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Une étude menée par Michel Dietsch et Vichett Oung sur les fusions de groupes bancaires survenues en
France sur la période 1997-2000 montre, à ce propos, que les stratégies de fusions fondées sur des
synergies de coûts ne sont plus empiriquement justifiées. Les économies d’échelle au niveau national ont
été épuisées. Il existe en revanche un potentiel de synergies de revenus et de diversification des risques
qui apparaît insuffisamment exploité au niveau des groupes. Ainsi, les futures synergies sont plutôt à
rechercher du côté des restructurations internes ou des regroupements transfrontaliers. Ce point est
nuancé par Allen Berger, Robert DeYoung et Gregory Udell qui montrent que les gains des opérations
transfrontalières et leurs effets sur l’efficience en termes de taille, de gamme et de combinaison de produits
peuvent être limités2 . En fait, les opérations de regroupement transfrontalières sont parfois induites par la
pression concurrentielle internationale conduisant à des réactions défensives face à une menace éventuelle
d’achat. Elles sont motivées alors par la constitution de mégabanques à fort pouvoir de marché occupant
une position dominante au plan géographique. D’ailleurs la plupart des études empiriques qui ont porté sur
les fusions dans les banques américaines n’ont pas réussi à identifier des économies d’échelle et de
gamme importantes3. Au mieux, elles mettent en évidence une courbe de coût moyen en forme de U
relativement plate. D’autres études récentes portant sur les banques européennes ont trouvé que les
banques de taille moyenne sont les plus performantes. En particulier il apparaît que les petites institutions
d’épargne européennes peuvent générer davantage d’économies d’échelle – de l’ordre de 3 % – grâce aux
fusions qu’elles pourraient réaliser (cf. encadré)4.
Encadré – Les économies d’échelle dans les petites banques
Comme le montrent Jean Dermine et Lars-Hendrik Röller5, les institutions financières françaises offrant une large
gamme d’OPCVM bénéficient d’économies d’échelle, mais uniquement pour les petites institutions. Ces économies
disparaissent pour les grandes banques. La dégressivité des coûts induite par le phénomène d'économies d'échelle
est répercutée sur la tarification subie par l'investisseur. On parvient ainsi à une relation négative entre la tarification
et la taille de l’encours.
D’autres études portant sur le système bancaire américain montrent que les économies d’échelle existent seulement
au sein des petites banques et qu’elles sont de l’ordre de 5 %6. Les grandes banques américaines présentent au
contraire des rendements d’échelle constants ou légèrement décroissants. Les économies de gamme sont quant à
elles mineures. Elles seraient de l’ordre de 5 % lorsque des produits bancaires multiples sont fabriqués
simultanément. Des travaux plus récents, menés en particulier sur les banques luxembourgeoises et les banques
suisses, montrent que les économies d’échelle n’existent que pour les petites banques dont la taille du bilan est de
886 millions d’euros pour les banques luxembourgeoises et entre 200 et 500 millions d’euros pour les banques
suisses7. Les économies de variété, quant à elles, ne sont pas constatées pour le couple (crédits-titres) au sein des
banques luxembourgeoises.
Source : synthèse d’après les auteurs.
2 Allen N. Berger, Robert DeYoung et Gregory F. Udell (2000), “Efficiency barriers to the consolidation of the European financial
services”, European Financial Management, vol. 6, no. 4, décembre.
3 Allen N. Berger, Rebecca S. Demsetz et Philip E. Strahan (1999), “The consolidation of the financial services industry: Causes,
consequences, and implications for the future”," Journal of Banking & Finance, vol. 23(2-4), février, pp. 135-194.
4 Paul Schure, Rien Wagenvoort et Dermot O'Brien (2004), “The efficiency and the conduct of European banks: Developments
after 1992”, Review of Financial Economics, 13, pp. 371-396.
5 Jean Dermine et Lars-Hendrik Röller (1992), “Economies of Scale and Scope in French Mutual Funds”, Journal of Financial
Intermediation, 2, pp .83-93.
6 Allen Berger, David Humphrey et F.W. Smith (1993), “Economies of scale, mergers, concentration and efficiency”, Revue
d'Économie Financière, n°27, hiver, pp. 123-154.
7 Abdelaziz Rouabah (2002), « Économies d'échelle, économies de diversification et efficacité productive des banques
luxembourgeoises », Banque centrale du Luxembourg, mars. Voir aussi Gaël Vettori (2003), « Économies d’échelle : les résultats
de la recherche sur le secteur bancaire suisse », Université de Genève.