial dans le développement des troubles anorexiques été
associée, au niveau thérapeutique, à la diffraction de la prise en charge. En effet, le patient n'étant
pas le seul en cause dans l'apparition des troubles, il a fallu inclure la famille dans le traitement.
Minuchin proposa ainsi la thérapie familiale comme traitement de l'anorexie mentale.
Un lien de causalité était donc suspecté entre le mauvais fonctionnement familial et le pronostic, la
réponse thérapeutique a alors été d'abord d'éloigner la cause supposée du mal, puis de proposer une
psychothérapie à la mère, et enfin de proposer une approche plus globale, familiale.
On retiendra que la place de la spéculation est encore importante dans l'approche psychanalytique
classique. En effet, si les fonctionnements familiaux ont été minutieusement étudiés à l'échelle
individuelle, notamment par Hilde Bruch, la réponse thérapeutique correspond à une extrapolation
de la logique et repose sur de nombreux postulats. Pour accepter ce raisonnement, il faut admettre
l'hypothèse que les relations précoces laissent des traces mnésiques. Si l'apport de l'épigénétique
viendra plus tard valider en partie cette hypothèse, la psychanalyse amène le postulat de
l'inconscient comme lieu d'inscription de ces traces mnésiques. De plus, pour s'appuyer sur ces
théories il faut aussi admettre une relation causale entre des affects et des manifestations corporelles.
26
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
2.2. La pensée psychanalytique actuelle.
Un tournant a été marqué dans les conceptions psychodynamiques sur l'anorexie lors du
Symposium de Göttingen en 1965. Cette rencontre a donné lieu à un nouveau regard de la
psychanalyse sur l'anorexie comme exprimant « une incapacité d'assurer le rôle sexuel génital et
d'intégrer les transformations de la puberté. Le conflit principal se situe au niveau du corps et non
de la fonction alimentaire ; la structure de l'anorexie mentale est différente de celle d'une névrose
classique. » 20.
Depuis, l'anorexie s'est vue rattachée au spectre de l'addiction. C'est l'apport de Philippe Jeammet,
Maurice Corcos et Martine Flament
21
qui retiennent l'anorexie comme une réponse du sujet à ses
difficultés de régulation narcissique et de rapport à l'objet.
Jeammet amène l'idée de fragilité des assises narcissiques
22
avec une dépendance à l'objet aux
dépens de l'investissement de ses ressources internes propres, dépendance vécue comme
insupportable. Cette idée se retrouve aussi chez Brusset qui évoque une organisation défensive sur
le mode de la toute-puissance avec réaction d'emprise sur l'objet externe 23.
Pour Maurice Corcos, le sujet exprime par la conduite de dépendance une vulnérabilité
neurobiologique, psychopathologique et sociale 24. Il met en avant dans les troubles alimentaires les
caractéristiques des conduites addictives : début dans l'adolescence, réactivation d'événements
infantiles, compulsivité de la conduite et obsessions idéatives concernant l'objet, sentiment de
manque, de vide, impulsivité, substitution à la dépendance à l'objet humain d'une dépendance à un
objet inanimé, disponible et manipulable, maintien masochique de la conduite malgré les effets du
manque et les conséquences délétères psychologiques, biologiques et sociales
25
. En ce sens
Maurice Corcos rapporte l'anorexie mentale à un trouble addictif, notant qu'elle peut être associée à
d'autres addictions toxiques et laisser également une large part à la dépression.
Au plan thérapeutique, il ne s'oppose pas à la mise en place de soins contractualisés avec une
dimension de contrainte, et souligne qu'en ce sens un déplacement s'opère du dictateur interne vers
un persécuteur extérieur
25
. Cette séparation est pour Corcos l'occasion d'un transfert dans le lien
soignant d'un conflit latent, permettant le remaniement des représentations qui y sont associées.
« La séparation unit, de par la réactivation des liens psychiques, ceux qu’elle sépare, plus que ne
peut le faire la proximité physique morbide. »
Plus récemment, certains auteurs reprennent le modèle de l'hystérie pour l'appliquer à l'anorexie
mentale. C'est le point de vue de la psychiatre et psychanalyste lyonnaise Colette Combe qui
reconnaît dans l'anorexie mentale l'expression d'une angoisse en un symptôme physique
26
. Elle
27
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
propose l'idée de refus de s'alimenter comme une expression du désir, sous la forme d'un refus.
L'originalité de sa pensée réside dans le fait qu'elle intègre les conséquences physiques et
psychiques de la dénutrition à sa compréhension de l'anorexie mentale et à ses propositions
thérapeutiques. Elle souligne notamment la dimension « secondaire » de certains symptômes
reconnus comme centraux dans l'anorexie. Le déni de la gravité des troubles par exemple, un des
critères diagnostiques du DSM-IV-TR pourrait en effet n'être qu'une conséquence de la dénutrition.
En effet, une perte de poids importante induit une augmentation de la cortisolémie et fausse la
perception de la douleur et de la faim. Ainsi avec un taux circulant de cortisol très augmenté, la
patiente perdrait la capacité de ressentir le stress physiologique et a fortiori de la dire 26.
Nous verrons plus bas que les recherches actuelles sur les endophénotypes et l'évolution de la
nosographie suivent la même approche de différenciation des causes et des conséquences. De cette
approche découlera l'intérêt porté à la remédiation cognitive comme traitement spécifique d'un trait
supposé prendre part à l’installation du trouble.
3. Les premières conceptualisations revues à la lumière des connaissances actuelles.
3.1. Interactions familiales et anorexie aujourd'hui
Les premiers modèles théoriques psychanalytiques imputaient une part des troubles
alimentaires à des liens familiaux dysfonctionnels. Or, certains auteurs ont suggéré que ces
hypothèses seraient à l'origine d'une stigmatisation des patients et de leurs parents
27
. Les avancées
de la connaissance du fonctionnement familial autour de patient anorexique font plutôt l'hypothèse
de dysfonctionnements réactionnels au trouble, et amènent à modifier la prise en charge de ces
patients 28. Actuellement, l'imputabilité d'un fonctionnement familial spécifique autour de l'anorexie
mentale n'a pas pu être mise en évidence 29.
En outre, l'approche de Selvini-Palazzoli soulève, par la théorie systémique, l'idée que l'anorexie
mentale résulte de difficultés présentes chez différents membres de la famille. Notons qu'il s'agit
d'une intuition clinique qui sera confirmée par l'étude des caractéristiques neuro-psychologiques des
familles de malades. En effet, si Selvini-Palazzoli suspectait des interactions précoces
dysfonctionnelles comme à l'origine du TCA, on approche de l'idée qu'un trouble serait partagé par
la famille. Les apports neuro cognitifs apporteront une résonance à cette intuition en retrouvant chez
les parents de malades les mêmes troubles des fonctions exécutives à minima, pouvant expliquer ses
difficultés dans les interactions 30,31.
28
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
De plus, si nous n'avons pas actuellement d'argument pour retenir une responsabilité d'un
fonctionnement familial pathologique dans la genèse du trouble, il apparaît que les relations
familiales peuvent être grevées par le trouble et constituer un facteur de maintien 32, et inversement
que le bon fonctionnement de la famille est un facteur de bon pronostic pour le patient. Ainsi, même
s'il ne s'agit nullement d'un traitement étiologique, la thérapie familiale reste, à ce jour, la seule
ayant fait preuve de son efficacité dans l'anorexie mentale. La mise en évidence scientifique des
enjeux en cause et la validation statistique de l'effet positif d'une telle thérapie
28 28,33
a permis sa
recommandation pour les adolescents par le National Institute for Clinical Excellence NICE
34
et
l'HAS 8.
3.2. Influence de l'environnement à l'échelle de la société sur l'anorexie mentale.
Si l'environnement familial a été mis en cause au cours des théorisations sur l'anorexie, il en
est de même pour le climat sociétal dans lequel naît le trouble. Jadis décrite comme une maladie
touchant les jeunes filles d'un milieu aisé, l'anorexie mentale soulève la question de l'impact d'une
société occidentale valorisant la maigreur sur l'apparition de troubles alimentaires.
Actuellement, l'augmentation de l'incidence de l'anorexie dans les pays à bas et moyens revenus
suggère que les mutations culturelles associées à l'industrialisation pourraient faire augmenter la
prévalence des troubles alimentaires 7. Le style de vie occidental pourrait être mis en cause par ses
habitudes nutritionnelles ou l'internalisation d'un idéal de minceur. Cependant, si l'insatisfaction
corporelle a été identifiée comme un facteur de risque des troubles alimentaires
35
, le rôle de la
pression socio-culturelle et l'internalisation de l'idéal de minceur dans l'installation de l'anorexie n'a
pas été confirmé
36
. Certains auteurs considèrent que cette influence occidentale pourrait
simplement faire augmenter le nombre d'individus qui débutent des comportements de restriction
alimentaire ou d'hyperactivité dans le but de mincir pour répondre à cet idéal, ce qui pourrait induire
des troubles alimentaires chez les personnes génétiquement vulnérables à ce type de pathologie 36.
Dans ce contexte, un projet de loi pour la prévention de l'anorexie et la lutte contre l'incitation à la
maigreur excessive a été adopté le 17 Décembre 2015 par l'Assemblée Nationale dans le cadre de
la loi santé
37
. Ce décret doit entrer en application fin 2016 et rendra obligatoire pour les
mannequins de justifier de leur état de santé par un certificat médical (l'idée d'un IMC minimum
comme en Italie ou en Espagne a été abandonnée) et obligera à signaler par une mention légale
toute photographie commerciale où le corps a été retouché.
29
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
3.3. Anorexie et dépression aujourd'hui
Concernant les liens entre anorexie et dépression, première hypothèse de Freud, on estime
actuellement qu'un épisode dépressif majeur sur la vie entière est retrouvé chez 50 à 75 % des sujets
avec anorexie mentale selon les études
38–40
. Selon une récente méta-analyse portant sur le 15-34
ans, les patients avec anorexie mentale ont un risque 18 fois supérieur de mort par suicide par
rapport à une population témoin
mentale
5,7
41
. Le suicide est responsable de 20 % des décès dans l'anorexie
. La prévalence de tentative de suicide (TS) chez les sujets avec anorexie mentale est
estimée entre 3 et 29.7 % selon les études 42–45. En effet, selon la théorie interpersonnelle du suicide,
un individu pour devenir capable de tenter de se suicider, doit acquérir une moindre peur de la mort
associée à une plus grande tolérance à la douleur
répétée à la douleur par la faim
47
46
. Dans le cas de l'anorexie mentale, l'exposition
associée à une diminution de la sensibilité à la douleur, qu'elle
soit innée ou acquise, 48 pourrait contribuer à augmenter la prévalence des TS dans cette population,
indépendamment de l'existence d'un épisode dépressif majeur 49.
Les études de jumeaux permettent de discriminer l'influence de l'environnement de la détermination
génétique, en comparant les jumeaux homozygotes qui partagent le même patrimoine génétique à
des jumeaux hétérozygotes qui ne partagent que le même environnement familial. Une récente
étude portant sur une large cohorte de jumelles suédoises a montré que le risque de TS chez des
patientes anorexiques était largement lié à des facteurs génétiques et non environnementaux 49.
A contrario, le risque de dépression dans l'AM est significativement lié à des facteurs
environnementaux, mais pas à des facteurs génétiques 49. En conséquence, les auteurs suggèrent aux
cliniciens d'être attentifs en particulier aux antécédents familiaux de TS plutôt qu'à une dépression
en cours afin d'évaluer le risque suicidaire.
Ainsi, certaines anciennes intuitions cliniques, telles que le lien entre anorexie et dépression, se sont
vues précisées par l'avancée de la science, et d'autres, comme l'imputabilité directe d'un
dysfonctionnement maternel ont été écartés. La nosographie internationale a dû suivre l'évolution de
ces conceptualisations.
30
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
3.4. Du DSM IV au DSM 5
Suivant les évolutions du cadre théorique, les critères diagnostics de l'anorexie mentale de la
classification de l'American Psychiatric Association (APA) ont été modifiés en 2013.
Critères DSM-IV-TR de l’anorexie mentale
Le diagnostic repose sur la présence de chacun des éléments suivants :
Refus de maintenir le poids corporel au niveau ou au-dessus d’un poids minimum normal pour l’âge et
pour la taille (p. ex., perte de poids conduisant au maintien du poids à moins de 85 % du poids attendu,
A.
ou incapacité́ à prendre du poids pendant la période de croissance conduisant à un poids inférieur à 85 %
du poids attendu).
B. Peur intense de prendre du poids ou de devenir gros, alors que le poids est inferieur à la normale.
C.
Altération de la perception du poids ou de la forme de son propre corps, influence excessive du poids ou
de la forme corporelle sur l’estime de soi, ou déni de la gravité de la maigreur.
Chez les femmes post-pubères, aménorrhée c.-à-d. absence d’au moins trois cycles menstruels
D. consécutifs (une femme est considérée comme aménorrhéique si les règles ne surviennent qu’après
administration d’hormones, par exemple œstrogènes).
Quand le trouble débute avant la puberté́ , les manifestations de cette dernière sont retardées ou stoppées
(arrêt de la croissance ; chez les filles, absence de développement des seins et aménorrhée primaire ;
E.
chez les garçons, absence de développement des organes génitaux). Après la guérison, la puberté́ se
déroule souvent normalement ; les règles n’apparaissent toutefois que tardivement.
Type restrictif (restricting type) : pendant l’épisode actuel d’anorexie mentale, le sujet n’a pas, de manière
régulière, présenté́ de crises de boulimie ni recouru aux vomissements provoqués ou à la prise de purgatifs
(c.-à-d. laxatifs, diurétiques, lavements).
Type avec crises de boulimie/vomissements ou prise de purgatifs (binge-eating/purging type) : pendant
l’épisode actuel d’anorexie mentale, le sujet a, de manière régulière, présenté́ des crises de boulimie et/ou
recouru aux vomissements provoqués ou à la prise de purgatifs (c.-à-d. laxatifs, diurétiques, lavements).
Critères DSM-5 de l’anorexie mentale
Le diagnostic repose sur la présence de chacun des éléments suivants :
A. Restrictions énergétiques menant à un poids inférieur au poids normal pour le sexe, l’âge et la taille.
B.
Peur intense de prendre du poids ou de devenir gros ou persistance d'un comportement qui interfère avec
la prise de poids.
C.
Altération de la perception du poids et du corps avec influence sur l’estime de soi et manque persistant
de reconnaissance de la gravité de la maigreur actuelle.
31
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
Ces nouveaux critères semblent mieux s'adapter à l'épidémiologie actuelle de l'anorexie mentale.
Par l'abandon de l'aménorrhée comme critère diagnostic, la nouvelle nosographie permet d'inclure
les formes masculines et pré-pubères en augmentation 50–52.
De plus, si le DSM IV 53 retenait des critères diagnostics impliquant la détermination du patient et
connotés négativement (« refus de maintenir un poids au niveau ou au-dessus du poids minimum
attendu pour l'âge et pour la taille », « déni de la gravité de la maigreur »), le DSM 5 54 abolit cette
notion de volonté pour aller vers des descriptions plus neutres (« restriction des apports
énergétiques par rapport aux besoins » « manque persistant de reconnaissance de la gravité de la
maladie ») 27.
En effet, l'intentionnalité de certaines autres conduites « anorexiques » tend à être infirmée.
L'hyperactivité par exemple, jadis considérée comme une démarche volontaire pour perdre du poids,
a été étudiée dans une sur modèle animal avec l'hypothèse d'une hyperactivité physiologiquement
liée à la restriction alimentaire
55
. Une surexpression du récepteur 5-HT4 de la sérotonine a été
retrouvée chez des souris en restriction alimentaire, cette surexpression était aussi retrouvée chez
les souris avec hyperactivité. Le récepteur 5-HT4 de la sérotonine intervient dans le noyau
accumbuns participant au système de la récompense, ce qui laisse supposer qu'une telle particularité
biologique peut exposer tant à la restriction alimentaire qu'à l'hyperactivité. Ces éléments
laisseraient entendre que l'hyperactivité dans l'anorexie pourrait correspondre à une propension
déterminée génétiquement, au même titre que la restriction alimentaire, sans qu'une recherche
d'amaigrissement soit toujours en cause.
Ainsi, certains auteurs plaident pour des critères diagnostics moins jugeants
56
, arguant que les
symptômes retenus comme au cœur de la maladie anorexique mêlent des comportements primaires
(traits du patient) et des séquelles physiques et psychiques de la dénutrition.
.
4. Modèle bio-psycho-social en trois temps
Dans les années 1990, des modélisations médicales des maladies psychiatriques émergent. Le
modèle de Vitousek et Make en 1994 fait une place à la génétique d'une part, à la famille d'autre
part et à l'environnement social dans un troisième lieu, sans interaction entre les causes et sans rétro
action des effets sur les facteurs étiopathogéniques.
32
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
Facteurs
Facteurs
familiaux
Facteurs
génétiques
génétiques
Facteurs
physiologiques
Facteurs
et de
physiologiques
développement
et de
développement
Personnalité
Personnalité
Facteurs socio
Facteurs
culturels
Socio-culturels
Influence du
groupe des pairs,
etc.. du
Influence
PATIENT
groupe de
pairs
SYMPTÔME
Symptôme
Modèle de Vitousek et Make
Ce modèle décrit un impact à sens unique de la famille vers le patient, des gènes vers le patient,
avec l'idée que ces facteurs déterminent l'évolution de la maladie sans réciprocité.
Cette représentation a semblé restrictive à Dare et Eisler qui la reprennent en 1997 dans la
deuxième version du Manuel pour le traitement des troubles alimentaires
57
. A cette
conceptualisation, Dare et Eisler ajoutent la notion de réciprocité, de conséquences du trouble sur le
fonctionnement familial notamment et ouvrent la voie à différentes écoles de thérapie familiale.
33
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
Modèle de Dare et Eisler58
Dès 1993, le modèle théorique de Garner a apporté l'idée d'une étiologie multifactorielle, biopsycho-sociale en trois temps. Dans ce modèle, le contrôle du poids est central et retenu par le
patient comme le moyen d'évaluer sa valeur et son efficacité personnelle.
Modèle de Garner
34
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
Garner repère un premier temps des facteurs prédisposant au trouble alimentaire, qu'ils soient
biologiques (génétiques), psychologiques (traits de personnalité, fonctionnement cognitif) ou
sociaux (relations familiales, pression sociale, idéal de minceur).
Le second temps est celui des facteurs précipitants d'abord biologiques représentés par la puberté et
son lot de modifications endocriniennes, ou encore l'exposition à un régime. Les facteurs
psychologiques sont le stress et la mésestime de soi dans la période d'adolescence. Les facteurs
sociaux sont les situations familiales de rupture et le départ du domicile parental.
Un troisième temps est représenté par les facteurs de maintien qui peuvent, de même, être
biologiques comme les conséquences de la dénutrition, ou psychologiques comme l'évitement de la
confrontation aux émotions induisant un isolement relationnel de mauvais pronostic 59.
Ainsi, les conceptualisations médicales de l'anorexie mentale ont suivi l'évolution des connaissances
en intégrant peu à peu une interdépendance entre le malade et son environnement. Dans ce contexte,
l'approche psychologique des troubles alimentaires a intégré ces relations pour développer de
nouveaux modèles.
5. L'approche cognitivo-comportementale.
Depuis la fin du XXème siècle, on assiste à l'essor des sciences cognitives et
comportementales avec des thérapies associées à cette approche (Thérapie Cognitive et
Comportementale : TCC). Basées sur l'idée qu'un trouble naît d'un apprentissage de comportements
inadaptés, et de l'importance des croyances et facteurs extérieurs dans leur maintien, les TCC
proposent de remanier les schémas cognitifs dysfonctionnels par un nouvel apprentissage. Ces
schémas sont un ensemble stable de croyances acquises, élaborées en fonction des expériences
passées. Ils influencent le traitement des informations. En travaillant sur ces schémas, ainsi que sur
les distorsions cognitives (logique inadaptée),
la TCC cible les pensées dysfonctionnelles
reconnues comme étant des facteurs d'entretien de la maladie anorexique 60.
Pour Fairburn, le schéma en cause dans l'anorexie serait que l'idée que l'estime de soi est déterminée
par le poids et l'image corporelle
61
. Les distorsions cognitives fréquemment en jeu seraient
l'abstraction sélective (occulter un ou plusieurs paramètres d'une situation pour n'en retenir que ceux
qui vont dans le sens du schéma dysfonctionnel), la sur-généralisation (l'extrapolation excessive
d'une situation) et la pensée magique (la mise en lien de causes et de conséquences qui n'ont pas de
35
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
lien logique).
Nous verrons que ces mécanismes peuvent se retrouver dans les paramètres cognitifs ciblés par la
remédiation cognitive.
L'efficacité des TCC a été montrée dans le traitement de la boulimie par différentes méta-analyses et
revue systématique de littérature 62–66. Dans l'anorexie mentale il n'existe pas de preuve suffisante à
ce jour pour reconnaître l'efficacité de la TCC
67
. Si le versant comportemental ne semble pas
montrer d'efficacité dans l'anorexie, les approches cognitives sont un domaine d'étude privilégié
dans le traitement de l'anorexie mentale 36.
Une récente modélisation intégrant les différents modèles présentés plus haut a été publiée par
Gorwood en 2016 68. Cette schématisation reprend la plupart des facteurs décrits jusqu’alors autour
d’un concept d’homéostasie psychique proposée par l’auteur. Gorwood fait l’hypothèse d’une
transposition de l’homéostasie connue en biologie vers le domaine psychique, avec un état de bienêtre qu'il nomme « eudémonie » (du grec eudemonia : béatitude)
36
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
37
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
Parallèlement aux modélisations psychodynamiques et cognitivo-comportementales, la pathogenèse
de l'anorexie mentale a aussi bénéficié de multiples recherches en génétique, biologie et imagerie
fonctionnelle.
6. L'apport de la génétique.
L'héritabilité de l'anorexie mentale a été bien étudiée
69 70
. L'hypothèse d'une part génétique
dans l'anorexie mentale répondait initialement à l'idée d'une interaction entre des facteurs innés
(génétique) et acquis (environnementaux). Ainsi, l'agrégation familiale de l'anorexie est admise 71 et
on reconnaît une héritabilité de 28 à 74 %
72
. Des études de jumeaux ont montré un taux de
concordance de 50 à 75 % pour l'anorexie mentale
73
. Ces résultats suggèrent l'existence d'une
composante génétique dans l'étiopathogénie de l'anorexie mentale.
De nombreux travaux ont étudié différents gênes candidats, codant pour des neurotransmetteurs
(dopamine, sérotonine, opioïdes), des neuropeptides (leptine, ghréline, récepteurs à la
mélanocortine), des substances impliquées dans la maturation cérébrale (BDNF : Brain Derived
Neurotrophic Factor) et dans le système neuro-endocrinien tel que l'axe hypothalamo-pituitogonadique impliqué dans la régulation de l'appétit, de l'humeur et la reproduction. Malgré certains
résultats encourageants, une large étude récente étudiant 182 gênes candidats n'a pas mis en
évidence d'association significative entre un de ces gênes et l'anorexie mentale
74
. De même, des
analyses d'association avaient suggéré l'implication du chromosome 1 dans l'anorexie mentale
75
,
cependant plusieurs larges études d'association pan-génomique n'ont retrouvé aucun locus
significativement lié à la pathologie anorexique 76–78.
Ainsi, l'agglomération familiale semble montrer un terrain génétique commun mais aucun gêne n'a
été identifié comme imputable spécifiquement ou systématiquement dans l'anorexie mentale.
L'hypothèse d'une causalité directe entre un ou plusieurs gènes et la maladie anorexique tend à être
infirmée, au profit d'un modèle étiopathogénique plus complexe avec des marqueurs génétiques de
susceptibilité qui évoluent dans le temps, ne laissant pas de place à une frontière rigide entre inné et
acquis.
La recherche s'oriente ainsi vers une approche épigénétique, soit l'étude des mécanismes
moléculaires qui modulent l'expression des gènes, en fonction de l'environnement. Les
modifications épigénétiques impliquent des interactions précoces et permanentes entre
38
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
environnement et gènes. La capacité à s'adapter est ainsi sous-tendue par des mouvements
homéostatiques complexes entre génome et environnement.
La découverte de l'épigénétique a amené la notion de plasticité cérébrale chez l'adulte et ouvre les
portes, dans le champ psychiatrique, à de nouvelles modalités thérapeutiques.
On peut également faire l'hypothèse qu'à la puberté, les modifications hormonales peuvent avoir un
rôle sur l'expression de certains gènes impliqués dans l'éclosion de la pathologie anorexique.
7. Modèles biologiques
Parallèlement aux approches psychologiques, la fin du XIXème siècle a vu émerger de
nouvelles hypothèses organiques pour l'anorexie mentale.
Dès 1914, l'endocrinologue allemand Morris Simmonds propose l'idée d'une origine hypophysaire
de l'anorexie. Son hypothèse sera finalement réfutée en 1937 par Harold-Leeming Sheehan et ses
travaux sur la nécrose antéhypophysaire ischémique du post-partum permettront de distinguer
l'anorexie mentale d'une anorexie symptôme d'origine endocrinienne. Les travaux autour de
l'imputabilité de facteurs biologiques dans la pathogenèse de l'anorexie mentale se sont poursuivis,
mais la discrimination des stigmates biologiques de la dénutrition et de paramètres physiologiques
pouvant intervenir dans la pathogenèse du trouble est complexe.
Actuellement, la question de l'interdépendance entre l'état psychique et somatique dans l'anorexie
mentale est toujours ouverte. En effet, plusieurs arguments sont avancés dans la littérature en faveur
d'une part biologique dans l'origine de l'anorexie mentale 79. Le début des troubles chez des jeunes
filles adolescentes a souvent fait évoquer la pression sociale vers la recherche de minceur comme
un facteur déclenchant de l'anorexie mentale. Or la prévalence du trouble reste faible comparée à la
population exposée à cette pression environnementale. De plus, la présentation stéréotypée,
l'héritabilité et l'âge développemental assez spécifique du début des troubles ne sont pas sans
appeler l'idée d'une vulnérabilité biologique. Aussi, l'adolescence, par ses modifications biologiques,
familiales, sociales requiert un haut degré de flexibilité
79
. Cette période peut mettre à l'épreuve la
rigidité psychique de certaines personnes vulnérables face au changement 80.
Des interactions entre facteurs biologiques à l'adolescence et vulnérabilité génétique sont suspectées.
En effet, des études de jumeaux n'ont pas mis en évidence de facteur génétique dans l'apparition de
TCA chez des enfants de 11 ans, en revanche, l'influence de ces facteurs était retrouvée chez des
patients de 17 ans, après la puberté 81.
39
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
La ménarche est associée à de nombreux changements métaboliques notamment dans la régulation
des neuropeptides. Les oestrogènes interviennent dans la régulation des fonctions sérototinergiques
82
, de même que le cortisol et le CRH (Cortisol Releasing Hormone) 83, et donc dans la réponse au
stress.
De plus, à la puberté se produit une phase de synaptogénèse, de sélection neuronale et de
myelinisation dans les régions frontales et limbiques, ce qui fait de l'adolescence, un moment
d'intégration des processus émotionnels à la cognition 84.
L'hypothèse de Kaye est celle d'une anomalie dans la régulation sérotoninergique pré existant chez
les patients anorexiques, responsables des symptômes pré-morbides d'anxiété et d'inhibition
79
. Ce
tempérament dysphorique implique une dysrégulation émotionnelle et des processus de récompense.
Sur ce terrain vulnérable, les modifications biologiques telles que les remaniements métaboliques
des hormones féminines à l'adolescence peuvent être un facteur déclenchant de déstabilisation d'une
régulation déjà précaire du métabolisme sérotoninergique. La réduction de prise énergétique, par
diminution d'ingestion de tryptophane (acide aminé indispensable à la production de sérotonine)
85
permettrait de moduler grossièrement l'activité sérotoninergique et suspendre l'inconfort lié à la
prise alimentaire sur ce terrain et entretiendrait le trouble alimentaire. Cependant la restriction
alimentaire ne permettrait qu'un bref répit de l'humeur dysphorique et induirait d'autres
modifications biologiques qui entretiendraient également les troubles. Malgré cette probable
dysrégulation sérotoninergique, les traitements antidépresseurs sérotoninergiques n'ont pas fait la
preuve d'une efficacité dans le traitement de l'anorexie mentale 86.
D'autres travaux ont étudié les anomalies de la régulation alimentaire. La prise alimentaire est
régulée par des mécanismes que l'on peut rapporter à deux systèmes : homéostatique et hédonique
(non homéostasique) 87.
40
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
Schématisation de la régulation alimentaire 58
Le système homéostatique correspond à la régulation alimentaire en fonction des besoins et des
réserves. Il est étroitement lié au métabolisme énergétique et fait intervenir des hormones
orexigènes et anorexigènes. Il s'agit d'un système dit « homéostatique » car il a vocation à maintenir
un équilibre entre la prise alimentaire et les besoins métaboliques. Son fonctionnement pourrait être
qualifié de « logique », « quantitatif », « objectif », il régule la faim et la satiété.
Les perturbations du système homéostatique observées dans l'anorexie mentale sont une
augmentation des taux d'hormones orexigènes circulantes (telles que la ghréline
88,89
), et une
diminution des taux d'hormones anorexigènes (telles que la leptine 90,91) en réponse à la diminution
de la prise alimentaire. Les dysfonctionnements du système homéostatique de régulation de la prise
41
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
alimentaire sont donc des conséquences du trouble alimentaire.
La ghréline est une hormone sécrétée en réponse à la vacuité gastrique. Elle agit au niveau central
pour augmenter la prise alimentaire, et elle pourrait aussi être impliquée dans le maintien d'une
homéostasie glycémique en situation de restriction calorique sévère. Cependant, malgré
l'augmentation adaptative du taux de ghréline circulant chez les patients avec anorexie mentale,
cette tentative d'homéostasie n'est pas suffisante pour maintenir une prise alimentaire suffisante.
Le système hédonique est représenté par le système méso-cortico-limbique. Il intervient dans la
régulation de la prise alimentaire par le biais des mécanismes motivationnels en lien avec le
système de récompense. Ce système a un fonctionnement que l'on pourrait qualifier de « subjectif »
et concerne plutôt l'appétit que la faim. La prise alimentaire est donc en partie régulée par le plaisir
et la motivation à manger.
Le système hédonique est composé des neurones dopaminergiques de l'aire tegmentale ventrale qui
se projettent sur les aires limbiques antérieures dont le noyau accumbens (du striatum ventral) et sur
le cortex préfrontal. Ces structures sont impliquées dans l'apprentissage de l'aspect hédonique de
l'alimentation, orientant l'intérêt du sujet vers une nourriture palatable (nommée liking par Berridge
92
), et l'aspect motivationnel (nommé wanting ). Le plaisir sensoriel attribué à l'alimentation est
modulé dans ces régions. L'amygdale intervient également dans cette régulation de la motivation
alimentaire, une structure étroitement liée avec la régulation émotionnelle de l'anxiété 93.
42
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
Les neurones dopaminergiques de l'aire tegmentale ventrale (mesencéphale) ciblent le noyau accumbens (système limbique) et le
cortex préfrontral. Dans les rectangles noirs on trouve les récepteurs identifiés dans chacune des régions cérébrales concernées.
D1 à D5 : récepteurs dopaminergiques
CRH : Corticotropin Releasing Hormone
GABA : Acide Gamma Aminobutyrique
NPY : Neuropeptide Y
Système méso-cortico-limbique
58
Le système hédonique et le système homéostatique sont en corrélation. En effet, les hormones du
système homéostatique telles que la leptine (anorexigène) et la ghréline (orexigène) interviennent
sur la régulation du système méso-cortico-limbique 94, et peuvent moduler la valeur motivationnelle
de la nourriture en fonction des besoins énergétiques. La leptine diminue la fréquence de décharge
des neurones dopaminergiques de l'aire tegmentale ventrale, contribuant à une moindre libération de
dopamine ce qui influe négativement sur le renforcement positif de la conduite alimentaire
95
.
Inversement, la ghréline augmente la fréquence de décharge des neurones dopaminergique et
augmente la libération de dopamine et donc renforce le comportement de prise de nourriture
plaisante 96. Cette interaction semble avoir une valeur adaptative, le système homéostatique pouvant
induire sur le niveau d'anxiété de l'organisme afin qu'il puisse adopter le comportement le mieux
adapté à l'état métabolique et nutritionnel 58.
43
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
Ainsi, la régulation de la prise alimentaire fait intervenir deux systèmes : biologique homéstatique
et hédonique lié à l'état émotionnel. Dans l'anorexie mentale, les altérations du système
homéostatique semblent être des conséquences du trouble. Le système hédonique en revanche, fait
intervenir le système de la récompense, perturbé dans les cas d'anorexie ou la perte de poids est plus
pourvoyeuse de récompense que la prise alimentaire. La notion de cause ou de conséquence dans le
trouble alimentaire reste cependant à clarifier 97.
Des pistes thérapeutiques ont été explorées en lien avec ces systèmes de régulation de la prise
alimentaire.
Malgré l'absence de preuve concernant l'imputabilité du système homéostatique dans la
pathogenèse de l'anorexie, des essais de traitement par ghréline sous différentes formes chez des
patients anorexiques ont été menés
quotidienne pendant 14 jours
99
98–101
. Seule l'administration intra-veineuse de ghréline bi-
(n=5) était en faveur d'une diminution des douleurs épigastriques,
de la constipation, d'une augmentation la faim (en lien avec la sensation de vacuité gastrique, et déjà
retrouvée dans une autre étude en 2004 98) et d'une prise de poids. Ces résultats restent de très faible
ampleur statistique et n'ont, à ce jour, pas conduit à des propositions thérapeutiques sérieuses.
Concernant le système hédonique, nous avons vu que les perturbations observées dans l'anorexie
étaient potentiellement impliquées dans la pathogenèse de l'anorexie mentale. En effet, les
particularités du système de récompense et de la réponse à la dénutrition semblent être des traits
caractéristiques de l'anorexie mentale. Ces dysrégulations de la récompense conduisent à un
fonctionnement addictif et sont retenues par certains auteurs comme un des mécanismes clés des
troubles alimentaires 68,102.
Nous allons voir, à travers la notion d'endophénotype et l'apport de l'imagerie fonctionnelle,
comment l'étude de ces traits caractéristiques peut ouvrir de nouvelles voies thérapeutiques.
8. La notion d'endophénotype.
L'endophénotype (du grec endo : interne ; phainô : montrer et tupos : caractère, forme)
correspond à un caractère visible de l'intérieur, à la différence d'un exophénotype.
103
. La notion
d'endophénotype est issue de de l'entomologie des années 1950, on parlait alors d'endophénotype
pour décrire des traits cliniques ou biologiques intermédiaires, plus simples, plus élémentaires que
les phénotypes cliniques et plus proches de l'expression des gènes et de leur polymorphisme.
44
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
Cette notion a été évoquée pour la première fois dans le champ de la psychiatrie autour de la
schizophrénie en 1972
104
comme « un phénotype interne repérable par un test biochimique ou un
examen microscopique ». Plus récemment, la nouvelle conceptualisation de l'endophénotype
s'applique à un trait mesurable, non observable par une œil non aidé, et qui se trouve plus proche de
la génétique sous-jacente à un trouble que le phénotype clinique 105.
Les caractéristiques d'un endophénotype sont d'être: 105

associé au trouble dans la population,

héritable : l'endophénotype est associé à une variation génétique et montre une
coségrégation avec la maladie (ce qui le différencie d'un simple marqueur biologique qui
n'est pas forcément hérité),

indépendant de l'état du trouble, présent aux différents stades de la maladie,

présent chez les apparentés des malades à un plus haut degré que dans les familles saines et
à un moindre degré que chez le patient malade.
Certains auteurs ont ajouté que l'endophénotype devait également être :

cohérent d'un point de vue clinique et biologique

évaluable de façon sensible, spécifique et reproductible (sans forcément être quantitatif)
Les caractères les plus souvent utilisées en psychiatrie comme endophénotypes sont des variables
cognitives, électrophysiologiques, de neuro-imagerie 106.
L'étude des endophénotypes correspond à une démarche analytique en psychiatrie, au sens d'un
découpage de l'objet d'étude en unités plus élémentaires, dont le mécanisme est, en théorie, plus
simple à étudier et plus proche d'une réalité supposée génétique. Cette démarche en psychiatrie fait
débat
106
tant elle s'éloigne des préceptes d'Henri Ey qui soulignait la nécessité de « saisir la
pathologie totale ».
Cependant, l'hypothèse de traits endophénotypiques ouvre des perspectives thérapeutiques qui
semblent pertinentes cliniquement. En effet, si l'on fait l'hypothèse de traits hérités, présents chez le
patient et à un moindre degré dans sa famille, on perçoit l'intérêt d'agir sur ces traits probablement
omniprésents dans le fonctionnement familial. En découle l'indication d'une thérapie familiale et de
remédiation cognitive ciblant ces traits 30,106–109.
45
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
9. L'apport de la neuro-imagerie dans la compréhension de l'anorexie mentale.
9.1. Neuro-imagerie structurale.
Le fonctionnement cérébral dans les TCA a d'abord été étudié sous l'angle neuro-anatomique.
Les premières explorations structurales du cerveau atteint de TCA ont retrouvé un élargissement des
ventricules, une diminution du volume de substance grise et blanche notamment des lobes pariétaux
et temporaux à la phase aiguë de la maladie 110,111 ainsi que dans les zones des ganglions de la base
et du cortex somato-sensoriel impliquées dans le système de la récompense 112.
Ces particularités étaient réversibles à la reprise de poids
113,114
. Ces résultats correspondent donc
probablement à des conséquences de la dénutrition et ne permettent pas d'améliorer la
compréhension de la pathogenèse de l'AM.
Prenant en compte cette limite, d'autres auteurs ont observé des modifications cérébrales qui
persistaient après la renutrition
115,116
. Il s'agissait chez les patients anorexiques adolescents et
adultes d'une augmentation de volume de gyrus médian du cortex orbito-frontal. Le cortex orbitofrontal participe à l'évaluation de la nature et de l'importance d'un stimulus récompense, tel que la
nourriture, et est impliqué dans la régulation de la satiété.
De plus, les patients anorexiques présentent une augmentation de volume de la substance grise de
l'insula droite comparés aux témoins. Cette zone cérébrale intervient dans la reconnaissance de soi
et la conscience intéroceptive.
Ainsi, il semble exister certaines particularités cérébrales structurales dans l'anorexie mentale mais
ces données ont été largement précisées par l'apport de l'imagerie fonctionnelle.
9.2. Neuro-imagerie fonctionnelle.
Avec les avancées techniques de la neuro-imagerie, des études en imagerie fonctionnelle ont
pu être conduites, avec des outils permettant de mesurer l'activité métabolique du cerveau, telles
que l'IRM fonctionnelle, la TEP (Tomographie par Emission de Positons) et la SPECT (Single
Photon Emission Computerized Tomography).
Les premiers résultats montraient une activité cérébrale diminuée dans les cortex pariétaux,
cingulaires antérieurs et frontaux à la phase aiguë de la maladie. L’activité du cortex temporal
apparaissait aussi fréquemment modifiée, mais selon les études, on pouvait observer tant une
46
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
diminution qu'une augmentation de son fonctionnement 117. Chez les sujets ayant reçu un traitement
ou guéris, les résultats sont hétérogènes mais il semble persister des différences fonctionnelles par
rapports aux sujets sains
117
. D'autres travaux, vont aussi dans le sens de différences de
fonctionnement non liées au stade de la maladie en retrouvant des résultats indépendants du statut
nutritionnel
110,118
. Ces résultats sont en faveur du caractère endophénotypique de ces particularités
qui pourraient ainsi éclairer sur la pathogenèse de l'anorexie mentale.
Concernant les différences observées dans les résultats (hypo ou hyper fonctionnement du cortex
pariétal), l'équipe de B. Lask suggère qu'elles pourraient s'expliquer par un recrutement de
population d'âges hétérogènes dans les études, des sujets dont le développement cérébral est à des
stades différents, donc non comparables quant à l'impact de la pathologie sur le fonctionnement
cérébral 119.
Une revue de la littérature a donc été publiée en 2005
119
reprenant les travaux existants sur la
population des 8 – 16 ans avec une anorexie mentale d'installation précoce et proposant une étude
originale en SPECT dans cette population (n=24). Il est en effet intéressant d'étudier cette
population comme un sous-groupe particulier car avant 15 ans le cerveau n'a pas atteint sa taille
définitive, ni sa pleine maturité qu'il n'atteint qu'en fin d'adolescence. L'étude retrouve une
diminution significative unilatérale du flux sanguin dans la région temporale et les régions
adjacentes chez 75% des sujets malades. Cette particularité semble indépendante du statut
nutritionnel, de la durée de la maladie, de l'humeur et de la psychopathologie du TCA.
Les structures cérébrales atteintes (cortex temporal, hypothalamus, amygdale, thalamus,
hippocampe) interviennent dans la gestion des émotions, de l'appétit, de la mémoire, de la
motivation et de la perception. Cliniquement, cette diminution de flux est associée à une diminution
des compétences visuo-spatiales, de la mémoire visuelle complexe et à une amélioration des
capacités de traitement de l'information. Lask retient l'hypothèse d'un phénomène primaire lié à
l'installation du trouble alimentaire ou, moins probablement, d'une conséquence de la dénutrition
qui apparaîtrait rapidement et disparaîtrait très lentement voire resterait comme stigmate du trouble.
L'hypothèse d'un marqueur fonctionnel d'un trait prédisposant à la maladie est privilégiée, laissant
le sujet en proie aux facteurs précipitants que peuvent être la puberté ou un régime 119
Plus récemment, le rôle du striatum ventral, région intervenant dans le système de récompense, a
été plus précisément étudié en IRM fonctionnelle par Fladung et al chez des patients avec anorexie
mentale adultes 120 et adolescents 121. L'épreuve consistait en l'exposition visuelle à des images d'un
corps d'une même femme avec des IMC variant de 11 à 30. La réaction des sujets était évaluée de
manière déclarative (réponse à la question « Imaginez que vous avez la même forme de corps que
47
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
cette femme. Comment vous sentiriez vous ? ») et en IRM fonctionnelle. Durant cette tâche, les
patients avec anorexie mentale rapportaient plus de sentiments positifs devant le stimulus de souspoids (IMC entre 11 et 16) et présentaient une plus grande activation du striatum ventral par rapport
aux contrôles. Ces résultats vont à l'encontre de l'hypothèse d'un profil « anhédonique » proposé par
de précédents travaux
122
. Actuellement, on admet plutôt l'idée d'une altération globale du système
de récompense et des processus émotionnels, incluant l'intégration des composantes cognitives et
physiologiques des émotions
102
.
En ce sens, une récente étude de l'Inserm, Paris Descartes et l'hôpital Sainte Anne a poursuivi les
recherches de Fladung et al. en évaluant la réponse à des stimuli de maigreur et d'obésité de façon
cognitive (réponse à la même question) et électrophysiologique par la réaction de conduction
cutanée (Skin Conduction Response : SCR) chez des femmes adultes avec anorexie mentale (n=71)
versus sujets sains (n=20)
102
. Les auteurs justifient la mesure de la SCR par le fait que la non
reconnaissance de la gravité de la maigreur fait partie des critères diagnostics de l'anorexie mentale
54
et qu'une évaluation déclarative uniquement ne serait pas significative. Les auteurs proposent
donc de rechercher des critères plus proches de la physiopathologie du trouble et plus fiables, que
sont les endophénotypes. La mesure de la SCR est considérée comme une évaluation pertinente de
la réaction émotionnelle chez les sujets dont les capacités d'introspection peuvent être altérées.
Suite aux travaux de Fladung, les auteurs retiennent que les spécificités de réaction à la maigreur
peuvent constituer un endophénotype de l'anorexie mentale.
Cette étude retrouvait une augmentation des sentiments positifs pour les images de sous-poids et
une diminution des sentiments positifs pour les stimuli de surpoids sur l'évaluation déclarative des
patientes par rapport aux témoins. La différence entre patientes et témoins est moins marquée avec
les images de surpoids. La mesure de la SCR retrouvait une augmentation de la réponse aux stimuli
de sous-poids chez les patientes comparées aux témoins. Cette différence n'était pas observée avec
les stimuli de poids normal et de surpoids.
Ce travail débouche sur une remise en question de l'idée de « peur de grossir », au profit de
l'hypothèse de « l'appétence pour la maigreur ». En d'autres termes, ces travaux vont plutôt dans le
sens d'un fonctionnement addictif que phobique et suggèrent comme nouvelle approche
thérapeutique la remédiation cognitive et la méditation en pleine conscience 123.
Ces données peuvent aussi autoriser un changement de regard sur l'anorexie, maladie souvent
décrite comme une adaptation du corps à une organisation psychique pathologique. Fort de ces
découvertes sur les particularités intrinsèques du système de récompense, on peut représenter
l'anorexie mentale comme une adaptation psychique à un déséquilibre somatique 124.
48
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
Résumé 1ère partie
L'anorexie mentale est une maladie fréquente et grave associée à un taux de mortalité
important, tant par cause physique (complications de la dénutrition) que psychique
(suicide). Au carrefour entre somatique et psychique, de nombreux axes de recherche
(médical, psychologique, biologique, génétique) convergent autour de l'anorexie
mentale mais son étiologie est toujours méconnue.
L'approche psychanalytique a rapidement souligné l'importance de la famille dans la
genèse du trouble, avec la proposition de thérapie familiale dans le traitement de
l'anorexie mentale. Cette thérapie est à présent la seule à avoir montré une supériorité
dans cette indication chez l'enfant et l'adolescent. Mais d'autres approches doivent
encore être développées.
Parallèlement, des recherches en biologie ont amené l'hypothèse de dysrégulations de la
prise alimentaire par des anomalies du système de récompense en lien avec des
caractéristiques cognitives propres à l'anorexie. De même la notion de flexibilité a été
soulevée dans les processus adaptatifs sollicités à l'adolescence, période classique
d'éclosion de l'anorexie mentale.
Les recherches en génétique ont retrouvé une forte héritabilité dans l'anorexie mentale
sans avoir pu mettre en évidence de gêne responsable. Par ailleurs, la recherche s'est
orientée vers l'étude d'endophénotypes, des marqueurs caractéristiques de la maladie,
hérités, présents chez les malades et leurs apparentés. Au plan thérapeutique, la
recherche d'une approche autour de ces endophénotypes est décrite comme prometteuse
dans la littérature.
Nous aborderons plus en détail dans une deuxième partie le profil cognitif
endophénotypique des patients avec anorexie mentale et la thérapie par remédiation
cognitive qui cible les traits de ce profil. Cet axe de travail prolonge la réflexion sur les
modèles théoriques et son évolution vers des approches basées sur des preuves
scientifiques.
49
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
Deuxième partie
La remédiation cognitive
dans le traitement de l'anorexie mentale
50
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
Nous avons vu que les modèles théoriques impliqués dans l'anorexie ont d'abord supposé un
substratum biologique, puis l'hypothèse de carences familiales pour finir par s'intéresser à des
marqueurs cognitifs et biologiques caractéristiques d'un terrain à risque. Ce cheminement est
émaillé du paradoxe entre des particularités biologiques d'allure innée et l'absence de traitement
chimique efficace. La remédiation cognitive, en s'appuyant sur l'hypothèse de la plasticité cérébrale
nous permettra de résoudre en partie ce paradoxe en abordant, par la psychothérapie, les marqueurstraits cognitifs de l'anorexie mentale. Associée à la notion d'épigénétique induisant des possibilités
de modifications par l'expérience des paramètres génétiques et biologiques, on entrevoit la place
d'une telle thérapie dans l'anorexie mentale.
1. Le fonctionnement cognitif dans l'anorexie mentale et ses implications cliniques.
Le fonctionnement cognitif est étudié en neuropsychologie. La neuropsychologie étudie les
activités mentales ainsi que leurs relations avec les structures cérébrales qui les sous-tendent
(définition de Hécaen, 1972). En d'autres termes, l'approche étudie les paramètres cognitifs
nécessaires à la réalisation d'une tâche : mémoire, attention, langage, perception et fonctions
exécutives.
51
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
Les fonctions cognitives.
Cette discipline se situe au carrefour entre neurologie et psychologie, ses liens avec la psychiatrie
tendent à se resserrer avec le temps. L'apport de la neuropsychologie à la psychiatrie est en partie
liée au fait que les maladies psychiatriques sont parfois accompagnées de troubles cognitifs
125
qui
peuvent tout autant grever la qualité de vie du patient que les symptômes psychiatriques. L'intuition
d'un style cognitif particulier à l'anorexie mentale était déjà présente dans les travaux de Hilde
Bruch 126, elle décrivait un « style concret » avec des difficultés d'abstraction.
Le profil cognitif des patients anorexiques a été étudié plus en détails sous l'angle de la
neuropsychologie dans les années 2000
127,128
. Les traits de personnalité classiquement attribués à
l'anorexie mentale ont pu être mis à l'épreuve des explorations neuropsychologiques.
Un large spectre de fonctions cognitives a été étudié dans les TCA, comprenant l'intelligence, les
fonctions exécutives (dont les capacités attentionnelles et la flexibilité mentale, l'inhibition et la
planification) la mémoire et les capacités visuo-spatiales (dont la cohérence centrale). Les résultats
de ces travaux ont validé certaines intuitions cliniques, mais ont aussi coupé court à certaines idées
reçues sur les caractéristiques classiquement attribuées à l'anorexie mentale.
52
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
1.1. L'intelligence
Une supériorité intellectuelle est souvent supposée accompagner les tableaux d'anorexie
mentale. Une méta analyse de 2010 a repris les données de 30 études concernant l'intelligence chez
des sujets avec anorexie
129
. Il apparaît que les compétences intellectuelles prémorbides sont
significativement meilleures chez les patients qu'en population générale (+10.8 points en moyenne
au NART : National Adult Reading Test où la moyenne est à 100). De même, l'intelligence actuelle
(durant la maladie) semble supérieure chez les patients par rapport aux témoins (+5.9 points aux
échelles de Wechler où la moyenne et à 100).
Notons que les résultats obtenus avec la NART doivent être pondérés, cette échelle évalue
principalement les compétences verbales et a été élaborée pour quantifier les défects cognitifs en
lien avec la démence. Dans le cas des échelles de Wechler, les compétences verbales et de
performances sont évaluées.
Par ailleurs, les recherches les plus récentes concluent à des résultats très hétérogènes, avec parfois
des performances supérieures à la normale
130,131
, dans la moyenne
132–134
, voire très faible lorsque
l'IMC est bas 135.
Comme nous l'avons vu plus haut, l'anorexie mentale est souvent associée à un épisode dépressif
majeur mais cette comorbidité ne semble pas avoir de répercussions sur les performances
intellectuelles globales 136–138 mais une certaine incidence sur les subtests de compréhension verbale,
raisonnement perceptif et mémoire de travail 138.
Ainsi, si certains travaux retrouvent des arguments en faveur d'une intelligence élevée dans
l'anorexie mentale, leurs résultats sont discutables. Néanmoins, cette tendance à des performances
intellectuelles conservées confèreraient à l'anorexie mentale un statut particulier parmi les maladies
mentales et sont importantes quand il s'agit d'envisager la thérapeutique. En effet, de nombreux
travaux sont menés dans le champ de la pathologie mentale pour reconnaître l'intelligence comme
facteur positif de réponse à la psychothérapie, considérant qu'un bon niveau intellectuel reflète un
insight développé (par exemple dans le champ de l'autisme
139
). Cependant, si meilleure est la
réponse au traitement avec un QI élevé, le pronostic de l'anorexie mentale est loin d'être meilleur
que celui des autres pathologies avec atteinte cognitive (schizophrénie, trouble bipolaire). On peut
donc supposer que d'autres facteurs interviennent dans la réponse au traitement dans l'anorexie
mentale, tels que des paramètres émotionnels.
53
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
1.2. L'attention
Les compétences attentionnelles des sujets avec anorexie mentale sont étudiées depuis les
années 1990. Les premiers travaux réalisés, de faible ampleur, ne retrouvaient pas de différence
significative entre sujets malades et non malades
140,141
. Certaines études retrouvent cependant une
augmentation du temps de réaction chez les malades, une particularité qui s'amendait avec la
guérison 137.
Par ailleurs, il est souvent noté en clinique chez les patients avec anorexie mentale des perturbations
de l'attention par des stimuli alimentaires (rumination alimentaires, pensée « parasitée » par
l'alimentation). Ce biais attentionnel appelé « effet d'interférence » peut être évalué par des tests qui
évaluent l'attention sélective et l'inhibition (tels que le Stroop alimentaire, les tests
neuropsychologiques explorant les fonctions cognitives sont exposés en annexe). Cette interférence
par l'alimentation a été largement retrouvée dans la littérature
142–146
ces travaux sont significativement en faveur d'un biais attentionnel
et les résultats de la revue de
147
.
Ainsi, le profil attentionnel dans l'anorexie mentale ne semble pas présenter de trait caractéristique
mais on note que certaines capacités attentionnelles peuvent être diminuées par la maladie.
1.3. La mémoire
Les capacités mnésiques ont été peu étudiées dans l'anorexie mentale. La littérature suggère
que les fonctions mnésiques ne sont pas atteintes par l'anorexie mentale
137
, mais certaines études,
qui incluent indifféremment des patients avec anorexie mentale ou boulimie, retrouvent de
meilleures performances en mémoire épisodique (rappels de mots) chez les sujets malades quand il
s'agit de mots en lien avec l'alimentation 148.
En effet, s'il ne s'agit pas d'un déficit mnésique, il semble exister des particularités dans le
fonctionnement de la mémoire dans l'anorexie mentale. L'hypothèse d'un biais de surgénéralisation
a été faite par Williams
149
, soit la tendance à se remémorer de manière neutre les expériences
négatives vécues afin d'en diminuer la charge affective. Ce biais a été retrouvé dans le traitement du
souvenir chez les patients avec anorexie mentale 150–152. Cette hypothèse prolonge l'idée d'un trouble
dans la régulation émotionnelle chez les malades
153
, amenant la surgénéralisation comme un
mécanisme adaptatif à la difficulté de faire face aux émotions négatives 151.
54
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
Ainsi, bien que l'on ne puisse pas conclure à des déficits mnésiques dans l'anorexie mentale, on peut
faire l'hypothèse de conséquences sur la mémoire des difficultés de gestion émotionnelle présentes
chez ces patients.
1.4. La cohérence centrale.
La cohérence centrale fait partie des fonctions visuo-spatiales. Cette notion a émergé à partir
de l'observation de patients atteints de troubles du spectre autistique étudiés par Uta Frith
154,155
. Il
s'agit de difficultés d’intégration globale au niveau visuo-spatial et verbal, avec une attention
exacerbée pour les détails, associée à la difficulté à aborder les situations dans leur globalité.
Cliniquement, le défaut de la cohérence centrale dans l'anorexie mentale pourrait être en lien avec
les préoccupations obsessionnelles pour un détail, sans pouvoir envisager la totalité des enjeux
d'une situation. On peut retrouver ici la notion d'abstraction sélective décrite dans l'approche
cognitivo-comportementale comme une distorsion cognitive fréquente dans l'anorexie.
Par similitude avec le fonctionnement classiquement décrit dans l'anorexie, ce paramètre a été
étudié avec les outils utilisés pour l'autisme dont la figure de Rey (qui explore les capacités visuospatiales ) et le calcul de l'index de cohérence centrale 156 (voir annexe).
Une récente méta-analyse
157
regroupant 7 études menées depuis 2008 met en évidence des
difficultés à avoir une vision globale et de meilleures performances dans les tâches nécessitant une
grande attention aux détails chez les patients adultes atteints d'anorexie mentale. Cette différence est
aussi présente chez les patients qui ont guéri d'un trouble alimentaire
apparentés des malades (sœurs saines)
109
108
, ainsi que chez les
, faisant de la cohérence centrale une caractéristique
candidate au statut d'endophénotype dans l'anorexie mentale.
Chez l'enfant et l'adolescent, il existe moins de données sur l'atteinte de la cohérence centrale par
l'anorexie mentale, mais plusieurs études retrouvent un index de cohérence centrale inférieur chez
les malades 31,158.
Ainsi, les difficultés de cohérence centrale semblent s'intégrer dans les caractéristiques du profil
cognitif associé à l'anorexie mentale, en constituant un endophénotype 159,160.
55
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
1.5. Les fonctions exécutives.

La flexibilité mentale.
La flexibilité mentale, en anglais « set shifting », correspond à la capacité à passer d'une
tâche à l'autre
161
. Elle fait partie des fonctions exécutives, qui sont les fonctions supérieures
conférant à l'humain la capacité d'accéder à son autonomie (imagination, planification, adaptation).
La flexibilité mentale permet de s'adapter aux situations nouvelles ou changeantes, ainsi que de
changer de point de vue pour se montrer créatif devant de nouvelles expériences.
Cette fonction a été beaucoup étudiée en psychologie. Un défaut de flexibilité mentale est retrouvé
dans plusieurs pathologies mentales (schizophrénie, trouble bipolaire)
162
. Plus globalement, la
flexibilité mentale apparaît être un indice à part entière du bien-être psychique 163.
Dans le cas de l'anorexie mentale, une flexibilité altérée peut se traduire cliniquement par une
rigidité psychique ainsi que des persévérations, tant dans la pensée que dans le comportement
164
.
On peut retrouver chez les patientes anorexiques une fixation particulière à certaines règles
alimentaires rigides, ne pouvant s'adapter à la situation et ajuster ces règles aux conséquences
néfastes de leur comportement
165
. Ce défaut de flexibilité peut aussi être mis en lien avec la
difficulté pour ces patientes de laisser les règles changer en acceptant un traitement qui vise une
reprise de poids 166.
La flexibilité mentale peut être évaluée par des tests neuropsychologiques d'alternance de tâches
(task-switching ) sur le modèle du test de classement de cartes de Wisconsin (WCST). La consigne
est de classer des cartes selon un critère qui n'est pas explicité au patient qui aura pour seule
information le feedback de l'examinateur (ou de l'ordinateur). Le critère de classement change suite
à 10 réponses correctes, le patient n'en est pas informé. L'épreuve teste la capacité du patient à
comprendre le changement de règle et à y réagir en comptabilisant les erreurs de persévération.
La flexibilité mentale chez le patient adulte atteint d'anorexie mentale a été étudiée dans plusieurs
travaux
167,168
depuis une méta-analyse parue en 2007
162
. Tous ces travaux retrouvent un défaut de
flexibilité mentale chez l'adulte avec anorexie mentale. La diminution flexibilité a parfois été
attribuée à l'état de dénutrition
169
. Or, les travaux récents ne retrouvent pas de corrélation
significative entre la flexibilité et l'IMC
30,109,170
. Nombreuses sont les études mettant également en
évidence la persistance du défaut de flexibilité mentale chez les patients guéris
168,171,172
. Certains
auteurs notent même des résultats similaires aux tests de flexibilité entre trois groupes de patients à
56
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
des stades différents de la maladie, sans différence significative entre les patients en phase aigue, en
rémission pondérale récente ou guéris
30
.
De plus ce trouble de la flexibilité est retrouvé à un niveau plus élevé chez les apparentés sains des
patients qu'en population générale
30,31
. Ces caractéristiques permettent de retenir le défaut de
flexibilité mentale comme un endophénotype de l'anorexie mentale, et certains auteurs le retiennent
même comme un facteur de risque d'apparition
159,173
ou de maintien du trouble 59.
Chez l'enfant et l'adolescent, certaines études vont dans le sens d'une flexibilité mentale altérée,
avec une puissance statistique faible
158,174,175
. Cependant, une récente méta-analyse n'a pas permis
d'affirmer un déficit en flexibilité mentale chez l'enfant par rapport aux témoins
176
et les auteurs
relèvent la nécessité de conduire également des explorations en imagerie fonctionnelle dans cette
population.
Si chez l'adulte, un déficit de flexibilité mentale a été mis en évidence, l'évaluation chez l'enfant et
l'adolescent de ce paramètre est plus complexe. Le développement de cette fonction exécutive est
mal connu. Pour certains auteurs la flexibilité se développerait encore durant l'adolescence
d'autres il y aurait un plateau autour de 11 ans
178
177
, pour
. La flexibilité mentale a été associée au
métabolisme cérébral de la dopamine 179 et il semble que la pathogenèse de l'anorexie mentale fasse
intervenir des anomalies de la dopamine
changements pendant l'adolescence
182
180,181
. Le système dopaminergique subit de multiples
. Shott suggère ainsi que l'altération de la flexibilité dans
l'anorexie représente ces changements dans le système dopaminergique. S'appuyant sur l'hypothèse
selon laquelle les jeunes auraient un système de récompense dopaminergique plus sensible 183, Shott
suggère qu'une meilleure plasticité cérébrale au niveau dopaminergique protègerait les jeunes des
difficultés de flexibilité par rapports aux sujets adultes avec une réponse dopaminergique moins
adaptative
184
. Ainsi pour l'auteur, les troubles de la flexibilité apparaissent avec le temps dans
l'anorexie mentale, et il est d'autant plus important de traiter l'anorexie mentale avant que ces
déficits associés ne se développent.
Une large étude longitudinale prospective a testé les fonctions exécutives d'enfants de mère avec
antécédent d'anorexie, une population considérée comme à plus haut risque d'anorexie
185
. Ces
enfants à 8 ans (n=6201) montraient de meilleurs scores à l'évaluation de l'intelligence par le QI, de
meilleures compétences visuo-spatiales et de mémoire de travail et un contrôle attentionnel moins
bon que ceux des témoins. S'il ne s'agit pas de particularités cognitives spécifiques à l'anorexie
mentale, ces résultats suggèrent qu'un terrain cognitif est présent dès le jeune âge.
57
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)

Planification.
Devant les difficultés en flexibilité mentale, la planification a également été étudiée. Cette
fonction exécutive est responsable de l'élaboration d'une séquence d'action pour parvenir à un but.
Dans la littérature, on retrouve des résultats contradictoires avec dans certains travaux des
performances comparables aux témoins avec une plus grande lenteur d'exécution des tâches
dans d'autres des capacités de planification moins bonnes que les sujets sains
186
171
, et
. On ne peut donc
pas retenir de particularité dans la planification chez les sujets avec anorexie mentale.
Ainsi, l'anorexie mentale est associée à un profil cognitif caractéristique associant difficultés de
cohérence centrale (attention excessive aux détails) et de flexibilité mentale. Ce profil a fait évoquer
à certains auteur l'hypothèse d'un modèle neuro-développemental dans la pathogenèse du trouble.
2. L'anorexie mentale : un trouble neuro-développemental ?
Des chevauchements entre anorexie mentale et autisme ont été suspectés cliniquement dès
les années 1980 devant la rigidité et le besoin de rituel souvent retrouvés chez les patients atteints.
Les déficits cognitifs présents dans les troubles du spectre autistique (TSA) sont bien documentés,
on y retrouve également le défaut de cohérence centrale
187
155
et les troubles de la flexibilité mentale
.
Une étude qui a suivi un groupe de 51 patients anorexiques de Göteborg sur plus de 18 ans
171
a
exploré l'hypothèse d'une association entre anorexie et trouble envahissant du développement (TED)
et mis en lumière des déficits cognitifs similaires à ceux retrouvés dans le spectre autistique (déficit
de cohérence centrale, de flexibilité mentale mais aussi une atteinte de la théorie de l'esprit) chez les
patients anorexiques. Ces similitudes dans les profils cognitifs ont fait naître l'hypothèse d'une
origine neuro-développementale de l'anorexie, à l'instar des troubles du spectre autistique. De plus,
le diagnostic comorbide de TED était présent chez 20 % des cas d'anorexie mentale (10 patients),
versus 0 % dans le groupe témoin, et serait de mauvais pronostic selon les échelles de
fonctionnement global passées 18 ans après le début des troubles 188.
De manière générale, les troubles psychiatriques débutant dans l'enfance étaient surreprésentés chez
les sujets anorexiques. Les diagnostics comorbides de TED, trouble déficitaire de l'attention avec
hyperactivité (TDA/H) ou syndrome de Gilles de la Tourette étaient présents chez 33 % des sujets
anorexiques. Dans cette étude, était montré que ces capacités étaient impactées indépendamment de
la perte de poids et de la durée du trouble alimentaire.
58
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
Inversement, on retrouve une altération significative du comportement alimentaire chez les sujet
avec trouble du spectre autistique, avec notamment une sélectivité alimentaire (texture, couleur) 189.
Ces similitudes font évoquer à certains auteurs l'intégration de l'anorexie mentale à une entité
nosographique de l'ordre d'un « trouble spécifique du développement alimentaire » 159.
L'hypothèse développementale du trouble est aussi soutenue par d'autres auteurs qui mettent en
avant l'incidence d'expériences négatives précoces dans la genèse de l'anorexie. Des événements
négatifs pré-nataux, péri-nataux et néo-nataux tels que la prématurité
précoces du sommeil ou de l'alimentation
191
190
ou encore des troubles
semblent être des facteurs de risque développementaux
de l'anorexie mentale. Pendant l'enfance, l'émergence de traits de personnalité associés à l'anxiété, la
dépression, le perfectionnisme et le spectre autistique ont aussi été identifiés comme des facteurs de
risque d'anorexie mentale 191.
De même, l'adolescence, période de transition vers l'âge adulte, est caractérisée par de profonds
changements et une vulnérabilité importante. A la puberté, les modifications hormonales pourraient
interagir avec le fonctionnement des neuro transmetteurs, la maturité cérébrale et des facteurs
génétiques pour prendre part dans l'apparition d'une anorexie mentale 27.
Le modèle de l'anorexie mentale comme un trouble neuro-développemental conduit à l'idée de la
remédiation cognitive comme thérapie, en s'appuyant sur l'hypothèse de la plasticité cérébrale.
3. La plasticité cérébrale.
La question de la plasticité cérébrale est un thème de recherche important dans le champ des
neurosciences ces vingt dernières années. On peut en retrouver des similitudes avec les théories
psychanalytiques et la notion de « traces mnésiques ». L'hypothèse était alors celle d'une inscription
dans l'appareil psychique de souvenirs inconscients, qui pouvaient refaire surface sous différentes
formes, prenant alors le nom de symptôme.
L'hypothèse de traces mnésiques liées à des événements de l'enfance était compatible avec les
données, anciennes, validant la plasticité cérébrale dans l'enfance. Mais en 2000, une étude anglaise
a étudié la plasticité cérébrale chez l'adulte en montrant des modifications cérébrales structurales
chez des chauffeurs de taxi londoniens
192
. Chez ces patients adultes, l'IRM fonctionnelle montrait
une augmentation du volume de l'hippocampe, région du cerveau impliquée dans le repérage spatial.
Ces résultats étaient en faveur d'une modification structurale et fonctionnelle du cerveau acquise à
l'âge l'adulte. Ces travaux ont ouvert la voie à l'hypothèse de la plasticité cérébrale chez l'adulte,
59
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
hypothèse confirmée par d'autres travaux par la suite
193–195
. Cette hypothèse débouchera sur de
nouvelles perspectives thérapeutiques s'appuyant sur cette plasticité pour « entraîner », par des
exercices répétés, des régions cérébrales suspectées d'être dysfonctionnelles.
La plasticité cérébrale chez l'adulte, soit la trace structurelle et fonctionnelle dans le réseau neuronal
de l'expérience, éclaire de la lumière des neurosciences l'hypothèse psychanalytique des traces
mnésiques
196
. En réponse à cette idée de plasticité cérébrale, la psychanalyse et les neurosciences
ont en revanche des approches bien différentes quand il s'agit de modéliser le « traitement » de ces
traces. Quand la psychanalyse propose de travailler en cure sur le souvenir, conscient ou inconscient,
de ce qui a fait trace, les neurosciences et la remédiation cognitive proposent d'induire de nouvelles
modifications par l'exercice volontaire de certaines fonctions.
Ainsi, par le truchement de nouvelles données dans le champ des neurosciences sur le terreau des
anciennes théorisations sur l'anorexie mentale, des recherches sur la remédiation cognitive dans le
traitement des troubles alimentaires ont vu le jour.
4. L'apparition de la remédiation cognitive dans l'anorexie mentale.
4.1. De la compensation d'un déficit lésionnel à la « gymnastique cérébrale »
La remédiation cognitive est définie comme une technique permettant d'améliorer le
fonctionnement cognitif, soit en entrainant les fonctions déficitaires (approche par stimulation), soit
en aidant les patients à acquérir des stratégies leur permettant d'exploiter au mieux leurs fonctions
résiduelles pour pallier aux déficits (approche par compensation) 197.
A l'issue de la deuxième guerre mondiale, la remédiation cognitive a été développée pour des sujets
cérébro-lésés. Les travaux princeps de Luria, neuropsychologue russe, montraient que des sujets
présentant des lésions cérébrales pouvaient bénéficier d'exercices cognitifs pour retrouver un
fonctionnement satisfaisant.
La remédiation cognitive s'appuie sur l'identification de déficits cognitifs spécifiques afin de
proposer des programmes visant à améliorer le profil cognitif et le fonctionnement psychosocial.
Cette approche cible la métacognition et incite le patient à repérer son « style cognitif ». A la
différence des thérapies cognitives et comportementales classiques, la remédiation cognitive cible la
60
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
pensée, le contenant des idées, et non le contenu, les idées elles-mêmes. En appréhendant son
fonctionnement de pensée, le patient est amené à réfléchir à d'autres stratégies cognitives afin
d'améliorer son adaptation psycho-sociale.
Cette thérapie a été validée dans le traitement de la schizophrénie par plusieurs méta analyses
198,199
mettant en évidence une amélioration du fonctionnement cognitif, mais aussi des symptômes de la
schizophrénie et de l'adaptation sociale. De plus, il apparaît à présent que le fonctionnement cognitif
est le meilleur marqueur du « fonctionnement dans la communauté » des patients schizophrènes 200.
Devant l'efficacité de la remédiation dans la schizophrénie et la mise en évidence de difficultés
cognitives dans l'anorexie mentale, des équipes ont tenté d'adapter des programmes de remédiation
cognitive à l'anorexie mentale. L'équipe du Pr Kate Tchanturia (psychologue à l'hôpital Maudsley
de Londres) est une des premières à avoir élaboré un programme de remédiation cognitive adapté à
la problématique anorexique. Ce programme cible la flexibilité mentale et la cohérence centrale, les
deux fonctions cognitives déficitaires dans l'anorexie mentale. Nous reviendrons sur ce programme
dans la troisième partie de ce travail.
4.2. Particularités de la remédiation cognitive dans l'anorexie mentale.
L'application de techniques de remédiation à l'anorexie mentale présente des particularités.
En effet, dans les TCA, on parlera plutôt de « compétences cognitives sub-normales »
201
que de
déficit. Cette particularité apporte certaines limites à l'usage de la remédiation cognitive dans cette
indication. D'une part, les évaluations neuropsychologiques réalisées avant la thérapie sont parfois
insuffisamment sensibles pour ces patientes aux capacités cognitives finement altérées. D'autre part,
si les difficultés cognitives ne sont ni diffuses (limitées à la flexibilité mentale et la cohérence
centrale) ni majeures, on peut penser que les conséquences sur le fonctionnement social sont
minimes. . Il n'existe pas pour l'anorexie mentale de corrélation entre le fonctionnement social et le
niveau cognitif, comme cela est montré dans la schizophrénie.Cependant, même si les difficultés
cognitives sont moins invalidantes dans l'anorexie que dans d'autres pathologies, elles représentent
néanmoins un facteur pronostic important
De plus, l'anorexie se démarque de la schizophrénie par une moindre part de passage à la chronicité.
En effet, même si cette part est importante seule la moitié des patients atteints développent une
maladie dite chronique 202, ce qui peut interroger l'opportunité de traiter un fonctionnement cognitif
61
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
basal qui préexistait à la maladie et persistera après la guérison. Néanmoins, à l'instar des patients
avec anorexie mentale, il a été retrouvé que les déficits cognitifs dans la schizophrénie étaient
présents chez les enfants à risque et étaient peu influencés par l'évolution de la maladie
203
, de la
même manière que les endophénotypes identifiés pour l'anorexie 185.
En outre, nous avons vu que la remédiation cognitive prenait pour cible thérapeutique certaines
caractéristiques cognitives à valeur endophénotypique. Cette approche tend vers une prise en charge
des difficultés cognitives identifiées dans l'anorexie. Au regard des connaissances actuelles sur
l'importance des facteurs d'entretien de la maladie, la remédiation cognitive n'est en revanche jamais
proposée seule. En effet, si on suspecte une participation du profil cognitif dans la pathogenèse de la
maladie, ceux-ci n'occultent pas l'importance des facteurs d'entretien liés à la dénutrition et à
l'entourage. Ainsi, une des caractéristiques de la remédiation dans l'anorexie mentale est qu'elle a
été pensée pour s'associer à d'autres prise en charges (nutritionnelles, familiales).
Par ailleurs, la remédiation cognitive est délivré sur un style motivationnel et se démarque en cela
d'approches classiques basées sur une forme de contrainte (contrats de poids, de soins). En effet, dès
Lasègue, la question de la confrontation à la patiente anorexique a été abordée. En écrivant « l'excès
d'insistance appelle un excès de résistance »
12
, il mettait déjà en garde contre une approche
coercitive, des soins délivrés sur le mode de l'imposition et de la contrainte. La tentation de la
contrainte a pourtant été bien présente dans l'histoire des soins de l'anorexie du fait du risque vital,
mais l'intuition de Lasègue était déjà en faveur d'une alliance thérapeutique nécessaire. Plus encore
aujourd'hui, le rôle expertal du médecin est mis en doute par l'ampleur de l'accès à la vulgarisation
des connaissances médicales et l'absence de traitement de référence validé pour l'anorexie mentale.
Le savoir profane tend à s'étendre, dans un domaine où le savoir savant atteint ses limites. La
remédiation fait partie des thérapies visant à favoriser une bonne alliance, indispensable aux soins.
Cette approche motivationnelle est également cohérente avec la notion d'addiction présente dans
l'anorexie mentale 21,24,25,102.
5. Evaluation de la remédiation cognitive dans l'anorexie mentale.
L'évaluation fait partie intégrante de la thérapie par remédiation cognitive dans l'anorexie
telle que proposée par l'équipe du Pr Kate Tchanturia. Cette thérapie a été l'objet de diverses
démarches évaluatives au cours de son développement dans l'indication du traitement de l'anorexie
mentale.
62
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
5.1. Evaluation de la remédiation cognitive dans le traitement de l'anorexie mentale chez
l'adulte.

Programme de remédiation en format individuel
Les premières recherches étaient des études de cas qui montraient l'amélioration des
résultats aux évaluations neuropsychologiques de la flexibilité mentale 204–206.
Des séries de cas ont ensuite vu le jour. Une première série (n=4) réalisée par l'équipe du Pr
Tchanturia a évaluée la flexibilité mentale avant, après et 18 mois après l'intervention
207
. Les
résultats étaient en faveur d'une amélioration des performances cognitives et d'une bonne
acceptabilité (aucun abandon).
Une plus large série de cas de patients hospitalisés (n=27) a montré une amélioration de la
cohérence centrale, de la flexibilité mentale mais aussi une augmentation de l'IMC et une
diminution des symptômes subjectifs de dépression 208.
Une autre série étudiant des patients ambulatoires (n=20) a montré une amélioration de la flexibilité
mentale après intervention (en utilisant des tests différents) ainsi qu'une augmentation de l'IMC, un
meilleur fonctionnement global et aucun abandon de la thérapie 209.
Une série de plus large ampleur (n=98) a été publiée en 2016, cette étude a la particularité d'inclure
des IMC plus faibles (jusqu'à 13) et d'étudier la remédiation cognitive sous le format individuel et
groupal. Elle retrouve ces effets positifs sur la flexibilité et la cohérence centrale ainsi qu'une
meilleure motivation au changement 210 dans le format individuel de la thérapie.
Plus récemment, des essais cliniques randomisés ont été conduits. En 2014, un essai sur des patients
hospitalisés présentant une anorexie sévère (n=82) comparait la remédiation cognitive associée au
traitement habituel, au traitement habituel seul
211
. Le groupe bénéficiant de la remédiation en plus
du traitement habituel montrait une amélioration des symptômes alimentaires (mesurée par l'échelle
Eating Disorder Examination Questionnaire, EDEQ) et de la qualité de vie alimentaire (mesurée par
l'échelle Eating Disorder Quality of Life, EDQoL). Cependant, les scores de flexibilité mentale et
de cohérence centrale mesurés avant et après intervention s'amélioraient de la même manière dans
les deux groupes, suggérant un effet d'apprentissage (effet « test re-test ») aux évaluations
cognitives.
Un autre essai a comparé une remédiation intensive ciblant la flexibilité mentale à une thérapie
neurocognitive non spécifique (ciblant l'attention, la mémoire et le raisonnement déductif) chez des
63
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
patients hospitalisés (n=40)
212
. Les résultats étaient en faveur d'une amélioration spécifique des
déficits cognitifs présents dans l'anorexie mentale par la remédiation cognitive et d'une très bonne
acceptabilité de cette approche.
Un troisième essai a porté sur des patients ambulatoires (n=46) randomisés et recevant soit 8
séances de remédiation puis 16 séances de TCC, soit 24 séances de TCC
213
. La remédiation
semblait améliorer les capacités de cohérence centrale et de flexibilité mentale ainsi que l'adhésion
des patients à la TCC. On notera que les patients ambulatoires recrutés dans cette étude avaient un
IMC moyen à 17.5, on pourra s'interroger sur la représentativité d'un tel échantillon par rapport à la
population cible de patients atteints d'anorexie mentale.
Ces essais sont réunis dans une méta-analyse publiée en 2013
166
qui conclut à une amélioration
cognitive par la RC, ainsi qu'un faible taux d'abandon, mais souligne l'importance, dans les
recherches futures, de relier cette amélioration psychologique avec la symptomatologie anorexique
et le fonctionnement social.

Programme de remédiation en format groupal
Le format groupal de la thérapie par remédiation cognitive dans l'anorexie mentale a été
moins étudié. Une première série de cas publiée par Genders et Tchanturia
214
, retrouvait une bonne
acceptabilité et des résultats encourageants sur la motivation au changement. Depuis d'autres études
ont trouvé des résultats similaires dans des groupes d'adultes 214–219. Ces séries de cas sont en faveur
d'une meilleure analyse du style de pensée après la remédiation cognitive avec plus d'acceptation de
certaines erreurs.
L'originalité du travail de Lang et Treasure
215
est d'avoir étudié le format groupal en incluant les
mères des patientes à la thérapie, proposant ainsi une approche déculpabilisante pour le patient et
encourageant la communication dans la famille. Ce travail retrouve une amélioration des
performances aux tests neuropsychologiques chez la patiente comme chez la mère.
Plus récemment, la large série de cas (n=98) conduite par l'équipe du Pr Tchanturia décrite plus haut
210
a montré des résultats positifs sur la flexibilité, la motivation au changement et la perception de
la thérapie en format groupal.
D'autres travaux concernant le format groupal ont été réalisés, ils seront exposés dans un prochain
paragraphe concernant la remédiation cognitive en population pédiatrique et adolescente.
64
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
On ne dispose pas actuellement d'essai clinique évaluant le format groupal de la remédiation
cognitive dans l'anorexie mentale.
Ainsi, la remédiation cognitive dans l'anorexie mentale est une approche ciblant des paramètres
cognitifs spécifiquement atteints et suspectés de participer à la genèse du trouble alimentaire. Les
données scientifiques des dernières années encouragent le développement de cette thérapie. Une
revue de la littérature reprenant les dernières données sur l'anorexie mentale parue dans le Lancet en
2015 cite la thérapie par remédiation cognitive comme un traitement prometteur de cette affection 36.
5.2. La remédiation cognitive chez l'enfant et l'adolescent.

Indication de la remédiation cognitive chez l'enfant et l'adolescent.
La remédiation cognitive est une approche thérapeutique proposée dans différents troubles
chez l'enfant
164
. Comme chez l'adulte, les objectifs de cette approche sont l'amélioration du
fonctionnement cognitif et un effet potentialisateur des autres thérapies.
La remédiation a été utilisée chez les enfants cérébro-lésés ou en post-chimiothérapie
220
et ses
indications se sont élargies. A présent, elle trouve une place dans le traitement des troubles neurodéveloppementaux installés dans l'enfance, tels que les troubles du spectre autistique
trouble déficit attentionnel avec ou sans hyperactivité
223–228
221,222
, le
. L'intérêt de la remédiation chez
l'enfant a également été souligné dans la schizophrénie à début précoce 229–231.

Remédiation cognitive et anorexie mentale chez l'enfant et l'adolescent.
Les essais cliniques randomisés concernant la remédiation au format individuel présentés
plus haut incluent le plus souvent des adolescents dès 15, 16 ou 17 ans 211,213,232. Les résultats de ces
travaux s'appliquent donc à cette population.
Par ailleurs, la remédiation a été étudiée spécifiquement chez l'adolescent principalement dans son
format groupal. Une première série de cas (n=9) a été publiée, portant sur des adolescents (13 à 19
ans) hospitalisés
219
. Elle montrait une bonne acceptabilité de cette thérapie et une impression
clinique positive des thérapeutes.
Une étude pilote a ensuite été réalisée sur 30 adolescents non hospitalisés
218
. Les résultats étaient
en faveur d'un effet positif (taille d'effet faible) sur la flexibilité mentale auto rapportée. La thérapie
65
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
a été vécue positivement par cette population adolescente.
Une équipe française a traduit un programme norvégien
portant sur des adolescents hospitalisés
216
233
et a publié une série de cas (n=10)
. Les résultats étaient en faveur d'une amélioration du
fonctionnement neurocognitif, de l'IMC et d'une bonne adhésion des adolescents au format groupal,
cependant les résultats sont de très faible ampleur puisque seuls deux patients ont terminé le
programme (les 8 autres ont quitté l'hôpital).
Aux vues des résultats encourageants de la remédiation sous une forme groupale en population
adolescente, le Pr Kate Tchanturia a manualisé un programme spécifiquement adapté à l'adolescent
pour le traitement de l'anorexie mentale et ce manuel a été conçu pour une thérapie en groupe
(Group Cognitive Remediation for Adolescents with Anorexia Nervosa 234 ).
66
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
Résumé 2ème partie
L'anorexie mentale présente, comme certains troubles neuro développementaux
(autisme) des caractéristiques cognitives propres. Cette signature cognitive est
caractérisée par des difficultés en flexibilité mentale et en cohérence centrale (attention
excessive aux détails). Ces traits sont des endophénotypes de l'anorexie mentale et
représentent des cibles thérapeutiques intéressantes.
La remédiation cognitive est une thérapie validée dans le traitement d'autres maladies
psychiatriques (schizophrénie) associées à des déficits cognitifs. Cette approche
s'appuie sur l'hypothèse de la plasticité cérébrale, bien connue chez l'enfant mais aussi
présente chez l'adulte. Par des exercices simples d'entrainement, elle vise à améliorer le
fonctionnement cognitif et l'intégration psychosociale des patients. Elle cible la
métacognition (penser sa pensée) et est délivrée sur un mode motivationnel. Elle
favorise également l'alliance thérapeutique et est complémentaire d'autres approches de
soin.
Un manuel ciblant la cohérence centrale et la flexibilité a été élaboré spécifiquement
pour l’anorexie mentale. La remédiation cognitive a ainsi pu être étudiée dans cette
indication chez l'adulte et chez l'enfant.
Une revue de littérature montre des résultats encourageants par l'amélioration des
symptômes alimentaires, de la qualité de vie et de l'alliance thérapeutique.
67
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
Troisième partie
Discussion autour d'un cas clinique
68
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
La remédiation cognitive est une thérapie obtenant de bons résultats dans le traitement de
l'anorexie mentale. Dans la littérature, on retrouve des essais autour d'un programme de remédiation
cognitive (Cognitive Remediation Therapy for Anorexia Nervosa) élaboré à Londres par l'équipe du
Pr Kate Tchanturia. A notre connaissance, il s'agit du seul programme spécifiquement construit
autour de l'anorexie mentale et ayant été soumis à évaluation. Dans nos recherches, nous avons
trouvé une traduction de ce programme par une équipe parisienne ayant conduit un essai clinique
randomisé avec ce manuel en Français (équipe TRECOGAM 232). Après avoir été formée auprès de
cette équipe, nous avons décidé de la proposer au sein du centre de référence des TCA de Bron.
Le manuel traduit en français, une situation clinique et une discussion autour de cette thérapie
manualisée et son évaluation feront l'objet de cette troisième partie.
1. Présentation du Manuel de Remédiation B.
1.1. Le programme de remédiation cognitive.
Le manuel utilisé dans ce travail est une traduction du manuel princeps du Pr Kate
Tchanturia à l'hôpital du Maudsley à Londres et fait partie d'un corpus thérapeutique nommé
MANTRA (Maudsley Model of Anorexia Nervosa Treatment for Adults).
Le MANTRA est un traitement basé sur un modèle cognitif interpersonnel qui propose quatre
facteurs comme piliers de la persistance de l'anorexie. Ces facteurs, liés aux traits anxieux ou
obsessionnels qui sous-tendent l'anorexie sont :
1) Un style de pensée caractérisé par la rigidité, l'attention excessive aux détails et la peur de l'erreur.
2) Une atteinte dans le domaine socio-émotionnel (évitement des expériences et de l'expression
émotionnelle, dysrégulation émotionnelle).
3) Des croyances positives autour de l'aide de l'anorexie dans la vie de l'individu.
4) Des réponses inappropriées des proches (surinvestissement, critique).
Ces quatre facteurs sont les cibles de l'intervention thérapeutique qui vise à augmenter le poids,
améliorer le comportement alimentaire et l'ajustement psychosocial. Ce modèle inclut un travail
avec la famille des malades, un nouvel apprentissage d'une alimentation saine, une approche autour
de la réappropriation des émotions et de la remédiation cognitive.
69
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
Schématisation du programme du MANTRA ciblé sur l'anorexie mentale
(par Sylvie Berthoz de l'équipe TRECOGAM)
Le MANTRA est manualisé et délivré dans un style motivationnel. La structure du traitement est
claire et les objectifs sont hiérarchisés. Des adaptations sont faites à l'échelle individuelle dans la
combinaison des modules et l'importance donnée à chacun des modules. En fonction de l'état de
motivation du patient, une prise en charge nutritionnelle ou comportementale peut être proposée.
La singularité de cette approche réside dans le fait qu'elle a été développée spécifiquement pour
l'anorexie mentale, sur la base de données biologiques et psychologiques issues de la recherche. Le
format du programme a été pensé pour s'adapter aux caractéristiques de la population concernée par
les troubles alimentaires. Il a la particularité de proposer au patient un document de travail
( workbook ) développé en collaboration entre des thérapeutes et des patients. Cette approche se
démarque également par l'implication des proches dans le traitement.
La remédiation cognitive est un des axes de traitement proposés par le MANTRA. Le manuel de
remédiation cognitive proposé par le Pr Kate Tchanturia et traduit en français sous le titre Manuel
de Remédiation B est amplement inspiré des travaux de l'équipe de Delahunty dans la schizophrénie
235,236
. Il propose des tâches ciblant la flexibilité mentale et la cohérence centrale.
70
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
On notera que, s'il est spécifiquement pensé pour les troubles alimentaires, ce programme n'aborde
jamais la problématique alimentaire. Les tâches proposées dans le manuel n'ont pas de lien avec
l'alimentation et les extrapolations à la vie quotidienne évitent, autant que possible, tout rapport
avec la nourriture. Cette exception a souvent été soulignée dans les retours positifs des patients, qui
apprécient de travailler sur leur fonctionnement hors du champ alimentaire, un domaine associé à la
maladie avec toutes les représentations d'échec qui y sont liées. D'autre part, cette extrapolation
systématique rejoint la dynamique actuelle de décentrer l'anorexie mentale de la sphère uniquement
alimentaire. De plus, à la différence d'autres thérapies, la remédiation cognitive ne cible pas les
émotions, une sphère bien souvent difficile à aborder pour les patients malades de troubles
alimentaires souvent peu à l'aise pour discriminer ou décrire leurs états émotionnels.
Les objectifs annoncés de ce programme sont :

Améliorer le fonctionnement cognitif des patients :
Le travail en remédiation cognitive a montré son efficacité sur la flexibilité mentale et la
cohérence centrale des patients. Le but de ce travail est d'acquérir un fonctionnement cognitif plus
varié et plus souple. En effet, si l'on prend l'exemple de la cohérence centrale qui cible l'attention
excessive portée aux détails, le but de la remédiation sera d'envisager des va-et-vient entre une
attention aux détails dans certaines tâches, et une vision plus globale dans d'autres. Un exercice
d'explication d'itinéraire stimulera par exemple la patiente à donner des informations générales en
premier lieu, puis des indications de plus en plus détaillées à l'approche de la destination. Cet
exemple illustre également l'idée de pouvoir parfois préférer un résultat « satisfaisant »
(explications incomplètes mais courtes) à un résultat « parfait » (explications exhaustives mais
longues et moins adaptées au but recherché).

Aider le patient à prendre conscience de son style de pensée, ses avantages et ses
inconvénients.
En ciblant la métacognition, le programme propose au patient de prendre du recul sur le
style de pensée. Le lieu même de la thérapie est l'occasion de relativiser l'importance de réussir
parfaitement une tache papier-crayon.
71
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)

Encourager et valoriser l'essai de nouvelles stratégies de pensée et de comportement.
Dans le cadre protégé de la thérapie et en dehors de tout enjeu de réussite, le patient est
encouragé à tenter de nouvelles approches de certaines situations. L'essai est valorisé, plus que la
réussite. La thérapie un lieu d'expérimentation et des liens avec la vie quotidienne sont proposés. De
petites modifications de comportements quotidiens peuvent aussi être proposées pour mettre en acte
les progrès en flexibilité.

Renforcer le sentiment d'efficacité personnelle et la motivation au changement.
Par la valorisation d'essais, de progrès avec des objectifs à la hauteur des capacités du
patient, la possibilité d'une influence de son action dans le changement de son état est petit à petit
intégrée. Cette notion provient des travaux sur la motivation au changement 237 qui montrent que de
passer de la conviction que les compétences sont « fixes » (soit nous les avons, soit nous ne les
avons pas) à l'idée d'un corpus de compétences « en développement » (apprentissage possible à tout
âge) permet d'atteindre plus d'objectifs. Ce passage se fait par l'acquisition de la conviction d'une
possibilité d'apprentissage par la confrontation à des expériences positives.

Favoriser l'alliance aux traitements par une première approche valorisante et positive.
La remédiation cognitive est une approche appréciée des patients et des thérapeutes
201,204,205,207
. Or une large part des patients anorexiques éprouvent des difficultés à s'engager dans un
traitement ou à le maintenir
238,239
. Par son style motivationnel hors du champ alimentaire, la
remédiation cognitive réussit à réunir un faible taux d'abandon
208
et peut ouvrir la voie à d'autres
soins en installant une certaine alliance.
1.2. La mise en pratique.
Le Manuel de Remédiation B a été adapté en français par S. Berthoz, D. Ringuenet et A-S.
Maria, une équipe (psychologues et psychiatre) de l'hôpital Montsouris à Paris ayant mené un essai
clinique randomisé (TRECOGAM) avec ce programme
232
. Les résultats finaux de cet essai sont à
paraître. Ce manuel propose une partie théorique, une large partie d'exercices à proposer et une
partie sur les modalités pratiques de la thérapie avec des réponses pour des situations pouvant
fréquemment poser question au thérapeute.
Ce programme est manualisé afin de pouvoir être mis en pratique par un large panel de thérapeutes.
72
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
Le prérequis est « d'avoir suivi le programme de formation à la remédiation cognitive et de
bénéficier d'une supervision régulière, en individuel ou en groupe ». J'ai donc participé à la
formation proposée par l'équipe TRECOGAM à Paris en Novembre 2015, nous avons abordé les
aspects théoriques et pratiques du manuel de remédiation.
Le programme se déroule sur 10 séances de 30 à 40 minutes. La 10ème séance est consacrée à un
échange de lettre entre patient et thérapeute. Une séance peut aborder jusqu'à 10 tâches proposées
dans le manuel. Les différents exercices font intervenir des tâches papier-crayon, des exercices
visuels, comportementaux ciblant la flexibilité mentale et la cohérence centrale. Après chaque tâche
le thérapeute peut proposer au patient de faire des liens avec le quotidien. Entre les séances, des
exercices sont proposés au patient, en résonance avec les tâches travaillées en séance. Ce
programme, comme décrit initialement dans le MANTRA, est destiné à être intégré à une approche
multidisciplinaire.
Mon intérêt pour cette thérapie a rencontré celui de l'équipe du centre de référence des troubles
alimentaire alors en cours de création à Lyon, et notamment celui du Dr Iceta, directeur de cette
thèse. Nous avons décidé de proposer l'implémentation du programme de remédiation cognitive
individuel au centre, ce qui a été validé par les responsables d'unité.
2. Situation clinique
Dans le cadre de ce travail de thèse, nous avons choisi d'étudier une situation clinique
survenue lors de l'implémentation du programme de remédiation cognitive au centre de référence
des Troubles du Comportement Alimentaire du Groupement Hospitalier Est de Bron. Créée fin
2015, cette structure a pour vocation d'accueillir une population pédiatrique et adulte présentant un
TCA (anorexie mentale, boulimie, hyperphagie, trouble atypique ou non spécifié), de réaliser une
évaluation somatique et psychiatrique et de proposer une orientation vers des soins adaptés. Il s'agit
de l'une des seules structures ambulatoires spécialisées dans les TCA dans la région lyonnaise. Les
patients accueillis, pour la plupart, ne bénéficient pas encore de soin adapté au trouble alimentaire
qu'ils présentent. Il est rapidement apparu à l'équipe du centre que l'offre de soin pour les TCA dans
la région était pauvre en approche spécifique. Les orientations à disposition des cliniciens étaient
principalement représentées par la psychiatrie ambulatoire (libérale ou CMP, non spécialisée) et
l'hospitalisation à temps plein, soit en clinique, soit dans les structures de soin-étude.
L'approche par remédiation cognitive nous a paru intéressante pour cette population ambulatoire
73
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
pour laquelle les consultations au centre de référence représentent une entrée dans les soins du TCA.
En effet, la remédiation cognitive, nous l'avons vu, contribue à l'installation d'une alliance de qualité
dans les soins. On retrouve dans de nombreux articles ses effets positifs sur l'adhésion des patients,
un axe que l'on sait central dans les soins de l'anorexie mentale166,209,213,240. On considère
actuellement que seuls 50% des patients atteints d'anorexie accèdent aux soins (étude Finlandaise
réalisée en population générale 2), or on sait aussi que plus de 40% des personnes soignées
atteignent une guérison complète 1. Cette proportion est encore supérieure dans les populations plus
jeunes. Le travail de l'alliance thérapeutique pour les patients entrant dans des soins était donc un
argument majeur pour l'implémentation de ce programme dans ce centre. De plus, le programme
étudié est spécifiquement conçu pour les troubles alimentaires et délivré au sein d'une structure
spécialisée, ce qui serait un facteur de meilleurs résultats d'une thérapie pour l'anorexie mentale 241.
Ainsi, nous avons jugé légitime d'étudier l'implémentation d'un tel programme dans ce centre de
référence, la remédiation nous paraissant s'inscrire dans les soins à proposer pour créer une alliance
et faciliter d'autres prises en charge.
Le programme a donc pu être mis en place au centre à partir de Juin 2016. Les indications étaient
posées lors de réunion de concertation pluri-disciplinaires (RCP) en présence des pédopsychiatre,
psychiatre, pédiatre, neuropsychologue, diététicienne et infirmières du centre. Les critères choisis
pour inclure un patient étaient le diagnostic d'anorexie mentale, la présence au bilan
neuropsychologique de fragilité en flexibilité mentale et/ou cohérence centrale. L'âge minimum
était fixé à 14 ans mais discuté au cas par cas selon la maturité du patient. Il n'y avait pas d'âge
maximum. Il a été convenu que les séances seraient animées par une des neuropsychologues
expérimentées dans le domaine de la remédiation cognitive et moi-même. Cet aménagement a pu
être proposé du fait de ma prise de poste prochaine au sein du centre. Le programme était précédé
et suivi d'une évaluation neuropsychologique.
Nous allons évoquer la situation de Julie, première patiente à avoir bénéficier du programme au
centre.
Julie était âgée de 14 ans et 9 mois quand elle a consulté pour la première fois au centre de
référence en Mai 2016. Elle a été adressée par l'unité de pédopsychiatrie de l'hôpital neurologique
où elle était prise en charge depuis Avril 2016 en hospitalisation séquentielle. A son arrivée au
centre, elle bénéficiait également en ambulatoire d'un suivi par un psychiatre et une psychologue.
Julie est la benjamine d'une fratrie de trois, elle a un frère de 22 ans et une sœur de 19 ans, tous
deux ont quitté le domicile familial pour poursuivre leurs études.
74
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
Julie a une histoire développementale sans anomalie notable, pas d'antécédent médical autre qu'une
bronchiolite du nourrisson. Au plan alimentaire, Julie a été allaité au biberon dès la naissance, la
diversification s'est bien passée et à un an elle mangeait de tout. On note cependant qu'à l'âge d'un
an et suite à un changement de marque de petit pot, Julie a commencé une sélection alimentaire, ne
voulant plus manger que des pâtes et du jambon aux repas, gardant le petit déjeuner et le goûter.
Cette sélectivité a duré un an et demi et s'est amendée sans qu'elle ne soit prise en charge à l'époque,
puis elle n'a plus présenté de problème alimentaire jusqu'à l'adolescence.
Au plan familial, on retrouvait des antécédents dépressifs chez les deux grand-mères ainsi qu'un
trouble alimentaire chez une tante.
Julie était en 3ème et avait un très bon niveau scolaire. Sa scolarité a été brillante sans qu'aucun
trouble d'apprentissage n'ait été soupçonné, elle n'avait pas présenté de difficulté de séparation. Elle
exprimait de l'ennui en classe, n'aimait pas vraiment l'école. Sa famille et elle banalisaient ses
excellents résultats scolaires.
Elle avait quelques amis desquels elle n'était pas très proche, pas de petit ami. On notait dans son
parcours une situation de moqueries en début de collège, dont elle n'avait à l'époque parlé à
personne et qui coïncide avec le début de son questionnement autour de son apparence physique.
Elle faisait de la danse jusqu’à 6h par semaine.
En famille, Julie était assez solitaire, elle partageait peu de choses avec ses parents et verbalisait peu
autour de ses émotions. Ses parents ne pouvaient pas dire quand Julie allait mieux ou moins bien.
Ils percevaient des moments de tristesse et d'absence fréquents. Les repas étaient des temps de
désaccord entre Julie et ses parents. Ceux-ci stimulaient beaucoup Julie à s'alimenter et elle
évoquait un vécu de forçage. Elle ne s'opposait pourtant pas activement et mangeait ce que l'on lui
proposait sans créer de réel conflit.
Julie se décrivait comme une personne timide, inhibée et à l'écoute. Elle présentait un
perfectionnisme important avec une attention envahissante sur certains détails de sa présentation
physique (coiffure, maquillage).
Dans l'anamnèse, on retrouvait des symptômes d'anorexie mentale restrictive depuis ses 13 ans et
demi. Elle disait vouloir perdre du poids depuis l'été 2014 en faisant du sport. Elle pesait alors 45 kg
pour 1.59 m. La restriction alimentaire aurait commencé 2015.
Devant l'amaigrissement, Julie a été adressée à un psychiatre par son médecin généraliste, puis vers
75
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
l'unité de pédopsychiatrie de l'hôpital neurologique. Dans l'unité, Julie a rencontré en consultation
une pédopsychiatre qui surveillait son évolution, et devant une stagnation du poids il a été décidé de
proposer des temps d'hospitalisation séquentielle dans un cadre protégé. Le but de cette prise en
charge était de travailler sur le manque de reconnaissance des troubles et l'adhésion aux soins. Lors
de cette prise en charge Julie a manifesté une grande tristesse et verbalisé des idées suicidaires
malgré la psychothérapie dont elle bénéficiait toujours en ambulatoire. L'unité a alors proposé une
hospitalisation à temps plein afin d'introduire traitement antidépresseur. Malheureusement, l'alliance
de cette famille dans les soins a été fragile, les parents craignant une stigmatisation par ces
hospitalisations et une discontinuité scolaire. Ils ont donc demandé l'arrêt de cette prise en charge.
Orientée initialement au centre de référence par l'unité de pédopsychiatrie pour un bilan somatique,
nous avons finalement reçu Julie pour un bilan complet.
Quand nous l'avons rencontré au centre, Julie a bénéficié d'une consultation pédopsychiatrique,
psychologique, pédiatrique et diététique ainsi qu'un bilan somatique.
Au plan somatique : Julie pesait 40 kg pour 161 cm soit un IMC à 15.4 kg/m², son poids était stable
depuis environ 6 mois. Elle présentait une bradycardie, une
tension artérielle basse et pas
d'hypothermie.
Julie présentait une aménorrhée secondaire depuis Février 2014 après une ménarche à 11 ans et
demi.
Elle avait un temps de sommeil court avec des nuits de (23h30 à 6h30), se levait tôt pour avoir le
temps de se préparer le matin.
Un bilan a été réalisé le 30 Mai : La biologie sanguine montrait une anémie avec une hémoglobine à
100g/L, une leptine abaissée et une T3L basse. L'ostéodensitométrie retrouvait une densité minérale
osseuse modérément abaissée.
Au plan diététique : Julie avait d'abord diminué les quantités d'alimentation journalière, puis à la
rentrée 2015 avait commencé des évictions alimentaires (supprimer les produits sucré, trier les
éléments gras) malgré un certain forçage du côté des parents. Elle s'intéressait beaucoup aux
étiquettes d'emballage, comptait les calories. Elle se donnait des objectifs entre 1600 et 2000 kcal/j
pour des besoins journaliers estimés entre 2500 et 2600 kcal/j. Ses apports étaient estimés par la
diététicienne à 1600 kcal/j soit 40 kcal/kg/j et 65g de protéines soit 1.6 g/kg/j. Elle réduisait d'autant
plus les quantités qu'elle ne connaissait pas la composition des plats, c'était le cas chaque fois
qu'elle ne prenait pas ses repas chez elle. Julie pensait manger trop et aurait aimé encore réduire les
quantités. Elle adhérait à ses convictions diététiques mais admettait que ses proches lui attribuaient
76
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
un « rapport bizarre à l'alimentation ». Les parents se disaient dépassés par les douleurs
abdominales dont se plaindrait Julie et mettaient en doute les repères alimentaires familiaux.
Julie refusait de prendre du poids ou d'augmenter sa prise alimentaire malgré son poids faible.
L'image de son corps était perturbée, Julie présentait une dysmorphophobie, elle se trouvait trop
grosse dans miroir malgré un IMC à 15.4, elle aimait à palper sa maigreur en faisant le tour de sa
cuisse avec ses doigts. Elle aurait aimé être plus maigre mais était retenue par l'attention croissante
que lui portent ses parents au fur et à mesure de son amaigrissement. Elle avait du arrêter la danse,
un certificat de contre-indication lui avait été remis dans l'unité de psychopathologie.
Au plan psychique, Julie présentait des affects dépressifs, elle se disait triste de façon permanente
depuis plusieurs mois et décrivait une anhédonie. Elle présentait une basse estime d'elle-même avec
un sentiment d'inutilité et se dévalorisait souvent. Elle parlait d'un sentiment de vide et disait se
sentir peu importante aux yeux des autres et souvent à l'écart. Elle ne rapportait pas d'asthénie
malgré le temps de sommeil nocturne court, ne dormait pas la journée. Elle s'était scarifiée une fois,
sur les face latérales des deux cuisses. Le contexte était celui du départ d'un membre d'un groupe de
musique qu'elle aimait bien. Elle avait déjà eu des idées suicidaires, notamment des périodes de
plusieurs jours avec des idées morbides quasi permanentes.
Au plan neuropsychologique, un bilan cognitif a été réalisé :

Le WISC-IV montrait une efficience cognitive dans la norme très supérieure avec une
hétérogénéité inter-échelles, avec des résultats supérieurs en compréhension verbale et
vitesse de traitement. Ce profil était en faveur d'un haut potentiel intellectuel hétérogène.

L'évaluation des fonctions exécutives montrait de bonnes performance en planification et
flexibilité, en inhibition, en attention soutenue et sélective (testées respectivement par la
figure complexe de Rey, la NEPSY 2, le barrage de Mesulam). La cohérence centrale était
perturbée. Elle a été testée à l'aide de l'épreuve de la figure de Rey, où l'observateur évalue
la manière de reproduire une figure complexe. Julie présentait un profil de type 4 sur les 7
profils possibles, du plus global (type 1) au plus désorganisé (type 7). Ce profil est
caractérisé par le « juxtaposition de détails », Julie n'a pas reproduit la forme générale de la
figure mais plutôt retranscit plusieurs détails qu'elle a assemblés de proche en proche.
Pendant cette passation Julie s'est montrée perfectionniste et efficace, sans anxiété de
performance.
77
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
Le diagnostic principal retenu était celui d'une anorexie mentale restrictive devant l'association des
critères du DSM 5 : une restriction de la prise alimentaire ne permettant pas de maintenir un poids
normal pour l'âge, d'une peur intense de prendre du poids et de l'altération de la perception
corporelle avec absence de reconnaissance du trouble et altération de l'estime de soi. Les
diagnostics associés de haut potentiel intellectuel et d'épisode dépressif majeur ont été posés. De
plus, au plan neuropsychologique, on retenait des fragilités en cohérence centrale (attention
excessive aux détails).
A l'issue de ce bilan, la situation de Julie a été discutée en RCP. Les propositions formulées étaient :

au plan psychique, la prise en charge en remédiation cognitive et le maintien des autres
moyens thérapeutiques déjà en place (psychiatre, psychologue).

au plan somatique : l'introduction de compléments nutritionnels par voie orale et une
surveillance pondérale.
L'objectif de cette prise en charge était une reprise pondérale progressive, l'amélioration des
symptômes anorexiques et un travail de l'alliance thérapeutique. Les objectifs spécifiques à la
remédiation cognitive étaient l'amélioration de la cohérence centrale, un renforcement de l'estime de
soi et un travail de motivation dans l'adhésion aux soins. Par ces moyens, on pouvait attendre
également un retentissement sur l'humeur.
La démarche mise en œuvre en remédiation cognitive était de proposer des tâches de difficulté
croissante, d'encourager les réussites, de souligner les particularités cognitives de la patiente pour
encourager la méta cognition et de développer des stratégies d'adaptation.
La thérapie a eu lieu entre Juillet et Septembre 2016. Cette thérapie lui a été proposée en
complément de ses prises en charge habituelles soit le suivi pédopsychiatrique et psychologique
ambulatoire.
Avec cette patiente, nous avons choisi d'utiliser le manuel de remédiation B, même si celui-ci est
initialement destiné à une population adulte. Ce choix a été justifié par trois éléments : d'une part le
niveau de maturité intellectuelle de Julie étant très bon, les tâches nous semblaient tout à fait à sa
portée, d'autre part, il s'agit du seul manuel en format individuel validé en français, et enfin la
littérature autour de ce manuel a intégré des adolescents dans les études sans mentionner de
78
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
particularité dans les résultats.
En pratique, Julie a bénéficié de 10 séances de remédiation cognitives de 45 à 60 minutes. La
dernière séance étant dédiée à la lecture de la lettre d'au revoir. J'ai animé les séances en alternance
avec une neuropsychologue formée à la remédiation cognitive.
Une séance comprenait environ 10 tâches proposées en fonctions des difficultés et performances
retrouvées lors de la séance précédente. Il pouvait s'agir de tâches papier-crayon ou d'exercices sous
forme verbale. Les tâches étaient réalisées soit par la patiente seule, soit avec la participation du
thérapeute. Devant l'aisance de Julie lors des premières séances, nous avons privilégié les tâches les
plus complexes du manuel et les tâches ciblant la cohérence centrale.
A titre d'exemple d'une tâche complexe ciblant la cohérence centrale, nous allons détailler la tâche
des images complexes. La patiente a devant elle une figure géométrique, le thérapeute ne voit pas
cette image. L'objectif pour la patiente est de décrire cette image au thérapeute afin qu'il la dessine
de manière ressemblante au modèle. Les rôles peuvent ensuite être inversés afin que la patiente
perçoivent les consignes pertinentes du côté du dessinateur. Le but de cette tâche est d'amener le
patient à faire une description globale et rapide qui permet un résultat « satisfaisant » sans
forcément être parfait.
Exemples d'images complexes
La dynamique motivationnelle de la thérapie impose une progression dans la difficulté des épreuves
proposées. Des épreuves simples en début de thérapie permettent de mettre en confiance le patient
ainsi que de partager des expériences de réussite qui encouragent à poursuivre la thérapie. Des
79
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
épreuves plus complexes peuvent ensuite être proposées lors des séances suivantes afin de mettre à
l'épreuve les compétences travaillées. De même, dans les exercices d'extrapolation à faire à
domicile, le niveau de difficulté représenté par l'importance du changement doit être croissant. Dans
cette situation, le haut potentiel intellectuel présenté par Julie était un obstacle à cette progression
car les tâches simples du manuel étaient trop facilement réussies, nous avons donc débuté avec des
tâches complexes mais la marge de progression était donc faible.
De même, le manuel prévoit plusieurs tâches avec la même consigne sous différentes formes, mais
de niveau de difficulté équivalent (tâches de Stroop, d'estimation). Dans cette situation, il ne nous a
pas paru judicieux de répéter ces tâches car le terrain de haut potentiel intellectuel nous poussait à
éviter les répétitions et augmenter la complexité des épreuves pour garantir un apprentissage
efficace et sans ennui.
Pour exemple de six tâches répétitives de même niveau de difficulté, citons les tâches d'estimation
suivantes :
Tâches d'estimation
Consignes de la tâche pour le patient : Placez la feuille directement devant le patient. Demandezlui de placer un trait là où il estime que cela correspond au milieu des lignes, cercles ou carrés.
Expliquez que le trait ne doit pas être placé exactement au milieu, il s’agit plutôt d’une estimation
brute. Si le sujet réalise cette tâche aisément, dans ce cas il est possible de complexifier la tâche
en demandant au sujet de placer différents pourcentages sur les lignes (25%, 75 %, etc.). Il est
important de toujours encourager l’utilisation d’approximations.
80
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
81
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
Dans cette épreuve, si Julie a cherché lors de son premier essai un résultat parfait, elle a rapidement
compris la consigne d'une estimation brute et n'a plus été perfectionniste dans ses essais suivants.
La réalisation des 5 tâches suivantes était donc inutile. Afin de préserver l'alliance thérapeutique il
nous a été indispensable de nous adapter aux particularités de cette patiente et de proposer parfois
des épreuves complémentaires.
Cette particularité liée au profil de haut potentiel nous a conduits à nous interroger sur les
indications de ce programme et sur la nécessité de prendre en compte les diagnostics associés et les
profils cognitifs dans leur ensemble. En effet, le cadre du manuel a dû être dépassé, convoquant
notre adaptabilité de clinicien. Nous avons perçu des limites à l'apprentissage en situation « de
laboratoire ». Nous avons donc rapidement axé nos propositions sur des exercices d'extrapolation
dans le quotidien. Le programme devenait ainsi un support à travers lequel nous pouvions aborder
les thèmes de la vision globale et de la flexibilité en milieu « réel ».
Au fil de la thérapie, nous avons constaté une amélioration du contact de Julie, une bonne alliance
avec cette prise en charge qui abordait peu la thématique alimentaire. Nous avons également
remarqué une moins grande peur de l'échec, de plus en plus de tentatives et de prises d'initiative
dans les exercices proposés dans le cadre protégé des séances mais aussi dans son environnement
habituel. Elle s'est saisi des propositions de mise en application formulées en séance et nous a fait
part de ses expériences de changement.
En fin de thérapie, nous avons rédigé des lettres d'au revoir. Nous avons pu exprimer à Julie les
progrès qu'elle avait fait dans le domaine de la cohérence centrale et saluer son investissement dans
la thérapie. Nous lui avons suggéré de prolonger cet effort de vision plus globale et lui avons
proposé des pistes d'exercices dans son quotidien.
Voici la lettre rédigée en retour par Julie :
« Je pense que j'ai changé depuis que j'ai commencé les séances et j'essaie de
faire des efforts (moins faire attention aux détails, moins s'attacher à mon
apparence). Cela m'a permis de me rendre compte de certaines choses (un peu
perfectionniste) et donc d'essayer de travailler dessus. J'ai bien aimé le fait
d'échanger et de parler. Parfois c'était un peu dur de trouver le rapprochement
82
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
entre le quotidien et les exercices. J'ai aussi changé mes habitudes. Aux premières
séances, c'est vrai que j'avais un peu de mal à savoir en quoi on pouvait m'aider,
mais je pense que ça l'a fait (peut-être sans que je m'en rende compte tout de suite.
Au quotidien, je pense à certaines choses que l'on a travaillé (faire plusieurs
choses en même temps, alterner) en essayant de m'en servir. Je ne sais pas si
certains changements sont liés à la remédiation mais j'arrive à être plus détendue,
à moins me poser de questions, parfois.
Merci à toutes les deux pour ces séances et ce travail que l'on a fait ensemble. »
Une nouvelle évaluation neuropsychologique des fonctions abordées en remédiation a été réalisée
en fin de thérapie. Les résultats aux épreuves testant la flexibilité (Trail Making Test et
questionnaire D-Flex) étaient peu modifiés. En revanche, à l'épreuve de la figure de Rey évaluant la
cohérence centrale, on retrouvait à l'issue de la thérapie un profil de type 2, dit « détails englobés
dans l'armature » (contre un type 4 avant la thérapie). Ces résultats sont bien sûr à pondérer car les
deux tests ont été réalisés à un court intervalle de temps, posant la question d'un effet test-retest.
Nous avons tenté de minimiser ce biais en proposant une alternative validée à la figure de Rey
(même figue mais renversée, en miroir) où les mêmes normes s'appliquent. Malgré tout,
l'amélioration des performances peut être liée à la thérapie comme à une simple réexposition
précoce au même test chez cette patiente aux bonnes capacités d'apprentissage.
3. Discussion
Cette situation clinique a illustré certains des apports et des limites de la remédiation
cognitive dans le traitement de l'anorexie mentale. Nous avons constaté que nous étions convoqués
à sortir du cadre du manuel, à nous adapter à la patiente et à mobiliser d'autres processus que celui
du fonctionnement cognitif. Ainsi, des questions quant aux perspectives de validation scientifique
de cette thérapie manualisée nous sont apparues : les diagnostics associés interviennent-ils dans
l'efficacité de ce programme ? Ont-elles été prises en compte dans les études d'évaluation ? Existe-til d'autres facteurs intervenant sur l'efficacité de la thérapie ? Cette thérapie engage-t-elle d'autres
processus que le fonctionnement cognitif ? Comment envisager les liens entre tâche papier-crayon
et situation de la vie quotidienne ?
83
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
Les études d'efficacité dont nous disposions nous semblaient insuffisantes pour répondre à ces
questions posées par la clinique, c'est pourquoi nous avons souhaité nous questionner sur la
démarche d'évaluation des psychothérapies.
3.1. Evaluation des psychothérapies : repères contextuels
Notre réflexion part de la constatation qu'à ce jour il est complexe d'établir des
recommandations en terme de psychothérapie. L'exemple de l'anorexie mentale nous montre que les
travaux de recherche sont en nombre insuffisant et leurs résultats ne permettent pas de proposer des
mesures thérapeutiques consensuelles. Si les sphères de recherche en psychiatrie étaient, par le
passé, centrées sur la psychopathologie et l'étiologie, on note depuis quelques années une place de
plus en plus importante de l'évaluation de l'efficacité des psychothérapies.
Aux Etats-Unis, le questionnement des psychiatres et psychologues pour les démarches évaluatives
est présent depuis les années 1960 (première édition de l'ouvrage Persuasion and Healing : a
comparative study of psychotherapy de J. Franck en 1961
242
puis
243,244
). Cette réflexion a pris
forme à l'échelle nationale dès 1980 avec l'étude sur la dépression (Treatment of Depression
Collaborative Study Program) de l'Institut National de Santé Mental américain (National Institute
of Mental Health, NIMH)
245
. Cette étude avait pour but de comparer l'efficacité de différentes
psychothérapies, entre elles et versus un traitement médicamenteux. Par son large recrutement
(n=250) et sa grande rigueur méthodologique, cette étude a été l'objet de nombreuses analyses. Les
résultats en termes d'efficacité étaient peu différents selon le type de thérapie et des analyses
complémentaires des facteurs intervenant dans l'efficacité d'un traitement ont été menées. Des
paramètres propres au thérapeute ou au patient ont donc été étudiés. Il apparaît que la variable qui
avait le plus de poids dans le succès du traitement était la qualité de l'alliance thérapeutique
246
,
tandis que le type de thérapie influait peu sur les résultats. Ainsi cette étude a alerté chercheurs et
cliniciens sur l'existence de facteurs parallèles au choix d'un type de thérapie, et dont l'importance
n'était pas négligeable. Ce questionnement a été repris par plusieurs auteurs d'orientations
théoriques différentes 247–249.
En France, la question de l'évaluation des psychothérapies a fait l'objet de rares ouvrages dès les
années 1980
250
. Mais il a fallu attendre les années 1990 pour voir s'éveiller un intérêt pour
l'évaluation des psychothérapies à l'échelle de projets nationaux. L'Inserm a d'abord tenté de lancer,
en 1991, des projets d'évaluation en libéral et en institution (avec l'équipe Script-Inserm
251
) mais
84
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
ces démarches n'ont pas abouti. C'est seulement en 2004 que l'expertise collective de l'Inserm
intitulé «Psychothérapies : trois approches évaluées » présente une analyse de la littérature portant
sur des études d'efficacité
252
. Ce rapport érigeait les TCC comme efficaces dans la majorité des
pathologies étudiées, alors que les thérapies psychanalytiques ne trouvaient que peu d'indications.
Lors de la parution de ce rapport, des opinions tranchées se sont faites entendre, à l'instar de celle
du médecin et ex-ministre de la santé Philippe Douste-Blazy qui déclarait: « la souffrance
psychique n'est ni évaluable ni mesurable » 253. Le ministre retira ainsi ce rapport du site de l'Inserm,
ce qui suscita une deuxième polémique à l'initiative des associations de malades, en attente d'être
informées. En effet, l'évaluation des psychothérapies est rendue complexe par l'intersubjectivité en
jeu et parfois polémique par les oppositions qu'elle génère.
Partant de ce paradoxe entre nécessité et limites de l'évaluation des psychothérapies, une réflexion
épistémologique autour des enjeux et des perspectives d'évolution font l'objet de notre discussion.
3.2. Evaluation des psychothérapies : exigences, enjeux, limites et propositions.
3.2.1 Exigences et enjeux
Le médecin est soumis à des exigences qui évoluent. D'une part, les exigences scientifiques
amènent chaque praticien à une médecine basée sur des preuves et uniformisée. La psychothérapie
ne fait pas exception à cette exigence. Le truchement d'une demande d'un traitement rapidement
efficace, par des patients de mieux en mieux informés, et d'une offre de soin florissante en
psychothérapie laissent penser qu'une thérapie, pour exister, doit faire ses preuves
252
. Et même si
les facteurs intervenant dans le choix du type de soin pour un patient dépassent la simple notion de
validité scientifique d'une technique, la psychothérapie est un traitement destiné à être mis en œuvre
sur prescription médicale. Les preuves de son efficacité doivent donc être produites.
La remédiation cognitive, comme les thérapies cognitives et comportementales classiques, a la
particularité d'être élaborée en prenant en compte la perspective d'évaluation de son efficacité. Or la
complexité d'évaluation des psychothérapies a souvent été soulignée dans les travaux visant a
établir des lignes de conduite dans le traitement de l'anorexie mentale
59,255
. La remédiation
cognitive représente donc une approche séduisante dans cette indication où des mesures
thérapeutiques peinent à faire consensus.
Par son positionnement paradigmatique de la psychothérapie basée sur des preuves (mécanismes
cognitifs connus et évaluables et effets de la thérapie mesurables), l'étude de la remédiation
85
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
cognitive nous a donc semblé propice à un questionnement sur la possibilité et l'intérêt d'analyser
les cibles d'une psychothérapie, et d'en évaluer l'efficacité.
Cependant, si la nécessité d'évaluer les psychothérapies, comme tout autre traitement médical,
semble s'imposer, cette démarche pose encore de nombreuses questions. La psychiatrie est une
spécialité médicale qui doit surmonter des obstacles spécifiques pour parvenir à un fonctionnement
basé sur des preuves.
3.2.2. Limites de l'évaluation des psychothérapies
La réticence de cliniciens à l'égard des démarches d'évaluation est l'objet d'une vaste
littérature, à l'initiative d'auteurs du champ psychanalytique notamment. Les principaux obstacles
présentées par les détracteurs de l'évaluation des psychothérapies peuvent être résumées par deux
types de critiques : d'abord la distance entre la recherche et la clinique et ensuite la difficulté à
intégrer la dimension de subjectivité dans l'évaluation d'un patient et sa part dans le processus
psychothérapique (limites proposées dans le colloque Inserm du 30 Mai 2007
256
suite aux débats
autour du rapport de 2004 252).

Distance entre recherche et clinique.
Ce fossé a souvent été souligné dans les travaux sur l'efficacité des psychothérapies
256–260
.
C'est en particulier l'essai clinique randomisé (ECR), gold standard de l'étude d'efficacité d'un
traitement, qui est critiqué tant les caractéristiques méthodologiques requises l'éloignent du cadre
psychothérapique 261–266.
D'une part, les patients des ECR doivent être en groupes homogènes, ce qui implique souvent que
les comorbidités psychiatriques sont désignées comme facteur d'exclusion. Or les comorbidités sont
fréquentes en psychiatrie, ce qui met en doute la validité externe de telles études (reproductibilité,
généralisation). Sur cette ligne, certains auteurs critiquent le « mythe de l'uniformité »
267
, une
formule reprise de Kiesler en 1971, qui donnerait l'impression illusoire de pouvoir caractériser une
population d'étude par les symptômes cliniques uniquement. L'étude de notre situation clinique
illustre d'ailleurs bien cette limite. Ces auteurs soutiennent que des comorbidités et traits de
personnalité interviennent parfois au-delà du diagnostic principal dans le choix de la thérapie 268,269.
Ainsi la population étudiée dans les ECR serait peu représentative de la population cible de la
thérapie.
86
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
D'autre part, le cadre de la thérapie est également différent en recherche et en clinique. La
randomisation est souvent montrée du doigt pour son caractère peu écologique
265,266
. En effet, un
patient randomisé dans le cadre d'un essai ne choisit pas sa thérapie, or suite aux résultats vus plus
haut sur l'importance de l'alliance thérapeutique, il nous semble que la randomisation peut biaiser
les résultats en intervenant sur l'investissement du patient dans la thérapie.

Intégration de la dimension subjective.
La subjectivité intervient en deux points quand il s'agit d'évaluer une psychothérapie : d'une
part l'évaluation de l'état clinique d'un patient se fait souvent sur le mode déclaratif faisant
intervenir sa subjectivité, d'autre part un des leviers de la psychothérapie est la rencontre entre deux
individus donnant lieu à l'intersubjectivité, pilier de l'action psychothérapeutique.
En effet, s'il existe des outils de mesure de critères cliniques (échelles, questionnaires), ceux-ci sont
multiples et sans gold-standard. Pour exemple, citons l'article de Lambert en 1991 qui a rassemblé
384 études portant sur l'évaluation des psychothérapies et qui a retrouvé plus de 1430 critères
d'efficacité différents, dont 840 n'étaient utilisés qu'à une occurrence
270
. De plus, ces critères ne
semblaient pas pertinents pour évaluer la dimension relationnelle et sa part dans l'efficacité d'une
psychothérapie 265.
Certains auteurs soulignent qu'une thérapie entièrement manualisée (standardisée dans le but d'une
évaluation objective) briderait la capacité d'adaptation du clinicien face aux réactions du patient
271,272
, et constituerait un appauvrissement par une simplification de l'approche psychothérapique
dommageable au patient
266,273,274
. Une telle approche menacerait le lien d'intersubjectivité et la
possibilité d'une co-construction entre le patient et le thérapeute 265.
D'autres auteurs dénoncent la perspective de la réduction du champ de la psychiatrie à l'étude des
comportements et la perte de la continuité de l'histoire des sujets, à l'instar de Bernard Golse
259
et
se positionnent en faveur d'évaluations par des cliniciens alimentées par les sciences humaines.
On peut également penser que les thérapies les plus facilement évaluables (un critère mesurable
ciblé pour l'évaluation et la thérapie, tel que le propose la remédiation cognitive) bénéficient d'un
avantage en situation d'essai clinique 273,275, pouvant induire une surévaluation de leur efficacité.
87
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
3.2.3. Propositions pour surmonter ces obstacles.
Ainsi, si la plupart des auteurs s'accordent sur la nécessité d'évaluer les psychothérapies, il
apparaît que l'application stricte de la méthodologie de recherche habituelle en médecine est
insuffisante et risque de mener à la validation de « thérapies de laboratoire »
275,276
. A travers les
apports de l'étude sur la dépression du NIMH et les polémiques suite au rapport d'expertise
collective de l'Inserm, des questionnements ont émergé chez les cliniciens et les chercheurs. Ces
études ont ouvert la voie à de nouvelles propositions méthodologiques pour concilier les exigences
de validité interne et externe 277–279.
Si des obstacles existent dans l'évaluation de l'efficacité des psychothérapies, on trouve dans la
littérature deux grands types d'approche pour les surmonter. En France notamment, mais surtout à
l'étranger, des perspectives existent pour adapter la recherche au domaine de la psychothérapie. A
l'opposé, on trouve la proposition américaine du NIMH consistant à remanier complètement la
clinique afin qu'elle corresponde aux nouvelles exigences de la recherche scientifiques. Ces deux
approches divisent et la place de la recherche aux cotés de la clinique doit être discutée.
a) Adaptations mutuelles pour construire des ponts entre recherche et clinique.
Certains auteurs ont tenté de faire entrer la psychothérapie dans les standards de la médecine
basée sur des preuves en montrant comment les limites avancées plus haut peuvent être contournées.
Les travaux de B. Falissard (co-auteurs du rapport Inserm de 2004) reprennent les composantes
méthodologiques de l'évaluation d'un traitement et les confrontent aux particularités de la
psychothérapie
280
. Les paramètres étudiés sont la caractérisation des traitements à comparer, des
critères d'inclusion et d'exclusion, des critères d'efficacité et le comparabilité des populations.
L'auteur en souligne les limites aussi présentes en médecine somatique et replace la psychiatrie sur
un pied d'égalité avec les autres spécialités, minimisant l'importance de ces limites. S'il ne retient
pas d'obstacle à l'évaluation clinique standardisée en psychiatrie (existence d'échelles, de
questionnaires), notons qu'il se positionne en faveur d'évaluations assez globales de l'état psychique
(tristesse, qualité de vie) plutôt que de mesures de paramètres trop ciblés et peu représentatifs.
L'auteur élargit aussi la question de l'évaluation en donnant toute sa place aux études de cas dans
l'évaluation.
Les travaux de Thurin et Briffault
266,281
prolongent cette réflexion et pésentent des propositions de
recherche alternatives aux ECR. En effet, les ECR sont des études d'efficacité potentielle (ou
88
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
efficacy) et bénéficient d'une validité externe limitée concernant les psychothérapies. L'apport des
études naturalistes, d'efficacité réelle (ou effectiveness) telles que des études de cas a été avancé
256,265,266
. Les études naturalistes s'intéressent à une population de patients ayant volontairement
choisi leur type de psychothérapie (sans randomisation), dont les comorbidités sont acceptées mais
néanmoins recensées. Cette population est un échantillon de la population cible ce qui permet une
bonne validité externe. En revanche, l'absence de randomisation ne permet pas d'affirmer avec
certitude que les effets du traitement sont bien dus à l'intervention et non au recrutement, ce qui
grève la validité interne
282
. Afin d'augmenter le niveau de preuve de ce type d'étude, Thurin et
Briffault proposent des études quasi-expérimentales prospectives de haute représentativité clinique.
S'appuyant sur un modèle proposé par Fishman
264
et déjà mis en pratique par l'équipe de Lutz
283
,
la démarche consiste en l'étude rigoureuse de plusieurs cas cliniques, des processus en jeu dans la
psychothérapie et leur évolution.
Des réseaux de collaboration entre recherche et clinique se sont formés pour favoriser ce type de
recherche basée sur la pratique (aux USA 263,284, en Angleterre
261
). Si bien qu'en 2005, l'American
Psychological Association a proposé de nouvelles directives quant à l'évaluation des
psychothérapies. Cette institution place comme priorité l'étude de l'alliance thérapeutique, des
caractéristiques des malades et du thérapeute et insiste sur la complémentarité de différentes
approches de recherche pour évaluer l'efficacité des techniques 285.
En France également, le Réseau de Recherche Fondé sur la Pratique en Psychothérapie (RRFPP) a
été fondé en 2008 en collaboration entre l'Inserm et la Fédération Française de Psychiatrie (FFP) 286.
Il réunit un ensemble de cliniciens d'orientations diverses et œuvre pour la mise en place de projets
de recherche en cohérence avec la clinique (B. Falissard et J-M. Thurin co-rédacteurs du rapport
Inserm de 2004 mais aussi B. Golse et G. Haag). Ce réseau a donné lieu a une première étude sur
l'autisme (n=50) parue en 2014, basée sur des études intensives de cas avec une méthodologie
rigoureuse 287.
Cependant, parallèlement à cette démarche de rationalisation de la recherche sur le modèle de la
clinique, on assiste à l'émergence d'une nouvelle approche, d'origine américaine, qui place les
exigences de la recherche au cœur de la démarche et pourrait bousculer complètement les repères
cliniques actuels.
89
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
b) Refondre la clinique sur le modèle de la recherche.
L’évaluation des psychothérapies souligne le positionnement de la psychiatrie entre
discipline idiographique, concernant des phénomènes uniques, non répétables et nomothétique, qui
s’attache à établir des lois, des relations de causalité reproductibles, à proposer des modèles de
fonctionnement et une discipline d’intervention 252.
Le parcours des différentes approches à travers l’histoire traduit une évolution vers le nomothétique.
Différents modèles théoriques ont été proposés, dans l’optique de généraliser un tableau clinique et
de dégager des liens de causalité entre différents facteurs (psychologique, éducatif, biologique,
génétique) et la maladie. L’identification d’endophénotypes nous semble représenter un paradigme
de cette évolution, par la recherche de caractères objectivables, héritables donc proche d’une réalité
génétique. Cette approche constitue une tentative de mettre en perspective un regard clinique, un
résultat à un test standardisé, une caractéristique physiopathologique et une démarche
thérapeutique. En psychiatrie, l’intérêt pour les endophénotypes réside dans la perspective de
circonscrire des marqueurs spécifiques d’une maladie afin de proposer une mesure thérapeutique
ciblée 106.
C'est aussi le paradigme de la nouvelle tentative d'harmonisation entre recherche et clinique
proposée par le NIMH. En 2009, l'institution a lancé un projet visant à établir une nosographie
basée sur l'intégration du comportement, des neurosciences et de la génétique. Cette approche,
nommée Research Domain Criteria Project (RDoC) prend sa source dans le plan stratégique de
recherche de la NIHM de 2008 qui se donnait comme objectif de «développer, à des fins de
recherche, de nouvelles manières de classifier les troubles mentaux basées sur les dimensions de
comportements observables et de mesures neuro -biologiques»
289
. Le RdoC est donc la
proposition nosographique développée par le NIMH à destination de la recherche,
ayant pour but de libérer la recherche en psychiatrie du carcan de l’approche
catégorielle afin d'accéder à une approche dimensionnelle. Elle se propose de
s'éloigner des « tableaux cliniques » traditionnels et de partir des données des
neurosciences, sciences comportementales ou génétique pour réaliser de n ouvelles
entités nosographiques. L’idée serait de « rendre les chercheurs libres d'effectuer des
recherches translationnelles dirigées par les neurosciences et les sciences comportementales plutôt
que par des contraintes liées à des ensembles de symptômes » 290. Les caractéristiques de l'approche
RDoC par rapport au DSM sont précisées dans le tableau ci-dessous.
90
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
Tableau traduit par Demazeux 291
depuis les 7 pilliers de RDoC par Cuthbert
292
Le projet RDoC vise à rapprocher la psychiatrie des autres spécialités médicales en se basant, pour
le diagnostic, sur des mesures standardisées, quantitatives et objectives. Les endophénotypes
représenteraient donc pour certains auteurs un outil clé voire paradigmatique de cette nouvelle
approche nosographique 106.
Bien que présentée dans un premier temps comme un projet concernant la recherche, il apparaît que
cette approche tend vers des applications cliniques avec le développement de mesures
thérapeutiques ayant un « effet démontrable sur une cible telle qu’un circuit neuronal impliqué dans
le trouble, ou une opération cognitive clé » selon le communiqué de Thomas Insel, directeur du
NIMH
293
.
Les chercheurs de ce projet nourrissent l'espoir que l'identification de nouveaux
syndromes basés sur la physiopathologie permette de faire correspondre un syndrome et un
traitement. Ils prennent l'exemple des biomarqueurs dans le champ du cancer, où la sensibilité à un
traitement en particulier détermine le type de cancer 294.
Cependant, cette approche est aussi le lieu de critiques, une partie des cliniciens soulignant le risque
de caractériser une maladie par « ce qui est guéri par le traitement » (selon la formule de Lakoff 288).
91
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
A ce jour, la part d'inconnue inhérente à ce projet est encore importante. Une des critiques
formulées à l’endroit de cette approche est notamment la complexité de la mise en lien entre les
différents champs de recherche concernés.
« C’est dans les interstices de la matrice que le vide scientifique règne actuellement. » 291
3.3. Intégration de données issues de champs divers
La traversée des différentes approches théoriques et thérapeutiques dans ce travail nous a
montré comment des axes de recherche divers pouvaient enrichir les conceptualisations autour de
l'anorexie mentale. Si nous portons la conviction de la nécessité d'une approche intégrative et
multidisciplinaire dans le champ de la maladie mentale, cette discussion vient questionner les
limites de la confrontation entre ces cadres théoriques. La mise en concordance, les liens de
complémentarité ou de potentialisation entre les différentes approches restent à étudier.
En effet, chaque approche comporte des paradigmes et leur mise en correspondance n'est pas
toujours aisée. Les ponts entre tests neuropsychologiques et clinique, neuro-imagerie fonctionnelle
et performance cognitive, amélioration d'une fonction et guérison restent fragiles. La transposition
de travaux du champ de la recherche vers un milieu écologique peut comporter un risque de
confusion et d'amalgame. Le terme « flexibilité », par exemple, rend bien compte de l'équivocité en
question. En effet, si dans le champ de la neuropsychologie, la « flexibilité » correspond à une
traduction du terme anglais « set-shifting » qui renvoie à une alternance de tâches, l'idée évoque
également la souplesse, l'adaptabilité dans le champ psychologique. Un des leviers de la
remédiation cognitive est d'ailleurs de proposer des extrapolations à la vie quotidienne, d'une tâche
papier-crayon en thérapie vers une situation courante, passant du plan neuropsychologique
(flexibilité mentale) au plan psychologique (souplesse psychique). Or la valeur de l'apprentissage en
remédiation cognitive sur des exercices standardisés dans l'extrapolation à des conditions de vie
écologiques reste à préciser. Nous resterons donc prudents quant à l'extrapolation des données de la
recherche vers des conséquences cliniquement palpables ressenties par le patient.
Il nous semble cependant qu'une transition est possible entre une recherche qui ne ferait que
cautionner ou sanctionner une thérapie et des échanges productifs entre clinique et recherche,
permettant de donner du relief aux différentes observations 296.
Ainsi, la question de l'évaluation de l'efficacité des psychothérapies se pose au clinicien (qui doit
interpréter les données de la littérature) comme au chercheur (afin de proposer des méthodologies
de recherche qui réponde à une réalité clinique).
92
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
Cette situation clinique et ces réflexions nous rappellent que le rôle du clinicien est de s'informer, de
se former à des thérapies validées et de savoir adapter celles-ci au patient sans en trahir les concepts
et les leviers thérapeutiques. L'intégration de données de champs divers est un défi qui, s'il est
abordé avec un regard critique représente un réel atout pour la médecine actuelle.
Malgré les limites évoquées dans ce travail, notre réflexion nous conduit à poursuivre
l'implémentation de la remédiation cognitive afin d'apporter une nouvelle approche aux soins
ambulatoires des TCA dans la région lyonnaise.
S'il manque de preuves formelles pour en affirmer la validité, on peut s'appuyer sur des résultats
empiriques probants. Si cela n'était pas suffisant, il nous resterait l'hypothèse du Dodo qui suppose
que toutes les psychothérapies, tant qu'elles sont bona fide (de bonne foi), donneront les mêmes
bénéfices 297.
93
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
Résumé 3ème partie
On constate un manque d'étude en France dans le domaine de l'efficacité comme des
processus engagés dans les psychothérapies. Leur évaluation soulève des enjeux qui ont
été l'objet de notre discussion. Pour tester la validité interne d'une psychothérapie il est
nécessaire de circonscrire les effets du traitement à des paramètres évaluables et
d'effectuer une randomisation. Or les conditions des essais cliniques randomisés sont
rarement représentatives de la clinique (de par la randomisation notamment) ; ces études
ne permettent donc pas d'établir la validité externe d'une psychothérapie. En contrepartie,
les études naturalistes ne témoignent pas de la validité interne d'une thérapie et n'ont pas
un niveau de preuve suffisant. Ces limites sont probablement à l'origine du manque de
preuve de l'efficacité des psychothérapies, creusant un fossé entre chercheurs et cliniciens.
Des réseaux de recherche basée sur la pratique ont vu le jour en France et dans le monde.
Ils se proposent de conduire des études en milieu écologique, de s'intéresser aux
processus en jeu dans la psychothérapie ce qui devrait permettre de solidifier les ponts
entre recherche et clinique.
A l'échelle du clinicien, il nous semble indispensable de nourrir ces questionnements afin
d'intégrer les données de la clinique et de la recherche à nos pratiques.
94
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
95
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
96
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
97
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
"Everybody has won and all must have prizes."
(«Tout le monde a gagné et tous doivent recevoir un prix.»)
Alice au pays des merveilles
Lewis Caroll
[Alice et les animaux, après un bain malencontreux, sont trempés et grelottants. Le dodo leur propose de faire une
course un peu particulière.]
Le Dodo, d’un ton vexé : « Une course cocasse ; c’est ce que nous pouvons faire de mieux pour nous sécher. »
« Qu’est-ce qu’une course cocasse ? » demanda Alice ; non qu’elle tînt beaucoup à le savoir, mais le Dodo avait fait
une pause comme s’il s’attendait à être questionné par quelqu’un, et personne ne semblait disposé à prendre la
parole.
« La meilleure manière de l’expliquer, » dit le Dodo, « c’est de le faire. » (Et comme vous pourriez bien, un de ces
jours d’hiver, avoir envie de l’essayer, je vais vous dire comment le Dodo s’y prit.)
D’abord il traça un terrain de course, une espèce de cercle ( « Du reste, » disait-il, « la forme n’y fait rien » ), et les
coureurs furent placés indifféremment çà et là sur le terrain. Personne ne cria, « Un, deux, trois, en avant ! » mais
chacun partit et s’arrêta quand il voulut, de sorte qu’il n’était pas aisé de savoir quand la course finirait. Cependant,
au bout d’une demi-heure, tout le monde étant sec, le Dodo cria tout à coup : « La course est finie ! » et les voilà tous
haletants qui entourent le Dodo et lui demandent :
« Qui a gagné ? »
Cette question donna bien à réfléchir au Dodo ; il resta longtemps assis, un doigt appuyé sur le front (pose ordinaire
de Shakespeare dans ses portraits) ; tandis que les autres attendaient en silence.
Enfin le Dodo dit : « Tout le monde a gagné, et tout le monde aura un prix. »
98
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
Annexe
Passation et résultats des tests neuropsychologiques.
Tests attentionnels
Matching Familiar Figures Test (Test
d’appariement de figures familières)
Consiste à identifier un objet parmi sept
autres objets très similaires
Permet de distinguer le style cognitif
impulsif ou réfléchi à travers l’ajustement
précision-rapidité des réponses
Figure complexe de Rey
Consiste à recopier puis reproduire de
mémoire une figure géométrique complexe
Permet d’évaluer les capacités de
mémorisation et de structuration visuospatiale selon le processus de reproduction et
la précision de sa réalisation. Evalue aussi la
cohérence centrale, l'attention aux détails ou
à la globalité de la figure.
Consiste à nommer la couleur de mots sans
lire le mot lui-même
Permet d'évaluer l'effet d'interférence ainsi
que les capacités d'inhibition et d'attention
sélective
Test de Stroop
Tests de flexibilité cognitive
Trail Making Task (Test des tracés)
Consiste à relier au crayon sur une feuilles
où ils sont disséminés des nombres
croissants (partie A) puis alternativement des
nombres et des lettres croissants (partie B), le
plus vite possible
Permet de mesurer la flexibilité cognitive
selon le ralentissement à la partie B
Wisconsin Card Sorting Test
Consiste à apparier des cartes à quatre cartes
de référence selon un des trois critères
(couleur, forme et nombre d’items)
représenté sur celles-ci, la règle d’association
est révélée par le feedback de l’examinateur,
celle-ci changeant au cours de la passation
Permet de mesurer la flexibilité cognitive
selon le nombre d’erreurs de persévération
Brixton Task
Consiste à prévoir les mouvements d’un
cercle bleu sur un écran, dont la règle de
déplacement change au cours de la passation
Permet de mesurer la flexibilité cognitive
selon le nombre d’erreurs de persévération
99
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
Bibliographie
1.
Steinhausen, H.-C. The Outcome of Anorexia Nervosa in the 20th Century. Am. J. Psychiatry
159, 1284–1293 (2002).
2.
Keski-Rahkonen, A. et al. Epidemiology and Course of Anorexia Nervosa in the Community.
Am. J. Psychiatry 164, 1259–1265 (2007).
3.
Raevuori, A. et al. Epidemiology of Anorexia Nervosa in Men: A Nationwide Study of Finnish
Twins. PLoS ONE 4, e4402 (2009).
4.
Godart, N. T. et al. Epidemiology of anorexia nervosa in a French community-based sample of
39,542 adolescents. Open J. Epidemiol. 03, 53–61 (2013).
5.
Arcelus J, Mitchell AJ, Wales J & Nielsen S. Mortality rates in patients with anorexia nervosa
and other eating disorders: A meta-analysis of 36 studies. Arch. Gen. Psychiatry 68, 724–731
(2011).
6.
Harris, E. C. & Barraclough, B. Excess mortality of mental disorder. Br. J. Psychiatry J. Ment.
Sci. 173, 11–53 (1998).
7.
Smink, F. R. E., van Hoeken, D. & Hoek, H. W. Epidemiology of eating disorders: incidence,
prevalence and mortality rates. Curr. Psychiatry Rep. 14, 406–414 (2012).
8.
Haute Autorité de Santé (HAS). Anorexie mentale : prise en charge. (2011).
9.
Mellinkoff, S. M. ANOREXIA NERVOSA: Its History, Psychology, and Biology—A
Psychosomatic Medicine Monograph. Calif. Med. 93, 321 (1960).
10. Guillemot, A. & Laxenaire, M. Anorexie mentale et boulimie, le poids de la culture. Gaz.
Médicale 102, 25–25 (1995).
11. Morton, R. Phthisiologia Seu Exercitationes De Phthisi: Tribus Libris Comprehensae ... (Kühn,
1691).
12. Lasègue, C. De l’anorexie hystérique. J. Fr. Psychiatr. n° 32, 3–8 (1873).
13. Freud, S. La naissance de la psychanalyse. (Presses Universitaires de France, 1956).
14. Lacan, J. Le séminaire de Jacques Lacan: La relation d’objet (1956-1957). (Seuil, 1973).
15. Garner, D. M. & Garfinkel, P. E. Handbook of Psychotherpay for Anorexia and Bulimia.
(Guilford Press, 1985).
16. Morgan, H. G. & Russell, G. F. M. Value of family background and clinical features as
100
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
predictors of long-term outcome in anorexia nervosa: four-year follow-up study of 41 patients.
Psychol. Med. 5, 355–371 (1975).
17. Minuchin, S. Families and family therapy. (Harvard University Press, 1974).
18. Minuchin, S., Rosman, B. L., Baker, L. & Minuchin, S. Psychosomatic Families: Anorexia
Nervosa in Context. (Harvard University Press, 1978).
19. Selvini-Palazzoli. Self-starvation: From the Intrapsychic to the Transpersonal Approach to
Anorexia Nervosa. (Human Context Books, 1974).
20. Decobert, S. Survol historique de la notion d’anorexie mentale. Groupal 8–17 (2000).
21. Corcos, M., Flament, M. & Jeammet, P. Les Conduites de dépendance. Dimensions
psychopathologiques communes. (2003).
22. Jeammet, P. Anorexie, Boulimie - Les paradoxes de l’adolescence. (Fayard/Pluriel, 2004).
23. Brusset, B. Psychopathologie de l’anorexie mentale - 2ème édition. (Dunod, 2008).
24. Corcos, M. Approche psychosomatique des conduites addictives alimentaires. Dialogue no
169, 97–109 (2005).
25. Corcos, M. & Dupont, M.-E. Approche psychanalytique de l’anorexie mentale. Nutr. Clin.
Métabolisme 21, 190–200 (2007).
26. Combe, C., Morasz, L. & Ostermann, G. Soigner l’anorexie. (Dunod, 2009).
27. Herpertz-Dahlmann, B., Seitz, J. & Konrad, K. Aetiology of anorexia nervosa: from a
‘psychosomatic family model’ to a neuropsychiatric disorder? Eur. Arch. Psychiatry Clin.
Neurosci. 261 Suppl 2, S177–S181 (2011).
28. Cook-Darzens, S., Doyen, C. & Mouren, M.-C. Family therapy in the treatment of adolescent
anorexia nervosa: current research evidence and its therapeutic implications. Eat. Weight
Disord. EWD 13, 157–170 (2008).
29. Holtom-Viesel, A. & Allan, S. A systematic review of the literature on family functioning
across all eating disorder diagnoses in comparison to control families. Clin. Psychol. Rev. 34,
29–43 (2014).
30. Holliday, J., Tchanturia, K., Landau, S., Collier, D. & Treasure, J. Is Impaired Set-Shifting an
Endophenotype of Anorexia Nervosa? Am. J. Psychiatry 162, 2269–2275 (2005).
31. Tenconi, E. et al. Set-shifting abilities, central coherence, and handedness in anorexia nervosa
patients, their unaffected siblings and healthy controls: Exploring putative endophenotypes.
101
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
World J. Biol. Psychiatry 11, 813–823 (2010).
32. Polivy, J. & Herman, C. P. Causes of Eating Disorders. Annu. Rev. Psychol. 53, 187–213
(2002).
33. Lock, J. & Grange, D. L. Treatment Manual for Anorexia Nervosa, Second Edition: A FamilyBased Approach. (Guilford Publications, 2015).
34. National Collaborating Centre for Mental Health (UK). Eating Disorders: Core Interventions
in the Treatment and Management of Anorexia Nervosa, Bulimia Nervosa and Related Eating
Disorders. (British Psychological Society (UK), 2004).
35. Stice, E., Marti, C. N. & Durant, S. Risk factors for onset of eating disorders: Evidence of
multiple risk pathways from an 8-year prospective study. Behav. Res. Ther. 49, 622–627 (2011).
36. Zipfel, S., Giel, K. E., Bulik, C. M., Hay, P. & Schmidt, U. Anorexia nervosa: aetiology,
assessment, and treatment. Lancet Psychiatry 2, 1099–1111 (2015).
37. Projet de loi de modernisation de notre système de santé. (Texte définitif).
38. Calugi, S., El Ghoch, M., Conti, M. & Dalle Grave, R. Depression and treatment outcome in
anorexia nervosa. Psychiatry Res. 218, 195–200 (2014).
39. Fernandez-Aranda, F. et al. Symptom profile of major depressive disorder in women with
eating disorders. Aust. N. Z. J. Psychiatry 41, 24–31 (2007).
40. Mischoulon, D. et al. Depression and eating disorders: Treatment and course. J. Affect. Disord.
130, 470–477 (2011).
41. Keshaviah, A. et al. Re-examining premature mortality in anorexia nervosa: A meta-analysis
redux. Compr. Psychiatry 55, 1773–1784 (2014).
42. Bulik, C. M. et al. Suicide attempts in anorexia nervosa. Psychosom. Med. 70, 378–383 (2008).
43. Forcano, L. et al. Suicide attempts in anorexia nervosa subtypes. Compr. Psychiatry 52, 352–
358 (2011).
44. Franko, D. L. & Keel, P. K. Suicidality in eating disorders: occurrence, correlates, and clinical
implications. Clin. Psychol. Rev. 26, 769–782 (2006).
45. Runfola, C. D., Thornton, L. M., Pisetsky, E. M., Bulik, C. M. & Birgegård, A. Self-image and
suicide in a Swedish national eating disorders clinical register. Compr. Psychiatry 55, 439–449
(2014).
46. Ribeiro, J. D. et al. Fearlessness about death: The psychometric properties and construct
102
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
validity of the revision to the Acquired Capability for Suicide Scale. Psychol. Assess. 26, 115–
126 (2014).
47. Selby, E. A. et al. Habitual starvation and provocative behaviors: Two potential routes to
extreme suicidal behavior in anorexia nervosa. Behav. Res. Ther. 48, 634–645 (2010).
48. Papežová, H., Yamamotová, A. & Uher, R. Elevated pain threshold in eating disorders:
physiological and psychological factors. J. Psychiatr. Res. 39, 431–438 (2005).
49. Thornton, L. M., Welch, E., Munn-Chernoff, M. A., Lichtenstein, P. & Bulik, C. M. Anorexia
Nervosa, Major Depression, and Suicide Attempts: Shared Genetic Factors. Suicide Life.
Threat. Behav. n/a–n/a (2016). doi:10.1111/sltb.12235
50. Madden, S., Morris, A., Zurynski, Y. A., Kohn, M. & Elliot, E. J. Burden of eatig disorders in
5-13-year-old children in Australia. ResearchGate 190, 410–4 (2009).
51. Nicholls, D. & Bryant-Waugh, R. Eating Disorders of Infancy and Childhood: Definition,
Symptomatology, Epidemiology, and Comorbidity. Child Adolesc. Psychiatr. Clin. N. Am. 18,
17–30 (2009).
52. Pinhas, L. Incidence and Age-Specific Presentation of Restrictive Eating Disorders in Children:
A Canadian Paediatric Surveillance Program Study. Arch. Pediatr. Adolesc. Med. 165, 895
(2011).
53. APA, A. P. A. Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders, Fourth Edition: DSMIV-TR®. (American Psychiatric Association, 2000).
54. APA, A. P. A. Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders (DSM-5®). (American
Psychiatric Pub, 2013).
55. Jean, A. et al. The nucleus accumbens 5-HTR4-CART pathway ties anorexia to hyperactivity.
Transl. Psychiatry 2, e203 (2012).
56. Hebebrand, J. & Bulik, C. M. Critical appraisal of the provisional DSM-5 criteria for anorexia
nervosa and an alternative proposal. Int. J. Eat. Disord. 44, 665–678 (2011).
57. Garner, D. M. & Garfinkel, P. E. Handbook of Treatment for Eating Disorders. (Guilford Press,
1997).
58. Nandrino, J.-L. L’anorexie mentale: Des théories aux prises en charge. (Dunod, 2015).
59. Schmidt, U. & Treasure, J. Anorexia nervosa: valued and visible. A cognitive-interpersonal
maintenance model and its implications for research and practice. Br. J. Clin. Psychol. Br.
103
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
Psychol. Soc. 45, 343–366 (2006).
60. Serpell, L., Treasure, J., Teasdale, J. & Sullivan, V. Anorexia: Friend or foe? Int. J. Eat. Disord.
25, 177–86 (1999).
61. Fairburn, C. G., Shafran, R. & Cooper, Z. A cognitive behavioural theory of anorexia nervosa.
Behav. Res. Ther. 37, 1–13 (1999).
62. Lewandowski, L. M., Gebing, T. A., Anthony, J. L. & O’Brien, W. H. Meta-analysis of
cognitive-behavioral treatment studies for bulimia. Clin. Psychol. Rev. 17, 703–718 (1997).
63. Ghaderi, A. & Andersson, G. Meta-analysis of CBT for Bulimia Nervosa: Investigating the
Effects Using DSM-III-R and DSM-IV Criteria. Scand. J. Behav. Ther. 28, 79–87 (1999).
64. Whittal, M. L., Agras, W. S. & Gould, R. A. Bulimia nervosa: A meta-analysis of psychosocial
and pharmacological treatments. Behav. Ther. 30, 117–135 (1999).
65. Shapiro, J. R. et al. Bulimia nervosa treatment: A systematic review of randomized controlled
trials. Int. J. Eat. Disord. 40, 321–336 (2007).
66. Hay, P. P., Bacaltchuk, J., Stefano, S. & Kashyap, P. in Cochrane Database of Systematic
Reviews (John Wiley & Sons, Ltd, 2009).
67. Bulik, C. M., Berkman, N. D., Brownley, K. A., Sedway, J. A. & Lohr, K. N. Anorexia nervosa
treatment: a systematic review of randomized controlled trials. Int. J. Eat. Disord. 40, 310–320
(2007).
68. Gorwood, P. et al. New Insights in Anorexia Nervosa. Neuroendocr. Sci. 256 (2016).
doi:10.3389/fnins.2016.00256
69. Gorwood, P., Kipman, A. & Foulon, C. The human genetics of anorexia nervosa. Eur. J.
Pharmacol. 480, 163–170 (2003).
70. Bulik, C. M. et al. Understanding the Relation between Anorexia Nervosa and Bulimia
Nervosa in a Swedish National Twin Sample. Biol. Psychiatry 67, 71–77 (2010).
71. Strober, M., Freeman, R., Lampert, C., Diamond, J. & Kaye, W. Controlled family study of
anorexia nervosa and bulimia nervosa: evidence of shared liability and transmission of partial
syndromes. Am. J. Psychiatry 157, 393–401 (2000).
72. Yilmaz, Z., Hardaway, J. A. & Bulik, C. M. Genetics and Epigenetics of Eating Disorders. Adv.
Genomics Genet. 5, 131–150 (2015).
73. Thornton, L. M., Mazzeo, S. E. & Bulik, C. M. The Heritability of Eating Disorders: Methods
104
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
and Current Findings. Curr. Top. Behav. Neurosci. 6, 141–156 (2011).
74. Pinheiro, A. P. et al. Association Study of 182 Candidate Genes in Anorexia Nervosa. Am. J.
Med. Genet. Part B Neuropsychiatr. Genet. Off. Publ. Int. Soc. Psychiatr. Genet. 153B, 1070–
1080 (2010).
75. Helder, S. G. & Collier, D. A. The genetics of eating disorders. Curr. Top. Behav. Neurosci. 6,
157–175 (2011).
76. Boraska, V. et al. A genome-wide association study of anorexia nervosa. Mol. Psychiatry 16,
(2011).
77. Boraska, V. et al. A genome-wide association study of anorexia nervosa. Mol. Psychiatry 19,
1085–1094 (2014).
78. Wang, K. et al. A genome-wide association study on common SNPs and rare CNVs in
anorexia nervosa. Mol. Psychiatry 16, 949–959 (2011).
79. Kaye, W. Neurobiology of anorexia and bulimia nervosa. Physiol. Behav. 94, 121–135 (2008).
80. Connan, F., Campbell, I. C., Katzman, M., Lightman, S. L. & Treasure, J. A
neurodevelopmental model for anorexia nervosa. Physiol. Behav. 79, 13–24 (2003).
81. Klump, K. L., McGue, M. & Iacono, W. G. Age differences in genetic and environmental
influences on eating attitudes and behaviors in preadolescent and adolescent female twins. J.
Abnorm. Psychol. 109, 239–251 (2000).
82. Rubinow, D. R., Schmidt, P. J. & Roca, C. A. Estrogen-serotonin interactions: implications for
affective regulation. Biol. Psychiatry 44, 839–850 (1998).
83. Torpy, D. J., Papanicolaou, D. A. & Chrousos, G. P. Sexual Dimorphism of the Human Stress
Response May Be Due to Estradiol-Mediated Stimulation of Hypothalamic CorticotropinReleasing Hormone Synthesis. J. Clin. Endocrinol. Metab. 82, 982–984 (1997).
84. Benes, F. M. Brain Development, VII: Human Brain Growth Spans Decades. Am. J.
Psychiatry 155, 1489–1489 (1998).
85. Schweiger, U., Warnhoff, M., Pahl, J. & Pirke, K. M. Effects of carbohydrate and protein
meals on plasma large neutral amino acids, glucose, and insulin plasma levels of anorectic
patients. Metabolism 35, 938–943 (1986).
86. Aigner, M., Treasure, J., Kaye, W., Kasper, S. & WFSBP Task Force On Eating Disorders.
World Federation of Societies of Biological Psychiatry (WFSBP) guidelines for the
105
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
pharmacological treatment of eating disorders. World J. Biol. Psychiatry Off. J. World Fed.
Soc. Biol. Psychiatry 12, 400–443 (2011).
87. Méquinion, M. et al. Ghrelin: Central and Peripheral Implications in Anorexia Nervosa. Front.
Endocrinol. 4, (2013).
88. Germain, N. et al. Ghrelin/obestatin ratio in two populations with low bodyweight:
Constitutional thinness and anorexia nervosa. Psychoneuroendocrinology 34, 413–419 (2009).
89. Germain, N. et al. Ghrelin and Obestatin Circadian Levels Differentiate Bingeing-Purging
from Restrictive Anorexia Nervosa. J. Clin. Endocrinol. Metab. 95, 3057–3062 (2010).
90. Haas, V. et al. Leptin and body weight regulation in patients with anorexia nervosa before and
during weight recovery. Am. J. Clin. Nutr. 81, 889–896 (2005).
91. Nogueira, J.-P. et al. Specific adipocytokines profiles in patients with hyperactive and/or
binge/purge form of anorexia nervosa. Eur. J. Clin. Nutr. 64, 840–844 (2010).
92. Berridge, K. C., Robinson, T. E. & Aldridge, J. W. Dissecting components of reward: ‘liking’,
‘wanting’, and learning. Curr. Opin. Pharmacol. 9, 65–73 (2009).
93. Berridge, K. C., Ho, C.-Y., Richard, J. M. & DiFeliceantonio, A. G. The tempted brain eats:
Pleasure and desire circuits in obesity and eating disorders. Brain Res. 1350, 43–64 (2010).
94. Perello, M. et al. Functional implications of limited leptin receptor and ghrelin receptor
coexpression in the brain. J. Comp. Neurol. 520, 281–294 (2012).
95. van Zessen, R., van der Plasse, G. & Adan, R. a. H. Contribution of the mesolimbic dopamine
system in mediating the effects of leptin and ghrelin on feeding. Proc. Nutr. Soc. 71, 435–445
(2012).
96. Merkestein, M. et al. Ghrelin Mediates Anticipation to a Palatable Meal in Rats. Obesity 20,
963–971 (2012).
97. Kaye, W. H., Fudge, J. L. & Paulus, M. New insights into symptoms and neurocircuit function
of anorexia nervosa. Nat. Rev. Neurosci. 10, 573–584 (2009).
98. Broglio, F. et al. The endocrine response to acute ghrelin administration is blunted in patients
with anorexia nervosa, a ghrelin hypersecretory state. Clin. Endocrinol. (Oxf.) 60, 592–599
(2004).
99. Hotta, M. et al. Ghrelin increases hunger and food intake in patients with restricting-type
anorexia nervosa: a pilot study. Endocr. J. 56, 1119–1128 (2009).
106
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
100. Miljic, D. et al. Ghrelin Has Partial or No Effect on Appetite, Growth Hormone, Prolactin, and
Cortisol Release in Patients with Anorexia Nervosa. J. Clin. Endocrinol. Metab. 91, 1491–
1495 (2006).
101. Ogiso, K., Asakawa, A., Amitani, H. & Inui, A. Ghrelin and anorexia nervosa: a
psychosomatic perspective. Nutr. Burbank Los Angel. Cty. Calif 27, 988–993 (2011).
102. Clarke, J., Ramoz, N., Fladung, A.-K. & Gorwood, P. Higher reward value of starvation
imagery in anorexia nervosa and association with the Val66Met BDNF polymorphism. Transl.
Psychiatry 6, e829 (2016).
103. John, B. & Lewis, K. R. Chromosome variability and geographic distribution in insects.
Science 152, 711–721 (1966).
104. Gottesman, I. I. & Shields, J. Schizophrenia and genetics: A twin study vantage point. xviii,
(Academic Press, 1972).
105. Gottesman, I. I. & Gould, T. D. The Endophenotype Concept in Psychiatry: Etymology and
Strategic Intentions. Am. J. Psychiatry 160, 636–645 (2003).
106. Glahn, D. C. et al. Arguments for the Sake of Endophenotypes: Examining Common
Misconceptions About the Use of Endophenotypes In Psychiatric Genetics. Am. J. Med. Genet.
Part B Neuropsychiatr. Genet. Off. Publ. Int. Soc. Psychiatr. Genet. 0, 122–130 (2014).
107. Bulik, C. M. et al. Genetic epidemiology, endophenotypes, and eating disorder classification.
Int. J. Eat. Disord. 40, S52–S60 (2007).
108. Lopez, C., Tchanturia, K., Stahl, D. & Treasure, J. Weak central coherence in eating disorders:
a step towards looking for an endophenotype of eating disorders. J. Clin. Exp. Neuropsychol.
31, 117–125 (2009).
109. Roberts, M. E., Tchanturia, K. & Treasure, J. L. Is attention to detail a similarly strong
candidate endophenotype for anorexia nervosa and bulimia nervosa? World J. Biol. Psychiatry
Off. J. World Fed. Soc. Biol. Psychiatry 14, 452–463 (2013).
110. Kerem, N. C. & Katzman, D. K. Brain structure and function in adolescents with anorexia
nervosa. Adolesc. Med. Phila. Pa 14, 109–118 (2003).
111. Castro-Fornieles, J. et al. A cross-sectional and follow-up voxel-based morphometric MRI
study in adolescent anorexia nervosa. J. Psychiatr. Res. 43, 331–340 (2009).
112. Titova, O. E., Hjorth, O. C., Schiöth, H. B. & Brooks, S. J. Anorexia nervosa is linked to
107
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
reduced brain structure in reward and somatosensory regions: a meta-analysis of VBM studies.
BMC Psychiatry 13, 110 (2013).
113. Van den Eynde, F. et al. Structural magnetic resonance imaging in eating disorders: a
systematic review of voxel-based morphometry studies. Eur. Eat. Disord. Rev. J. Eat. Disord.
Assoc. 20, 94–105 (2012).
114. King, J. A. et al. Global Cortical Thinning in Acute Anorexia Nervosa Normalizes Following
Long-Term Weight Restoration. Biol. Psychiatry 77, 624–632 (2015).
115. Frank, G. K. W. Advances from neuroimaging studies in eating disorders. CNS Spectr. 20,
391–400 (2015).
116. Frank, G. K. W. Recent Advances in Neuroimaging to Model Eating Disorder Neurobiology.
Curr. Psychiatry Rep. 17, (2015).
117. van Kuyck, K. et al. Towards a neurocircuitry in anorexia nervosa: Evidence from functional
neuroimaging studies. J. Psychiatr. Res. 43, 1133–1145 (2009).
118. Rastam, M. et al. Regional cerebral blood flow in weight-restored anorexia nervosa: a
preliminary study. Dev. Med. Child Neurol. 43, 239–242 (2001).
119. Lask, B. et al. Functional neuroimaging in early-onset anorexia nervosa. Int. J. Eat. Disord. 37,
S49–S51 (2005).
120. Fladung, A.-K. et al. A Neural Signature of Anorexia Nervosa in the Ventral Striatal Reward
System. Am. J. Psychiatry 167, 206–212 (2010).
121. Fladung, A.-K., Schulze, U. M. E., Schöll, F., Bauer, K. & Grön, G. Role of the ventral
striatum in developing anorexia nervosa. Transl. Psychiatry 3, e315 (2013).
122. Keating, C. Theoretical perspective on anorexia nervosa: The conflict of reward. Neurosci.
Biobehav. Rev. 34, 73–79 (2010).
123. Gorwood, P. L’anorexie : plaisir de maigrir plutôt que peur de grossir. Communiqué INSERM
(2016).
124. Askenazy, F. Anorexie à l’adolescence et séparation. Ann. Méd.-Psychol. Rev. Psychiatr. 174,
426–430 (2016).
125. Millan, M. J. et al. Cognitive dysfunction in psychiatric disorders: characteristics, causes and
the quest for improved therapy. Nat. Rev. Drug Discov. 11, 141–168 (2012).
126. Bruch, H. Les Yeux et le ventre: l’obèse, l’anorexique. (Payot & Rivages, 1994).
108
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
127. Tchanturia, K., Campbell, I. C., Morris, R. & Treasure, J. Neuropsychological studies in
anorexia nervosa. Int. J. Eat. Disord. 37 Suppl, S72–76; discussion S87–89 (2005).
128. Jáuregui-Lobera, I. Neuropsychology of eating disorders: 1995–2012. Neuropsychiatr. Dis.
Treat. 9, 415–430 (2013).
129. Lopez, C., Stahl, D. & Tchanturia, K. Estimated intelligence quotient in anorexia nervosa: a
systematic review and meta-analysis of the literature. Ann. Gen. Psychiatry 9, 40 (2010).
130. Blanz, B. J., Detzner, U., Lay, B., Rose, F. & Schmidt, M. H. The intellectual functioning of
adolescents with anorexia nervosa and bulimia nervosa. Eur. Child Adolesc. Psychiatry 6,
129–135 (1997).
131. Connan, F. et al. Hippocampal volume and cognitive function in anorexia nervosa. Psychiatry
Res. Neuroimaging 146, 117–125 (2006).
132. Galderisi, S. et al. Neurocognitive functioning in subjects with eating disorders: the influence
of neuroactive steroids. Biol. Psychiatry 53, 921–927 (2003).
133. Gillberg, I. C., Gillberg, C., Råstam, M. & Johansson, M. The cognitive profile of anorexia
nervosa: A comparative study including a community-based sample. Compr. Psychiatry 37,
23–30 (1996).
134. Ranseen, J. D. & Humphries, L. L. The Intellectual Functioning of Eating Disorder Patients. J.
Am. Acad. Child Adolesc. Psychiatry 31, 844–846 (1992).
135. Koyama, K. I. et al. Intelligence quotient and cognitive functions in severe restricting-type
anorexia nervosa before and after weight gain. Nutrition 28, 1132–1136 (2012).
136. Jones, B. P., Duncan, C. C., Brouwers, P. & Mirsky, A. F. Cognition in eating disorders. J. Clin.
Exp. Neuropsychol. 13, 711–728 (1991).
137. Lauer, C. J., Gorzewski, B., Gerlinghoff, M., Backmund, H. & Zihl, J. Neuropsychological
assessments before and aftertreatment in patients with anorexia nervosa and bulimianervosa. J.
Psychiatr. Res. 33, 129–138 (1999).
138. Weider, S., Indredavik, M. S., Lydersen, S. & Hestad, K. Intellectual Function in Patients with
Anorexia Nervosa and Bulimia Nervosa. Eur. Eat. Disord. Rev. 22, 15–24 (2014).
139. Howlin, P., Magiati, I. & Charman, T. Systematic Review of Early Intensive Behavioral
Interventions for Children With Autism. Am. J. Intellect. Dev. Disabil. 114, 23–41 (2009).
140. Green, M. W., Elliman, N. A., Wakeling, A. & Rogers, P. J. Cognitive functioning, weight
109
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
change and therapy in anorexia nervosa. J. Psychiatr. Res. 30, 401–410 (1996).
141. Mendlewicz, L., Nef, F. & Simon, Y. Selective Handling of Information in Patients Suffering
from Restrictive Anorexia in an Emotional Stroop Test and a Word Recognition Test.
Neuropsychobiology 44, 59–64 (2001).
142. Ben-Tovim, D. I. & Walker, M. K. Further evidence for the stroop test as a quantitative
measure of psychopathology in eating disorders. Int. J. Eat. Disord. 10, 609–613 (1991).
143. Ben-Tovim, D. I., Walker, M. K., Fok, D. & Yap, E. An adaptation of the stroop test for
measuring shape and food concerns in eating disorders: A quantitative measure of
psychopathology? Int. J. Eat. Disord. 8, 681–687 (1989).
144. Channon, S., Hemsley, D. & de Silva, P. Selective processing of food words in anorexia
nervosa. Br. J. Clin. Psychol. 27, 259–260 (1988).
145. Cooper, M. & Todd, G. Selective processing of three types of stimuli in eating disorders. Br. J.
Clin. Psychol. 36, 279–281 (1997).
146. Jones-Chesters, M. H., Monsell, S. & Cooper, P. J. The disorder-salient Stroop effect as a
measure of psychopathology in eating disorders. Int. J. Eat. Disord. 24, 65–82 (1998).
147. Carrard, I. & Ceschi, G. in Traité de psychopathologie cognitive: Tome II – États
psychopathologiques (Groupe de Boeck, 2008).
148. Sebastian, S. B., Williamson, D. A. & Blouin, D. C. Memory bias for fatness stimuli in the
eating disorders. Cogn. Ther. Res. 20, 275–286 (1996).
149. Williams, J. M. G. in Remebering our past 224–268 (1996).
150. Dalgleish, T. et al. Self-reported parental abuse relates to autobiographical memory style in
patients with eating disorders. Emot. Wash. DC 3, 211–222 (2003).
151. Dalgleish, T. et al. Reduced specificity of autobiographical memory and depression: The role
of executive control. J. Exp. Psychol. Gen. 136, 23–42 (2007).
152. Nandrino, J.-L., Doba, K., Lesne, A., Christophe, V. & Pezard, L. Autobiographical memory
deficit in anorexia nervosa: Emotion regulation and effect of duration of illness. J. Psychosom.
Res. 61, 537–543 (2006).
153. Karwautz, A. et al. Characteristics of self-regulation in adolescent patients with anorexia
nervosa. Br. J. Med. Psychol. 74, 101–114 (2001).
154. Frith, U. Autism : Explaining the enigma. (1989).
110
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
155. Happé, F. & Frith, U. The Weak Coherence Account: Detail-focused Cognitive Style in Autism
Spectrum Disorders. J. Autism Dev. Disord. 36, 5–25 (2006).
156. Lopez, C. et al. An examination of the concept of central coherence in women with anorexia
nervosa. Int. J. Eat. Disord. 41, 143–152 (2008).
157. Lang, K., Lopez, C., Stahl, D., Tchanturia, K. & Treasure, J. Central coherence in eating
disorders: an updated systematic review and meta-analysis. World J. Biol. Psychiatry Off. J.
World Fed. Soc. Biol. Psychiatry 15, 586–598 (2014).
158. Allen, K. L. et al. Neurocognitive functioning in adolescents with eating disorders: a
population-based study. Cognit. Neuropsychiatry 18, 355–375 (2013).
159. Martinez, G., Cook-Darzens, S., Chaste, P., Mouren, M.-C. & Doyen, C. L’anorexie mentale à
la lumière du fonctionnement neurocognitif : nouvelles perspectives théoriques et
thérapeutiques. L’Encéphale 40, 160–167 (2014).
160. Southgate, L., Tchanturia, K. & Treasure, J. in Neuropsychology of Mental Illness 316–325
(2009).
161. Miyake, A. et al. The Unity and Diversity of Executive Functions and Their Contributions to
Complex ‘Frontal Lobe’ Tasks: A Latent Variable Analysis. Cognit. Psychol. 41, 49–100
(2000).
162. Roberts, M. E., Tchanturia, K., Stahl, D., Southgate, L. & Treasure, J. A systematic review and
meta-analysis of set-shifting ability in eating disorders. Psychol. Med. 37, 1075–1084 (2007).
163. Kashdan, T. B. Psychological Flexibility as a Fundamental Aspect of Health. Clin. Psychol.
Rev. 30, 865–878 (2010).
164. Doyen, C. et al. Thérapie par remédiation cognitive chez les enfants : données de la littérature
et application clinique dans un service de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent. Arch.
Pédiatrie 22, 418–426 (2015).
165. Tchanturia, K., Lounes, N. & Holttum, S. Cognitive Remediation in Anorexia Nervosa and
Related Conditions: A Systematic Review. Eur. Eat. Disord. Rev. 22, 454–462 (2014).
166. Tchanturia, K., Lloyd, S. & Lang, K. Cognitive remediation therapy for anorexia nervosa:
Current evidence and future research directions. Int. J. Eat. Disord. 46, 492–495 (2013).
167. Tchanturia, K. et al. Cognitive Flexibility and Clinical Severity in Eating Disorders. PLoS
ONE 6, (2011).
111
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
168. Tchanturia, K. et al. Poor Cognitive Flexibility in Eating Disorders: Examining the Evidence
using the Wisconsin Card Sorting Task. PLoS ONE 7, (2012).
169. Szmukler, G. et al. Neuropsychological Impairment in Anorexia-Nervosa - Before and After
Refeeding. J. Clin. Exp. Neuropsychol. 14, 347–352 (1992).
170. Sato, Y. et al. Neural Basis of Impaired Cognitive Flexibility in Patients with Anorexia
Nervosa. PLoS ONE 8, e61108 (2013).
171. Gillberg, I. C. et al. Attention, executive functions, and mentalizing in anorexia nervosa
eighteen years after onset of eating disorder. J. Clin. Exp. Neuropsychol. 32, 358–365 (2010).
172. Roberts, M. E., Tchanturia, K. & Treasure, J. L. Exploring the neurocognitive signature of
poor set-shifting in anorexia and bulimia nervosa. J. Psychiatr. Res. 44, 964–970 (2010).
173. Tchanturia, K., Morris, R. G., Surguladze, S. & Treasure, J. An examination of perceptual and
cognitive set shifting tasks in acute anorexia nervosa and following recovery. Eat. Weight
Disord. EWD 7, 312–315 (2002).
174. Lang, K. et al. Do Children and Adolescents with Anorexia Nervosa Display an Inefficient
Cognitive Processing Style? PLoS ONE 10, (2015).
175. McAnarney, E. R. et al. Restrictive Anorexia Nervosa And Set-Shifting in Adolescents: A
Biobehavioral Interface. J. Adolesc. Health 49, 99–101 (2011).
176. Lang, K., Stahl, D., Espie, J., Treasure, J. & Tchanturia, K. Set shifting in children and
adolescents with anorexia nervosa: An exploratory systematic review and meta-analysis: Set
Shifting in Adolescents With An. Int. J. Eat. Disord. 47, 394–399 (2014).
177. Kalkut, E. L., Han, S. D., Lansing, A. E., Holdnack, J. A. & Delis, D. C. Development of setshifting ability from late childhood through early adulthood. Arch. Clin. Neuropsychol. Off. J.
Natl. Acad. Neuropsychol. 24, 565–574 (2009).
178. Klimkeit, E. I., Mattingley, J. B., Sheppard, D. M., Farrow, M. & Bradshaw, J. L. Examining
the development of attention and executive functions in children with a novel paradigm. Child
Neuropsychol. J. Norm. Abnorm. Dev. Child. Adolesc. 10, 201–211 (2004).
179. Floresco, S. B., Magyar, O., Ghods-Sharifi, S., Vexelman, C. & Tse, M. T. L. Multiple
Dopamine Receptor Subtypes in the Medial Prefrontal Cortex of the Rat Regulate Set-Shifting.
Neuropsychopharmacology 31, 297–309 (2005).
180. Frank, G. K. et al. Increased Dopamine D2/D3 Receptor Binding After Recovery from
112
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
Anorexia Nervosa Measured by Positron Emission Tomography and [11C]Raclopride. Biol.
Psychiatry 58, 908–912 (2005).
181. Kaye, W. H., Frank, G. K. & McConaha, C. Altered Dopamine Activity after Recovery from
Restricting-Type Anorexia Nervosa. Neuropsychopharmacology 21, 503–506 (1999).
182. Suzuki, M. et al. Age-related changes of dopamine D1-like and D2-like receptor binding in the
F344/N rat striatum revealed by positron emission tomography and in vitro receptor
autoradiography. Synapse 41, 285–293 (2001).
183. Galvan, A. Adolescent development of the reward system. Front. Hum. Neurosci. 4, 6 (2010).
184. Shott, M. E. et al. Cognitive Set-Shifting in Anorexia Nervosa. Eur. Eat. Disord. Rev. 20, 343–
349 (2012).
185. Kothari, R., Solmi, F., Treasure, J. & Micali, N. The neuropsychological profile of children at
high risk of developing an eating disorder. Psychol. Med. 43, 1543–1554 (2013).
186. Lindner, S. E., Fichter, M. M. & Quadflieg, N. Decision-making and planning in full recovery
of anorexia nervosa. Int. J. Eat. Disord. 45, 866–875 (2012).
187. Hill, E. L. & Bird, C. M. Executive processes in Asperger syndrome: Patterns of performance
in a multiple case series. Neuropsychologia 44, 2822–2835 (2006).
188. Wentz, E., Gillberg, I. C., Anckarsäter, H., Gillberg, C. & Råstam, M. Adolescent-onset
anorexia nervosa: 18-year outcome. Br. J. Psychiatry 194, 168–174 (2009).
189. Schreck, K. A., Williams, K. & Smith, A. F. A Comparison of Eating Behaviors Between
Children with and Without Autism. J. Autism Dev. Disord. 34, 433–438 (2004).
190. Tenconi, E., Santonastaso, P., Monaco, F. & Favaro, A. Obstetric complications and eating
disorders: A replication study. Int. J. Eat. Disord. 48, 424–430 (2015).
191. Jacobi, C., Hayward, C., de Zwaan, M., Kraemer, H. C. & Agras, W. S. Coming to terms with
risk factors for eating disorders: application of risk terminology and suggestions for a general
taxonomy. Psychol. Bull. 130, 19–65 (2004).
192. Maguire, E. A. et al. Navigation-related structural change in the hippocampi of taxi drivers.
Proc. Natl. Acad. Sci. U. S. A. 97, 4398–4403 (2000).
193. Wykes, T. et al. Effects on the brain of a psychological treatment: cognitive remediation
therapy. Br. J. Psychiatry 181, 144–152 (2002).
194. Eack SM, Hogarty GE, Cho RY & et al. Neuroprotective effects of cognitive enhancement
113
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
therapy against gray matter loss in early schizophrenia: Results from a 2-year randomized
controlled trial. Arch. Gen. Psychiatry 67, 674–682 (2010).
195. Penadés, R. et al. Brain Effects of Cognitive Remediation Therapy in Schizophrenia: A
Structural and Functional Neuroimaging Study. Biol. Psychiatry 73, 1015–1023 (2013).
196. Magistretti, P. & Ansermet, F. La plasticité neuronale : un nouveau paradigme entre
neurosciences et psychanalyse. PSN 5, 138–143 (2007).
197. Franck, N. Quels programmes de remédiation cognitive pour le premier épisode psychotique ?
L’Encéphale 36, Supplement 3, S58–S65 (2010).
198. McGurk, S. R., Twamley, E. W., Sitzer, D. I., McHugo, G. J. & Mueser, K. T. A Meta-Analysis
of Cognitive Remediation in Schizophrenia. Am. J. Psychiatry 164, 1791–1802 (2007).
199. Wykes, T., Huddy, V., Cellard, C., McGurk, S. R. & Czobor, P. A Meta-Analysis of Cognitive
Remediation for Schizophrenia: Methodology and Effect Sizes. Am. J. Psychiatry 168, 472–
485 (2011).
200. Prouteau, A. & Doron, J. Prédicteurs cognitifs des différentes dimensions du fonctionnement
dans la communauté dans la schizophrénie : revue de la littérature et perspectives.
L’Encéphale 34, 360–368 (2008).
201. Tchanturia, K. & Lock, J. in Behavioral Neurobiology of Eating Disorders (eds. Adan, R. A. H.
& Kaye, W. H.) 269–287 (Springer Berlin Heidelberg, 2010).
202. Keel PK et al. PRedictors of mortality in eating disorders. Arch. Gen. Psychiatry 60, 179–183
(2003).
203. Blank, D. S., Addington, D. & Addington, J. Social functioning and cognition in first episode
and multi-episode schizophrenia. Schizophr. Bull. 33, 583–583 (2007).
204. Davies, H. & Tchanturia, K. Cognitive remediation therapy as an intervention for acute
anorexia nervosa : a case report. Eur. Eat. Disorders Rev. 311–316 (2005).
205. Tchanturia, K., Whitney, J. & Treasure, J. Can cognitive exercises help treat anorexia nervosa?
Eat. Weight Disord. EWD 11, e112–116 (2006).
206. Pretorius, N. & Tchanturia, K. Anorexia nervosa: how people think and how we address it in
cognitive remediation therapy. Therapy 4, 423–431 (2007).
207. Tchanturia, K., Davies, H. & Campbell, I. C. Cognitive remediation therapy for patients with
anorexia nervosa: preliminary findings. Ann. Gen. Psychiatry 6, 14 (2007).
114
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
208. Tchanturia, K. et al. Letter to the Editor: Neuropsychological task performance before and
after cognitive remediation in anorexia nervosa: a pilot case-series. Psychol. Med. 38, 1371–
1373 (2008).
209. Abbate-Daga, G., Buzzichelli, S., Marzola, E., Amianto, F. & Fassino, S. Effectiveness of
cognitive remediation therapy (CRT) in anorexia nervosa: a case series. J. Clin. Exp.
Neuropsychol. 34, 1009–1015 (2012).
210. Tchanturia, K., Larsson, E. & Brown, A. Benefits of group cognitive remediation therapy in
anorexia nervosa: case series. Neuropsychiatrie 30, 42–49 (2016).
211. Dingemans, A., Danner, U. N., Donker, J. M., Aardoom, J. J. & van Meer, F. The effectiveness
of cognitive remediation therapy in patients with a severe or enduring eating disorder : a
randomized controlled trial. Psychotherpy Psychosom. 29–36 (2014). doi:10.1159/00355240
212. Brockmeyer, T. et al. Training cognitive flexibility in patients with anorexia nervosa : a pilot
randomized controllled trial of cognitive remediation therapy. Int. J. Eat. Disord. (2013).
213. Lock, J. et al. Is Outpatient Cognitive Remediation Therapy Feasible to Use in Randomized
Clinical Trials for Anorexia Nervosa? Int. J. Eat. Disord. 46, 567–575 (2013).
214. Genders, R. & Tchanturia, K. Cognitive remediation therapy (CRT) for anorexia in group
format: a pilot study. Eat. Weight Disord. EWD 15, e234–239 (2010).
215. Lang, K., Treasure, J. & Tchanturia, K. Acceptability and feasibility of self-help Cognitive
Remediation Therapy For Anorexia Nervosa delivered in collaboration with carers: A
qualitative preliminary evaluation study. Psychiatry Res. 225, 387–394 (2015).
216. Asch, M. et al. Évaluation d’un programme de remédiation cognitive au sein d’un groupe
d’enfants et d’adolescents anorexiques français : étude exploratoire. L’Encéphale 40, 240–246
(2014).
217. Zuchova, S., Erler, T. & Papezova, H. Group cognitive remediation therapy for adult anorexia
nervosa inpatients: first experiences. Eat. Weight Disord. EWD 18, 269–273 (2013).
218. Pretorius, N. et al. Evaluation of a Cognitive Remediation Therapy Group for Adolescents
with Anorexia Nervosa: Pilot Study. Eur. Eat. Disord. Rev. 20, 321–325 (2012).
219. Wood, L., Al-Khairulla, H. & Lask, B. Group cognitive remediation therapy for adolescents
with anorexia nervosa. Clin. Child Psychol. Psychiatry 16, 225–231 (2011).
220. Butler, R. W. et al. A multicenter, randomized clinical trial of a cognitive remediation program
115
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
for childhood survivors of a pediatric malignancy. J. Consult. Clin. Psychol. 76, 367–378
(2008).
221. Grynzspan, O. in Remédiation cognitive. N. Franck 210–219 (2012).
222. Kaye, K. in Regards périphériques sur l’autisme 131 (Lavoisier, 2012).
223. Beck, S. J., Hanson, C. A., Puffenberger, S. S., Benninger, K. L. & Benninger, W. B. A
controlled trial of working memory training for children and adolescents with ADHD. J. Clin.
Child Adolesc. Psychol. Off. J. Soc. Clin. Child Adolesc. Psychol. Am. Psychol. Assoc. Div. 53
39, 825–836 (2010).
224. Fourneret, P. & Seguin, C. in Remédiation cognitive. N. Franck 219–240 (2012).
225. Giroux, S., Parent, V. & Guay, M.-C. La remédiation cognitive et la remédiation métacognitive
pour les personnes ayant un TDAH : deux stratégies d’intervention novatrices et pourquoi pas
complémentaires ? J. Thérapie Comport. Cogn. 20, 87–92 (2010).
226. Klingberg, T. et al. Computerized training of working memory in children with ADHD--a
randomized, controlled trial. J. Am. Acad. Child Adolesc. Psychiatry 44, 177–186 (2005).
227. Klingberg, T., Forssberg, H. & Westerberg, H. Training of working memory in children with
ADHD. J. Clin. Exp. Neuropsychol. 24, 781–791 (2002).
228. Slate, S. E., Meyer, T. L., Burns, W. J. & Montgomery, D. D. Computerized cognitive training
for severely emotionally disturbed children with ADHD. Behav. Modif. 22, 415–437 (1998).
229. Demily, C. & Franck, N. Cognitive remediation: a promising tool for the treatment of
schizophrenia. Expert Rev. Neurother. 8, 1029–1036 (2008).
230. Fourneret, P., Georgieff, N. & Franck, N. La schizophrénie infantile : données actuelles et
principes de prise en charge thérapeutique. Arch. Pédiatrie 20, 789–799 (2013).
231. Wykes, T. et al. Cognitive remediation therapy (CRT) for young early onset patients with
schizophrenia: An exploratory randomized controlled trial. Schizophr. Res. 94, 221–230 (2007).
232. Maria, A.-S. et al. 2586 – French adaptation of cognitive remediation therapy for anorexia
nervosa: Study design and preliminary findings of a multicenter randomized clinical trial in
adolescents and young adults. Eur. Psychiatry 28, Supplement 1, 1 (2013).
233. Lask, B., Lindvall Dahlgren, C. & van Noort, B. M. The CRT Resource Pack for children and
adolescents with anorexia nervosa. (2013).
234. Tchanturia, K., Maiden, Z., Baker, L., Simic, M. & Espie, J. Group Cognitive Remediation
116
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
Therapy for Adolescents with Anorexia Nervosa ‘The Flexible Thinking Group’. (2014).
235. Delahunty, A., Morice, R. & Frost, B. Specific cognitive flexibility remediation in
schizophrenia. Psychol. Med. 221–227 (1993).
236. Delahunty, A., Reeder, C., Wykes, T., Morice, R. & Newton, E. Revised Cognitive
Remediation Therapy Manual. (2002).
237. Dweck, C. Mindset: The New Psychology of Success. (Random House Publishing Group,
2006).
238. Lock, J. & Fitzpatrick, K. K. Anorexia nervosa. BMJ Clin. Evid. 2009, (2009).
239. Treasure, J., Claudino, A. M. & Zucker, N. Eating disorders. Lancet Lond. Engl. 375, 583–593
(2010).
240. Brockmeyer, T. et al. Training cognitive flexibility in patients with anorexia nervosa: A pilot
randomized controlled trial of cognitive remediation therapy. Int. J. Eat. Disord. 47, 24–31
(2014).
241. House, J. et al. Comparison of specialist and nonspecialist care pathways for adolescents with
anorexia nervosa and related eating disorders. Int. J. Eat. Disord. 45, 949–956 (2012).
242. Frank, J. D. & Frank, J. B. Persuasion and Healing: A Comparative Study of Psychotherapy.
(JHU Press, 1993).
243. Greenberg, L. S. & Pinsof, W. M. The psychotherapeutic process: A research handbook. xvii,
(Guilford Press, 1986).
244. Luborsky, L., Crits-Christoph, P., Mintz, J. & Auerbach, A. Who will benefit from
psychotherapy?: Predicting therapeutic outcomes. xxix, (Basic Books, 1988).
245. Elkin I, Shea M, Watkins JT & et al. National institute of mental health treatment of
depression collaborative research program: General effectiveness of treatments. Arch. Gen.
Psychiatry 46, 971–982 (1989).
246. Krupnick, J. L. et al. The role of the therapeutic alliance in psychotherapy and
pharmacotherapy outcome: Findings in the National Institute of Mental Health Treatment of
Depression Collaborative Research Program. J. Consult. Clin. Psychol. 64, 532–539 (1996).
247. Forrest, P., Strupp, H. H. & Butler, S. F. Psychotherapy research and practice: Bridging the
gap. xvi, (Basic Books, 1994).
248. Horvath, A. O. & Greenberg, L. S. The Working Alliance: Theory, Research, and Practice.
117
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
(John Wiley & Sons, 1994).
249. Roth, A. & Fonagy, P. What Works for Whom?, Second Edition: A Critical Review of
Psychotherapy Research. (Guilford Publications, 2013).
250. Gerin, P. L’évaluation des psychothérapies. (Presses Universitaires de France, 1985).
251. Gerin, P., Dazord, A. & Sali, A. M. Psychothérapies et changements : Méthodologie de leur
évaluation. (Presses Universitaires de France - PUF, 1991).
252. Canceil, O. et al. Psychothérapie : trois approches évaluées. inserm (2004). Available at:
http://lara.inist.fr.docelec.univ-lyon1.fr/handle/2332/1323. (Accessed: 6th January 2016)
253. Douste Blazy, P. Déclaration de M. Philippe Douste-Blazy, ministre des solidarités, de la santé
et de la famille, sur le plan ‘psychiatrie et santé mentale’, l’hospitalisation des malades et les
moyens et capacités d’hospitalisation publiques. (2005). Available at: http://discours.viepublique.fr/notices/053000477.html.
254. Grawe, K. Research-informed psychotherapy. Psychother. Res. 7, 1–19 (1997).
255. Watson, H. J. & Bulik, C. M. Update on the treatment of anorexia nervosa: review of clinical
trials, practice guidelines and emerging interventions. Psychol. Med. 43, 2477–2500 (2013).
256. Bréchot, C. et al. Méthodologie de l’évaluation en psychiatrie et en santé mentale. Colloque
Inserm du 30 mai 2007. Pour Rech. (2007).
257. Doron, C.-O. Évaluation de l’efficacité des psychothérapies entre science et société. Inf.
Psychiatr. me 85, 131–141 (2012).
258. Elkin, I., Gibbons, R. D., Shea, M. T. & Shaw, B. F. Science is not a trial (but it can sometimes
be a tribulation). J. Consult. Clin. Psychol. 64, 92–103 (1996).
259. Golse, B. En matière de santé mentale à l’INSERM : les expertises nouvelles sont arrivées !
Adolescence 207–217 (2008).
260. Herbert, G. L., Callahan, J., Ruggero, C. J. & Murrell, A. R. New analyses of the National
Institute of Mental Health Treatment of Depression Collaborative Research Program: do
different treatments reflect different processes? Psychother. Res. J. Soc. Psychother. Res. 23,
514–525 (2013).
261. Audin, K. et al. Practice research networks for effective psychological therapies. J Ment
Health 10, 241–251 (2001).
262. Barkham, M. & Mellor-Clark, J. Bridging evidence-based practice and practice-based
118
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
evidence: developing a rigorous and relevant knowledge for the psychological therapies. Clin.
Psychol. Psychother. 10, 319–327 (2003).
263. Borkovec, T. D., Echemendia, R. J., Ragusea, S. A. & Ruiz, M. The Pennsylvania Practice
Research Network and Future Possibilities for Clinically Meaningful and Scientifically
Rigorous Psychotherapy Effectiveness Research. Clin. Psychol. Sci. Pract. 8, 155–167 (2001).
264. Fishman, D. B. Transcending the efficacy versus effectiveness research debate: Proposal for a
new, electronic ‘Journal of pragmatic case studies.’ Prev. Treat. 3, (2000).
265. Hendrick, S. Problématique et méthodologie de l’évaluation des psychothérapies. Thérapie
Fam. 30, 147–165 (2009).
266. Thurin, J.-M. & Briffault, X. Distinction, limites et complémentarité des recherches
d’efficacité potentielle et d’efficacité réelle : nouvelles perspectives pour la recherche en
psychothérapie. L’Encéphale 32, 402–412 (2006).
267. Pinsof, W. M. & Wynne, L. C. Toward Progress Research: Closing the Gap Between Family
Therapy Practice and Research. J. Marital Fam. Ther. 26, 1–8 (2000).
268. Clarkin, J. . & Levy, K. . in Handbook of psychotherapy and behavior change (4th ed.) xvi,
(John Wiley & Sons, 1994).
269. Zimmerman, M. & Mattia, J. I. Psychiatric diagnosis in clinical practice: Is comorbidity being
missed? Compr. Psychiatry 40, 182–191 (1999).
270. Lambert, M. J. in Psychotherapy research: An international review of programmatic studies
(eds. Beutler, L. E. & Crago, M.) 1–11 (American Psychological Association, 1991).
271. Fischman, G. & Veyrat, F.-E. Évaluation des psychothérapies selon les principes de
l’Evidence-based Medicine. Enjeux et scientificité du rapport de l’Inserm. Discussion. Ann.
Méd.-Psychol. 163, 769–779 (2005).
272. Robertson, M. & Stuart, S. Interpersonal Psychotherapy - A Clinician’s Guide. (CRC Press,
2003).
273. Silverman, W. H. Cookbooks, manuals, and paint-by-numbers: Psychotherapy in the 90’s.
Psychother. Theory Res. Pract. Train. 33, 207–215 (1996).
274. Westen, D., Novotny, C. M. & Thompson-Brenner, H. The Next Generation of Psychotherapy
Research: Reply to Ablon and Marci (2004), Goldfried and Eubanks-Carter (2004), and Haaga
(2004). Psychol. Bull. 130, 677–683 (2004).
119
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
275. Holmes, J. All you need is cognitive behaviour therapy? BMJ 324, 288 (2002).
276. Leichsenring, F. Randomized controlled versus naturalistic studies: a new research agenda.
Bull. Menninger Clin. 68, 137–151 (2004).
277. Garland, A. F., Plemmons, D. & Koontz, L. Research–Practice Partnership in Mental Health:
Lessons from Participants. Adm. Policy Ment. Health Ment. Health Serv. Res. 33, 517–528
(2006).
278. Lampropoulos, G. K. et al. What kind of research can we realistically expect from the
practitioner? J. Clin. Psychol. 58, 1241–1264 (2002).
279. Pachankis, J. E. & Goldfried, M. R. On the next generation of process research. Clin. Psychol.
Rev. 27, 760–768 (2007).
280. Falissard, B. Comment penser l’évaluation des psychothérapies dans le contexte général de
l’évaluation des thérapeutiques ? Ann. Méd.-Psychol. Rev. Psychiatr. 168, 156–158 (2010).
281. Thurin, J.-M., Thurin, M., Lapeyronie, B. & Briffault, X. Évaluer les psychothérapies Méthodes et pratiques.
282. Kazdin, A. E. & Kendall, P. C. Current progress and future plans for developing effective
treatments: comments and perspectives. J. Clin. Child Psychol. 27, 217–226 (1998).
283. Lutz, W. Patient-Focused Psychotherapy Research and Individual Treatment Progress as
Scientific Groundwork for an Empirically Based Clinical Practice. Psychother. Res. 12, 251–
272 (2002).
284. Zarin, D. A., Pincus, H. A., West, J. C. & McIntyre, J. S. Practice-based research in psychiatry.
Am. J. Psychiatry 154, 1199–1208 (1997).
285. APA Presidential Task Force on Evidence-Based Practice. Evidence-based practice in
psychology. Am. Psychol. 61, 271–285 (2006).
286. Falissard, B. et al. Réseau de Recherches Fondées sur les Pratiques Psychothérapiques.
techniques-psychothérapiques.org (2008). Available at: http://www.techniquespsychotherapiques.org/Reseau/ProjetRRFPP.html.
287. Thurin, J.-M., Thurin, M., Cohen, D. & Falissard, B. Approches psychothérapiques de
l’autisme. Résultats préliminaires à partir de 50 études intensives de cas. Neuropsychiatr.
Enfance Adolesc. 62, 102–118 (2014).
288. Lakoff, A. La raison pharmaceutique. (Les empêcheurs de penser en rond., 2008).
120
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
289. NIMH Strategic Plan for Research Strategic Objective 1. National Institure of Mental Health
(2008). Available at: http://www.nimh.nih.gov/about/strategic-planning-reports/strategicobjective-1.shtml.
290. Cuthbert, B. N. The RDoC framework: facilitating transition from ICD/DSM to dimensional
approaches that integrate neuroscience and psychopathology. World Psychiatry 13, 28–35
(2014).
291. Demazeux, S. & Pidoux, V. Le projet RDoC: La classification psychiatrique de demain ?
médecine/sciences 31, 792–796 (2015).
292. Cuthbert, B. N. & Insel, T. R. Toward the future of psychiatric diagnosis: the seven pillars of
RDoC. BMC Med. 11, (2013).
293. A New Approach to Clinical Trials. Available at:
http://www.nimh.nih.gov/about/director/2014/a-new-approach-to-clinical-trials.shtml.
(Accessed: 29th July 2016)
294. Insel, T. et al. Research Domain Criteria (RDoC): Toward a New Classification Framework for
Research on Mental Disorders. Am. J. Psychiatry 167, 748–751 (2010).
295. Wilson, G. T. & Shafran, R. Eating disorders guidelines from NICE. The Lancet 365, 79–81
(2005).
296. Roten, Y. de. Ce qui agit effectivement en psychothérapie : facteurs communs ou agents
spécifiques. Bull. Psychol. Numéro 486, 585–590 (2012).
297. Marcus, D. K., O’Connell, D., Norris, A. L. & Sawaqdeh, A. Is the Dodo bird endangered in
the 21st century? A meta-analysis of treatment comparison studies. Clin. Psychol. Rev. 34,
519–530 (2014).
121
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
Diane MEYSSAT MORFIN : Place de la remédiation cognitive dans le traitement de
l'anorexie mentale : Fondements théoriques, proposition d'implémentation et limites
RESUME
L’anorexie mentale, par sa gravité et sa fréquence, est un domaine de recherche florissant,
notamment dans le domaine des approches thérapeutiques. En l’absence de consensus
quant à la supériorité d’une approche sur une autre en matière de psychothérapie dans
cette indication, et à la lumière des connaissances actuelles, de nouvelles voies
thérapeutiques s’ouvrent. Un profil cognitif caractéristique de l’anorexie mentale a pu être
mis en évidence par des études en neuropsychologie. La remédiation cognitive cible ces
traits cognitifs en encourageant un questionnement du patient sur son style cognitif et en
proposant des stratégies d’adaptation. La remédiation cognitive représente une piste
thérapeutique intéressante en tant que psychothérapie basée sur des preuves scientifiques.
Une revue des évaluations de son efficacité montre des résultats sont encourageants. Nous
avons implémenté un programme de remédiation cognitive au Centre de Référence pour
les Troubles des Conduites Alimentaires à Lyon. Une situation clinique illustre les intérêts
et limites de ce programme. Les enjeux spécifiques à l’évaluation des psychothérapies sont
discutés afin d’aider le clinicien manier ce type de thérapie manualisée.
_____________________________________________________________
MOTS CLES : anorexie mentale, psychopathologie, neuropsychologie, remédiation cognitive,
psychothérapie, endophénotype, psychiatrie.
_____________________________________________________________
JURY
Président :
Monsieur le Professeur Pierre FOURNERET
Membres :
Monsieur le Professeur Nicolas FRANCK
Monsieur le Professeur Mohamed SAOUD
Monsieur le Docteur Edouard CARRIER
Monsieur le Docteur Sylvain ICETA
_____________________________________________________________
DATE DE SOUTENANCE : Le 3 Octobre 2016
_____________________________________________________________
ADRESSE DE L’AUTEUR : [email protected]
122
MEYSSAT-MORFIN
(CC BY-NC-ND 2.0)
Téléchargement