Tiré à part NodusSciendi.net Volume 11 ième Décembre 2014 Mythes, création et société Volume 11 ième Décembre 2014 Numéro conduit par KONANDRI Affoué Virginie Maître de Conférences à l’Université Félix Houphouët Boigny d’Abidjan ISSN 1994-2583 ISSN 2308-7676 Comité scientifique de Revue BEGENAT-NEUSCHÄFER, Anne, Professeur des Universités, Université d'Aix-la-chapelle BLÉDÉ, Logbo, Professeur des Universités, U. Félix Houphouët Boigny, de Cocody-Abidjan BOA, Thiémélé L. Ramsès, Professeur des Universités, Université Félix Houphouët Boigny BOHUI, Djédjé Hilaire, Professeur des Universités, Université Félix Houphouët Boigny DJIMAN, Kasimi, Maître de Conférences, Université Félix Houphouët Boigny KONÉ, Amadou, Professeur des Universités, Georgetown University, Washington DC MADÉBÉ, Georice Berthin, Professeur des Universités, CENAREST-IRSH/UOB SISSAO, Alain Joseph, Professeur des Universités, INSS/CNRST, Ouagadougou TRAORÉ, François Bruno, Professeur des Universités, Université Félix Houphouët Boigny VION-DURY, Juliette, Professeur des Universités, Université Paris XIII VOISIN, Patrick, Professeur de chaire supérieure en hypokhâgne et khâgne A/L ULM, Pau WESTPHAL, Bertrand, Professeur des Universités, Université de Limoges Organisation Publication / DIANDUÉ Bi Kacou Parfait, Professeur des Universités, Université Félix Houphouët Boigny, de Cocody-Abidjan Rédaction / KONANDRI Affoué Virgine, Maître de Conférences, Université Félix Houphouët Boigny, de Cocody-Abidjan Production / SYLLA Abdoulaye, Maître de Conférences, Université Félix Houphouët Boigny, de Cocody-Abidjan SOMMAIRE 1- AMEYAO Attien Solange Inerste, 2 Université Félix Houphouët Boigny, L’IDEOLOGIQUE DE L’ORALITURE DANS LA CARTE D’IDENTITE DE JEAN-MARIE ADIAFFI 2- ABOUA KOUASSI Florence, Université Félix Houphouët Boigny, LES NAUFRAGES DE L’INTELLIGENCE, FRESQUE D’UNE SOCIETE IVOIRIENNE EN CRISE 3- Dr. DIALLO Adama, CNRST/INSS OUAGADOUGOU, LANGUES ET IDENTITES CULTURELLES : UNE AFFIRMATION DES OUTILS ET FONCTIONS DE LA LANGUE COMME REFLET DES PRATIQUES DE L’IDENTITE CULTURELLE A TRAVERS LA SOCIETE BURKINABE 4- Guéi Paul KELANONDE, Université Félix Houphouët Boigny, BOSSONNISME ET IDENTITE : VISION ADIAFFIENNE DE L’AFRICAIN NOUVEAU DANS LES NAUFRAGES DE L’INTELLIGENCE DE JEAN-MARIE ADE ADIAFFI 5- KONKOBO Madeleine, INSS/CNRST OUAGADOUGOU, LA QUESTION DE L’APPRENTISSAGE DE LA LANGUE FRANÇAISE AU BURKINA FASO 6- KOUASSI Kouamé Brice, Université Félix Houphouët Boigny, L’IDEE DE TOLERANCE CHEZ VOLTAIRE DANS TRAITE SUR LA TOLERANCE 7- ZEBIE Yao Constant, Université Félix Houphouët-Boigny, LES NAUFRAGÉS DE L’INTELLIGENCE DE JEAN-MARIE ADIAFFI À L’AUNE DES CONCEPTS DE "DÉMAÎTRISE" ET DE "REMAÎTRISE" : UNE CRITIQUE INTÉGRALE DES VALEURS AFRICAINES MODERNES 8- JOHNSON Kouassi Zamina, Université Félix Houphouët- Boigny, MAXINE HONG KINGSTON’S THE WOMAN WARRIOR: A PROCESS OF GLOBALIZATION OF IDENTITY BEYOND MULTICULTURALISM IN AMERICA 9- KABORÉ Sibiri Luc, I.N.S.S, OUAGADOUGOU, LES FORTES RÉTICENCES DE SCOLARISATION DANS LA COMMUNE DE DORI AU BURKINA FASO 10- KOUAME YAO Emmanuel, Université, Félix Houphouët-Boigny MORPHOLOGIE DERIVATIONNELLE DU DIDA, LANGUE KRU DE COTE D’IVOIRE 11- Clément DILI PALAÏ, Université de MAROUA, LES CONTES PAILLARDS SELON SÉVÉRIN CÉCILE ABÉGA : ESTHÉTIQUE ET ÉTHIQUE DE LA SEXUALITÉ 12- Affoué Virginie KONANDRI, Université Félix Houphouët-Boigny, MYTHE ET MYTHO GENÈSE DANS LE ZOUGLOU 13- Sara CISSOKO, Université Félix Houphouët-Boigny, CRÉATION ET MYTHES DE LA VIOLENCE CHEZ JEAN-MARIE ADIAFFI 14- YAO Yao Lévys, Université Félix Houphouët-Boigny, ESTHÉTIQUE DE LA FRAGMENTATION DANS BLEU- BLANC- ROUGE D’ALAIN MABANCKOU 15- Léa ZAME AVEZO’O, Université Omar Bongo, REGARD SUR L’HISTOIRE ET LES PRATIQUES CULTURELLES DU PEUPLE KOTA DU GABON DANS HISTOIRE D’UN ENFANT TROUVÉ DE ROBERT ZOTOUMBAT 16- DJIMAN Kasimi, Félix Houphouët-Boigny University of Cocody-Abidjan, POSTCOLONIAL DISCOURSE IN AFRICAN LITERATURE 3 L’IDEE DE TOLERANCE CHEZ VOLTAIRE DANS TRAITE SUR LA TOLERANCE KOUASSI Kouamé Brice Université Félix Houphouët Boigny de Cocody-Abidjan 4 Introduction Traité de la tolérance chez Voltaire, c’est analyser l’actualité et la pertinence de cette notion dans l’évolution de nos sociétés post-11 septembre 2001. Dans l’ébullition conflictuelle de ces sociétés, la pression religieuse notable au fanatisme ambiant, responsable d’attentats et de peur, l’idée de tolérance s’impose pour rassurer le monde. L’insécurité et le sentiment d’insécurité créent une véritable psychose dans les rapports entre les peuples mais surtout dans l’expression des libertés. Les attentats à répétition et les nouvelles tueries de masses dans des guerres ethniques, des guerres religieuses et autres intolérances, invitent à l’actualisation de la tolérance dans les rapports humains. Le cycle de la violence se poursuit alors que l’humanité aspire à la quiétude et à la paix, sans doute, asymptotiques au fait même des compétitions inavouées inhérentes à la nature du vivre-ensemble. A défaut de s’accepter, il faut au moins se tolérer pour ouvrir les libertés aux possibilités. C’est ici que la tolérance devient une alternative à toute forme de totalitarisme et de sectarisme. Voltaire l’avait compris face à la montée des périls. L’esprit des Lumières, influencé par l’humanisme qui place l’homme au centre des intérêts, préconise la souveraineté de l’individu, ce qui remet en cause l’absolutisme politique des sociétés d’ancien régime. Dans un contexte de dérives totalitaires et de persécutions religieuses notamment en France avec la révocation de l’édit de Nantes, des écrivains vont prôner la tolérance. Voltaire (François Marie Arouet, de son vrai nom), écrivain et philosophe français du XVIIIème siècle et figure emblématique de la France des Lumières, 1 est l’un de ceux qui ont milité activement pour la tolérance et la liberté de penser. Intellectuel engagé au service de la vérité et de la justice, il prend, sur le tard, seul et en se servant de son immense notoriété, la défense des victimes de l’intolérance religieuse et de l’arbitraire. Dans son œuvre Traité sur la tolérance paru en 1763, il invite à la tolérance religieuse et prend pour cible le fanatisme religieux. Comment l’idée de tolérance apparait-elle dans l’œuvre ? 1 Le siècle des Lumières est caractérisé par une progression des sciences, une facilitation de la diffusion des savoirs, l’écriture de l’Encyclopédie qui recense tous les savoirs et une remise en cause du pouvoir absolu . 5 Notre article s’intéresse à la question et va tenter d’élucider l’idée de tolérance, le sens de la tolérance chez Voltaire. Chemin faisant, nous évoquerons la dénonciation de l’intolérance religieuse, les dérives de l’inquisition et de l’appareil judiciaire et le plaidoyer de Voltaire en faveur de la tolérance religieuse. 1. La tolérance : concept et idée La notion de tolérance connote celle d’indulgence et de patience. On peut définir la tolérance comme le fait d’accepter des attitudes que l’on ne supporte pas. Selon Simone Mamon (2007 :14), dans l’idée de tolérance, il y a, à la fois, l’idée d’une acceptation et celle d’une réprobation. Tolérer c’est faire souvent preuve d’une grande compréhension à l’égard des faiblesses et des vices des hommes. Il y a, dans cette capacité à accepter les vices des autres, sans doute beaucoup de commisération pour la condition humaine, et parfois un brin de complaisance. Comme l’affirme Voltaire, «Qu’est-ce la tolérance ? C’est l’apanage de l’humanité. Nous sommes tous pétris de faiblesse et d’erreur. Pardonnonsnous réciproquement nos sottises, c’est la première loi de la nature ». 2 Voltaire estime également si l’intolérance, l’impuissance et la lâcheté qui fondent une attitude tolérante, il n’y a guère de sens à la célébrer. Chez Wesfreid, Marcelo (2010 :42) « il y a beaucoup de vertu dans la personne magnanime mais la tolérance consiste, dans le premier des cas, à nier le droit des autres, et dans les autres, à s’accommoder à ce qui fait injure à l’humanité : l’erreur dans les paroles, la faute dans les conduites, etc. ».3 De toute évidence, lorsqu’elle n’est pas vidée de sa substance, la tolérance est un effort sur soi-même. Cela suppose la capacité à relativiser son point de vue, et à accepter ou admettre des opinions différentes. Dans le siècle des Lumières, la tolérance se fonde sur l’idée que le progrès n’est rendu possible que par l’échange, la communication des idées et le dialogue. La tolérance, comme l’admet Kant, se fonde ainsi sur « l’extrême lucidité de l’esprit qui reconnait son impuissance à démontrer de manière absolue son savoir ».4 2 3 4 Voltaire (1763) Traité sur la tolérance, Les éditions de Londres p. 29 Wesfreid, Marcelo (2010), La vérité sur Voltaire, L’espress Culture Emmanuel, Kant (1790), Qu’est-ce que s’orienter dans la pensée ? 6 De ce point de vue, il apparaît que la tolérance ne découle pas des faiblesses de la nature humaine, mais qu’elle est, au contraire, ce qui en resplendit la force. C’est d’ailleurs l’idée que soutient Voltaire dans son Traité sur la tolérance. En effet, dans cette œuvre aux relents de spiritualité, Voltaire invite à la tolérance et prend pour cible le fanatisme religieux. 1. Dénonciation de l’intolérance religieuse La tolérance est une attitude consistant à accepter des croyances et des conduites que l’on n’approuve pas. Selon Simone Manon (2007 :11), « La tolérance est une vertu lorsqu’elle n’est pas ce que le mot implique. Elle usurpe, au fond, la grandeur morale du respect et s’il en est ainsi, c’est sans doute que la capacité de respecter est trop noble pour être naturelle à notre misérable condition ».5 Pour Paul Ricœur (1999 :45) les hommes sont si peu enclins à s’aimer et à se respecter que pour obtenir d’eux la reconnaissance réciproque de leurs droits fondamentaux, on a institué des lois les obligeant à une attitude tolérante. 6 L’idée de tolérance a été développée et théorisée par bien d’écrivains français notamment au XVIIIème siècle. Dans son Traité sur la tolérance, Voltaire dénonce le fanatisme religieux, l’arbitraire, l’hérésie dans la société française du XVIIIème siècle et qui consistait à brûler les dissidents c’est-à-dire ceux qui n’adhéraient pas à la religion catholique et à ses pratiques. Il stigmatise les églises et les dogmes qui mettent en avant les passions religieuses, hystériques au point d’aller parfois jusqu’au meurtre (Cesu 2012 : 4). 7 Traité sur la tolérance est publié, en 1763, dans un contexte ambiant marqué par la montée du fanatisme religieux en Europe et la guéguerre entre les religions. Ce texte a été écrit après l’injustice subie par Jean Calas, protestant faussement accusé et exécuté pour le meurtre de son fils, qui s’est converti au catholicisme, afin de le réhabiliter. Dans cette œuvre, Voltaire prône la tolérance entre les religions, prend pour cible le fanatisme religieux et présente un réquisitoire contre les superstitions accolées aux religions. L’œuvre voltairienne, comme l’indique Marcelo Wesfreid (2010 :5)8, fait suite au procès, à 5 Manon Simon (2007), La tolérance est-elle un vice ou une vertu ? Philo log, Cours de Philosophie Ricoeur Paul (1999), « Tolérance, intolérance et intolérable in Lectures, Tome 1 : Autour du politique, Seuil. 7 Cesu, Salarie (2012), La critique de la religion et de l’intolérance, Prepabac. 8 Wesfreid, Marcelo (2010), La vérité sur Voltaire, L’espress Culture 6 7 la condamnation à mort et à l’exécution de Jean Calas, père de la famille Huguenot, le 10 mars 1762. Soulignons que Jean Calas appartient à une famille protestante à l’exception de sa servante, catholique et de son fils, converti au catholicisme. L’affaire Calas s’inscrit dans une histoire tragique : celle de la Réforme et des guerres de Religion qui mirent la France au carnage, de toutes les querelles qui opposèrent les ordres monastiques, les Jésuites et le clergé séculier, des ravages des conversions forcées et de la violence de l’Eglise. Dans Traité sur la tolérance, Voltaire a une manière bien particulière de dénoncer l’intolérance. Il utilise bien souvent des exemples pour montrer l’ampleur des dérives du fanatisme religieux. Un des exemples est exprimé en ces termes : «Un grand feu était allumé sous eux, on les y plongeait et on les relevait alternativement : ils éprouvaient les tourments et la mort par degrés, jusqu’à ce qu’ils expiassent par le plus long et le plus affreux supplice que jamais ait inventé la barbarie » p. 279 Les êtres humains soumis à cette torture ont été condamnés parce qu’ils « niaient le purgatoire » p. 27 Voltaire montre, dans cette séquence, jusqu’où peut mener l’intolérance religieuse. En effet, la différence de conception religieuse n’étant pas tolérée et, encore moins, acceptée, à cette époque, l’un des partis opte pour l’extermination systématique de l’autre. En décrivant cette monstruosité, ce cynisme dont font preuve les chapelles religieuses, les unes à l’égard des autres, Voltaire dénonce les horreurs et les massacres qui étaient perpétrés, au nom de la religion. Dans le chapitre IV de l’œuvre intitulé « Dialogue entre un homme mourant et un homme qui se porte bien », le titre, comme le fait remarquer Eléonore Cotton (2012 : 2), est intrigant et oppose deux conditions : « le mourant », un être faible, aux portes de la mort et « l’homme qui se porte bien », qui a la vie devant lui. Dans cette fiction, l’homme qui se porte bien est appelé « le barbare ». Il afflige « le mourant » de son envie de le convertir à une autre foi. Il tourmente « le mourant » malgré le dédain de ce dernier pour la 9 Voltaire (1763) Traité sur la tolérance, Les éditions de Londres p. 27 8 conversion. Ainsi, jusqu’à son dernier souffle, « le mourant » va subir la violence de ce prosélytisme. 10 Ce texte rappelle le Dialogue entre un prêtre et un moribond de Sade, en 1782. En effet, dans ce dialogue philosophique, le marquis de Sade affirme son libertinage et son athéisme à travers le moribond qui refuse de se repentir. Ce dernier, athée, s’oppose au prêtre qui tente de lui faire admettre la nécessité de l’existence de Dieu. Le moribond, lui, au contraire, insiste sur l’impossibilité de prouver rationnellement cette existence. Le dialogue s’achève sur la victoire rhétorique du moribond sur le prédicant qui devient, dans les bras des femmes, « un homme corrompu par la nature, pour n’avoir pas su expliquer ce que c’était que la nature corrompue ».11 Dans Traité sur la tolérance, Voltaire relève, dans « le dialogue entre l’homme mourant et l’homme qui se porte bien » le fait que le vivant n’ait pas su respecter la paix du mourant, en voulant absolument que l’autre porte la même foi que lui. On note ici une forme d’atteinte à la dignité humaine et à la liberté de culte. Dans le chapitre V du Traité intitulé « Lettre écrite au Jésuite Le Tellier, par un bénéficiaire, le 6 mai 1714 », Voltaire présente un autre aspect de l’intolérance et de la violence religieuse. En effet, dans ce chapitre, on a affaire à un homme d’Eglise qui écrit à un Jésuite pour lui proposer de se débarrasser des hérétiques. Sa méthode s’apparente plus à de l’extermination qu’à autre chose : « Il est aisé d’attraper en un jour tous les prédicants et de les pendre tous à la fois dans une place, non seulement pour l’édification publique, mais pour la beauté du spectacle. Je ferais assassiner dans leur lit tous les pères et mères, parce que si on les tuait dans les rues, cela pourrait causer du tumulte ; plusieurs même pourraient se sauver, ce qu’il faut éviter sur toute chose » p. 45 Cet appel au meurtre traduit le summum de l’intolérance religieuse et l’ampleur de la dégradation des rapports entre les adeptes des différentes religions. Voltaire décrit ici le degré d’animosité, de haine et d’intolérance entre les religions. Eléonore Cotton (2012 : 6) souligne que l’intolérance apparait, dans le texte de Voltaire, comme éminemment négative par le fait qu’elle n’est ni un droit humain, ni un droit divin. Voltaire exprime d’ailleurs cette idée, en ces termes, « Le droit de l’intolérance est donc 10 11 Cotton, Eléonore (2012) Havre de pensées et de mots : Exposé sur Traité de tolérance, Wordpress Donatien, Alphonse François, Marquis de Sade (1782) Dialogue entre un prêtre et un moribond, p.12 9 absurde et barbare : c’est le droit des tigres, et il est bien horrible, car les tigres ne déchirent que pour manger, et nous nous sommes exterminés pour rien» p. 40 L’idée que l’intolérance n’est pas un droit divin est également exprimée à la page 77 de l’œuvre, en conclusion du chapitre XII intitulé « Si l’intolérance fut de droit divin dans le judaïsme, et si elle fut toujours mise en pratique ». En effet, dans ce chapitre, Voltaire traduit une idée qui résume assez bien sa pensée : « L’écriture nous apprend donc que non seulement Dieu tolérait tous les autres peuples ; mais qu’il en avait un soin paternel : et nous osons être intolérants ! » p. 77 L’exclamation qui marque la fin de cette citation donne un ton particulier au discours : c’est de l’indignation. Indignation envers le comportement humain qui va à l’encontre des préceptes des Ecritures, c’est-à-dire l’Ancien Testament pour la culture judaïque et le Nouveau Testament pour les chrétiens, si on le prend dans tous les sens possibles. Ces Ecritures étant considérées comme le message de Dieu, ce serait, pour Voltaire, commettre une faute grave, du point de vue de la foi, que de ne pas les respecter. Il estime que les fanatiques qui massacrent les adeptes des autres confessions, espérant ainsi convertir le plus grand nombre à leur religion, ne respectent pas leur propre foi. Ils sont donc en contradiction avec leur propre croyance. Voltaire présente l’intolérance comme une contradiction envers le message de Dieu. C’est en cela que ce n’est pas un droit divin (Salvan : 2008).12 L’auteur écrit : « Ce sont là d’étranges titres pour la gloire éternelle. » p. 69, en parlant de massacres perpétrés par des fanatiques. On a encore, dans cet autre énoncé, une expression de la contradiction entre l’intolérance et le message d’amour de la religion et du salut. A travers le Traité de tolérance, Voltaire critique le fanatisme religieux et l’intolérance. Avec ce texte incisif, l’écrivain s’inscrit comme un grand défenseur des droits de l’homme, et ceci, bien avant la révolution française. Il pressent qu’il existe «un lien invisible entre les 12 Salvan, Géneviève (2008), « Sectes et sectateurs dans le Traité sur la tolérance de Voltaire : Enquête lexicologique et étude stylistique » Philosophie des Lumières et valeurs chrétiennes, l’Harmattan 10 êtres qui les unit au-delà des différences sociales, culturelles et religieuses et qui les relie à une origine commune » (Léonie Behlert 2013 :3). 13 La tolérance est la clé de voute de son œuvre. Pour Voltaire, la tolérance est le seul moyen de sortir de la barbarie. Il estime que tout individu a besoin d’un code moral auquel se référer afin de devenir un bon et honnête citoyen (Epictete : 2005).14 Un autre aspect de la dénonciation de l’intolérance dans l’œuvre de Voltaire apparait à travers les dérives de l’inquisition et de l’appareil judiciaire. 2. Les dérives de l’inquisition et de l’appareil judiciaire L’œuvre de Voltaire, Traité sur la tolérance, passe au crible le système judiciaire et dénonce ses avatars. Les juges sont visés ainsi que le suggère l’expression « les bonnets » p. 57 : ils étaient aussi au service d’une religion cruelle et injuste. On pourrait même dire, selon Pomeau (1997), qu’ils se voyaient comme les instruments de Dieu et de sa volonté15. Au nom de la justice, ils n’hésitaient pas à pratiquer la cruauté et à cautionner les pratiques des bourreaux inquisiteurs. On note donc, dans le texte, une satire très acerbe de la justice de l’époque de Voltaire. L’extrait suivant traduit le degré des dérives dans l’appareil judicaire : « Quelques magistrats étaient de la confrérie des pénitents blancs. Dès ce moment, la mort de Jean Calas parut infaillible. Ce qui surtout prépara son supplice, ce fut l'approche de cette fête singulière que les Toulousains célèbrent tous les ans en mémoire d'un massacre de quatre mille huguenots; l'année 1762 était l'année séculaire. On dressait dans la ville l'appareil de cette solennité: cela même allumait encore l'imagination échauffée du peuple; on disait publiquement que l'échafaud sur lequel on rouerait les Calas serait le plus grand ornement de la fête; on disait que la Providence amenait elle-même ces victimes pour être 13 14 15 Behlert, Léonie (2013), Voltaire, philosophe de la tolérance, Revue Acropolis, Etre philosophe aujourd’hui. Epictete (2005), De la liberté suivi de la profession cynique, Gallimard Pomeau, René (1997), Voltaire, Coll. Ecrivains de toujours, Seuil 11 sacrifiées à notre sainte religion. Vingt personnes ont entendu ces discours, et de plus violents encore. Et c'est de nos jours! Et c'est dans un temps où la philosophie a fait tant de progrès! Et c'est lorsque cent académies écrivent pour inspirer la douceur des mœurs! Il semble que le fanatisme, indigné depuis peu des succès de la raison, se débatte sous elle avec plus de rage. Treize juges s'assemblèrent tous les jours pour terminer le procès. On n'avait, on ne pouvait avoir aucune preuve contre la famille; mais la religion trompée tenait lieu de preuve. Six juges persistèrent longtemps à condamner Jean Calas, son fils, et Lavaisse, à la roue, et la femme de Jean Calas au bûcher » p. 58 Rappelons qu’il y a au centre du récit « l’affaire Calas », du nom d’un père protestant qui est accusé d’avoir tué son fils qui voulait se convertir au catholicisme. Il est roué vif et sa famille est persécutée. Voltaire se fait leur avocat en démontrant l’incohérence du procès. Il s’en suit la révision, puis la cassation du jugement et la réhabilitation de Calas (le père, à titre posthume) et de sa famille. Les extraits suivants montrent quelques séquences du développement judiciaire de « l’affaire Calas ». « Jean Calas et Anne-Rose Cabibel sont marchands lingers protestants à Toulouse. Ils ont deux filles et quatre fils. Louis, l'un d'eux, s'est converti au catholicisme sous l'influence de la servante, Jeanne Viguière. Le 13 octobre 1761, l'aîné des fils, Marc-Antoine, est retrouvé étranglé au rez-de-chaussée de la maison familiale. Ce soir-là, les Calas avaient un hôte : Gaubert Lavaysse, témoin de la découverte… » p. 18. «…Le capitoul chargé de l'enquête, David de Beaudrigue, néglige son travail, et la rumeur populaire le convainc que Jean Calas a assassiné son fils, sous prétexte de sa soi-disant intention de se convertir également au catholicisme. Suite à un monitoire ridicule et à des interrogatoires douteux, le Parlement de Toulouse condamne au supplice le seul Jean Calas, le 9 mars 1762 et fait appliquer la sentence dès le lendemain. Le condamné n'aura cessé de clamer son innocence « avec une fermeté inconcevable ». Quelques jours plus tard, Pierre Calas, le frère de Marc-Antoine, est banni. Sa mère, la servante et Lavaysse sont acquittés… » p. 80. 12 « …Le 7 mars 1763, le Conseil du Roi autorise l'appel du jugement du Parlement de Toulouse. Après un nouveau jugement par le Tribunal de Paris, Jean Calas est réhabilité par le Conseil, à l'unanimité, le 9 mars 1765, trois ans exactement après l'exécution » p. 82. Ces quelques extraits montrent le déroulement de l’affaire Calas et son issue. Voltaire présente ici les erreurs justiciaires comme l’un des dérapages de la société. Il s’élève contre les jugements sentencieux, dictés plus par des desseins obscurs que par le droit. Voltaire choisit donc de défendre les Calas, face au rouleau compresseur judiciaire. Pour Voltaire, il n’y a pas la moindre preuve contre Jean Calas, ni contre Gaubert Lavaisse, invité ce soir-là à la table des Calas et accusé, lui aussi, d’avoir pris part au meurtre. Chez lui, il n’y a plus aucun doute, « Il est avéré que les juges toulousains ont roué le plus innocent des hommes » p. 71. Voltaire s’insurge contre de telles dérives judiciaires. Il souligne que : « Les nations étrangères qui nous haïssent et qui nous battent sont saisies d'indignation. Jamais, depuis le jour de la Saint-Barthélémy, rien n'a tant déshonoré la nature humaine ». Dénonçant l’incongruité des faits reprochés à la famille Calas, il poursuit son long réquisitoire contre la justice : « Il paraissait impossible que Jean Calas, vieillard de soixantehuit ans, qui avait depuis longtemps les jambes enflées et faibles, eut seul étranglé et pendu un fils âgé de vingt-huit ans, qui était d’une force au-dessus de l’ordinaire ; il fallait absolument qu’il eut été assisté dans cette exécution par sa femme, par son fils Pierre Calas, par Lavaisse, et par la servante. Ils ne s’étaient pas quittés un seul moment le soir de cette fatale aventure. Mais cette supposition était encore aussi absurde que l’autre: car comment une servante zélée catholique aurait-elle pu souffrir que des huguenots assassinassent un jeune homme élevé par elle pour le punir d’aimer la religion de cette servante ? Comment Lavaisse serait-il venu exprès de Bordeaux pour étrangler son ami dont il ignorait la conversion prétendue ? Comment une mère tendre aurait-elle mis les mains sur son fils ? Comment tous ensemble auraient-ils pu étrangler un jeune homme aussi robuste qu’eux tous, sans un combat long et violent, sans des cris affreux qui auraient appelé tout le voisinage, sans des coups réitérés, sans des meurtrissures, sans des habits déchirés » p. 72 Voltaire égrène ici des considérations de pur bon sens ; très fortes comme seules le sont les remarques de ce bon sens que les juges, les enquêteurs et souvent les avocats, happés par la logique d’une mécanique judiciaire qu’ils mettent en mouvement, finissent 13 par ne plus voir. Jean Calas, âgé de plus de soixante ans, n’allait pas exécuter un fils de vingt-huit ans tout seul. Il lui fallait l’aide de la famille qui dînait vers dix-neuf heures : était-ce crédible ? Comment était-il possible que le jeune Lavaisse, arrivé par hasard le soir même, eût pu être complice d’un tel crime ? Et la servante, présente dans la maison depuis trente ans et qui avait élevé Marc-Antoine comme ses autres frères et sœurs, étaitelle coupable, elle aussi ? Voltaire rappelle encore que Marc-Antoine « passait pour un esprit inquiet, sombre et violent. » p. 24 Bloqué dans ses projets professionnels, il « résolut de finir sa vie et fit pressentir ce dessein à un de ses amis. » p. 24. C’est très vrai mais cela apparaît peu dans le dossier (Bonnefon : 1895)16 . Pour Voltaire, condamner Jean Calas tout seul à la peine de mort pour voir si, sous les coups du bourreau et devant la mort, il n’allait pas avouer pour, ensuite, devant ses dénégations dans la souffrance, par une seconde décision, condamner les autres membres de la famille à des peines vénielles était absurde. Pour lui, soit tous coupables de tout, soit tous innocents (Dominique Inchauspé 2004).17 La campagne pour la réhabilitation de Calas est donc ainsi lancée. La machine Voltaire se met en marche. Elle est d'une prodigieuse efficacité. Pendant trois années, sans jamais désarmer, Voltaire va pousser tous les feux. Il fait mener des enquêtes, il recueille des témoignages, il rédige des mémoires, « J'écris pour agir » disait-il. p. 304. Le 4 juin 1764, le Conseil du roi casse le procès de Toulouse et ordonne la révision. Un nouveau tribunal est nommé. Voltaire exulte: « Les écailles tombent des yeux, le règne de la vérité est proche » p. 79 Le 12 mars 1765, le tribunal réhabilite Jean Calas et décharge sa famille et Lavaisse de toute accusation. Les Calas sont autorisés à prendre à partie les juges toulousains. Mme Calas reçoit du roi 12000 livres, ses filles 6000 livres chacune. Voltaire accueille ce triomphe avec beaucoup de modestie, mais il sait que c'est son œuvre. Le sens de sa vie, de sa gloire est changé, le voilà, selon ses dires, « le Don Quichotte des malheureux » p. 84. 16 Bonnefon, Daniel, (1895), Les écrivains célèbres de la France, Librairie, Fischbacher 17 Inchauspé, Dominique (2004), L’intellectuel fourvoyé, Voltaire et l’affaire Sirven, Salon Littéraire. 14 Toute la trame du récit dans Traité sur la tolérance est un véritable plaidoyer de Voltaire en faveur de la tolérance. 3. Un plaidoyer pour la tolérance religieuse Dans Traité sur la tolérance, Voltaire lance un vibrant appel à la tolérance. Comme le fait remarquer Léonie Behlert (2013 :5), la fin de l’œuvre apparait sous la forme d’une prière, « la prière à Dieu ». Le texte suivant présente la prière que Voltaire adresse à Dieu : « Ce n'est plus aux hommes que je m'adresse ; c'est à toi, Dieu de tous les êtres, de tous les mondes, et de tous les temps s'il est permis à de faibles créatures perdues dans l'immensité, et imperceptibles au reste de l'univers, d'oser te demander quelque chose, à toi qui as tout donné, à toi dont les décrets sont immuables comme éternels , daigne regarder en pitié les erreurs attachées à notre nature ; que ces erreurs ne fassent point nos calamités. Tu ne nous as point donné un cœur pour nous haïr, et des mains pour nous égorger; fais que nous nous aidions mutuellement à supporter le fardeau d'une vie pénible et passagère que les petites différences entre les vêtements qui couvrent nos débiles corps, entre tous nos langages insuffisants, entre tous nos usages ridicules, entre toutes nos lois imparfaites, entre toutes nos opinions insensées , entre toutes nos conditions si disproportionnées à nos yeux, et si égales devant toi ; que toutes ces petites nuances qui distinguent les atomes appelés hommes ne soient pas des signaux de haine et de persécution que ceux qui allument des cierges en plein midi pour te célébrer supportent ceux qui se contentent de la lumière de ton soleil ; que ceux qui couvrent leur robe d’une toile blanche pour dire qu’il faut t’aimer ne détestent pas ceux qui disent la même chose sous un manteau de laine noire ; qu’il soit égal de t’adorer dans un jargon formé d’une ancienne langue, ou dans un jargon plus nouveau ; que ceux dont l’habit est teint en rouge ou en violet, qui dominent sur une petite parcelle d’un petit tas de la boue de ce monde, et qui possèdent quelques fragments arrondis d’un certain métal, jouissent 15 sans orgueil de ce qu’ils appellent grandeur et richesse, et que les autres les voient sans envie : car tu sais qu’il n’y a dans ces vanités ni de quoi envier, ni de quoi s’enorgueillir.». p. 8318 Le texte de Voltaire ressemble à une prière, dans les choix énonciatifs qu’il opère. Ce texte reprend une image pascalienne des hommes : « L'Homme est grand en ce qui se sait misérable »19. On peut, en effet, relever dans le texte le thème de la petitesse, de la faiblesse des hommes et de leurs situations sur Terre : « faibles créatures perdues » ; « débiles corps » ; « langage insuffisant » ; « petites parcelles d'un petit tas de boue », ce qui renvoie à l'imperfection de l'homme. A cette petitesse sont associés la dénonciation du ridicule et des erreurs : « erreurs attachées à notre nature » ; « usages ridicules » ; « lois imparfaites ». Voltaire condamne la cruauté attaché à l'homme : « pour nous haïr » ; « pour nous égorger » ; « ne déteste pas ». Il condamne l'orgueil humain : « jouissent sans orgueil » ; « dans ces vanités ». L'ensemble du texte s'attache à dévaloriser l'image de l'homme pour lui ôter tout orgueil et toutes vanités. Dans ce texte, Voltaire dépasse les clivages religieux, en s’adressant à un dieu indéterminé. Mais en réalité, c’est aux hommes qu’il s’adresse. Ils les supplient de dépasser leurs dissensions, leurs conflits, nés de leurs croyances religieuses. Pour lui, les hommes font des erreurs certes, mais elles ne doivent pas faire leurs malheurs et encore moins les conduire à mal se comporter (Pierre Le Pape : 1994)20. Voltaire estime que les hommes devraient apprendre à se pardonner mutuellement leurs faiblesses et leurs manquements. Peu importe les rituels et les différences, l’essentiel, selon lui, serait que les chacun y trouve son bonheur (Léonie Behlert 2013 :5) C’est d’ailleurs, ce qui apparait dans cette autre séquence de la prière : « Puissent tous les hommes se souvenir qu'ils sont frères ! Qu'ils aient en horreur la tyrannie exercée sur les âmes, comme ils ont en exécration le brigandage qui ravit par la force le fruit du travail et de l'industrie paisible ! 18 Voltaire, (1763), Traité sur la tolérance, Chapitre XXIII Blaise, Pascal (1670), Pensées, Edition du Port Royal/XXIII, p.176 20 LE Pape, Pierre, (1994) Voltaire le conquérant, Seuil 19 16 Si les fléaux de la guerre sont inévitables, ne nous haïssons pas, ne nous déchirons pas les uns les autres dans le sein de la paix, et employons l'instant de notre existence à bénir également en mille langages divers, depuis Siam jusqu'à la Californie, ta bonté qui nous a donné cet instant ». p. 84 Voltaire manifeste, à travers cette prière, sa volonté de dépasser la diversité des coutumes, des rites, des croyances pour fonder une morale religieuse et sociale afin de permettre à l’homme de trouver le bonheur sur terre avec ses semblables. Cette prière invite finalement les hommes à réfléchir sur eux-mêmes et sur leur responsabilité individuelle et collective. Elle en appelle à la fraternité, à la tolérance, à la solidarité et au respect des différences. Cet apologue est également un appel à la tolérance religieuse et à la liberté de culte. C’est d’ailleurs ce que relève Pierre Le pape (1995 :14) lorsqu’il écrit : « Voltaire se tourne maintenant avec émotion vers le « Dieu de tous les êtres ». Son déisme lui permet de s'élever au-dessus des religions et de considérer la faiblesse humaine avec une commisération qui conduit logiquement à la tolérance. Mais cet appel, dont les intentions sont très nobles, peut-il être vraiment efficace alors qu'il repose sur le doute rationnel, c'està-dire sur la négation même de la foi religieuse? Dans ce morceau d'apparat où l'auteur adjure les religions de se respecter mutuellement, l'esprit voltairien reprend çà et là le dessus pour railler, avec une irrévérence mesquine, le détail particulier de leurs rites ».21 Dans le texte de Voltaire, son criticisme de Dieu devient apparent. Il s’agit, en quelque sorte, d’un plaidoyer pour le déisme. En effet, Voltaire, tel Montesquieu, milite pour la multiplicité des croyances, la liberté de penser, la tolérance, le dialogue des cultures et le respect des différences. Il s’insurge donc contre le fanatisme religieux, les dérives de la justice et toutes les formes d’intolérance (Aurele : 2006)22. Voltaire espère vivement que son appel à la tolérance, au respect des différences et à la justice vraie, sera entendu. D’ailleurs, c’est ce qu’il souligne, à mots couverts, dans le chapitre II de son traité intitulé « Conséquence du supplice de Jean Calas ». En effet, il 21 22 Pierre Le Pape (1995) L’affaire Calas, l’avis d’un contemporain, Le Monde Aurele, Marc (2006), Pensées, Gallimard 17 écrit : « Peut-être un tableau raccourci et fidèle de tant de calamités ouvrira les yeux de quelques personnes peu instruites, et touchera les cœurs bien faits. » p. 25. Une façon de dire que son traité n’est pas uniquement une adresse aux hautes sphères de la société française, mais surtout à un large public. Il y a donc, dans l’œuvre, une sorte de plaidoyer universel en faveur de la tolérance. Conclusion Traité sur la tolérance de Voltaire est une œuvre qui a marqué le monde littéraire et philosophique français du XVIIIème siècle. On retrouve dans l’œuvre l’idéal du siècle des Lumières : la valeur de la raison. En effet, Les lumières, mouvement culturel et philosophique qui émerge dans la seconde moitié du XVIIIème siècle sous l’impulsion de philosophes s’engage contre les oppressions religieuses et politiques. Voltaire, est l’un de ceux qui ont décrit la pensée des Lumières, à travers notamment le sens de la tolérance. Son œuvre Traité sur la tolérance, conçue pour réparer l’erreur judiciaire à l’origine de l’affaire Calas, acquiert progressivement une portée universelle, devenant un véritable plaidoyer en faveur de la tolérance. Voltaire prône la tolérance, le respect de toutes les religions, le droit à la dignité humaine et s’insurge contre le fanatisme et l’esclavagisme. Cet écrivain et philosophe, assurément l’un des plus actifs de son temps, développe dans l’œuvre, ses idées contre le fanatisme et la persécution. Il montre que les pratiques ou les rites religieux sont des sources de conflits entre les hommes. Voltaire était déiste. Ce qui signifie qu’il croyait en une entité spirituelle sans pour autant adhérer à une religion révélée, avec tout ce que cela suppose, c’est-à-dire la confession, la prière etc. On pourrait donc affirmer que dans son traité, il encourage la foi sans pourtant sombrer dans le fanatisme. 18 Bibliographie AURELE, Marc (2006), Pensées, Gallimard BEHLERT, Léonie (2013), « Voltaire, philosophe de la tolérance », Revue Acropolis, Etre philosophe aujourd’hui. BONNEFON, Daniel, (1895), Les écrivains célèbres de la France, Librairie, Fischbacher CESU, Salarie (2012), La critique de la religion et de l’intolérance, Prepabac. COTTON, Eléonore (2012) Havre de pensées et de mots : Exposé sur Traité de tolérance, Wordpress EPICTETE (2005), De la liberté suivi de la profession cynique, Gallimard INCHAUSPE, Dominique (2004), L’intellectuel fourvoyé, Voltaire et l’affaire Sirven, Salon Littéraire LE PAPE, Pierre, (1994) Voltaire le conquérant, Seuil LE PAPE, Pierre (1995) L’affaire Calas, l’avis d’un contemporain, Le Monde MARQUIS de Sade (1782) Dialogue entre un prêtre et un moribond PASCAL, Blaise (1670), Pensées, Edition du Port Royal/XXIII, p.176 POMEAU, René (1997), Voltaire, Coll. Ecrivains de toujours, Seuil SALVAN, Géneviève (2008), « Sectes et sectateurs dans le Traité sur la tolérance de Voltaire : Enquête lexicologique et étude stylistique » Philosophie des Lumières et valeurs chrétiennes, l’Harmattan VOLTAIRE (1763) Traité sur la tolérance, Les éditions de Londres WESFREID, Marcelo (2010), La vérité sur Voltaire, L’express Culture 19